Cette fois-ci, Thomas Piketty s’attelle à une très grosse affaire...
Evaluer le rendement d’un capital en refusant de prendre en compte le capital fixe (et peut-être même le circulant).
Voici Thomas Piketty d'abord affairé dans l'infiniment petit :
« Par exemple, considérons un capital (bureaux, équipe-ments, machines) d'une valeur de 5 millions d'euros, et réalisant une production annuelle de 1 million d'euros, qui se partage entre 600.000 euros de masse salariale et 400.000 euros de profits. » (Idem, page 97.)
Observons le contenu de cette première phrase...
Nous constatons que chez Thomas Piketty, la production annuelle (1 million d'euros) est constituée uniquement de revenus : salaires (600.000 euros) et profits (400.000 euros). C'est bien ce qu'il a affirmé dès le début : tout doit se ramener à des revenus.
Rappelons maintenant que salaires et profits correspondent au seul temps de travail réalisé dans les marchandises produites. Si la somme des salaires et des profits (1 million d'euros) est dite former la production annuelle, le capital fixe lui-même ne se retrouve même pas pour un euro dans celle-ci... Il y a donc un capital de 5 millions qui a disparu des opérations de production...
Faut-il s'en étonner ? Non, puisque Thomas Piketty a décidé de ne tenir aucun compte de la dépréciation du capital fixe... Mais pourquoi, alors, a-t-il trouvé bon de nous parler tout de même d'un capital fixe ("bureaux, équipements, machines") dont la valeur s'établirait à 5 millions, et qui n'apporte strictement rien à la production annuelle qui, elle, ne serait formée que de revenus ?
Lisons la suite :
« Le rapport capital/production de cette société est β = 5 (son capital représente l'équivalent de cinq années de production), la part du capital dans sa production est α = 40 %, et le taux de rendement de son capital est r = 8 %. » (Idem, page 97.)
Soudainement, pour calculer β, il faut réintroduire le capital fixe de cinq millions (fixe, puisque - répétons-le - les cinq millions d'euros ne nous ont toujours été présentés que comme représentant les "bureaux, équipements, machines") et le diviser par une production dans laquelle il n'intervient pas même pour un euro... Cinq millions divisés par un million, cela donne bien à β la valeur 5. Mais il s'agit d'une division qui rattache, l'un à l'autre, deux éléments qui n'ont pas le moindre rapport...
Nous voici revenus à cette production totale de 1 million. Le capital fixe (et même le capital circulant) ayant été annulé par l'opération du saint-esprit, cette production n'est que le total des revenus (salaires et profits). Ces derniers étant (par hypothèse, et rien que par hypothèse) de 400.000 euros, leur part dans la production (dont la valeur ne se rattache en rien au capital fixe) est indubitablement de 40 %. C'est ce que Thomas Piketty appelle α. Donc α = 40 %, comme il l'écrit bravement. Ensuite la première loi fondamentale de ce capita-lisme foireux triomphe. Si α = r x β, r = α/β, d'où r = 0,4/5, et donc r = 0,08 ou encore r = 8 %. Il n'écrit rien d'autre. Bravo, Thomas.
La démonstration est faite : chacun de ces éléments ne vaut strictement rien. C'est mélanger des carottes avec des roues de bicyclette pour fabriquer des poires.
Pour être bien certain de s'enfoncer complètement, il nous fournit une note à rallonge qui s'achève sur ceci qui est une confirmation de la désinvolture avec laquelle il exclut le capital du capital pour calculer le taux de rendement du capital :
« Nous nous référons ici à la valeur ajoutée nette de la dépréciation du capital (c'est-à-dire après avoir retiré les coûts liés à l'usure du capital et des équipements) et aux profits nets de dépréciation. » (Idem, page 97.)
Or, Thomas Piketty se comprend lui-même si peu qu'il se permet dès la page suivante d'aborder une question qui n'est plus du tout à sa portée :
« Certains secteurs sont plus intensifs en capital que d'autres - la métallurgie et l'énergie sont plus intensives en capital que le textile ou l'agroalimentaire, et l'industrie est plus intensive que les services. » (Idem, page 98.)
Pas touche, Thomas, ça c'est du capital fixe (et peut-être même circulant) : tu vas te faire mal.
Michel J. Cuny
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