Ceux qui s’égarent
Franchement, on se demande bien pourquoi elle persiste à s’agiter, cette poignée de contestataires anti-déchéance, anti-sécuritaire, anti-unité-nationale.
Sur la constitutionnalisation de la déchéance de nationalité, d’abord. N’ont-ils pas compris que cette mesure serait extrêmement limitée, voire inapplicable, et qu’il n’était donc pas utile de crier au loup ? N’ont-ils pas saisi qu’elle était essentiellement symbolique, puisqu’existant déjà dans notre droit ? Certains pinaillent qu’on détourne la Constitution pour inscrire une disposition qui ne relève pas d’elle : et alors ? Tout le monde sait bien qu’à l’heure de l’intégration européenne, la Constitution n’a plus rien d’un texte suprême, qu’elle se réduit à une sorte de règlement intérieur puisque l’Etat lui-même évolue vers un rôle de collectivité intermédiaire chargée d’administrer sans décider. Franchement, autant que ce torchon serve au moins à quelque chose d’utile ! D’autres objectent que, si cette mesure n’a pas de sens, mobiliser le Congrès pour l’inscrire dans le marbre n’est pas nécessaire. Mais qui a dit qu’elle n’avait pas de sens ? Elle est utile pour rassurer, pour tranquilliser, pour faire croire. Elle est pour le peuple qui manque de capacité de compréhension, pas pour ceux qui ont déjà compris. Les intellectuels-bobos-raisonneurs sont-ils le peuple ? Alors qu’ils se taisent !
Sur l’Etat d’urgence, ensuite. Faut-il encore le répéter ? Nous sommes en guerre, une guerre totale, mondiale, universelle et absolue. Une guerre de civilisation. Pourquoi se préoccuper du droit et de la liberté quand c’est le droit et la liberté qu’on veut tuer ? À quoi bon s’attacher aux conséquences quand c’est l’action qui importe ? La volonté de séparer le détail de l’essentiel, la partie du tout, est absurde quand prévaut l’urgence, puisque, justement, l’urgence fond le détail dans l’essentiel, la partie dans le tout, et les amalgame en un seul bloc. S’opposer à une telle évidence n’est que du moralisme inconséquent, « du juridisme » comme l’a dit notre premier ministre qui est lui-même un bloc. Il y a une centaine d’année, un autre au même poste l’a bien résumé pour couper court aux chicaniers : « je fais la guerre, je fais toujours la guerre ! » Certains ne manqueront pas de pratiquer une misérable rationalisation comptable en objectant que les dommages humains de la Grande guerre ne sont pas comparables à ceux des attentats de 2015. Notre premier ministre, lui, ne comptabilise pas : il fait la guerre !
Sur l’unité nationale, enfin. C’est pourtant simple : en sonnant le clairon, le pouvoir fait barrage au Front National. À la barbarie de Daech d’abord, bien sûr, mais soyons clairs : si aucun nouvel attentat n’a lieu, ce sera grâce à l’état d’urgence, et si de nouveaux attentats surviennent, ce sera malgré l’état d’urgence. L’état d’urgence est donc le seul pare-balle du pouvoir actuel, dont le maintien est aussi la meilleure protection contre le Front National. CQFD : le pouvoir actuel incarne aujourd’hui à lui tout seul tout à la fois : la République, la démocratie, la gauche et la droite, la civilisation... Éblouissante évidence !
La menace commande désormais. Les esprits forts que la peur n’a pas gagnés et qui refusent cette vérité sont irresponsables et dangereux. (Si vous n’avez pas compris ce qui était écrit au-dessus, contentez-vous de répéter cette dernière phrase jusqu’à mémorisation complète).
(Et si vous n’avez toujours pas compris, vous pouvez lire cette synthèse.)
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