Abrégé du terrorisme arabo-musulman sur le sol français
« La France est aujourd'hui, clairement, le pays le plus menacé par l'État islamique. (...) Si les attentats de novembre dernier ont été perpétrés par des kamikazes et par des gens armés de kalachnikov, nous risquons d'être confrontés à une nouvelle forme d'attaque : une campagne terroriste caractérisée par le dépôt d'engins explosifs dans des lieux où est rassemblée une foule importante, ce type d'action étant multiplié pour créer un climat de panique. » Propos de Patrick Calvar, le patron de la Direction générale de la Sécurité intérieure devant la Commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale le 10 mai 2016.
« Aujourd'hui, Daech a trois stratégies. Déstabiliser l’Europe par une vague d’immigration sans précédent, cela a été atteint, infiltrer ces réseaux pour asseoir des réseaux dormants, c’est fait, malgré tous les contrôles dans le cadre de Schengen. Enfin, c’est s’attaquer à la piraterie maritime et à la déstabilisation des plages et des rives de Méditerranée à partir de l’été. (...) Je me souviens les attentats du Groupe islamique armée à Paris, en 1995. Al-Ansar affichait comme symbole la Tour Eiffel qui explosait en plusieurs morceaux. » (Squarcini)
A la fin des années 70, deux tendances de soutien à la révolution palestinienne s'opposent avec d'un côté l'Organisation de Libération de la Palestine dirigée par Yasser Arafat et soutenue par la Syrie, qui tend à négocier avec Israël, de l'autre, le Fatah-Conseil révolutionnaire (scission du Fatah libanais dirigé par Abou Nidal), une mouvance radicale soutenue par l'Irak. Ce conflit va se propager du Moyen-orient à travers le monde et en venir à polluer les esprits des musulmans vivants en France.
Certaines factions sont faites de la chaîne et trame du même tissu. Le groupe Abou Nidal, par exemple, soutient l'Armée secrète arménienne de libération de l'Arménie (ASALA) qui a perpétré l'attentat du 15 juillet 1982 contre le comptoir de la Turkish Airlines à l'aéroport d'Orly qui a fait huit morts et cinquante-six blessés. Une lecture au deuxième degré montre que cet attentat servait également les Syriens qui s'insurgeaient contre la présence française et américaine au Liban. Le 23 octobre 1983, deux attentats aux camions suicides concomitants dirigés contre le QG américain et le Drakkar à Beyrouth faisaient deux cent trente-neuf morts américains et cinquante-huit du côté français. Ces attentats seront revendiqués par le Jihad Islamique, une organisation sous le contrôle de l’Iran. L’attentat contre le « Drakkar » ne donna lieu à aucune enquête..., il faudra attendre la loi de 1986 pour voir la judiciarisation des attentats survenus à l’étranger commis à l’encontre de Français.
« Flashback », le phénomène terroriste contemporain apparaît à la fin du XIXeme siècle avec la Narodnala, ce qui en Russe signifie la « volonté du peuple ». Ce mouvement qui pratique l’attentat à la bombe réussit le 1 janvier 1881 à atteindre le Tsar Alexandre II. Cette pratique va s'étendre à travers l’association internationale des travailleurs qui va adopter le principe de l’action violente. Les progrès de la chimie, l'accès aux connaissances et la facilité à se procurer les substances indispensables concourent à ce mode d'attentat. Cet appel sera suivi en 1892 par l’anarchiste Ravachol qui fera sauter l'appartement du président de tribunal, Benoît et celui de l’avocat général Bulot, qui avaient dirigé le procès contre des anarchistes condamnés à l'emprisonnement. Peu après, le Parti socialiste révolutionnaire né de la fusion des différents groupes Russes va pratiquer le terrorisme en le considérant sous un jour nouveau. En 1903, il déclare « l’action terroriste n’est pas un système indépendant de la lutte, capable d‘abattre par elle même la résistance de l’ennemi et de le forcer à déposer les armes ».
