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BOOMERANG NEWS

Les journaux télévisés m'avaient habitué à une très grande diversité de reportages...

On y trouvait tout et son contraire ;de la lénifiante onction relatant les mésaventures du dernier sabotier de Saint-Junien-le-Chauchet (Creuse) distillée par les entreprises Pernaud &co, aux images choc des attentats terroristes, ressassées ad nauseam par les chaînes « d'information » en continu...

Bref un panel exhaustif de tout ce que le génie journalistique peut inventer pour colmater les quelques espaces de cerveau laissés libres par les spots publicitaires...

Cependant, tous ces reportages avaient un but une raison d'être ; la délivrance d'un message précis...

« Voyez-donc, madame Chombier comme la vie était plus belle avant, quand on portait des sabots faits à la main... » nous susurre Pernaud...

« Saperlipopette, que de beauté virile dégagent ces jeunes gens du RAID dans la fumée de cordite et la brume du petit matin !!! » nous assène BFM TV...

 

Vendredi soir, lors du journal de France 3, j'ai, je crois, découvert, une nouvelle forme de reportage, que faute de dénomination littéraire française précise, j'ai intitulé boomerang news...

La caractéristique principale de ce reportage étant qu'à la fin, les arguments développés reviennent en plein dans la poire de son auteur.

Explications :

Vendredi soir, donc, le gendre idéal chargé de la présentation et dont j'ai complément zappé le nom expose un des contenus du chef-d’œuvre télévisuel à venir :

« Le transport ferroviaire bientôt ouvert à la concurrence en France. En Angleterre, cela fait 20 ans. Mais après des débuts difficiles, le bilan est plutôt positif... » 

Ah damned....Moi qui pensais plutôt le contraire et qui apparemment n'était pas tout seul....

Et commence alors le reportage, truffé de lieux communs et de techniques journalistiques à la con....

D'abord, on nous présente le problème en évoquant le cas de deux bourges parties faire la fête à London depuis leur bled de province et qui apprécient énormément la nouvelle organisation de la ligne qu'elles empruntent. Ca s'appelle prendre le problème par le petit bout de la lorgnette... Lorsqu'on veut juger de l'efficacité d'un système, on commence par le considérer dans sa globalité, et ensuite on passe aux détails. De plus il est malhonnête d'occulter que le train est un moyen de transport de masse et d'aménagement du territoire et pas un capitaine de soirée pour pintades en goguette

Le commentaire nous assure, lui, que la régularité est en hausse partout ( de 77% à 88% en 15 ans) et que 8 usagers sur 10 sont satisfaits du service contre 6 sur 10 en France... Bizarre, Bizarre, un récent sondage (décembre 2016) commandé par l'association we own it évalue à 58% la proportion de Britanniques qui qualifient d'échec la privatisation du rail...

Viennent ensuite, les interviews sur le vif de 3 ou 4 clampins qui vocalisent les louanges appropriées et on passe à l'historique et au bilan....

Et là, la voix off, nous explique, imperturbable,

« qu'au début des années 2000 après la privatisation du rail, les accidents se succèdent ; 53 morts en 4 ans... »

« Des infrastructures en mauvais état, alors le gouvernement a repris à sa charge la maintenance et investit des milliards d'euros(sic !) pour moderniser son réseau...  »

Puis vient l'interview d'une conductrice de train qui confirme, bien entendu, les propos du reportage (je présume que les chemins de fer anglais même privatisés conservent les mêmes règles que leurs homologues européens publics qui interdisent à tout agent de conduite de s'exprimer devant la presse sans l'avis préalable de sa hiérarchie...)

Ah mais attention, les compagnies mettent aussi la main à la poche :

« 44 milliards d'euros (re re sic) entre 2014 et 2019 « 

... Ah ben on peut pas avoir tout gratos quand même... De temps en temps faut quand même payer le personnel.

Ca se termine en apothéose avec l'interview d'un spécialiste qui

 « reconnaît une amélioration aujourd'hui, mais le rail britannique aurait toujours un train de retard sur la France »

Le mec reconnaît que seul 1/3 des lignes sont électrifiées en Angleterre et que la France en compte le double...

Ben ouais, mais alors, tout le présumé pognon déboursé par les compagnies en péage au gouvernement, il a servi à quoi ?

A acheter des chapeaux à la reine mère ?

Last but not least (la vache ! je m'améliore là) à la toute fin, il faut bien parler de la partie la plus sensible de l'affaire, le prix du billet. Et là, matérialisation de la voix off en un jeune homme brun, qui nous apprend que le prix du billet Londres-Manchester est de 169 livres (il a enfin compris qu'il est en Angleterre ?) soit :

« 3 fois plus que le prix d'un trajet Paris-Lyon en TGV à la même heure »

Et de conclure : 

« L’amélioration du rail britannique a donc un prix majoritairement payé par les usagers »

Ben voilà, la privatisation du rail en Angleterre, c'est :

-53 victimes dans des accidents dus au manque d'entretien

-La maintenance reprise à sa charge par le gouvernement et des milliards d'argent public investis pour le seul intérêt des compagnies privées.

-Un prix de billets prohibitif...

 

Du coup, je crois que j'ai retrouvé le nom du mec qui disait :

« Le transport ferroviaire bientôt ouvert à la concurrence en France. En Angleterre, cela fait 20 ans. Mais après des débuts difficiles, le bilan est plutôt positif... » 

Ca serait-y-pas Georges Marchais ???


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lahalle


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