Au diable la presse étrangère ! La Mauritanie ne mérite pas cette image…
Après l’étiquette de premier pays au monde producteur et consommateur d’esclaves après un procès sans appel, voilà que la Mauritanie est devenue aussi le pays de la peine de mort contre un jeune sans trop que l’on sache ce qu’il dénonce exactement sinon un ordre social préhistorique. La presse étrangère qui a abandonné à son sort ce jeune militant forgeron pendant un an ! le découvre tout d’un coup ! Toute cette presse d’investigation ânonne les premières dépêches de l’AFP sur le sujet.
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L300xH520/arabe-3-13dd3.jpg)
Alors que les textes du condamné sont disponibles en ligne en français et en arabe depuis le début de l’affaire car ils n’ont été retirés que des sites arabophones, un peu de googlage eût suffi pour le découvrir, les premières dépêches de l’AFP racontent en gros , dans un formidable condensé de désinformation, que suite à un article retiré, qui parut quelque temps sur les sites de Mauritanie, un jeune a été arrêté et poursuivi pour apostasie alors qu’il dit qu’il dénonce un ordre social inique. Il s’est repenti à son procès mais cela n’a pas suffi et il s’est évanoui à l’énoncé du verdict à savoir la condamnation à mort. Ensuite scènes de joie à Nouadhibou et à Nouakchott.
Cela a été repris et répété partout avec pour unique nuance le nouvelobs qui cite le président du premier parti d’opposition, Jemil Ould Mansour, déclarant à propos du jeune que « c’est un criminel qui n’a eu que ce qu’il mérite ». Le journal rajoute que ce Jemil est l’une des rares personnalités à oser s’exprimer sur le sujet. C’est dire dans quel bain de terreur nous sommes en Mauritanie islamique.
Pas un ne dira à ses lecteurs qui sont les zouayas ( marabouts) et pourquoi le jeune militant les attaque. Pas un n’ira citer la petite dernière lettre du jeune où il fait une mise au point pour rappeler que nul ne respecte le prophète Psl plus que lui et où il donne les raisons de son combat contre les zouayas uniquement. C’était trop demander à cette presse aussi lamentable que gonflée.
Depuis un an, il est arrêté, cette presse avait largement le temps d’expliquer son cas vu qu’il s’agit d’un jeune militant qui défend une cause. Personne ne s’est occupé de son cas ni à l’intérieur de la Mauritanie ni à l’extérieur sauf quelques citoyens bien impuissants face à la machine de désinformation pourtant l’affaire est très grave. Une affaire d’état qui a remué l’ordre social, détruit une famille, ruiné la vie d’un jeune dans le silence assourdissant de la quasi-totalité des intellectuels mauritaniens sans parler de la fuite en rang dispersé de l’ordre national des avocats.
Pendant un an, quelques citoyens, pour garder une trace de la vérité, ont essayé de faire connaître ses écrits en arabe et en français sans que cela n’interpelle nullement la grande presse étrangère ni même le haut-commissariat onusien des droits de l’homme qui vint à Rosso enquêter à propos de Birame fraîchement arrêté sous le coup de chefs d’accusation mineurs.
Birame ! Birame ! Qui ne risque rien de sérieux et rien pour ce jeune forgeron qui appartient à une classe sociale autrement méprisée et marginalisée que les hratines car ceux qui appartiennent à cette classe subissent dès l’enfance toutes formes de terribles légendes les traitant de gens maudits, de juifs etc. Des faux hadiths auraient été même inventés pour encore plus les conditionner. Nul ne peut imaginer ce que c’est que d’être forgeron en Mauritanie surtout quand on est éduqué.
Aussi, il ne faut pas s’étonner qu’un jeune ingénieur de son état, issu d’une famille de lettrés où l’on trouve des savants, son père étant préfet de la république au moment des faits, ait eu les ressors intellectuels pour briser le poids social sur ses épaules. Il a écrit pour dire à ses frères forgerons qu’il n’y a pas de caste en religion ; il l’a écrit avec la maladresse de la jeunesse traumatisée par un ordre social implacable.
Nul ne peut aussi imaginer ce que c’est dans l’imaginaire des zouayas, d’entendre un jeune forgeron oser non seulement les attaquer en les présentant comme des manipulateurs de l’islam mais en plus citer des auteurs pour se servir de faits présentés hâtivement de travers par l’auteur impliquant un jugement du prophète PSL pour justifier que les zouayas aient ensuite fait passer leurs intérêts de classe avant ceux des autres croyants. C’est vraiment une décharge électrique dans l’imaginaire des marabouts.
Si l’Etat mauritanien ne l’avait pas arrêté, il aurait très certainement été tué dans un mouvement de foule orienté comme l’effet tsunamique du tremblement de terre que son audace a provoqué dans l’inconscient des zouayas.
A la différence de Birame, ou des minorités ethniques qui se réunissent en groupes pour défendre les intérêts des leurs, le jeune forgeron n’a pas reçu le soutien d’un quelconque mouvement de forgerons. Au contraire, il a été renié de partout, sa femme l’a quitté sous le coup de la pression sociale. Ce fut vraiment un moment de terreur comme la Mauritanie n’en a pas connu depuis longtemps et comme les maures eux-mêmes n’en ont pas connu car personne n’a cherché à défendre le jeune malgré sa mise au point quand il a compris qu’il allait servir de bouc émissaire à une affaire politique qui le dépasse.
Il faut se souvenir que tout cela se passait bien avant que l’Arabie Saoudite ne déclare les frères musulmans terroristes comme tous ceux qui les soutiendraient. Ce qui anesthésia du jour au lendemain le mouvement en Mauritanie.
Pendant un an, personne ne s’est soucié du jeune ni de son combat. Tous ceux qui se lèvent aujourd’hui à l’étranger pour parler de lui, l’ont laissé croupir en prison un an ! Ce qui prouve que son cas ne les intéresse pas, ce qui les intéresse c’est présenter la Mauritanie comme une république islamique qui condamne à mort un jeune pour apostasie.
C’est vraiment lamentable.
Beaucoup d’opposants au régime trouvent un irresponsable plaisir à voir le régime indexé par la presse étrangère occidentale mais ils se trompent. Ce n’est pas l’occident ni l’extérieur qui sauvera la Mauritanie face à l’obscurantisme mais les mauritaniens eux-mêmes. Si les intellectuels et les religieux de bonne foi continuent à démissionner, c’est terminé. La presse étrangère pourra présenter la Mauritanie comme une république islamique arriérée cela ne changera rien ! Bien au contraire ! Après la résolution de notre assemblée nationale contre le parlement européen, cela ne va que souder les ignorants et les égarés autour des fanatiques xénophobes qui iront intimider le pouvoir qui jusqu'à présent n'a donné aucun signe de résistance face à ces pressions.
De l’extérieur les opposants pourront être contents mais nous de l’intérieur, nous vivrons dans une atmosphère plus invivable que jamais.
L’extérieur peut soutenir une résistance intérieure, des forces du progrès contre les forces du refus mais l’extérieur, surtout étranger, ne fera pas le travail à la place des mauritaniens.
C’est aujourd’hui plus que jamais, que la société civile mauritanienne doit prendre ses responsabilités en risquant quelque chose comme en Tunisie et ailleurs contre les illuminés qui la menace avec leur armée d’égarés et c’est au pouvoir de protéger les forces du progrès sinon nous sommes partis pour une longue nuit dans la misère et les ténèbres…
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