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Accueil du site > Tribune Libre > Benoît, Clinton, Tiger, Milgram et… La Boétie

Benoît, Clinton, Tiger, Milgram et… La Boétie

L’actualité nous gâte à l’heure actuelle avec les éruptions naturelles, sociales et médiatiques. Signe des temps ou temps des signes :)

 Je me suis toujours intéressé au comportement humain et naturellement ses excès. Comme tout un chacun je me suis posé la question, en apprenant l’existence de la seconde guerre mondiale, ses chambres à gaz, la shoah et autres atrocités, puis toutes les guerres (militaires, civiles, religieuses, idéologiques ou économiques) et toute l’ingéniosité humaine à détruire l’existence de ses semblables, des motivations de ce dernier. Celles des dirigeants me paraissaient plus ou moins évidentes. Envie de pouvoir, envie d’argent, envie de sentir libre en emprisonnant les autres dans les rais de leurs propres désirs. Le comportement de leurs cours, leurs suivants, leurs collaborateurs, Milgram et Arendt me les ont quelques peu éclairés par leurs lumières. La banalité du mal, la poursuite sur une ligne amorale du commandement des puissants … Un autre chercheur américain, du nom de Philip Zimbardo, psychologue à l’université de Stanford a porté un peu plus loin ces expériences avec celle de la prison de Stanford (voir : The Lucifer Effect de Philip Zimbardo chez l’éditeur Random House pour les anglophones). Cette expérience consistait à explorer les effets du pouvoir de tout un chacun sur l’autre chez des étudiants de bonne famille de l’université de Stanford. Ces étudiants étaient triés en aveugle pour un "jeu de rôle en grandeur nature", où certains jouaient le rôle de gardien de prison et les autres des prisonniers. L’expérience prévue sur un temps long a été écourté à quelques jours étant donné les comportements abusifs du groupe des "gardiens".

"Le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument" (Lord Acton, 1834–1902)

 Des choses qui parfois nous semblent bien éloignées sont bien plus proches, au point de vue du comportement humain.

 La crise de l’église catholique et ses scandales de pédophilie (contrairement à ce que j’ai pu lire ici ou là, ces dérives ne sont pas une spécialité de l’église mais une spécialité ecclésiastique quelle que soit la religion … Etant originaire d’un pays du moyen orient plus connu pour ses démêlés nucléairo-politiques, et ayant travaillé, étant multilingue comme archiviste dans une bibliothèque rattachée à une école formatrice de la caste ecclésiastique, j’ai eu à cataloguer des livres provenant des bibliothèques des anciens du régime monarchique précédent, et j’ai été en contact avec les élèves de cet établissement. Je rassure tous mes coreligionnaires athées ( :-) ), la pédophilie existe partout où règne un pouvoir autocratique). L’effet du pouvoir réel ou illusoire et les débordements du "puissant". Je ne suis, en aucune façon, en train d’excuser en quoi que ce soit le comportement de ces derniers. Tout homme est sujet à ses défauts et ses névroses. Ces derniers proviennent de notre histoire personnelle mâtinés à l’exposition sociétale (professionnelle, politique, médiatique, culturelle et j’en passe). C’est le pouvoir acquis qui détermine le mode de décompensation de ces névroses. Pour un père de famille, ça peut se traduire par un abus physique ou psychologique sur les siens, pour un prêtre sur ses ouailles, pour un sportif sur ses fans, pour un président de la république française… euh… vous voyez ;-)

Comme je l’ai dit précédemment, je ne cherche pas d’excuse à ces comportements qui ont ruiné et ruinent tous les jours la vie de dizaines de milliers de personnes (sinon plus). Ce qui m’intéresse plus, c’est la manière de les empêcher dans le futur. Une des réponses possibles, comme à chaque fois, est la coercition et la judiciarisation. Mais ceci n’empêche malheureusement jamais, ou alors dans des proportions infimes, la répétition de ces problèmes, les vrais déviants relationnels se tournant alors vers les plus faibles et les plus vulnérables de leurs victimes, et vers une dissimulation encore plus grande de leur comportement. Je pense que ce ne sont pas les bourreaux mais les victimes qu’il faut éduquer.

