Aveugles et sourds
Le monde m’echappe, j’en ai conscience. Je ne comprends pas toujours tout même si je pose beaucoup de questions. j’essaie d’avoir une conscience de moi et de ce qui m’entoure, de m’en servir dans ma vie, mais j’ai l’impression que la conscience de l’Homme n’est qu’un concept car notre monde est tout simplement inconscient et incompréhensible pour qui cherche des réponses à ses questions.
Comment faites-vous tous pour garder les yeux à ce point fermés ?
Comment faites-vous tous pour rester sourds et aveugles à ce qui se passe ici, là, près de vous, et là-bas, très loin de vous, partout, tout le temps, tous les jours, toutes les secondes ?
Comment faites-vous pour ignorer ce que nous sommes devenus ?
Ces bêtes immondes sans morale, sans valeurs, sans respect, sans amour, nous tuant, violant, massacrant, torturant, enfermant, condamnant nos enfants et notre Terre nourricière.
Comment faites-vous pour ne pas pleurer chaque soir comme je le fais devant les informations, qui même si elles nous informent peu de ce qui se passe réellement dans le monde ne nous en montrent pas moins ses images incompréhensibles de corps morts que nous avons pris l’habitude de voir chaque jour pour mieux les oublier.
Comment faites-vous pour vivre dans ce monde sans être torturés de doutes et de questions, comment faites-vous pour vous lever chaque matin en n’étant pas sûr de rentrer chez vous puisque le monde est devenu tellement dingue que vous pouvez au choix sauter dans le métro à cause d’une bombe, vous retrouver sous les roues d’un chauffard en traversant sur les clous, vous faire agresser dans la rue, et même chez vous, êtes-vous si sûr d’être en sécurité ?
Comment faites-vous pour ne pas avoir un peu plus peur chaque jour du monde que nous avons créé, ce monde ou plus rien ne nous résiste, ni la nature, ni les animaux, ni nos enfants, ni notre conscience ? Que nous reste-t-il aujourd’hui dont nous puissions être fiers en tant qu’êtres humains ? Sommes-nous même encore des humains ou sommes-nous redevenus des bêtes ? Sincèrement ? Trouvez-vous que l’homme soit réellement un être évolué ?
Petite fourmi perdue au milieu des fourmis, je me perds un peu plus chaque jour dans ce monde incompréhensible d’horreur, je n’arrive même plus à en voir la beauté tellement l’abjecte attitude de l’homme a fini par noircir tout ce qui l’entourait. Nature dévastée, pillée, brûlée, transformée ; animaux torturés de toutes les manières possibles et imaginables, par les labos, par les groupes fournissant notre nourriture, par l’exploitation humaine, par la destruction de leur habitat, et très souvent pour le simple plaisir puisque l’homme n’a plus de compassion. Enfants du monde exploités, violés, tués, utilisés comme simple marchandise. Nous faisons subir au monde et à nous-mêmes des horreurs dont nous ne voulons pas prendre conscience en nous disant : « oui mais à mon niveau que puis-je y faire ? », et nous retournons à notre petite vie puisque nous ne pouvons rien faire et que nous ne sommes pas responsables.
Alors pourquoi est-ce que je me sens si coupable ? Pourquoi est-ce que je ne peux pas m’empêcher de m’en vouloir de ce que nous faisons, nous tous, collectivement, à l’échelle mondiale en tant qu’êtres humains ? Pourquoi je n’arrive pas moi aussi à me sentir la conscience tranquille ? Comment faites-vous ? Dites-moi par pitié. Mais ai-je bien raison d’implorer la pitié dans un monde où ce mot n’a plus aucun sens, ne veut plus rien dire ? Moi même qui parle je me retrouve perdu à ne pas savoir quoi acheter lorsque je fais mes courses, car même en essayant d’être consciente de l’impact que j’ai, je dois aussi faire en fonction de mon porte-monnaie et n’ai donc pas toujours les moyens de faire ce qu’il faudrait. Puis même lorsque je crois faire un bon choix, j’apprends que telle marque exploite des enfants dans tel pays, et là je me trouve à avoir participé sans le savoir à ce crime. Je dois d’ailleurs sans le savoir avoir participé à beaucoup de crimes, vous aussi, vous avez sans nul doute dû dévaster quelque forêts sans le savoir non plus.
