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Aller-Retour : Les limousins partent en vacances…

Un samedi du mois d’août 2013, 7H15. J’attends, sur le quai de la magnifique gare des Bénédictins de Limoges, le train qui me rapprochera un petit peu plus du lieu où je m’apprête à passer le week-end pendant cette période de vacances estivales : Royan ! Il fait un peu frais ce matin-là, comme souvent à Limoges, même si, c’est vrai que l’été fût globalement correct. De nombreuses personnes attendent avec moi, des personnes âgées, des jeunes, des femmes seules avec leurs enfants, et même un couple et leur fils. Le train s’arrêtera à Angoulême où il y aura une correspondance à prendre pour la destination finale. Quelle hâte !

C’est vrai que l’océan a quelque chose d’apaisant, ses vagues, leurs bruissements, et les fragrances qui l’entourent, celle que délivrent les pins maritimes par exemple, ils ont cette odeur de vacances que nous n’avons pas dans notre Limousin.

Celui qui semble être notre train est à quai déjà, enfin, c’est ce que mes yeux me permettent de constater, mais je ne crois pas vraiment que celui-ci nous soit destiné. Je le vois prêt à partir, pourtant, il y a quelque chose qui m’inquiète un peu : il n’y a qu’un seul wagon. Un wagon qui fait aussi locomotive. Les portent s’ouvrent et les gens commencent à monter, mais moi je prends mon temps, ce n’est pas possible qu’un seul wagon soit prévu alors que nous sommes très nombreux. Sceptique, pourtant j’entre, remplie de doutes, m’assied à côté d’une femme et ses deux enfants. Nous sommes un peu serrés sur la banquette, avec les sacs, mais on y arrive. Des gens entrent encore, et encore, traversent le wagon tant bien que mal, devant, avec leurs bagages, escalader, jambes, pieds, valises encombrant le couloir du wagon. « Jérôme, y’a de la place-là ! Oh pardon madame... Là, là, à côté du jeune homme au fond, là. Je vous ai pas fait mal au moins ? ». On entend les soufflements d’une vieille dame soulevant d’une main sa lourde valise, et utilisant l’autre pour essayer de maintenir son équilibre alors qu’elle doit franchir un parasol reliant le sol aux mains de son propriétaire encombré. Lorsqu’on est assis, il est intéressant d’observer cette cavalcade, certains sont décidément plus agiles que d’autres. Certains aussi, sont obstinés, font demi tour dans le train, rouspétant, espérant que peut-être, quelqu’un aura cédé sa place.

7h32 : le cadran de ma montre est formel, c’est l’heure du départ. Un contrôleur entre dans le train et nous informe qu’on ne peut pas, et on le comprends bien, partir dans ces conditions, d’autant que, tous le monde, même en restant debout, n’a pas pu entrer. On va voir si on peut rajouter un autre wagon. Personne ne râle, on ne voudrait pas se sentir privilégié, la solidarité règne. Bien sûr, on va attendre parce qu’il n’y a aucune raison que nous partions alors que nos camarades restent à quai pendant que nous, nous sommes confortablement assis, enfin assis. Néanmoins, je demande au contrôleur si l’on va malgré tout avoir notre correspondance, celle de 9h40, à Angoulême. Absolument sympathique, ce dernier me répond que ses collègues d’Angoulême seront informés, ce ne sera pas un problème. Me voilà rassurée. Enfin, pas totalement puisque ma question a semé la panique, la plupart des personnes autour de moi ignoraient qu’il y avait une correspondance à Angoulême.

Pendant qu’on accroche un second wagon sous les yeux de quelques gosses intrigués, je me pose quelques questions sur le billet que j’ai acheté. Un ami m’avait informé d’un tarif préférentiel pour se rendre à Royan. A défaut de partir en vacances, je me dis que Royan ce n’est pas si mal, mes recherches préalables sur la toile m'indiquait : 

« Le pass-océan », « un tarif unique de 20 euros pour les adultes, 10 pour les enfants pour aller-retour Limoges et Royan. (gratuit pour les moins de 4 ans). »

Ce pass est utilisable « tous les week-ends du 28 juin 2013 au 1er septembre avec un départ dès le vendredi (le délai entre l’aller et le retour est libre. Le retour doit cependant être effectué un dimanche jusqu’au 1er septembre inclus). » On peut donc partir le vendredi à 18h34, arrivée à 22h15, ou le samedi donc, à 7h32, arrivée à 11h39. Le retour se fait quant à lui, un dimanche, à 19h44 de Royan, arrivée à Limoges à 23h 17.

Avant mon départ, je me rends donc à la sncf pour acheter mon billet. Je ne souhaitais pas rentrer obligatoirement le dimanche, mais je n’envisageais pas non plus de passer toute la semaine à Royan. La personne me recevant au guichet m’explique donc qu’il n’est pas possible d’acheter juste un aller, que le pass comprend l’aller et le retour ; Sinon, il faut acheter l’aller en tarif normal. Mais lorsqu’elle m’annonce le tarif, je me résigne à ne rester qu'une nuit. L’aller-retour avec ce pass me coûte définitivement moins cher que l’aller seul au tarif normal. Je ne fais pas la difficile et prends ce qu’on « m’offre ».