« Soyez donc résolus à ne plus servir et vous serez libres. » (Etienne de La Boétie, 1530-1563, "Discours de la servitude volontaire")

La question est ancienne et la réponse encore plus. Dans ce texte de philosophie politique fondamentale, La Boétie démontre et démonte les origines du pouvoir et de la soumission à ce dernier. Le Discours de la servitude volontaire constitue une remise en cause de la légitimité des gouvernants (et par extrapolation de tout détenteur de pouvoir), que La Boétie appelle « maîtres » ou « tyrans ». Quelle que soit la manière dont un tyran s’est hissé au pouvoir (élections, violence, succession ou dans l’exemple de la société moderne sa situation socio-professionnelle), ce n’est jamais son bon gouvernement qui explique sa domination et le fait que celle-ci perdure. Plus que la peur de la sanction, c’est d’abord l’habitude qu’a le peuple de la servitude qui explique que la domination du maître perdure. Ensuite vient l’idéologie et les superstitions. Mais ces moyens ne permettent de dominer que les ignorants. Vient le « secret de toute domination » : faire participer les dominés à leur domination. Ainsi, le tyran jette des miettes aux courtisans (ça me rappelle des trucs… mais bon ne soyons pas mauvaise langue :-) ). Si le peuple est contraint d’obéir, les courtisans ne doivent pas seulement obéir, mais devancer les désirs du tyran (non, non, je ne parle nullement d’Eric B. ;-) ). Aussi, ils sont encore moins libres que le peuple lui-même, et choisissent volontairement la servitude. Beaucoup s’imaginent que la servitude est forcée, alors qu’elle est toute volontaire. En tout cas c’est ce que la Boétie veut prouver dans son « Discours ». En effet, la question qu’il se pose, touche à l’essence même de la politique : « pourquoi obéit-on ? ». On admet généralement comme allant de soi l’existence d’un pouvoir absolu et on omet de se demander d’où vient l’obéissance. Un homme ne peut asservir un peuple si ce peuple ne s’asservit pas d’abord lui-même. Bien que la violence soit son moyen spécifique, elle seule ne suffit pas à définir l’État. C’est à cause de la légitimité que la société lui accorde que les crimes sont commis. Il suffirait à l’homme de ne plus vouloir servir pour devenir libre ; « Soyez résolus à ne plus servir, et vous voilà libres ». A cet égard la Boétie tente de comprendre pour quelles raisons l’homme a perdu le désir de retrouver sa liberté. (http://fr.wikipedia.org/wiki/Étienne_de_La_Boétie)

Dénoncer l’église, les gouvernements, les tyrans comme dirait La Boétie, ce n’est que légitime, mais plus légitime encore est la découverte des moyens de s’en défaire en rendant les hommes passibles d’un raisonnement indépendant. Bon vu le pouvoir des médias dans le monde actuel, l’unicité de la philosophie mondiale dominante et par extrapolation de l’éducation qu’une telle philosophie inculque aux générations futures, vous me direz que c’est bien mal barré :-P

« Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. »  (Etienne de La Boétie)


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2 réactions à cet article    


  • JoëlP JoëlP 24 avril 2010 12:26

    Article un peu fouillis mais bien intéressant. Pour la plupart des gens, on devrait plutôt dire « tendre vers la liberté ». Il est relativement facile pour La Boétie, fils d’un lieutenant particulier du sénéchal du Périgord et d’une famille de magistrats, qui a grandi dans un milieu éclairé composé de bourgeois cultivés, de ne pas servir et de se rendre libre. II l’est un peu moins pour un fils de paysan misérable.

    Un aspect qui me semble riche de potentiel c’est dans l’affranchissement de la consommation. Il y a beaucoup de liberté à gagner (facilement il me semble) en se libérant des mercantis, du marketing, de la pub qui nous asservit directement et aussi indirectement par la nécessité de bosser pour acheter, donc en général de servir un patron, pour consommer plus. Simplicité volontaire donc.
    Très bien vos interventions sur Onfray.
    http://perino.net/


    • Immyr Immyr 24 avril 2010 12:51

       Cher Joël,

       je vous remercie d’abord pour votre gentillesse.

       Par ailleurs je ne peux qu’être d’accord avec votre commentaire sur la nécessité de la réduction de nos consommations « futiles ». Un excellent mini-documentaire d’animation résume très simplement ces idées : http://www.storyofstuff.com/

       Je suis justement en train de réfléchir sur un article sur la signification du travail, de la liberté et la vie en me basant sur l’écriteau que les nazis déroulaient sur la devanture des camps de concentration, l’ignoble « arbeit macht frei » (le travail rend libre) et de repenser une autre forme de socialisme libertaire pour une société « utopique » future.... !!!! (je suis sur que nous nous en reparlerons)

       Amicalement.
       

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