Anti-spécisme : danger ou faux problème ?
Devenant progressivement végétarien, j'ai fini par entendre parler de cette notion d'anti-spéciste. De prime abord, n'aimant pas particulièrement tout ce qui commence par "anti", j'ai commencé par me renseigner sur la notion de "spécisme" puis sur "l'anti" qui lui est associée. Le but de ce modeste article n'est pas de redéfinir ces notions, il suffit pour cela de chercher un peu sur le net (un bon wiki par exemple), mais de faire part de mon sentiment à ce sujet. D'une manière générale, je vois guère l'intérêt de devenir anti-spéciste pour changer le monde, je trouve même cela dangereux, cette notion divise (pro et anti). C'est une perte d'énergie. Je rejète donc cette notion tout en approuvant totalement la citation de Pythagore : "Car aussi longtemps que les hommes massacrent les animaux, ils vont s’entre-tuer. En effet, celui qui sème la graine du meurtre et de la douleur ne peut pas récolter la joie et l’amour." (580 av. JC).
Existe-t-il une autre espèce qui a autant modifié son environnement que l'Homme ? A ma connaissance, non. Combien d'animaux pratiquent-ils un art varié, non répétitif et multi-formes (écrit, oral, musical, pictural, chorégraphique...), je n'en connais pas. Certains poissons réalisent de véritables chefs d'oeuvre dans le sable pour attirer la femelle, mais tous les mâles le font (certes plus ou moins bien). Je sais que cette comparaison est anthropocentriste, mais je peux faire l'inverse : nous avons des points communs avec les animaux (compassion, sensibilité, vie sociale etc.), et les plantes aussi (besoin d'eau, de lumière, d'oxygène). Doit-on aussi rompre la barrière qui nous sépare des végétaux ? Des insectes ? Des microbes ? Et après, on fait quoi ?
Est-ce que vous vous demandez, face à un sanglier en furie, s'il est ou non anti-spéciste... Ou bien courrez-vous le plus vite possible ? En dernier recours, si vous avez un fusil, que faites-vous ? Combien d'animaux sont-ils capables de réduire la planète en cendres avec leur technologie, tout en étant conscients de ça ? Aucun. Nous nous sommes différenciés des autres espèces par un degré de conscience plus élevé, nous sommes aussi fragiles que créatifs ou dangereux. Nous sommes différents, essentiellement par une conscience plus développée, et la conscience d'être conscients. Nous nous affranchissons de la pure sélection naturelle pour protéger les plus faibles (plus ou moins selon les sociétés). Nous sommes conscients de nous mêmes, des autres, du monde, de l'univers, de tout notre pouvoir (et nos limites) et de la mort. Je ne dis pas que les animaux sont dépourvus de conscience ou d'intelligence, mais l'évolution ne les a pas conduits aussi loin que nous.
Nous pouvons faire le meilleur comme le pire (pas les animaux), nous avons su nous différencier et maintenant nous sommes Responsables de nos actes, de nos décisions ou de nos incapacités à nous entendre, pour vivre en paix avec nous-même et la planète. Cette "supériorité" ou plutôt "différence" qui nous est donnée ne doit plus être utilisée pour nous affranchir de la nature jusqu'à sa perte et la notre, mais pour veiller aux grands équilibres (écosystèmes, biodiversité). Nous devons et pouvons agir en responsables conscients, c'est une question de volonté et d'évolution. L'anti-spécisme, le fait de nous mettre au niveau des animaux et inversement est pour moi une manière d'abandonner cette responsabilité qui, qu'on le veuille ou non, nous incombe. Un animal n'est pas responsable, il EST tout simplement l'animal qu'il est. Nous ne sommes pas forcément supérieurs, nous sommes peut-être des animaux, oui, mais pas seulement. La métaphore biblique peut nous aider à mieux percevoir notre identité. Nous sommes sortis du jardin d'Eden.
Nous avons croqué la pomme, maintenant, c'est à nous de cultiver le jardin d'Eden en bonne intelligence, en non en maximisant aveuglément le profit. Assimiler l'homme à l'animal ou l'animal à la personne est une manière habile d'abandonner cette notion de responsabilité. L'animal en devenant Responsable quitte l'animalité pure et innocente. Il sort du jardin d'Eden et devient jardinier. Je vois cet anti spécisme comme un moyen très habile inspiré par je ne sais quel groupe pour nous détourner des vrais questions. Comment nous réconscilier avec la planète et arrêter la pollution, les destructions, les guerres. En pleine conscience, nous devons nous concentrer sur les moyens nécessaires à mettre concrètement en œuvre pour redresser la barre avant d'avoir complètement détruit la planète et ses êtres vivants et donc... au final... nous-mêmes. Si je devais tuer une poule pour sauver une baleine en voie de disparition, alors, oui, à contre coeur peut-être, mais je le ferais sûrement.
Il serait peut être cependant moins chocant d'utiliser la notion d'anti-spécisme pour reconsidérer les relations entre l'homme et les différentes espèces d'animaux. Comment peut-on simultanément aimer son chien ou son chat et laisser conduire des centaines de miliers de bovins, ovins, et autres porcins à l'abatoir ? Certains animaux seraient familiers et amis de l'homme et d'autres uniquement bons à être découpés en tranches... Cela dit, à quoi bon d'être "anti", de juger et de s'opposer frontalement à ces pratiques ? Il est préférable de faire de la pédagogie afin que chacun puisse éventuellement cheminer et changer ses pratiques. Toutefois, je ne crois pas au zéro viande à moins d'un grave problème sanitaire. Si, déjà, nous arrêtions la boucherie intensive, la surconsommation de viande, ce serait un net progrès. Sans parler de la reconversion des éleveurs, mais c'est un autre sujet.
Pour conclure, je ne crois pas qu'il y ait besoin d'être anti quelque chose pour être végétarien ou végan, il vaudrait mieux être "pro" quelque chose (c'est plus positif, donc sans doute psychologiquement plus sain), par exemple pour le respect de la vie mais tout en restant humain (donc, conscient et responsable). L'anti-spécisme peut toutefois avoir eu l'intérêt de faire prendre conscience à certains que nous faisons n'importe quoi avec les animaux... C'est toutefois une fausse bonne idée, trop radicale, car il nous faut rassembler les énergies pas diviser les gens. Nous devons désormais agir en êtres Responsables ou retourner à l'animalité, à la loi du plus fort, à la barbarie. Je ne veux pas faire le procès de l'anti-spécisme, je dois rester à ma place, je pense seulement que cette notion n'est pas vraiment la bonne piste. Je suis spéciste et pour le respect de la vie animale. Cependant, je ne suis pas encore 100% végétarien, je chemine à mon rythme pour éviter tout retour en arrière. Je laisse la place aux philosophes :
http://www.franceculture.fr/emissions/
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