Bon anniversaire M. le Président !
Après un décollage bling et un trou d’air pschitt, vitesse de croisière pour le commandant Sarkozy. Communiqué de la présidence du 6 mai 2008 : le commandant Sarkozy, son copilote Fillon, son hôtesse en chef Carla et son gouvernement souhaitent aux Français un bon voyage. La destination est à peu près connue. Les passagers sont priés de travailler, être calmes et sourire. Atterrissage dans quatre ans. Puis, nouveau décollage avec le même commandant et son équipage, ou alors quelqu’un d’autre, dans une autre compagnie, Airsocialisme, si vous n’êtes pas satisfaits du service.
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L300xH221/Commandant_Sarkozy-2-5009c.jpg)
Voilà un an que Sarkozy est président. Il ne s’est rien passé en vérité. Devait-il se passer quelque chose ? Non ! Ceux qui ont cru que la France allait se transformer sont-ils des naïfs ? Oui ! Ceux qui sont déçus par Sarkozy méritent-il quelque compassion ? Non ! Sarkozy pouvait-il faire beaucoup de choses ? Non ! Les Français se sont-ils illusionnés sur la politique ? La réponse dépend de chacun. Ceux qui ont cru en la politique se sont illusionnés, les autres, non. Mais les élections de 2007 valaient bien quelque passion. Comme au mondial de foot. D’ailleurs, les présidentielles c’est plus rare que les JO ; tous les cinq ans chez nous. En fait, les élections sont devenues un mélange de pipolisation, de combat de cirque et de nuances sur les valeurs et les programmes. Mais ce ne sont pas des nuances qui peuvent infléchir le cours d’une société, avec comme disait Mitterrand, des forces puissantes que ne peuvent contrôler les politiques. Juste les chevaucher et les canaliser. Actuellement, les forces en présence sont plutôt inertielles. On ne voit pas comment le hussard de la rupture pouvait transformer la société, ni en un an, ni en cinq ans. D’ailleurs, son élection repose sur un malentendu. Ce sont les plus de 70 ans qui ont mis Sarkozy au pouvoir ; la rupture ils s’en tapent. Les vieux paraissaient égoïstes, mais sont souvent généreux Dieu merci pour leurs enfants et leurs petits-enfants. Il sont aussi emprunts d’une sagesse qui aurait, semble-t-il, joué contre Ségolène Royal, cette aventurière narcissique poussée par les médias et franchement approximative pour diriger un pays.
Les médias ont voulu accentuer le côté bling bling d’un président qui s’est prêté de bonne grâce à ce jeu, au début du moins, car après, les signes ostentatoires de luxure ont été jugés incompatibles avec la « laïcité sobriatoire » et le président a dû se voiler. Escapades en jet, mise en scène d’un divorce, d’une liaison amoureuse, d’un troisième mariage. La presse n’a cessé de donner des dépêches et des commentaires politiciens sur des faits sans aucune importance. Cette même presse qui se plaît à lyncher Sarkozy parce qu’il est maintenant très bas dans les sondages. Mais la France avance, elle travaille, elle cherche, elle place ses capitaux, elle gère ses administrations et la roue tourne. Les Français sont pour les réformes c’est certain. Mais à condition que les réformes ce soit pour les autres, et que ça permette d’agrémenter le quotidien de celui qui n’est pas touché par les effets financiers de la réforme. C’est chacun pour soi, une bonne dose d’hypocrisie. Voilà les bases sur lesquelles la société avance. Avec quelques résistances de gauche. Des résistances qu’on ne doit pas mépriser, même si elles semblent vaines et ne fournissent pas les clés d’un monde meilleur. Des résistances nous rappelant quelques valeurs d’humanité qui se sont dissoutes dans ce monde du chacun pour soi, de l’abêtissement médiatique, des fausses religions, de la vénération du fric, des stars, des célébrités qui savent se mettre en scène et jouer la comédie face aux caméras mais qui, dans leur existence individuelle, sont de féroces profiteurs et prédateurs, soucieux de leurs intérêts et indifférents au monde qui crève. Les médias servent le vin de messe pour célébrer le culte des images et les téléspectateurs de boire les paroles de ce vin de messe. La politique ne peut rien faire dans une société plombée par les affects médiatiques. Juste gérer et coller au mieux des préoccupations réelles ou bien artificiellement façonnées par la propagande médiatique.
