Au pied du mur : l’expérience d’un chantier international
Deux Ukrainiennes, deux Espagnoles, un Vénézuélien, quatre Français, un Italien, une Japonaise, deux Coréens (du Sud quelle question !), une Russe, une Slovaque, une Turque et un Bangladais.
Un muret à construire.
Trois semaines.
Tels sont les ingrédients pour résumer ce qu’on appelle communément un chantier international.
Récit de vacances pas comme les autres :
Nous sommes le Samedi 31 Juillet 2010. Il est environ 16h quand mon train en provenance de la gare de l’Est à Paris arrive en gare de Vesoul. J’ai encore deux heures à attendre avant le rendez-vous fixé à 18h. L’attente est assez longue, surtout pour moi qui ne suis jamais trop confiant avant une expérience nouvelle, dont je ne sais pas grand chose. Je sais seulement que je vais participer à la construction d’un muret dans un petit village de Haute-Saône avec une quinzaine de volontaires étrangers. Mais ça a été assez pour me motiver à m’inscrire. Je suis nerveux donc, mais c’est normal.
18h20, j’ai déjà fait la connaissance de Violeta, une Espagnole des Iles Canaries. Me voyant seul à attendre, elle a présumé que j’attendais pour la même chose qu’elle. Se joint à nous quelques minutes plus tard Isil, arrivant tout droit de Turquie. Nous somme maintenant trois à attendre devant la gare. A 18h30 enfin, on vient nous chercher. C’est un Italien (Marcello, 23 ans, co-animateur du chantier) qui est venu, accompagné de deux jeunes du villages (Rémi et Ludovic). Une fois les valises dans le coffre, en route pour le village qui nous accueille.
Vingt minutes plus tard, nous y voici. C’est la mairie du village d’Esprels (qui héberge aussi l’école privée) qui nous servira de base, pour manger et dormir.
Les premières minutes avec le groupe sont assez chaotiques. Dans ma tête résonne des : " Qu’est-ce que tu fous là ? Tu pouvais pas rester chez toi devant l’ordi au lieu de venir ici ? ". Je fais la connaissance un par un des autres volontaires. Ce n’est visiblement pas assez pour me sentir plus à l’aise. La préparation du premier repas du soir permet à tout le monde de parler, de mieux se connaître.
La soirée sera assez courte, tout le monde un peu fatigué, les lits de camp installés dans une grande salle de la mairie seront vite remplis : le voyage a été très long pour beaucoup.
Premier jour, le Dimanche. Le réveil est assez tardif pour tout le monde : 11h voir midi. On prend notre petit-déjeuner dans un silence assez communicatif. Mais rapidement, l’atmosphère se détend. Les langues se délient, la bonne humeur s’installe.
A 14h, la réunion de début de chantier débute. Mélanie (22 ans, Française et seconde co-animatrice du chantier) et Marcello, dans une bonne humeur à toute épreuve, nous explique le déroulement des trois semaines que nous allons passer ensemble. Des petits jeux pour la présentation de chaque volontaire entrecoupent la réunion.
Nous allons donc construire un muret. Au près d’un ruisseau et de l’école publique, il servira sans doute à la protection des enfants. Nous avons trois semaines pour construire le mur. Deux si le travail est fait assez rapidement. Nous travaillerons de 7h30 le matin jusqu’à 14h. L’après-midi sera consacré, soit au repos (et c’est ce qui sera principalement le cas) soit aux activités.
Le reste de l’après-midi sert à faire encore plus connaissance avec les volontaires. Pour ma part, c’est d’abord avec Pedro le Vénézuélien et ensuite Darina l’Ukrainienne que le contact se fera le mieux. Politique, littérature, on parle un peu de tout. Pour ma part, je suis surpris qu’une Ukrainienne connaisse autant de choses sur la France (Frédéric Beigbeder, Louis de Funès, Pierre Richard et tant d’autres), tandis qu’elle est surprise de me voir connaître des auteurs comme Tolstoï ou Dostoïevski. Bref, les échanges sont riches, c’est l’occasion d’apprendre des choses. " Finalement, c’était peut-être pas une mauvaise idée de venir " remplace la peur des premières minutes.