La forme moderne de cette action se répandra lors des guerres de libération menées après la Seconde Guerre mondiale. Les mouvements de résistance à l’occupant avaient déjà prouvé leur efficacité et le modèle de structure des réseaux allait être repris par la Hagannah, le Front de Libération National (FLN), l’Organisation de l'Armée Secrète, etc. Le 5 mars 1962, l'OAS déclenchait l'opération « Rock and Roll » : cent-vingt plasticages en deux heures ! Du 1 au 31 janvier 62 plus de huit-cents attentats faisaient cinq cent cinquante morts et neuf cents blessés ! Du 1 au 15 février cinq cent sept attentats. Climat de guerre civile qui effraya la population sans jamais vraiment menacer l'État, au contraire, la cohésion nationale en sortit renforcée. Quand bien même la cause serait défendable, la société occidentale l’assimile aux seuls actes de violence.
C’est sans conteste le romantisme des leaders des guérillas prolétariennes en Amérique Centrale qui allait contribuer à l’expansion de cette forme de lutte dont les bases en furent jetées en janvier 1966 lors la première Conférence de solidarité des peuples, d'Asie, Afrique, d'Amérique latine, Conférence plus connue sous le nom de la « Tricontinentale » et dont le Président d’honneur n'était autre que le très charismatique Che Guevara. Participaient à cette réunion plus de cinq cents délégués représentant quatre-vingt-trois groupes d’un éclectisme extraordinaire, : des anarchistes - des Léninistes - des Marxistes - des Maoïstes - des Staliniens - des Trotskistes - des séparatistes - des nationalistes - des anticolonialistes, etc.
Les vagues terroristes des années soixante disparues, la France va devenir la cible d'attentats en lien avec le Proche et le Moyen-Orient. Le coup d'envoi, si l'on peut s'exprimer ainsi, remonte au 6 septembre 1972 avec l'assassinat des athlètes israéliens à Munich. Le 13 novembre, un journaliste syrien est abattu à son domicile, rue Copernic à Paris. Les enquêteurs de la brigade criminelle du 36 quai des Orfèvres vont découvrir que la victime était proche des services de renseignement de l'organisation « Septembre noir » et qu'elle était le correspondant d'un hebdomadaire arabe libanais. L'homme avait été retourné l'année précédente par le service secret jordanien !
Le Service de Documentation Extérieure et du Contre-Espionnage (l'ancêtre de la DGSE) avait adressé au président Georges Pompidou au mois d'août 1973, la note n°10959 l'avertissant d'une reprise des activités palestiniennes avec l'accueil par l'ambassade de Lybie d'une douzaine d'extrémistes appartenant au FPLP et à Septembre noir ! Le SDECE avait vu juste. Le 26 juillet 1978, la police aux frontières de l'aéroport d'Orly interpellait un Japonais en possession de 10 000 dollars en fausses coupures destinés au Front pour la libération de la Palestine (FPLP). Le 13 septembre, Carlos organisait la prise d'otage de l'ambassadeur de France à la Haye aux Pays-bas, exigeant en contre-partie la libération du Japonais membre de l'Armée rouge incarcéré à Paris. Le 15, un groupe de terroristes Franco-Palestiniens lançait deux grenades dans le Drugstore de Saint-Germain-des-Près, attaque faisant deux morts et trente-trois blessés. La suite n'allait être qu'une litanie : Le 29 mars 1982 : l’explosion d’une bombe dissimulée dans une valise faisait cinq morts et 27 blessés dans le Capitole Paris-Toulouse ; avril 1982, l’attentat de la rue Marbeuf un mort ; l'attentat de la rue des Rosiers et contre le restaurant Jo Goldenberg le 9 août 1982 6 morts et 22 blessés ; l'explosion d'une valise piégée le 15 juillet 1983 dans l'aéroport d'Orly 8 morts et 56 blessés (Asala) ; les attaques à la gare Marseille Saint-Charles et à bord du TGV Marseille-Paris au mois de décembre 1983, 5 morts et 45 blessés.
