Après le 17 décembre ?
La "réforme" Delevoye institue un système à points dont le but est "d'organiser et de garantir la baisse des pensions", afin de rendre obligatoire le recours à des retraites privées. On peut citer la Fondation Copernic ou bien ATTAC pour des analyses plus précises. Le nouveau système sera très complexe, très injuste, et réduira très sensiblement les pensions pour la majorité des salariés.
Après deux années de pseudo concertations et d'hésitations, notamment après l'épisode des "gilets jaunes", le gouvernement vient de décider de passer en force, s'il le faut par la violence, et de faire voter le texte de loi début 2020.
L'opinion publique est partagée en trois parties à peu près égales :
- Un premier tiers qui a compris la nature de la "réforme", qui veut la combattre et qui se mobilise.
- Un deuxième tiers qui s'interroge et s'inquiète, et qui est prêt à rejoindre la mobilisation.
- Enfin une partie de la population qui accepte et soutient la réforme Delevoye, parce qu'ils pensent que leurs revenus et leur patrimoine les mettent à l'abri du besoin lorsqu'ils cesseront de travailler.
Néanmoins, l'opinion générale admets que la "réforme" Delevoye produira deux effets :
- le montant des pensions va diminuer et il faudra travailler plus longtemps pour les percevoir.
- le recours à des retraites privées va devenir une nécessité, ce qui est précisément le but de la "réforme".
Tel est l'état des lieux en cette fin d'année. Le slogan "plutôt quelques jours de galère qu'une retraite dans la misère" résume bien l'état d'esprit de ceux qui ont commencé à lutter contre la "réforme" Delevoye. Ils sont nombreux. Néanmoins la méthode de lutte est inefficace.
Actuellement la "lutte" est menée par une vague intersyndicale qui regroupe des opposants au système de retraite à points et des partisans (sic) de la "réforme" Delevoye. Pour ces derniers la mobilisation de leurs adhérents les oblige à "faire semblant" de combattre la "réforme". (CFDT, UNSA ..)
Selon une tactique déjà expérimentée en 2003, leur protestation cessera dès que le gouvernement proposera une "avancée", réelle ou fictive. Ce qui permettra de rompre ce soi-disant "front syndical" qui n'a jamais existé !
De plus, les syndicats mènent la "lutte" en reprenant la tactique des "temps forts" qui s'est révélée perdante en 2003, 2010, 2016, 2018, et qui sera également perdante en 2019 et 2020. Il s'agit davantage d'une gesticulation bien controlée plutôt que d'un réel combat pour faire reculer le gouvernement.
Ainsi on parlera de "la généralisation des grèves" mais pas question d'organiser et de coordonner une grève générale et le blocage du pays. C'est une protestation "soft" en quelque sorte.
Or l'exemple des "gilets jaunes" a bien montré que la seule façon d'obtenir des résultats c'est la mobilisation massive, permanente et active. En se limitant à la répétition de manifestations traîne-savates, accompagnées de grèves sectorielles isolées, le combat est bien mal engagé.
Cette absence de combativité des dirigeants syndicaux doit être corrélée avec le fait que le gouvernement a promis aux syndicats des postes juteux dans la gouvernance du nouveau système de retraite. Ce qui est une catastrophe sociale pour les salariés peut donc se révéler nettement plus avantageux pour les permanents syndicaux !
La stratégie syndicale consiste donc à gérer le mouvement de protestation pendant quelques mois afin de satisfaire ses adhérents sans indisposer sérieusement le gouvernement. Jusqu'au vote de la loi début 2020.
Dès maintenant il faut choisir. On ne peut pas négocier la destruction de notre système de retraite, qui est parfaitement équilibré jusqu'en 2070 dès lors que l'on supprime les innombrables exonérations de cotisations sociales. (Le seul CICE c'est juste 40 Mds en 2018, soit 10 fois le déficit des retraites !!)
La seule stratégie raisonnable c'est d'engager une lutte déterminée jusqu'au retrait de la réforme Delevoye !
Ce qui suppose d'employer des méthodes de luttes plus efficaces, notamment :
- Faire adopter largement une revendication unique, "retrait immédiat du projet Delevoye", afin de rassembler la majorité des salariés et de contrer les tentatives de division du gouvernement qui invite à des "négociations" bidons.
- Organiser des collectifs locaux, par entreprises, par quartiers, par affinités, chaque fois que c'est possible et les coordonner par des AG régulières.
Ce mode d'organisation permet d'inclure les syndicats qui participeront aux décisions collectives qui seront votées le plus démocratiquement possible.
- Organiser une campagne massive d'information sur la réalité de la "réforme" Delevoye, à partir des documents connus, puisque le texte de la loi n'est pas divulgué par le gouvernement, et en s'appuyant sur les analyses d'Attac, Copernic, et d'intellectuels progressistes.
- Accompagner la campagne d'information par la mise en place de caisses de grève, locales ou nationales, pour soutenir les salariés en grève qui ont déjà quelques semaines de mobilisation. En complément des caisses syndicales.
Cette liste de propositions n'étant nullement exhaustive. Tout procédé, de préférence non violent, qui parviendra effectivement à rassembler les salariés et à mettre en difficulté le gouvernement est souhaitable.
On peut aussi utiliser avantageusement les méthodes militantes d'antan : intervention sur les marchés, diffusion de tracts aux sorties d'usines et de bureaux, dans les centre commerciaux, prospecter les immeubles étages par étages ... Bref tout sauf la passivité et le suivisme derrière les manifs plan-plan des syndicats.
Cela ne garantit pas le succès mais les chances de réussite seront bien meilleures. Bien qu'à mon avis il suffirait de bloquer le pays quelques jours et de résister suffisamment aux actes de violences du gouvernement pour obtenir la victoire.
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