Alain Finkielkraut, CPE et principe de réalité
10 avril 2006, lors de l’émission « Mots croisés ».
Alain Finkielkraut nous fait part de son analyse de la fronde rencontrée par le gouvernement De Villepin avec le CPE, contrat dit de « première embauche » destiné à favoriser l’insertion professionnelle des jeunes, analyse qui n’est pas sans ressorts comiques et qui est une bonne démonstration de pensée unique.
Pour Finkielkraut la pensée unique est celle du peuple
Le philosophe nous dépeint une France où règne un climat de terreur, la pensée unique exercée par une partie de la population, une idéologie immature et pleine de gauchisme bien pensant ; Finkielkraut va nous parler des jeunes, comme il aurait tout aussi bien pu nous parler de la niche sociale des fonctionnaires.
Dans une charge vaillante notre philosophe-dissident s’attaqua au conformisme d’une jeunesse manipulée avant de nous rappeler la réalité réellement vraie de la vie. Car derrière ce refus juvénile de l’adaptation au néolibéralisme flexible c’est bien toute la réalité que l’on nie, et que voulez vous rétorquer face un tel aveuglement ?
Une analyse à laquelle souscrirait volontiers Alain Minc.
Alain Finkielkraut, philosophe dissident au milieu de l’irréalisme français
Il s’agit tout d’abord d’énumérer l’importance de l’opposition au CPE avec quelques noms insignifiants pour mieux souligner le conformisme de la masse. Procédé classique plein de sophisme puisqu’il revient, en miroir, à qualifier la prédominance néolibérale des trente dernières années d’anticonformiste. C’est avec le même anticonformisme que s’effectuera donc la privatisation de la Poste.
On constate cependant que le conformisme populaire vaut bien peu face au conformisme des élites.
2) L’éternel manque de maturité de la jeunesse
L’enfant ne peut pas faire de la politique. Proposition simple et pleine de bon sens, en effet, collégien ou lycéen, on n’a en règle générale pas la formation politique minimale nécessaire à exercer une pensée consciente et indépendante.
Mais que vaut l’inexpérience de la jeunesse face aux arguments spécieux d’Alain Finkielkraut qui, lui, a atteint l’âge nécessaire pour savoir ce que l’on défend en pleine conscience.
Le bon sens n’est pas toujours là où on le croit, en l’occurrence, refuser un modèle qui n’a rien d’autre à proposer qu’une précarité et un écart croissants dans la répartition des richesses devrait sembler légitime pour un philosophe, illégitime pour un sophiste.
Mais Alain Finkielkraut se place du côté de la vérité, pour lui on ne disserte pas sur le bien fondé de la "réalité". Ce n’est donc pas tant sur l’âge que se fonde l’argumentaire du philosophe mais bien plutôt sur un choix politique, qui porte chez lui le doux nom de réalité, et qui peut tout aussi bien être nié par un adulte. Le néolibéralisme est tel la loi de la gravité, on n’a pas à y objecter.
Néolibéralisme ou principe de réalité
1) Goût de l’effort et précarité
Se mettre à jour au libéralisme anglo-saxon c’est donc reprendre pied dans la réalité et abandonner enfin ses illusions. Mais en l’espèce, cela met en jeu une vertu supplémentaire : le goût de l’effort. Et quel meilleur moyen pour le redonner au jeune que de multiplier les contrats précaires ? En défendant un système largement fondé sur le désir frivole Alain Finkielkraut croit nous redonner le goût de l’effort.
2) La fin de l’histoire, le règne de la Réalité
Le réel, la réalité, le bon sens, une rhétorique que l’on connait et qui sous entend simplement la soumission du politique et de la vie sociale à la loi du marché.
Une réalité qui a partout remplacé le qualitatif par le quantitatif, une réalité dogmatique, mais qui sait en temps (de crise) voulu – et par réalisme certainement ! - sociabiliser les pertes pour continuer à privatiser les profits…
Lecture recommandée : l’essai critique de Serge Halimi sur la pensée unique propagée par les médias : « Les Nouveaux chiens de Garde ».
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