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Accueil du site > Tribune Libre > Au Portugal aussi, cela « ruisselle » à l’envers

Au Portugal aussi, cela « ruisselle » à l’envers

Dans la théorie ultralibérale, la thèse du " ruissellement " postule que l'enrichissement des plus riches est vertueux parce qu'il profite aussi à l'ensemble de la société et notamment aux plus pauvres. Les plus riches seraient ainsi les principaux promoteurs de l'activité économique. Dans ces conditions, qu'ils bénéficient de la plus grosse part de l'accroissement de richesse serait à la fois juste et efficace, dès lors que les autres composantes de la société y trouveraient aussi leur intérêt fut-il minime.

Il y aurait beaucoup à dire sur ce privilège d'office accordé au capital sur le travail.

Admettons cependant qu'il y ait une part de vérité dans tout cela. Encore faudrait-il que les riches en question soient de véritables entrepreneurs et que leur fibre sociale ne soit pas trop émoussée !

Or, l'une des caractéristiques de la période actuelle est que les fortunes se font plus aujourd'hui sur la spéculation que sur la véritable activité économique.

En outre, le partage du gâteau n'est plus seulement inégal (beaucoup pour quelques-uns et un peu pour beaucoup). La part des riches, qui croit, se nourrit désormais de la part des pauvres, qui décroit.

Un récent écho du Monde.fr (29 novembre 2013) nous en donne une nouvelle illustration : 

" 16 %. C'est la hausse de la fortune des 25 personnes les plus riches du Portugal en 2013, atteignant, malgré la crise, 16,7 milliards d'euros, selon le palmarès annuel publié jeudi par le magazine Exame. (...) les 25 plus grosses fortunes détiennent désormais l'équivalent de 10 % du PIB, contre 8,4 % en 2012. "Même en temps de crise, les grosses fortunes continuent à s'accroître", a commenté le magazine portugais, qui attribue cet enrichissement à des gains en Bourse alors que l'activité industrielle a baissé. L'homme le plus riche du Portugal, l'homme d'affaires Americo Amorim, 79 ans, a vu sa fortune plus que doubler en un an, à 4,5 milliards d'euros, grâce à l'envolée des titres du groupe qui porte son nom, premier producteur mondial de bouchons en liège, et du pétrolier Galp Energia. "

Attention cependant ! On voit que ces accroissements de fortune sont en grande partie "potentiels" car les valorisations boursières sont sujettes à fluctuations, parfois brutales. Qu'une nouvelle " bulle " crève et l'on se rendra une nouvelle fois compte qu'il ne faut pas se laisser abuser par certaines gonflettes financières.

Tout cela est donc non seulement injuste mais aussi néfaste pour le système économique, car générateur de risques, de soubresauts, de réactions en chaîne incontrôlables ... bref, de crises qui en sapent les fondations.

www.citoyensunisdeurope.eu


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14 réactions à cet article    


  • pidgin 2 décembre 2013 10:33

    D’ailleurs, ce phénomène de « ruissellement » à l’envers auquel fait référence l’auteur a été théorisé, à partir de l’exemple états-unien, par Joseph Stiglitz, prix Nobel d’Économie en 2001, économiste en chef de la Banque Mondiale jusqu’en 2000, dans son livre « Le prix de l’inégalité » (2012).


    • scripta manent scripta manent 2 décembre 2013 11:06

      Oui, et le titre même de ce dernier ouvrage de Joseph Stiglitz - « Le prix de l’inégalité » - appelle bien l’attention sur l’absurdité d’un système qui glorifie et revendique la « croissance », tout en enlevant à une part croissante de la population la possibilité d’y contribuer, en développant sa consommation ou, tout simplement, en ayant les moyens de subsister.
      Henry Ford avait compris cette équation lorsqu’il disait : « Je paie mes ouvriers pour qu’ils m’achètent mes voitures ». Cynique, mais réaliste !


    • philippe913 2 décembre 2013 11:09

      vous ne démontrez absolument rien.

      Vous dites, avec justesse, que la richesse de ces ultra riches n’est que potentielle, découlant de la valeur des titres qu’ils possèdent, mais en disant que leur fortune a augmenté de 16% en 2013, vous oubliez les années précédentes. Il serait peut être plus juste d’aller voir de combien elle avait fondu depuis 2007.

      Et enfin, ça n’est pas simplement parce que le cours d’action progresse que cette somme est retirée de la poche des petites gens (dont je fais partie).