Lundi, 7h. Le premier réveil est assez dur. Le temps pluvieux à l’éxterieur n’est pas là pour nous motiver à aller travailler. Mais c’est le premier jour, il serait de mauvais ton de commencer à faire la tête.
Le petit-déjeuner avalé, les habits de travail enfilés, il est déjà 7h30. Le temps d’aller chercher les outils au local de la mairie, il faut déjà aller sur le chantier. Situé à vingt mètres de la mairie, le trajet n’est pas ce qui sera le plus pénible.
Tailler des pierres, placer les pierres selon des consignes assez strictes, faire du mortier, couler le mortier, re-régler les pierres. Voilà ce qui sera la routine de travail pendant les jours de travail. Nous finirons le mur le Jeudi 19 Août. Un peu moins de trois semaines.
Nous travaillons du Lundi au Vendredi. L’après-midi, c’est repos. Tout le monde fait la sieste, seuls quelques volontaires, dont je fais partie, restent éveillés. C’est l’occasion d’aller se promener en forêt, d’échanger, etc...
Le week-end, et certaines après-midi, c’est visites et sorties. Nous aurons le droit à : Besançon et sa citadelle, Vesoul, le chateau d’Oricourt, du canoë, Ronchamp et sa chapelle Notre Dame du Haut, la maison de la Négritude et des Droits de l’Homme, etc...
Mais l’expérience ne se résume pas seulement à la construction du mur et les visites. Un chantier international, c’est d’abord la vie en communauté. D’abord entre volontaires. Venus d’horizons différents, de confessions différentes, la vie en groupe n’est pas simple. Il faut s’habituer aux autres, toujours agir en considération de leur présence. C’est nous par exemple qui devons faire la cuisine : trois volontaires par jour, qui ne vont pas sur le chantier, mais restent à préparer le petit-déjeuner, le déjeuner et le dîner. En plus de la vaisselle et du ménage, ce n’est pas moins fatiguant que le chantier en lui-même. Pas de porc pour les musulmans, pas d’oignons pour les allergiques, ce n’est vraiment pas simple. Chacun doit faire des efforts.
Et puis c’est aussi une relation avec les habitants du village. Esprels, petit village de Haute-Saône comptant environ 700 habitants. On a été prévenu dès le début : les douches, chez l’habitant ! En plus de certains repas chez l’habitant et des lessives, " the local population " comme on aura l’habitude de les appeler (la langue la plus usitée pendant le chantier étant bien entendu l’anglais) sera assez solicitée. Ce qui me permettra de découvrir les gens les plus accueillants qu’il m’a été donné de rencontrer. " Vous venez prendre votre douche ? Bien sûr, entrez ! Vous voulez boire quelque chose ? ", l’accueil est toujours chaleureux.
Le soir, à la mairie (notre quartier général), c’est le maire en personne, Michel Richard qui nous apporte de quoi faire la fête. Toujours présent, il a été un des moteurs du chantier. Tous les soirs, on a le droit à la visite de certains habitants, qui doivent prendre plaisir à venir avec nous : ils viennent à chaque fois !
Entre travail, repos, visites et fêtes, les trois semaines passent donc en un éclair. Il est déjà temps de faire ses adieux, aux autres volontaires, mais aussi au mur et aux habitants.
Un au revoir plus qu’un adieu, on l’éspère tous. On repart avec les coordonnées de tout le monde. La promesse de se revoir semble indestructible. Deux couples se sont formés pendant les trois semaines, une véritable vie s’était mise en place. Le départ est assez déchirant pour tout le monde. Les larmes coulent sur le visage de tout le monde : volontaires, animateurs. Même le maire est venu pour nous dire au revoir. On a pas envie de partir, et pourtant...
Samedi 21 Août. Le voyage pour revenir semble interminable. Le retour à la solitude apparaît comme un choc brutal et insurmontable. Pourtant, la vie étudiante va reprendre pour la plupart d’entre nous début Septembre.
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