L’autre jour, Pascal Perineau, politologue, trouvait qu’un an de présidence n’avait servi à rien. C’est presque exact. Un bémol. La présidence ostentatoire a fait gloser, jaser et vendre quelques feuilles. D’ailleurs, Marianne est le journal spécialisé en sarkologie et grâce à son savoir-faire anti-Sarko, il se vend bien. Deux tiers des Français n’apprécient pas la manière de gouverner de Sarkozy ou sa politique, on ne sait plus trop. Si c’est le style, on se demande pourquoi les sondeurs posent cette question. Ce qui compte, ce n’est pas le style mais la politique qui est conduite. Préférez-vous être dans un avion piloté par un charlot qui vous conduira à bon port ou un commandant strict et sérieux qui lors d’un coup de vent, risque de planter l’avion à l’atterrissage ? Les Français n’aiment pas la politique de Sarkozy mais ils apprécient les réformes et en redemandent, or, Sarkozy ne fait que ça, des réformes. Cherchez l’erreur !
Le ton chansonnier et mécréant propre à la France conduit sans doute à évoquer une présidence qui après avoir tant promis, puis tant relui, a fait pschitt. Un an pour rien ! Est-ce si sûr ? Ceux qui ont eu le malheur de perdre leurs parents ont pu faire quelques substantielles économies sur la succession selon les cas. Cela n’a rien changé pour la France. Ceux qui risquent de perdre un hôpital ou un tribunal de proximité devront faire des kilomètres supplémentaires. Ce n’est pas drôle mais on ne va quand même pas tous les jours à l’hosto ou chez le juge. C’est ainsi. Comme quand une ligne TGV ou une autoroute impose une expropriation. Ce n’est pas de chance pour les proprios mal placés. Mais une bonne plus-value est faite pour ceux dont l’appartement est situé près de la nouvelle ligne de tramway. Et la France ne change pas. Les universités ont acquis une autonomie sans qu’on sache ce qu’elles vont en faire. Ceux qui ont été en mesure de faire des heures supplémentaires ont gagné plus. Cela n’a rien changé pour la France. Français Fillon s’est félicité d’avoir déplacé le terrain idéologique des Français vers la droite. Mais ce terrain n’était-il pas déjà ensemencé ?
Après un an et un décollage tonitruant, un envol remarqué, des figures acrobatiques en bling attitude, des trous d’air amples et commentés, la présidence a pris une vitesse de croisière. Sarkozy s’est banalisé. Et la presse s’est bien amusée. Il fait président, avec son style. Sauf accro majeur ou crise économique de grande ampleur, nous voilà embarqués pour quatre ans qui ne vont sans doute rien changer à la France. Juste de la réforme pratiquée comme dans une entreprise, on réorganise la production, la comptabilité, le commercial, le marketing. Une entreprise peut prendre des parts de marché à ses concurrents et même émerger du néant. Mais à une échelle nationale, il n’y a pas de miracle. Tout se moyenne. Avec des entreprises qui sombrent et d’autres qui prospèrent. C’est une illusion de croire que la politique peut amener de la croissance significative. La France fera 1,7 point, ses voisins 1,5 ou 1,9. C’est comme une assurance-vie. L’une fait 4,2 et l’autre 4,5. Ceux qui ont voté pour Sarkozy (et qui ont aussi voté Royal), si ça se trouve, ils ont souscrit une assurance-vie. Comme d’ailleurs M. notre Président et son million et demi placé d’après sa déclaration légale de patrimoine.
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