      • scripta manent scripta manent 2 décembre 2013 11:39

        Mon objectif ici n’est pas de démontrer. Il est de donner une nouvelle illustration d’un phénomène connu et bien documenté. Les inégalités de revenus et de patrimoines, qui avaient eu tendance à diminuer entre le début du XXème siècle et les années 70 (destructions dues aux guerres, effets de l’inflation, politiques sociales) ont repris leur envol depuis la mise en oeuvre de la « mondialisation ultralibérale ».
        Vous pourrez consulter sur ce point cette série d’articles : http://www.citoyensunisdeurope.eu/pauvrete-richesse-revenus-et-patrimoines-f67/
        Parmi lesquels une étude instructive de l’OCDE (que l’on ne pourra pas taxer de gauchisme ...) : « Les inégalités et la pauvreté augmentent alors que les plus défavorisés sont les plus touchés par la crise »
        Tout cela est tellement vrai que l’on voit maintenant des tenants du libéralisme pur et dur réclamer un retour à la raison car ils craignent une implosion du système.
        Pour ceux qui n’aiment pas les statistiques, on peut aussi se contenter de regarder autour de soi : une industrie du luxe qui n’a jamais été aussi prospère, à un moment où les organisations de secours aux plus démunis n’ont jamais été aussi mobilisées.
        Contrairement à vous, je pense que la pure spéculation financière, lorsqu’elle est, comme aujourd’hui, à peu près libérée de toute entrave, « prend de l’argent dans la poche des petites gens », parce qu’elle détourne les capitaux des investissements productifs et d’avenir et parce qu’elle génère des crises qui perturbent l’ensemble du système économique : faillites (ou sauvetages coûteux pour les finances publiques), chômage, pression sur les bas salaires, ... 


      • Pepe de Bienvenida (alternatif) 2 décembre 2013 11:49

        Ce transfert de richesse vers les rentiers existe aussi en France (voir Olivier Berruyer). Le mécanisme généralisé de la dette en est le moteur principal.



          • philippe913 2 décembre 2013 13:40

            les tenants du libéralisme pur et dur préconisent de laisser s’effondrer les sociétés financières en faillite, pas de réguler plus.
            La prise en compte du risque et le fait s’assumer les conséquences d’une erreurs par les acteurs économiques est une régulation, une entrave, normalement bien suffisante.
            Je vous rappelle que la crise des subprimes vient :
            1- de l’avidité des différents intervenants financiers pour le pognon, certes,
            2- et, pour faire simple, de l’Etat américain qui a enlevé toute notion de risque dans l’octroi des crédits, incitant les organismes financiers à faire n’importe quoi, sachant qu’ils avaient la garantie étatique.

            Donc maintenant, il faut se poser la question de pourquoi et comment, selon vous, la finance détourne les capitaux des secteurs productifs, pour les envoyer où, alors que justement, c’est normalement le rôle de la finance d’aiguiller ces capitaux vers les secteurs le plus productifs et rentables.
            que s’est il passé pour en arriver là ?


            • scripta manent scripta manent 2 décembre 2013 14:31

              Oui, c’est une bonne question : que s’est-il passé pour en arriver là ?
              Je me risque à quelques explications.
              Le contexte général est la mise en oeuvre d’une philosophie économique et sociale dite « ultralibérale », théorisée aux USA dans les années 70/80 et propulsée dans le réel par le fait, dans un 1er temps, de Ronald Reagan et Margaret Thatcher.
              La prospérité des USA et l’échec des régimes communistes ont contribué à convaincre la planète que là était le chemin et que la seule règle devait être de ne pas en avoir.
              D’où une dérégulation étatique mais aussi internationale qui a libéré les mouvements de capitaux, avec des forces de frappe considérables (notamment : fonds de pension et fonds souverains des pays bénéficiant de la manne pétrolière).
              Le financement des entreprises qui était, pour l’essentiel, entre les mains des banques a été confié aux « marchés ». La durée moyenne de détention d’une action, qui s’exprimait en mois, voire en années, il y a une cinquantaine d’années, s’exprime désormais en secondes.
              Les rendements recherchés, qui étaient de l’ordre de 2 à 3 % + l’inflation auparavant (compatible avec l’économie réelle), sont passés à 20 ou 30 % (insoutenable dans la durée), avec des cycles de plus en plus courts.
              De l’époque des entrepreneurs (qui n’étaient pas forcément des anges mais qui calculaient souvent à long terme), on est passé au couple infernal : actionnaires spéculateurs / dirigeants mercenaires, financièrement incités à faire cracher la bête. 
              (je parle là surtout des grandes entreprises, qui font le plus gros de l’activité économique).
              Et nous voila dans l’économie casino, qui nous promène de bulles en bulles ...
              A ce jeu, il y en a qui gagnent et il y en a qui perdent mais, globalement, les riches s’enrichissent parce que le consensus est qu’il faut peser sur le mal nommé « coût du travail ».
              Et je ne m’étends pas sur les aspects éthiques et environnementaux.
              Pour quelque chose d’un peu plus substantiel :

              http://www.citoyensunisdeurope.eu/notes-du-portail-f69/la-course-a-la-competitivite-ou-panurge-au-pouvoir-merkel-austerite-protectionnisme-libre-echange-mondialisation-pascal-lamy-omc-world-policy-conference-t425.html

               


            • lois-economiques lois-economiques 2 décembre 2013 19:11

              Si vous voulez comprendre comment la société a basculé progressivement dans un système médiéval, où the rich and the rest je vous conseille d’aller sur le wiki de mon site http://lois-économiques.fr/ ou tout est expliqué.


