Adieu Tombouctou
Appelée aussi Tinbuktu, cette ville du Mali est située sur la rive du fleuve Niger. Son nom viendrait, selon une légende, d’un endroit où une femme nommée Bouctou avait un puits (Tin). Au XIIe siècle, après des siècles de campement touareg, les premières oeuvres en dur apparaissent.
L’architecture de la ville est d’une grande beauté. C’est une ville de sable et d’argile posée sur le même sable d’or. Tombouctou a connu un grand rayonnement intellectuel dans le passé, comme lieu d’étude du Coran. A certaines périodes on compta jusqu’à 25‘000 étudiants musulmans dans son Université. Elle a connu la richesse grâce au commerce international en Afrique, dont le trafic d’esclaves, bien avant la traite négrière.
Cette ville nommée « perle de l’Afrique » ou « Ville aux 333 saints » est aujourd’hui sous la domination des milices salafiste qui, comme dit précédemment, ont commencé hier à détruire les mausolées des saints. S’agissant de saints Soufis, les salafistes n’ont aucun scrupule.
Le soufisme est parfois nommée voie mystique de l’islam.
« Le soufi est l'amoureux de la Vérité ; c'est celui qui par les moyens de l'amour et de la dévotion va vers la Perfection dont tout le monde réellement est en quête. »
Le soufi n’a pas renoncé à l’islam, il en privilégie la voie de la Vérité. La conscience intérieure doit le guider. Le soufisme n’est donc pas séparé de l’islam et il recommande la pratique des cinq piliers. Il considère que l’observance des lois de la religion sans la disposition de conscience intime n’est que formalisme de surface et non transformation intérieure.
On comprend que les salafistes, beaucoup plus formalistes, méprisent les soufis.
La destruction des mausolées de Tombouctou par des factions islamistes est donc d’une part une profanation de leur propre religion, d’autre part une bataille dans la guerre d’influence que se livrent les différents courants de cette religion.
C’est aussi une manière de terroriser les habitants et d’asseoir le pouvoir sur eux :
« Désormais, il n’y a que deux activités possibles à Tombouctou : aller à la mosquée et rester chez soi. » Hallé Ousmane, le maire, cache mal son dépit. Sa ville, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco, se meurt à petit feu. Les façades sont éventrées, les archives de l’administration ont été détruites, des bâtiments saccagés servent d’abris aux animaux… »
La ville passa sous administration française en 1894, puis partie du Mali dans la deuxième moitié du XXe siècle. Outre les éléments d’architecture Tombouctou recèle des dizaines de milliers de manuscrits remontant jusqu’à des périodes pré-islamiques. Ces manuscrits sont des enseignements scientifiques mais aussi des documents de droits dotés d’une grande valeur historique et culturelle.
La ville de Tombouctou a été longtemps dirigée par des musulmans non salafistes. La rébellion touareg n’est pas nouvelle dans cette région mais son affiliation salafiste est récente.
La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) a décidé de soutenir Bamako, dont l’armée est réduite presque au néant. Un force militaire de 3‘300 hommes, formée au Sénégal et au Nigéria, devrait être prochainement opérationnelle et attend le soutien de l’ONU. Sa mission est d’abord de sécuriser Bamako, capitale du Mali, puis de reprendre les régions du nord, actuellement sous contrôle islamiste. S’ils n’y parviennent pas, toute la culture ancienne et riche ainsi que la pratique modérée de la religion à Tombouctou pourraient disparaître.
A suivre attentivement.
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