Anna Politkovskaïa : hommage et intérêts
Je suis allé faire un petit tour au rassemblement organisé à la mémoire d’Anna Politkovskaïa.
J’y allais comme ça, en quidam amoureux de la liberté de la presse, respectueux de cette dame qui a payé de sa vie son infatigable besoin d’informer, notamment sur la guerre en Tchétchénie. Elle dénonçait avec fougue la fascisation de la société russe, ce besoin d’ordre dont le chef a profité pour arriver au pouvoir. Cette soif de nettoyage des abus d’une société ultra corrompue qui permet à son président de maintenir un régime calculateur et cupide en Russie.
La réunion se passait devant Notre-Dame. Je me suis bien demandé pourquoi. Je me suis aussi bien demandé pourquoi a été officiellement remercié au micro l’ecclésiastique qui aurait « permis » à ce rassemblement de se tenir à cet endroit.
Trois ou quatre cents personnes se trouvaient là, dont beaucoup de célébrités, d’intellectuels, et de journalistes. Certains faisaient le beau, se saluaient en rigolant. En ce qui me concerne, j’avais surtout envie de pleurer, et surtout de mordre ; l’assassinat d’un journaliste ne m’inspire pas de joie.
Puis Robert Ménard, le patron de RSF, s’est emparé d’un micro. Après nous avoir expliqué qu’il était à l’origine du rassemblement, et que « d’autres associations s’étaient jointes à lui », il a passé la parole à quelques intellectuels, éditeurs, et acteurs.
Hommage, ô désespoir
On sentait clairement deux sortes de tribuns dans cette petite troupe. Des figures habituelles de la contestation policée tout d’abord, admirables orateurs, qui laissent toutefois un amer goût dans la bouche ; pour lesquels on se demande s’ils ne défendent des causes que pour en faire bénéficier leur propre renommée.
Des lutteurs authentiques ensuite, des gens qui éditent des livres par exemple, replaçaient cette dame dans la littérature russe à côté des Tchekhov et des Dostoïevski. Ils nous expliquaient que l’âme russe existe encore, que l’image que l’on a d’un peuple russe rangé derrière son froid président n’est pas la bonne ; qu’il y a encore un espoir. Ou cette jeune Tchétchène, étudiante en France, Milena Terloeva, sincère et touchée, qui expliquait qu’Anna était un exemple pour elle. On lui souhaite un meilleur sort.
Tous hurlaient contre Jacques Chirac, et dénonçaient qu’il ait récemment remis les insignes de Grand-Croix de la Légion d’honneur au président Poutine.
La figure de cette dame assassinée est là pour nous rappeler que l’information libre est l’une des bases de la société. En France, était récemment dénoncée la connivence entre les politiques, les industriels et les médias. MM. Ménard, Henry-Lévy et Glucksman seraient bien inspirés de jeter un oeil au système médiatique français qu’ils ne dénoncent jamais avec autant de véhémence.
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