Adieu Angela Merkel ! Bonjour Annalena Baerbock ?
L'Allemagne entre dans une ère nouvelle avec les élections législatives de septembre
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16 ans au pouvoir plein et entier pour Angela Merkel ; même François Mitterrand en France avec ses 14 ans dont 4 ans de cohabitation, est battu. Angela Merkel a connu Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy, puis François Hollande, puis Emmanuel Macron présidents de la république française.
Mais Angela Merkel chancelière, c'est fini pour l'Allemagne. Angela Merkel ne se représente pas : le 26 septembre prochain ce sont les élections générales en Allemagne et le changement de chancelier, moments importants pour le pays, pour l'Europe et pour le "tandem" franco-allemand. Puis en janvier 2022 ce sera l'élection du président fédéral par les " länder" (les régions allemandes) et le Bundestag.
Le 26 septembre, les allemands vont voter pour un parti et un candidat dans une circonscription avec un système qui favorise les petits partis. Les élections vont avoir lieu dans un contexte à forte pression avec la pandémie et ses dégâts mondiaux passés et à venir.
Les 2 grands partis, les chrétiens démocrates (CDU-CSU) et socio-démocrates (SPD) sont en difficultés. La CDU le plus grand parti, de droite, a perdu depuis 1990 40% de ses adhérents, depuis la réunification des 2 Allemagnes. Le SPD est encore plus en crise que la CDU. Lui qui était ancré dans le fort mouvement syndical, a perdu en importance depuis de nombreuses années, et il est crédité de 10% des intentions de vote, au même rang que les libéraux. Les libéraux, les partisans de la vraie économie de marché et de l'indépendance de la société envers l'état, existent toujours mais en portion congrue.
Les extrêmes stagnent, comme à l'extrême droite, l'Alternativ für Deutschland (AfD) parti très anti-européen et dénonciateur de l'immigration insécurisante, avec quelques alliances locales avec l'aile droite des chrétiens-démocrates. Certains lui octroient 12% des intentions de vote. Dans quelques semaines un scrutin régional doit avoir lieu en Saxe-Anhalt et la CDU a décidé d'une alliance avec tous les partis contre l'AfD. Die Linke à l'extrême gauche, ancienne aile gauche du SPD et héritier du PC de l'ex RDA ( Allemagne de l'est communiste), est implanté dans des länder mais sans progresser notablement.
Les Verts (Die Grünen) sont devenus la deuxième organisation politique allemande derrière la CDU, avec une maturité écologiste remarquable.
Tout est désormais possible en extrapolant des coalitions entre la gauche, les Verts, les libéraux, la droite, hormis l'extrême-droite.
Dans les länder qui ont, comme chacun sait en Allemagne, un fort poids institutionnel, d'ores et déjà les coalitions vont bon train : coalitions à 3 partis comme en Rhénanie-Palatinat ; coalitions à 2 partis comme en Bade-Wurtemberg.
L'électeur ne sait donc pas avant les élections générales quelle sera la coalition constituée. Mais le système est stable et tourne rond.
En Allemagne il y a un désir général de nouveau souffle, de tourner la page Angela Merkel qui aurait pu se représenter comme l'avait fait son mentor Helmut Kohl. Mais elle a préféré "jeter l'éponge", peut-être pour être plus libre dans son action gouvernementale finissante.
Les allemands rendent hommage à l'action immense d'Angela Merkel jusque dans sa gestion de la crise du Covid, même si l'Allemagne connait comme d'autres démocraties une crise de confiance envers les politiques. Angela Merkel est reconnue comme travailleuse inlassable.
Une autre femme co-présidente des Verts est en train de prendre de l'ampleur : la candidate verte au poste de chancelier Annalena Baerbock, 40 ans, alors que le candidat CDU en a 60. Des enfants jeunes ( télétravail à la maison avec ses enfants pendant le confinement), une écoute féminine qui plait bien, un "nouveau narratif" comme le nomme des chercheurs en science politique, voire un côté maternel qu'elle sait exploiter, la caractérisent dans l'opinion allemande. Et elle a le vent en poupe, elle qui est diplômée de la London School of economics et en sympathie avec Christine Lagarde qui préside la Banque centrale européenne.
Les Verts tentent de devenir un "Volkspartei", un parti populaire avec un nombre conséquent de militants et d'élus. Et ils sont bien implantés dans les länder. Parti avec des étudiants, des retraités, des urbains, des ruraux, des jeunes de tous horizons, des militants de la cause climatique, des militants anti-nucléaire, des représentants de la forte minorité turque, des investisseurs, des entrepreneurs, les Verts tentent habilement la synthèse.
Le ministre-président Kretschmann réélu il y a peu dans son land de Bade-Wurtemberg, land de l'automobile, que la CDU avait tenu pendant 50 ans, est le type même de ce que les allemands appellent le conservatisme vert qui allie pragmatisme et changement sans révolution.
Le programme des Verts, très épais, 137 pages, prévoit 50 milliards d'investissements de l'état, par an, pour les infrastructures, les transports en commun, la santé, l'éducation avec endettement (alors qu'il y a la règle du "frein" dans la constitution allemande) et hausse des impôts pour les revenus supérieurs (au contraire des libéraux par exemple), un salaire minimum et des allocations familiales en hausse.
Selon un sondage effectué il y a peu auprès des entrepreneurs, la candidate des Verts est choisie par plus d'un électeur sur 4 et les investissements verts et les placements financiers verts prévus dans le programme vert sont plébiscités par le monde de l'entreprise. La famille, l'éducation, la santé, l'intelligence artificielle sont mises en avant par la candidate verte même avant les problèmes environnementaux, comme un vrai parti de centre gauche.
Même si des faiblesses apparaissent avec des divergences entre les Verts, sur le nucléaire, l'environnement, l'Europe, la politique militaire avec l'OTAN et la politique étrangère en direction de l'Afrique et du Moyen-Orient. Même si le groupe parlementaire vert actuel refuse une bonne partie du programme pour les élections générales, les Verts veulent un gouvernement de rupture mais avec une certaine continuité. Ce qui ne sera pas sans présenter des difficultés avec leurs partenaires éventuels de l'ouest comme de l'est.
Comme tous les candidats (hormis les extrêmes) les Verts sont pro-européens. Comme ceux de la CDU, le parti dont le futur a peu préoccupé la chancelière Merkel et qui a choisi Armin Laschet négociateur et rassembleur, président fédéral de la CDU, pour être son candidat à la chancellerie, dans la grande tradition Kohl- Adenauer. Tout comme le SPD pro-européen avec son candidat à la chancellerie Olaf Scholz ministre actuel d'Angela Merkel, opposé à la direction de son parti et avec un groupe parlementaire à 40% hostile au gouvernement de coalition avec la CDU.
Les commentateurs français ne manqueront pas de prendre en compte des comparaisons entre les Verts allemands et les Verts français, de faire des parallèles entre CDU, SPD et les ex partis français dominants LR et PS. Mais comparaison n'est pas raison...
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