Cohn-Bendit, un le Pen habillé de vert pour un Front écologiste après le FN ?

Oser comparer Daniel Cohn-Bendit à le Pen est un outrage ; même le plus sulfureux des humoristes, Stéphane Guillon, ne s’y risquerait pas. Pourtant, de nombreuses similitudes existent. Bon, la bienséance eut voulu qu’on compare Dany à Bernard Tapie. Nous avons affaire à trois bêtes de scène, musclés du verbe, altiers, sûr d’eux, avec une règle non dite mais très prisée lorsqu’il s’agit de débattre en politique. Cette règle, c’est envoyer l’adversaire dans le décor. Si bien que peu ne se risquèrent à affronter en direct le Pen. Cela dit, la comparaison porte surtout sur le parallèle tracé entre les écologistes en général et le front national. On trouvera quelques similitudes, notamment dans le fait que le jeu politique se trouve bouleversé pendant un an au moins. Si l’on se place du côté de l’UMP, la stratégie pour rester au pouvoir repose en fait sur un classique. Il faut trouver une force politique assez puissante, disons entre 10 et 15 points, pour affaiblir le principal adversaire et lui pourrir la vie électorale. Ce fut le cas au temps de Mitterrand, quand le Front national « piquait » des voix à droite. Mais la comparaison s’arrête là. Car les positions extrêmes de le Pen, ses provocations, faisaient du FN un parti incompatible pour une alliance nationale. Il n’y eut que quelques accords ayant fonctionné dans de rares régions. La situation des Verts est différente puisque cette force s’avère compatible avec le PS et a même fonctionné au niveau national, lorsque la gauche plurielle fut portée au pouvoir après la dissolution de 1997.

Rappelons que le FN fit une belle percée en 1984 aux européennes puis se vit accorder quelques espaces bien placés dans les médias. Sans y voir aucune malice ni complot, on aura noté la présence de Dany dans les journaux télévisés et les colonnes des nationaux. Il faut dire que Dany est resté ce poupon sympathique, icône de mai 68 et n’a rien du repoussoir que représentait le Pen. Néanmoins, la fabrication de la troisième force est en route. Bayrou entame une traversée du désert sans doute, alors qu’il joua le trouble-fête en 2007. Les analystes pensaient récemment que Besancenot pouvait pourrir le PS en 2012 mais pour l’instant c’est Dany qui est pressenti par les médias. Certes, Verts et PS peuvent s’allier mais l’on sait bien que si ces deux formations s’étripent, le PS pourrait être affaibli et du reste, rien ne dit que les écologistes puissent séduire un électorat qui par « essence » doit revenir à la gauche. Ce sont en effet les classes populaires et moyennes, avec les précaires, que la gauche devrait attirer.

On ne peut éviter de penser que tout ce remue ménage médiatique autour du score, non pas des Verts en tant que formation politique française, mais d’Europe écologie en tant que formation européenne, mérite quelques réflexions sévères. Cet engouement renvoie à un phénomène social très tendance, décelé par le très rusé Sloterdijk. Le score des Verts plaît à certain parce qu’il représente une punition contre le PS. Autant le 21 avril fut perçu avec compassion, autant le jovial Dany s’attire les sympathies alors que le ressort programmatique des écologistes est inconsistant pour ne pas dire vide. Oui, on peut louer Nicolas Hulot lorsqu’il affirme qu’avec le dixième du budget militaire on peut donner à manger au milliard dénutri. Mais c’est un peu court car s’il y a une politique humaniste et planétaire, elle ne peut se faire qu’en gérant la natalité et donc en accompagnant les pays pauvres avec un programme éducatif autant qu’alimentaire. Quant à l’écologisme frenchie, parlons-en.

Une idée comme ça. De mauvaises pensées. Le FN avait comme idéal la reconstitution d’une France pays de Cocagne sans immigrés, avec des valeurs coercitive, bref, le retour au 19ème siècle et la purification culturelle de la France. Des idées qui ne sentent pas bon. L’écologie se veut plus universelle. Il n’est pas question des pollutions culturelles ou communautaires mais des dommages infligés à la nature. L’idéal des Verts et des écolos diffère sur la forme de celui du FN mais dans le principe, on trouve quelques similitudes. Un idéal de pureté. Les électeurs écolos ne sont pas nécessairement des gens d’ouverture ni de cœur. Ils ont leurs lubies et bien des bobos s’en foutent que la société soit éclatée et que l’économie inflige des dommages aux gens. Leur seul pensée va pour la nature et leur intérêt c’est d’engranger des moyens matériels pour une douce et paisible retraite active de senior sur une planète qui ne soit pas trop chaude ni dévastée. Bref, les électeurs de l’écologisme, on n’est pas sûr qu’ils aient plus d’ouverture de cœur et d’esprit que ceux du FN.

Les écolos, pour le dire franchement, ne font pas rêver et ne sont pas plus sexy ni enthousiasmants que les gens du FN. Ce n’est pas avec les écolos qu’on peut espérer un monde plus juste. Même s’il en est quelques-uns éclairés mais qui hélas, ne feront pas l’histoire car la pensée écologiste telle que nous la connaissons est rétrograde et que les Verts sont tout aussi coupés des intellectuels et des créateurs d’idées que les Socialistes. Sale époque dirions-nous !

Les écologistes ne sont pas plus porteurs d’espérance que le FN, ni du reste que le PS, l’UMP ou le NPA. La société française est en panne d’espoir. Mais elle n’est pas en panne de lobbys et de gens cherchant à sauver leurs acquis. Une société en cet état ne peut perdurer sans qu’il ne se produise soit un déclin, une chute, une dégénérescence ou alors une rupture.