Algérie, 1944 : quand, soumis à Charles de Gaulle, le parti communiste français faisait plus que se renier
Placé totalement à la merci de Charles de Gaulle sur le plan de la résistance intérieure – et quels que fussent les crimes que celui-ci y laissait commettre délibérément, ainsi que cela se voit dans le massif du Vercors – et quelle que soit l’impéritie du Général qui avait abouti à ceci que le débarquement allié du 6 juin 1944 sur les plages de Normandie, bien que parti des côtes de Grande-Bretagne où le futur chef de la France libre avait été accueilli dès les 17 et 18 juin 1940, ne comptait de soldats français que le maigre commando de 177 membres placé sous l’autorité du capitaine Philippe Kieffer, quel poids le parti communiste comptait-il avoir dans la lutte contre l’impérialisme français, combat qui constituait pour lui ce que l’on pourrait appeler un… minimum syndical ?
Nous l’avons vu : en juillet 1944, comme d’autres responsables politiques, certains dirigeants communistes, venus de métropole ou antérieurement retenus prisonniers sur le sol algérien, vivaient à Alger. De plus, il y avait, dans cette Algérie constituée de trois départements français, un parti communiste algérien (P.C.A.). Qu’allait-il pouvoir s’y passer du point de vue de la situation politique inférieure faite aux Musulmans ? Quel rôle Charles de Gaulle comptait-il lui-même y jouer ? Les communistes étaient-ils prêts, là comme ailleurs, à lui laisser faire tout et n’importe quoi en n’osant ensuite que venir pleurnicher devant lui pour très vite reprendre leur place sous le joug imposé par le Maître ?
Nous allons voir que ce fut pire, et ceci dès le 8 mai 1945, jour où l’on fêtait pourtant la capitulation sans conditions de l’Allemagne nazie…
Quel était le sens qu’il convenait de donner à la Seconde Guerre mondiale ? Voilà ce qui avait fait le contenu du message adressé aux nouvelles autorités françaises, mais aussi aux USA et à la Grande-Bretagne (à titre de témoins), par l’un des principaux leaders du peuple algérien, Ferhat Abbas, une quarantaine de jours après le débarquement allié effectué en Afrique du Nord (8 novembre 1942)…
« Les représentants des Musulmans algériens, en présence des événements graves dont leur pays est le théâtre depuis le 8 novembre 1942, adressent aux autorités françaises le message suivant : « La guerre, après avoir bouleversé tous les continents et meurtri la France, flambeau de civilisation et de culture, atteint aujourd’hui l’Algérie. Si cette guerre était, comme l’a déclaré M. le président des Etats-Unis, une guerre de libération des peuples et des individus, sans distinction de race et de religion, les Musulmans algériens s’associeraient de toutes leurs forces et par tous les sacrifices à cette lutte libératrice. Ils assureraient ainsi, dans un cadre essentiellement français, leur propre affranchissement politique en même temps que la libération de la France métropolitaine. Mais il convient de rappeler que les populations qu’ils représentent sont privés des droits et des libertés essentielles dont jouissent les autres habitants de ce pays malgré les sacrifices qu’elles ont consentis et les promesses formelles et solennelles qui leur ont été faites à maintes reprises. » (Mahfoud Kaddache, Histoire du nationalisme algérien, tome II, 1939-1951, Editions Paris-Méditerranée 2003, page s 636-637)
C’est que l’armée française avait bien besoin de ces jeunes – et moins jeunes – hommes, dont on sait le rôle qu’ils allaient jouer bientôt du côté du Monte Cassino, en Italie, de janvier à mai 1944… Allait-on, à nouveau, leur faire de belles promesses pour ensuite immédiatement les trahir ?…
Voici la transcription que Liberté, le journal communiste d’Algérie, donne, à la date du 20 janvier 1944, du discours que le dirigeant communiste métropolitain André Mercier – qui avait représenté le Parti lors de la réunion de constitution du Conseil National de la Résistance du 27 mai 1943 à Paris – vient de prononcer à l’Assemblée consultative d’Alger :
« La démocratie politique se propose d’étendre la qualité de citoyen à tous les habitants des terres françaises. La France de demain doit travailler à rendre possible l’accession des Indigènes à la capacité politique, l’intégration des possessions coloniales à la communauté française. » (Idem, page 609)
Ce qui est plutôt mou, et n’entretient manifestement aucun lien avec la pensée de Lénine… ni, plus particulièrement, avec la huitième des conditions d’admission des partis dans l’Internationale Communiste (juillet 1920) :
« Dans la question des colonies et des nationalités opprimées, les Partis des pays dont la bourgeoisie possède des colonies ou opprime des nations, doivent avoir une ligne de conduite particulièrement claire et nette. Tout Parti appartenant à la III° Internationale a pour devoir de dévoiler impitoyablement les prouesses de « ses » impérialistes aux colonies, de soutenir, non en paroles mais en fait, tout mouvement d’émancipation dans les colonies, d’exiger l’expulsion des colonies des impérialistes de la métropole, de nourrir au cœur des travailleurs du pays des sentiments véritablement fraternels vis-à-vis de la population laborieuse des colonies et des nationalités opprimés et d’entretenir parmi les troupes de la métropole une agitation continue contre toute oppression des peuples coloniaux. »
« Oppression des peuples coloniaux », et par voie de terre, de mer et des airs…, nous allons voir comment De Gaulle s’y est couvert de sang les mains… dès le jour même de la proclamation de la victoire sur le nazisme, tandis que les communistes, etc…
NB. Cet article est le quatre-vingt-treizième d'une série...
« L’Allemagne victorieuse de la Seconde Guerre mondiale ? »
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