Au-delà du réel...
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On ne cesse d’entendre ou de lire - et dernièrement ici même ce qui est la raison de cet article - que les idées de « la gauche radicale », de « l’extrême gauche », de « la gauche de gauche » sont utopiques et « se heurtent au réel », « sont rattrapées par le réel » ou que cette gauche « croit pouvoir s’affranchir du réel »...
Se pose - ou, devrait se poser - alors la question suivante : qu’englobent ces définitions du réel ?
La gauche (la vraie, la communarde, l’émancipatrice, la révolutionnaire - armée ou pas d’ailleurs -, la progressiste, l’anticonformiste, etc.) y met... les lois de la physique, de la chimie, de l’astrophysique, etc. (en tout cas les phénomènes et les « lois » que les véritables sciences essaient de comprendre et de coucher sur le papier). Bref, la nature et son fonctionnement, tout ce qui est immuable, tout ce que l’homme ne peut dominer (bien que certains croient tout de même y parvenir... avec les conséquences que l’on sait...), tout ce qui fonctionnait avant et qui fonctionnera après l’humanité. Ou comme le dit le TLFI, le réel c’est ce « qui existe d’une manière autonome, qui n’est pas un produit de la pensée ».
Point !
D’où, pour les personnes ayant cette définition du réel l’immense boulevard ouvert pour l’imagination, l’élaboration, la création de la société... imagination qui n’a donc QUE ces limites "naturelles". Avec une telle conception, vous imaginez toutes les sociétés possibles (bonnes et mauvaises) ?
La société n’est que ce que l’homme en fait !
A cette conception-là du réel, s’opposent plusieurs autres conceptions, toutes plus larges (et paradoxalement plus étriquées) les unes que les autres.
Dans ces visions (pour ne pas dire ces mirages) du "réel" chacun y rajoute qui du capitalisme, qui de l’économie de marché, qui de la libre concurrence, qui de la hiérarchie (sociale ou pas), qui de la mondialisation (des échanges, s’entend), qui de l’indépassabilité de la nation, etc., réduisant à chaque fois le nombre de sociétés potentiellement élaborables à partir de la définition du "réel" qui en résulte.
On rajoute à chaque fois au réel un ou plusieurs « produit[s] de la pensée » !... qui par définition n’est pas quelque chose d’immuable, pas quelque chose faisant partie du réel et on la place vite dans ce sanctuaire afin de ne pas avoir à y réfléchir à nouveau, à y porter une vision critique a posteriori, et ce bien que l’Histoire nous ait montré que tout ce qui fut créé par l’homme ne fut pas à chaque fois (et loin s’en faut) une "bonne" chose (la liste étant trop longue, je laisse à chacun le soin de la faire)...
On reproche donc à cette gauche radicale (Oh le vilain mot !) de croire qu’elle peut s’affranchir du réel, sauf que je n’ai jamais entendu aucun de ses "membres" proclamer qu’il fallait que la pluie cesse de tomber les jours impairs, ou qu’il fallait que la Terre arrête de tourner autour du Soleil, ou encore qu’il fallait apprendre à manger des cailloux (et ce bien que certains l’aient cependant appris... à leurs dépens... en Mai-68... notamment) !
NON !
Que disent-ils ? (du moins, certains...)
Que le capitalisme n’est pas immuable, qu’il est destructeur aussi bien socialement qu’écologiquement et que par conséquent - et comme ceci n’est qu’une invention humaine - il faut la remplacer par une autre.
Que la libre concurrence, ce qui sous-entend un grand nombre de producteurs/fournisseurs/créateurs/cultivateurs, si elle n’est pas contrôlée (oh ! un autre gros mot) dérive inexorablement vers la création d’oligopoles voire de monopoles qui sont plus que néfastes pour le peuple (lorsqu’ils ne rendent pas un service public).
Que les différences de salaires et/ou de revenus si elles peuvent exister car relevant d’un choix (« Travailler plus pour gagner plus » OU « Ne plus ou moins travailler pour y gagner plus ») et/ou de l’impact sur l’espérance de vie du travailleur (et non d’une hiérarchie soi-disant nécessaire et généralement anti-démocratique) ne doivent aucunement permettre l’obtention d’un pouvoir sur la société (comme l’ont les Arnault, Dassault, Lagardère, Bouygues, Pinault, etc.), mais seulement la possibilité d’acheter plus de biens. Et que, ceci n’étant pas le cas, il faut diminuer drastiquement les écarts de salaires entre les plus riches et les plus pauvres et instaurer un Revenu Maximum Autorisé à fixer démocratiquement.
Que la finalité de l’homme n’est pas d’être un rouage productif de la grande machine à consommer/polluer/aliéner/décérébrer, mais bien de penser, de réfléchir, de philosopher, de construire, de créer, d’aimer... bref que le travail n’est pas une valeur !... ou de manière plus imagée que le but de l’homme n’est pas de devenir une fourmi !
Etc.
Etc.
Etc.
Rien d’irréel donc pour ceux qui ont une vision qui n’est pas restreinte...
Séparons donc clairement et définitivement le réel des « produit[s] de la pensée » et que chacun réalise qu’être de gauche radicale c’est « croire »... NON, c’est SAVOIR que l’on PEUT s’affranchir des « produit[s] de la pensée » à l’origine de cette société - dans laquelle la joie, le bien-être (réel), le plaisir de vivre, la liberté ne seront bientôt plus que l’apanage d’une minorité.
Il ne tient donc qu’à nous d’ôter nos oeillères et de créer une société plus juste, plus humaine, plus humaniste.
Rêvons,
créons, changeons, améliorons la société !
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