              Extrait de mon ouvrage :

              En secourant continuellement les banques mécaniquement, on sauve les épargnants, l’argent non détruit va un peu plus enrichir les systèmes riches. On se retrouve dans la situation que nous avons décrite au paragraphe 5.3.3 pour le scénario 1, c’est-à-dire une économie qui fonctionne de plus en plus qu’avec le système riche, ce que l’on peut résumer par les mots : « The rich and the rest » en reprenant le titre de The Economist dans un numéro spécial de janvier 2011 concerné aux élites mondialisées[1].


              [1] Pour avoir une idée de ce qu’est ce type d’économie où la classe moyenne a quasiment disparue, il suffit d’aller se promener dans la Silicon Valley (Californie) où elle est en œuvre. Ainsi d’un coté nous avons : « De magnifiques maisons (les styles à la mode en ce moment Château de la Loire et villa méditerranéenne), des maisons qui valent des millions, que leurs propriétaires dissimulent derrière des murs de briques et de petites forêts » et à quelques encablures « Une forte proportion de migrants, légaux et illégaux. Les maisons sont un peu déglinguées, des chiens au bout de chaînes, des voitures sur les pelouses abîmées. Tous ces gens vivent de travaux effectués dans les grandes maisons des milliardaires : ils font les jardins, entretiennent les piscines, font le ménage, s’occupent des enfants, réparent le toit ou la plomberie. Maitres et serviteurs ». C’est « Le devenir médiéval de l’Amérique numérique  », de Xavier Laporte dans « Ce qui nous arrive sur la Toile » sur France culture, diffusé le mercredi 27 novembre 2013 et réécoutable (une version écrite existe également) en podcast. 


            • scripta manent scripta manent 2 décembre 2013 20:13

              A lois-economiques

              Sur « The rich and the rest » :

              Article paru sur « The Economist » du 17 octobre 2012, sur la question du développement des inégalités aux USA.
              On y constate notamment l’effet du développement de la finance spéculative. Indépendamment du creusement de l’écart entre les riches et les pauvres, on y découvre que les dirigeants des 25 plus grands hedge-funds gagnent plus que l’ensemble des dirigeants des 500 sociétés industrielles et commerciales cotées au Standard and Poors !

              Pour accéder à l’article :
              http://www.citoyensunisdeurope.eu/pauvrete-richesse-revenus-et-patrimoines-f67/aux-usa-the-rich-and-the-rest-the-economist-inegalites-t377.html

            • lois-economiques lois-economiques 2 décembre 2013 20:46

              @scripta manent

              La référence que j’ai donné concerne un autre article du the économist dont le lien est : http://www.economist.com/node/17959590

            • philippe913 7 décembre 2013 10:42

              ce qui n’explique pas votre assertion selon laquelle la finance détourner les capitaux.
              La finance qui spécule sur des secondes sur les marchés n’a que faire, ou pas loin, de la réalité de la vie de la société et ne lui demande rien.
              L’investisseur à long terme, oui, et c’est lui le vrai propriétaire actionnaire qui a un pouvoir aux ag, et il ne demandera jamais 20 ou 30 %.


            • spartacus spartacus 2 décembre 2013 17:49

              C’est amusant votre texte, puisque dans l’énoncée vous avez votre réponse. 

              les valorisations boursières sont sujettes à fluctuations, parfois brutales

              La valeur de richesse n’a de valeur que le jour ou elle est vendue !
              Ce ne sont que des valorisations fictives. Dans un monde de destruction créatrice, il y a des flux et des reflux.

              Par contre ça ne change pas la convoitise des gauchistes. Toujours à envier l’argent des autres faute de savoir travailler pour créer la richesse.




              • lois-economiques lois-economiques 2 décembre 2013 19:38

                Les riches sont des voleurs que qu’avait bien analysé John Ruskin[1] 


                « L’économie marchande n’est que : l’art de devenir riche en maintenant son voisin dans la pauvreté et il n’y a rien dans l’histoire d’aussi déshonorant pour l’intelligence humaine que cette idée moderne selon laquelle l’injonction commerciale "achetez au meilleur marché et vendez au plus cher" puisse représenter un principe valable d’économie nationale. Car pourquoi une chose est-elle bon marché ? Tout simplement parce que le producteur recourt sans vergogne à la forme commerciale du vol qui consiste à tirer profit du dénuement d’un homme pour obtenir son travail ou ses biens à prix réduit."


                [1] Ecrivain, poète, peintre et critique d’art britannique (1819 – 1900).

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