Cessons de soutenir nos maîtres !
On qualifie d'autonome un pouvoir politique qui dirige sans consulter le peuple. C'est présentement le cas en France pour la caste dirigeante élue. Nulle contradiction ici car l'élection, contrairement au référendum, n'est en rien une consultation qui offre l'opportunité au peuple votant de diriger, ni même de participer à la direction. C'est rigoureusement l'inverse puisque cette procédure organise le transfert - et donc la dépossession - du pouvoir individuel de chaque citoyen au profit d'un membre de la caste dirigeante. Et s'il y a bien un choix, c'est celui, pitoyable, de choisir son maître. On pourrait accepter la description qu'en fait la propagande institutionnelle, l'élection en tant que noble établissement d'un mandat d'agir, si ce mandat était associé à quelque manière de contrôle des agissements du mandataire ou si la fréquence rapprochée des élections de même nature était telle qu'elle ferait office de contrôle à posteriori.
C'est donc un peu gêné aux entournures, moralement parlant, que le pouvoir s'exerce et ses détenteurs perçoivent fort bien leur déjà fragile légitimité s'effriter à vue d’œil. Car la légitimité d'exercer un pouvoir n'a rien à voir avec l'acte légal qui l'autorise. La légitimité, c'est le soutien du peuple. Elle disparaît dès l'instant que ce peuple, source de tout pouvoir, redéfini sans l'aide des législateurs ce qui est désormais légal. Cette éventualité, plus ou moins brutale, n'est peut-être pas si éloignée, et les candidats aux élections le seront de plus en plus à leurs risques et périls. Si l'on suit La Boétie qui l'écrivait en 1549, et sauf à utiliser la force pour se maintenir, - ce qui est loin d'être exclu -, ce pouvoir restera en place tant que le soutien du peuple durera. Or on peut raisonnablement penser que les abstentionnistes de longue date, les non-inscrits sur la liste électorale, - entre 7 et 10 % de la population en âge de voter -, et tous les dégoûtés de cette organisation social-politique (la pseudo-démocratie capitaliste) mais qui votent encore faute de pouvoir échapper à leur dressage citoyen, constituent une majorité qui ne soutient plus. Pourquoi dure-t-il alors ? C'est qu'heureusement la procédure élective peut produire des élus, jusqu'à une participation réduite à un électeur votant, ce qui offre l'immense avantage de se passer du soutien du peuple.
Gageons qu'avant ce stade du scrutin à un votant, l'éventualité précitée - le peuple qui redéfinit les règles du jeu plus ou moins brutalement - se sera réalisée. Elle se sera réalisée, car le peuple abstentionniste aura pris conscience qu'il n'est plus cette masse tantôt majoritaire, tantôt minoritaire, plus ou moins en équilibre avec les votants et qu'il est devenu très forte majorité, celle qui autorise à dire « ça suffit » sans avoir peur d'être désavoué par le premier venu.
Nous n'y sommes pas encore mais nous sommes sur la bonne voie.
Ces élections européennes semblent être un parfait terrain d'entraînement pour une entrée en dissidence électorale, nous libérant ainsi de cette injonction de voter (d'élire) que la propagande institutionnelle a réussi à nous faire accepter comme un devoir. (Un devoir ne discute pas. Ne pas l'honorer est une faute morale). Notre devoir de citoyen n'est pas celui de soutenir un pouvoir qui nie le peuple, mais bien celui de cesser de participer aux rites électifs de légitimation jusqu'à l’avènement d'une démocratie véritable. Ce premier pas séditieux effectué, les suivants pour les élections nationales seront plus aisés. C'est bien de cela qu'il s'agit car les pouvoirs français ou européen sont rigoureusement de même nature, le second se situant cependant à un niveau de déficit démocratique plus élevé, celui d'une institution politique se confondant avec un immense lobby.
Il nous faut désormais nous opposer radicalement aux élites dirigeantes politiques et économiques car nous ne pouvons plus longtemps nous laisser insulter en permanence par ceux qui privilégient les intérêts marchands aux intérêts supérieurs de la société. L'objectif n'est pas chasser les présentes pour en installer d'autres qui seraient plus vertueuses. L'objectif c'est de changer de système politique, d'en construire un nouveau, au service du peuple et dirigé par lui-même avec éventuellement une représentation minimale et sous contrôle.
Cessons donc d'absorber la propagande aristocratique éculée de l'immaturité du peuple. Soyons confiants dans notre capacité collective à nous diriger, avec plus de responsabilité que ne le font ces élites orgueilleuses et ignorantes.
Votons pour l'abstention générale.
Soyons tous dissidents le 25 mai.
Voir aussi :
Pour une abstention générale
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/pour-une-abstention-generale-146554
Misère du vote blanc … et de l'élection
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/misere-du-vote-blanc-et-de-l-146763
S'abstenir à moitié, est-ce bien raisonnable ?
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/s-abstenir-a-moitie-est-ce-bien-147115
La meilleur façon de soutenir le fascisme renaissant
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-meilleure-facon-de-soutenir-le-148449
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