Environ 7h45, enfin nous partons. Les enfants à mes côtés, fort sages, commencaient à s’impatienter. Ils frétillaient tels des poissons rouge hors de leur bocal. Après le départ, ils s’endorment accolés à leur mère. Celle-ci, et d’autres voyageurs me demandent des renseignements concernant la correspondance. Personne ne les a informés. Et en effet, sur le billet, rien n’est mentionné. Le contrôleur passe, contrôle nos billets, et disparaît. On ne le reverra plus. On est nombreux c’est vrai, mais le voyage me semble relativement calme.

9H40 : Angoulême. La correspondance. Nos avons quelques minutes pour embarquer dans le prochain train. On sort en trombe, mais poliment, et s’entraidant. Nous sommes des êtres civilisés. Deux agents de la scnf, debout en haut des escaliers, nous encouragent à aller plus vite en riant. Je fulmine, ils m’agacent profondément.

Le voyage se poursuivra, chacun à sa place jusqu’à Royan, où un soleil timide nous accueillera mais au moins, il y a du soleil.

 

Le week-end se passe, l’heure du retour approche. Même trajet à l’envers.

 

21h30 : Arrivés à Angoulême, même scène à quelques détails prêts. Un wagon à quai, je m’assois, une vague de voyageurs arrive. Trop de bagages, pas assez de sièges, mais cette fois-ci, pas de wagons supplémentaires !!! Ceux qui n’ont pas de sièges feront le retour debout, assis par terre, certains serrés comme des sardines. Une jeune fille et sa mère s’assoient face à moi. La maman réussit à introduire le bagage de sa fille dans l’espace prévu à cet effet, au-dessus des sièges. La sienne n’y trouvera pas sa place, et finira finalement sous mes pieds. Je voyage les genoux dans le menton, ou le menton dans les genoux, je ne sais pas vraiment. Un vieil homme entre, s’assied à la place qu’on lui cède, mais laisse avec quelques inquiétudes sa valise à l’entrée du wagon, au milieu d’un groupe de jeunes n’ayant trouvé places. Il ne cessera de se retourner pour jeter un œil à sa valise. La contrôleuse ne manque pas à ses devoirs. Elle contrôle nos billets qu'on essaie de sortir de nos sacs respectifs sans envahir l'espace des autres, une voix alors se lève : « C’est abusé m’dame ! On n’est pas des animaux ! » Perdant la face, elle répond sèchement aux jeunes assis par terre qu’elle n’est aucunement responsable de la situation, mais veut bien faire remonter les plaintes à sa hiérarchie. Elle note. Nous voilà réconfortés.

Il fait affreusement chaud dans ce wagon. J’ai fini mon eau et il n’y a pas de « ventes à bords ». Même à deux euros (à peu près), je me serais pourtant bien offert le luxe d’une bouteille d’eau de 50cl. J’ai envie d’aller aux toilettes, c’est urgent, je dérange tous les voyageurs du couloir pour y accéder, j’en ressors avec la nausée. Urine, transpiration, merde, je ne saurai dire laquelle de ces odeurs a pu me provoquer cet état, peut-être le mélange des trois. Heureusement, lorsque je rejoins ma place, une jeune fille assise sur le sol et visiblement en sueur, s’asperge de déodorant. Ma nausée cède sa place à la migraine.

23h17, j’arrive à Limoges, descends gare des Charentes, tant pis pour les magnifiques vitraux des bénédictins. Le quai est sombre, noir. Je suis les silhouettes des autres pour trouver la sortie et rentre chez moi à pied. Il n’y a pas de transport en commun pour me ramener un dimanche à cette heure-là. Les taxis prennent un tarif de nuit, mais dans la place suspecte de cette gare, même les taxis n’attendent pas.

 

Alors voilà, le pass-océan semble être un grand succès. Effectivement, pour les initiateurs c’en est un ! Plusieurs personnes sont parties ou « ont pu partir » à Royan, mais à quel prix ? On peut s’interroger une fois encore sur la qualité des services offerts aux voyageurs. Enfin, certains voyageurs. Si une offre comme celle-ci vise un public à faible revenu, cela justifie-t-il pour autant les mauvaises conditions de voyage ? Même pour un prix considéré par certains comme low cost, de quel droit se permet-on de piétiner la dignité des voyageurs ? Ou peut-être que la mauvaise qualité du service était conçue comme une offre pour les mauvais voyageurs ?


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2 réactions à cet article    


  • foufouille foufouille 27 août 2013 12:39

    tu avait ka faire du stop, c’est encore moins cher !
     


    • Mr Dupont 27 août 2013 13:04
      L’auteur

      Quelle vie trépidante est la vôtre !!!

      Celle d’Indiana Jones à coté c’est de la gognotte

      Pour information à l’aventureuse auteur : une locomotive qui fait wagon en même temps ; ça s’appelle une Micheline , c’est diesel et ça pollue

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Auteur de l'article

Nini


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