A Lyon, ma raison de battre s’est arrêtée
Subjectivement, l’homme de droite que je suis y croit ardemment. Jusqu’au bout. Autrement à qui bon croire en la démocratie et la souveraineté du peuple ! Objectivement, les faits sont là, têtus, qui ne laissent guère de place à l’optimiste.
Après l’union de la droite réussie, un véritable exploit, l’ambiance avait réellement changé. L’espoir avec un grand ‘’E’’ renaissait. La mobilisation battait son plein. Les sondages d’ailleurs à l’époque ont confirmé qu’un vent nouveau soufflait sur la campagne politique à Lyon. Un blizzard ? Non, malheureusement, juste une rafale ! Car progressivement, la situation s’est à nouveau normalisée avec le maire sortant, Gérard Collomb, reprenant de l’avance avant de la conforter.
Comment expliquer ?
Trois éléments majeurs handicapent la candidature de Dominique Perben, tête de liste de la droite à Lyon.
Premier : son image de parachuté dont il ne parvient pas à se défaire. Une étiquette qui lui colle. Aussi fort que celle au dos des livres que parfois il faut passer à l’eau chaude pour parvenir à s’en débarrasser. Pourtant, Dominique Perben n’a pas ménagé sa peine et ses efforts pour se défaire de cette image dont ses adversaires ont su admirablement jouer au début. Car l’objectif était de marquer une différence essentielle entre les deux prétendants : d’un côté un maire sortant, au fait de la réalité lyonnaise, des dossiers et surtout dont sa fidélité à la ville n’a jamais été prise en défaut. Gérard Collomb a réalisé tout son parcours politique au service de la seconde ville de France.
La fidélité, un argument qui fait mouche car les Lyonnais y sont profondément attachés. C’est viscéral. Dominique Perben, même si sa ville natale est Lyon et qu’il prépare sa candidature avec le plus grand sérieux depuis plus de quatre ans, preuve en est la solidité de son programme et sa maîtrise des dossiers, n’a pas réussi à gommer cette image dans l’esprit des Lyonnais. Tout du moins à l’estomper suffisamment. Même si les vicissitudes de la vie ne vous laissent, parfois, pas maître à 100 % de la conduite de votre parcours et décisions.
Deuxième élément et non des moindres, l’alliance avec les millonistes. Pour nombre d’électeurs de droite qui vivent encore dans le traumatisme des élections régionales de 1998 quand le président de l’époque, Charles Millon, avait osé franchir le rubicond, soit tendre la main au Front national. Episode surmédiatisé et qui est resté en travers de la gorge d’une partie de l’électorat de droite. Les millonistes sont toujours dépeints comme le mal absolu en politique, la peste qu’il faut éviter de fréquenter à n’importe quel prix sous peine de contagion ! Ainsi, encore récemment lors d’une interview donnée au quotidien local, Le Progrès, Michel Noir, ancien maire de Lyon, rappelait qu’il avait conseillé à Dominique Perben ne pas perdre ne serait ce qu’"une nano seconde" avec les millonistes. Vu de Paris ou d’ailleurs, on peut se laisser à la caricature et surtout ne pas saisir le sens de cette alliance.
Dominique Perben pouvait-il faire autrement ? Passer outre ? Certainement pas car les millonistes sont une force politique incontournable, de surcroît à la légitimé locale incontestable. Ceux qui prétendent que Dominique Perben pouvait y aller seul témoignent d’une méconnaissance de la réalité politique lyonnaise. Dominique Perben est-il allé trop loin dans son marchandage ? Question qui appelle un autre débat et surtout qui n’a pas sa place maintenant.
Pour comprendre cette attitude, il faut se pencher sur l’histoire récente de la ville de Lyon. En effet, en tant que capitale de la Résistance, et de surcroît ville par excellence centriste (aux dernières élections présidentielles, François Bayrou a fait un de ses meilleurs scores) nombreux sont les électeurs humanistes à rejeter, pour ne pas dire à condamner, cette alliance. Pour eux, finalement, mieux vaut que la droite perde cette élection que la ville de Lyon perde son âme. Son honneur certains diront.
Enfin, la sociologie, qui a considérablement changé ces dernières années dans la ville de Lyon, joue contre la droite. Désormais à l’instar des grandes villes de France, comme en témoignent les scores réalisés par la candidate socialiste à la présidentielle de 2007 Ségolène Royal, Lyon a enregistré l’arrivée d’une population au statut socioprofessionnel respectable, bénéficiant d’un mode de vie disons "confortable" sensible aux thèmes de la gauche. Ce qu’on appelle désormais les "bobo" ou la gauche bourgeoise.
Bien sûr, la droite dispose de nombreux et de solides atouts, arguments. Un projet qui tient la route, fruit d’un travail de longue haleine, réfléchi, novateur, qui va au fond des sujets. Un candidat fort d’une expérience en politique et d’une notoriété dont la ville de Lyon a un grand besoin, surtout quand on aspire au rôle de capitale européenne. Sans oublier, une situation qui s’est dégradée dans de nombreux domaines : circulation routière, petite enfance, propreté, logements sociaux, la place accordée aux économies du savoir, des nouvelles technologies, facteur-clé maintenant et à l’avenir de la compétitivité des villes et des nations, etc. A cela, il faut ajouter un bilan financier guère reluisant, relevé par le magazine Challenges.
Une réalité donc en déphasage avec la confiance, la bonhomie et la sérénité du maire sortant. Un maire qui met l’accent sur les arbres, certes symboliques et réussites indiscutables comme le vélo’v, mais qui cachent, toutefois, une forêt plutôt mal entretenue. Et souvent maigres au regard des enjeux qui attendent la capitale des Gaules.
Une posture et une diversion qui marchent. Cependant, les lendemains pourraient être douloureux en étant passé à côté de l’essentiel durant la campagne. La raison voudrait donc que les élections municipales réservent une surprise. Mais, voilà, la mienne, de battre s’est arrêtée...
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