J’ai beau tourner le problème dans ma tête je ne trouve jamais d’issue, car c’est vrai qu’à notre niveau, que pouvons-nous faire ? Lorsque l’on est salarié et qu’on n’a pas sa vie à consacrer au militantisme, lorsque l’on gagne juste de quoi vivre et payer les factures mais pas assez pour pouvoir donner plus que quelques euros et un sourire au SDF en bas de chez soi, lorsqu’on a beau s’informer des conditions de fabrication de ce que l’on mange et ce que l’on porte mais qu’on finit toujours par avoir le doute « suis-je vraiment sûre de ne pas me faire avoir ? »
Comment faire lorsque le monde tout autour de vous est complètement dingue et que vous vous sentez vraiment moins que rien d’en faire partie sans pouvoir le changer ?
Ma seule solution a été d’imprimer ce mot pour partager ma peine avec vous, vous dire que si vous aussi vous vous sentez triste de regarder sans pouvoir agir car vous ne savez même pas par où commencer dans tout ce bordel, et bien vous n’êtes pas tout seul(e). Je suis là aussi à pleurer ce monde, à me dire que c’est vraiment plus que triste de nous voir tous devenir si fous, de nous voir perdre chaque seconde un peu plus ce qui faisait de nous des êtres de conscience, de réflexion, d’intelligence, de savoir et surtout d’amour.
J’ai l’impression que ce monde en manque cruellement d’amour, comme si tout allait trop vite pour pouvoir vraiment aimer, aimer nos proches, nos voisins, nous aimer nous -êmes surtout. On finit par ne naître que pour mourir, nous n’avons plus d’idéal, on se contente de se lever le matin pour aller travailler et ramener de l’argent pour payer tout ce que nous possédons ou voulons posséder, et on finit par oublier que nous ne sommes pas nés pour posséder mais pour vivre. Car la vie n’est que l’espace entre la naissance et la mort, quelle que soit notre religion, nos croyances ou non-croyances, on ne peut nier cela, on ne sait rien de ce qu’il y a avant ou après la vie, mais par contre on sait que l’on est en vie, et même si on l’oublie il faut avoir conscience de ce fait extraordinaire que nous n’arrivons pas à expliquer, nous venons au monde et nous mourons, pleins de choses peuvent se passer entre ces deux instants tout comme l’instant qui les sépare peut être très court. On ne peut jamais vraiment prévoir quand cela va nous tomber dessus ni pourquoi ni comment, c’est une totale surprise et c’est peut-être parce que nous ne voulons pas admettre que nous allons mourir un jour sans avoir plus de réponse qu’en arrivant, sans savoir pourquoi nous sommes là, comment nous sommes arrivés là et ce que nous sommes venus y faire, c’est peut-être pour oublier ces questions si obsédantes que nous nous abrutissons un peu plus tous les jours dans notre travail, à regarder la télé et à faire les magasins, pour oublier que nous sommes mortels et que nous ne savons pas ce que nous devons faire de cette vie.
J’ai ouvert les yeux, je me suis regardée à l’intérieur et j’ai regardé le monde à l’extérieur, j’ai vu que le monde entrait en moi mais que j’avais peu de force pour entrer en lui. Mais si nous ouvrons les yeux à plusieurs, si nous réveillons notre conscience, si nous redevenons des êtres humains pour arrêter de n’être que des troupeaux d’êtres humains, si nous essayons de retrouver un peu d’estime pour nous-mêmes et surtout beaucoup de respect pour ce qui nous entourent, peut être avons-nous encore une chance de ne pas sombrer totalement, car, ce n’est que ma vision, mais les crimes perpétrés par l’homme depuis le XXe siècle, à tous les niveaux (humains, animal, végétal) ont dépassé de loin toutes les horreurs des siècles précédents, et ce tout simplement parce que nous sommes de plus en plus nombreux à perpétrer ces crimes.
J’ai perdu l’espoir mais je suis toujours en vie, aussi voici mon témoignage pour au moins l’avoir dit.
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