Entre le mois de février 1985 et de septembre 1986, treize attentats vont ébranler la France. Ces attentats coûteront la vie à 13 personnes et feront près de 300 blessés. Cette série a été attribuée au Comité de solidarité avec les prisonniers politiques arabes et du Proche-Orient, proche du Hezbollah. Paris va subir à partir de l'été 1995, huit attaques à la bombe attribuées au Groupe Islamique Armé. Le 25 juillet, une bombe artisanale bourrée d’écrous explose dans la gare RER Saint-Michel à Paris faisant 8 morts et 117 blessés. Le 3 décembre 1996, un attentat similaire se produit à la station Port-Royal faisant 8 morts et 151 blessés.
Le 13 février 2006, Ilan Halimi était découvert entre la vie et la mort le long d'une voie SNCF près de Sainte-Geneviève-Des-Bois. Le jeune homme qui a été séquestré et torturé par le gang des barbares pendant 24 jours dans une cave d'une cité de Bagneux, décédera avant d'arriver au service des urgences. Le directeur de la maison d'arrêt de Versaille, Florent Goncalves, va s'enticher de la jeune fille qui avait servi d'« appât » pour attirer le jeune homme et nouer une relation amoureuse avec la détenue... Les 11 et 13 mars 2012, Mohammed Merah abat 3 militaires à Toulouse et Montauban ; le 19, il tue trois enfants et un professeur à l’école juive d’Ozar Hatorah de Toulouse. Le 9 septembre 2012 une grenade lancée contre une épicerie casher à Sarcelles (Val-d'Oise) fait un blessé léger. Un mois plus tard, les enquêteurs interpellent douze individus à Cannes et à Torcy avant leur passage à l'acte. Les policiers saisissent « Des sacs contenant du nitrate de potassium, du soufre, du salpêtre, des récipients type Cocotte-Minute, et des ampoules de phare, tous produits ou instruments utiles à la fabrication de ce que l'on appelle des engins explosifs improvisés. (...) Ces techniques étaient utilisées par le réseau Kelkal des attentats de 1995 comme celui commis à Paris à la station Maison-Blanche ou l'attentat manqué " au couscoussier " sur le marché de Wazemmes à Lille. Là aussi, le contenu explosif était maintenu dans un récipient de type Cocotte-Minute ou bonbonne de gaz, vidée de son contenu et remplie d'un mélange explosif et de clous » similaire à ceux ayant été utilisés pour confectionner les bombes des attentats du métro en 1995 !
Le deuxième millénaire va coïncider avec l'acmé des attentats suicides. Le 7 janvier 2015, les frères Chérif et Saïd Kouachi abattent 12 personnes au siège de Charlie Hebdo. Le 8 janvier, Amédy Coulibaly abat une policière municipale et blesse un agent municipal à Montrouge (Hauts-de-Seine), le lendemain il prend plusieurs personnes en otages dans une épicerie casher de la Porte de Vincennes et en tue 4 avant d’être abattu dans l’assaut du Raid. Le 3 février 2015, Moussa Coulibaly agresse à l’arme blanche 3 militaires qui participent au plan Vigipirate à Nice. Le 26 juin 2015, Yassin Salhi décapite son employeur et en expose la tête sur la clôture entre deux calicots islamiques. Le 21 août 2015, Ayoub El Khazzani porteur d’un fusil d’assaut AKM est désarmé in extremis par des passagers du TGV Amsterdam Paris. La suite ? les attentats du Stade de France, du Bataclan, des cafés restaurants dans le XI° arrondissement de Paris suivis de ceux survenus à Bruxelles.
Trente-six après l'attentat de la rue Copernic à Paris ayant fait quatre morts et une quarantaine de blessés le 3 octobre 1980, on apprenait que le dénommé Hassan Diab, un libano-canadien âgé de 62 ans et principal suspect extradé vers la France en 2012, venait d'être libéré et placé sous bracelet électronique grâce au témoignage tardif de son ex-épouse... Petite phrase du jour : « Même une montre arrêtée donne l'heure exacte toutes les douze heures. »
23 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON