Charlie Hebdo - Le crash !
Des événements bien plus tragiques que des caricatures blessantes sont notre quotidien. La mort rôde et fauche des vies partout. Mais comment ne pas comprendre que certaines caricatures puissent outrer, et fort logiquement d'abord dans le pays le plus concerné par le drame.
Suite à l'explosion en plein vol de l'A321 russe dans le Sinaï, qui a fait 224 victimes. La publication par Charlie Hebdo de deux dessins a provoqué des réactions parfois violentes. Mais à chacun sa perception des limites à se donner, dans sa liberté d'expression. En France, les "Je suis Charlie" où les "Je suis pas Charlie" vont pouvoir encore polémiquer sur le sujet. C'est cela aussi la liberté d'expression.
RT, porte-voix du porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, déclare que la Russie ne déposerait pas plainte contre ces caricatures jugées « blasphématoires ». Des dessins qui selon lui, n’ont « rien à voir avec la démocratie ou la liberté d’expression ». Une liberté d’expression à géographie variable dans le monde, puisqu’il n’y a pas qu’en Russie, où Roskomnadzor veille, que Charlie Hebdo n’est pas le bienvenu voire interdit.
Mais si Charlie n'a pas de limite dans la provocation au nom de la liberté d’expression, si l’hebdomadaire qui se revendique comme étant « laïque, athée et démocratique » est considéré par les Russes comme provocateur et blasphémateur. Pourquoi fallait-il en parler dans la presse russe, pourquoi en rajouter encore à la douleur des familles des victimes. Dans ce cas précis et pour la bonne cause, ne valait-il pas mieux faire preuve d'intelligence et se taire.
Et lorsque Alexeï Pouchkov, président de la commission des Affaires Etrangères à la Douma, s’était exclamé « Y a-t-il des limites à la russophobie dans les médias occidentaux ? On pourrait lui rétorquer que la réciproque n’est pas une vue de l’esprit. D'ailleurs lorsque la presse et complice ou otage du pouvoir, comment peut-il en être autrement.
On remarquera également que les excès de langage de certains responsables politiques n'ont rien à envier aux traits gras, parfois méchants, des caricaturistes. Encore que cette déclaration d'Alexeï Pouchkov "Seul un salaud peut encore soutenir Charlie" soit assez mesurée par rapport à cette attaque de Ramzan Kadyrov, le président tchéchène, qui demande la fermeture du journal, car "ces créatures sont des ordures qui n'ont pas le droit d'exister parmi les humain". L'humanité du personnage n'aura échappé à personne.
Suite à ces accusations, Gérard Biard, rédacteur en chef de Charlie Hebdo se défend...
« C’est une manipulation du Kremlin, qui utilise Charlie Hebdo », « Il veulent attirer l’attention sur deux malheureux dessins et créer une polémique qui n’a pas lieu d’être. Cela ressemble à la manipulation habituelle d’un pouvoir totalitaire ».
« Que même les Russes s’y mettent, ce n’est pas nouveau : c’était déjà le cas avec la polémique sur le dessin sur Aylan. Et aussi quand un opposant russe a été abattu devant le Kremlin (Boris Nemstov), ils avaient dit qu’il avait été tué parce qu’il avait soutenu Charlie Hebdo ». « Nous respectons plus de valeurs que le pouvoir russe, comme la démocratie, la laïcité, la liberté d’expression »,
Donc à l’Est comme à l’Ouest, rien de très nouveau, la petite guéguerre propagandiste soutenue par les médias va continuer jusqu’à un problématique apaisement des tensions. En attendant des gens meurent ou quittent les pays en guerre dans un chaos indescriptible. Sans oublier, et ce n’est pas moindre mal, les dégâts collatéraux de la guerre des mots, qui sans doute laisseront longtemps des cicatrices en plein coeur de l’amitié franco-russe.
Existe-t-il encore des "Je suis charlie" en Russie ?
On constatera simplement que le journaliste d'opposition Oleg Kachine, a poussé un coup de gueule contre les "officiels et organes de presse qui expriment leur vindicte contre les caricaturistes français". Mais ne va-t-il pas trop loin lorsqu'il déclare "Si les frères Kouachi n'avait pas décimé la rédaction de Charlie Hebdo en janvier ; il se trouverait sûrement de nombreux patriotes aujourd'hui en Russie pour prendre une mitraillette et en finir avec les blasphémateurs français". Car pour Oleg Kachine, "le blasphème, c'est cette Russie encapuchonnée dans un foulard qui fait les gros yeux.
La liberté d'expression et aussi une arme qui peut tuer. Et si chacun mettait un peu d'eau dans son vin...
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