Coke en Stock (LXXXVIII) : Chavez, le pétrole, et les avions
Le jet privé est, on le sait, un symbole de richesse actuel, un caprice de star. Nul doute que le système politique d'un Chavez l'exclut directement de l'environnement de ses dirigeants : le socialisme partageur en béret rouge, se prétendant près de "son" peuple, ne vole pas à l'évidence en fauteuil de cuir à 20 000 mètres de haut, Et pourtant : Chavez, comme beaucoup d'autres dirigeants de ce monde, a bel et bien possédé un Airbus 319 personnel... alors qu'il avait à son avènement fait tout un discours "sur ses avions de riches qu'il fallait rendre au peuple". Le discours de 1999 est resté célèbre, mais les avions n'ont jamais quitté leurs propriétaires patronaux. Bien au contraire : les dirigeants politiques vénézuéliens si près du peuple en ont largement profité... jusqu'au jour où un journaliste plus curieux que les autres a fait le bilan des dépenses somptuaires d'un ministre sous Chavez pour aller faire du ski ou visiter la Floride...
Chavez et ses jets
Un article vengeur de mars 2013 de Javier Ortega Figueiral expose crûment cette duplicité de Chavez à propos des jets gouvernementaux : "Voulant donner un exemple suprême de l'empathie avec les gens, Chavez avait souligné que l'un des avions à vendre, était un Gulfstream de la flotte présidentielle qui devrait être le premier à donner l'exemple de l'austérité, symboliser la fin de la corruption en s'en prenant aux "queues décorées" ou siglées des appareils, populairement appelés “colitas en los aviones de PDVSA”, similaire à "viajar de gorra ("casquette", ou "chapeau de voyage")" comme expression. Le Gulfstream présidentiel ne (ex FAV0004) s'est pas vendu il a été envoyé aux États-Unis (en 2006) pour être démoli.
La photo est prise dans le désert de Mojave (c'est le N124TV ; ex suisse HB-IEW) Après cette décision il n'a plus jamais parlé de la vente des avions ni vraiment vérifié les avantages supposés ou réels de ce genre d'action de propagande, parce que juste au registre des aéronefs vénézuéliens, la plupart des appareils de type Falcon 50 ou 900 encore en état de vol sont restés inchangés en propriété et de nouveaux appareils ont même été achetés, ils ont été enregistrés à la fois dans le pays et aux États-Unis au nom de Citgo Petroleum Corporation, la filiale américaine de PDVSA. Pour sa part, l'avion symbolique de la présidence, n'a pas réussi à être vendu, mais a été cédé pour obsolescence et a été détruit dans le désert de Mojave, aux Etats-Unis".
Les avions de CITGO
L'achat du 319, sur un coup de tête. "Loin de suivre la politique d'austérité promise peu de temps avec un achat absolument inattendu en contradiction avec leurs allégations dures contre les dépenses, a été effectué. Lors d'une tournée des pays asiatiques de Chavez, fin 99, le Boeing 737 vétéran de l'Air Force a subi une crevaison et l'Emir du Qatar l'a invité à poursuivre le voyage dans un tout nouveau Airbus 319 CJ "Executive", dans lequel il a aimé volé . Dès qu'il est revenu à Caracas il a négocié avec le constructeur européen pour acquérir un modèle identique à celui du Qatar pour devenir l'avion présidentiel bolivarien, au prix peu austère de 80 millions de dollars, y compris la décoration, le confort VIP, les équipements de transmission et d'autres caractéristiques qui distinguent un avion de ce type de ces homologues commerciaux, tels que sa capacité limitée à seulement 30 personnes, quand le même appareil dans des environnements commerciaux peut emporter 141 passagers"...
L'Airbus de Chavez
L'achat de l'avion, qui est entré en service en 2001 était controversé et critiqué comme inutile et trop coûteux est pourtant resté grâce à la surexploitation qui a été donnée à l'appareil : non seulement le transport de Chávez sur de longues tournées, mais aussi dans des gestes d'amitié, tels que des vols gratuits pour Evo Morales, Daniel Ortega, Alexandre Loukachenko et Mahmoud Ahmadinehejad, plus un certain nombre de personnalités et professionnels cubains, qui ont ainsi volé au Venezuela. L'appareil présidentiel précédent, un Boeing 737-200 n'a pas non plus été vendu mais Chavez en a dit qu'il deviendrait un dispositif populaire utilisé "pour les pauvres pour qu'ils puisse se rendre à des endroits comme Isla Margarita » (sic.), ce qui n'est jamais arrivé." Les « colitas en los aviones » se sont perpétuées, comme toujours, pour quelques-uns. Maduro, lui, a trouvé tout seul une "faille" dans l'aile de l'avion de Chavez, le fameux 319 de luxe... et l'aurait fait révisé "en France" pendant cinq mois à quel coût ?) Mais aurait toujours peur de voler avec. Paranoïa aigûe de sa part ? Le 14 janvier, il déclarait l'avoir "offert" à Conviasa (avec l'aile toujours défectueuse ?)... une réminiscence du discours du 14 septembre 1999 ? En tout cas ; ça s'est mal passé avec Airbus...
Pots de vins au menu, et jet au dessert
Il y en a eu d'autres, ensuite, d'avions. Le montage effectué pour obtenir l'usage de luxueux jets est un grand classique de la dissimulation de pots de vins. Le Venezuela n'y échappe pas, et les généraux étoilés ou "ensoleillés" plutôt, en ont largement profité eux aussi. Des sociétés se sont largement sucrées au passage... "Derwick Associates est une société installée dans les Bermudes dans le domaine de l'électricité et cet entrepreneur a eu beaucoup de succès pour la vente de centrales à des entreprises appartenant à l'Etat vénézuélien. Ces efforts ont attiré l'attention de la presse et, plus récemment, l'ancien ambassadeur américain du Venezuela à Otto Reich, qui a poursuivi deux responsables de Derwick (Pedro Trebbau Lopez” et “Leopoldo Alejandro Betancourt Lopez) pour ingérence alléguée avec les entreprises et de racket, les accusant de corruption également au Venezuela." "Derwick Associates est l'élément clé de ce montage (ici à gauche le jeune président de Derwick Associates, Alejandro Betancourt).
Comme le précise un remarquable article "le mode d'entreprise" de Derwick Associates est simple. De leur port d'attache des opérations aux États-Unis, les gens de Derwick Associates offrent plusieurs millions de dollars de commissions occultes à des fonctionnaires au Venezuela en échange de l'octroi des contrats de construction publiques d'énergie et d'industrie. Une fois que les contrats sont fixés entre eux et Derwick Associates (et finalement lorsque que l'argent est transféré à New York sur des comptes bancaires), les gens de Derwick Associates prennent quelques millions "écrémés sur le dessus", qu'ils déposent dans les banques américaines. Il appellent alors d'autres sociétés américaines en sous-traitance sur le travail réel à effectuer sur site à dont une installée dans le Missouri. Avec ce type de contrats ainsi faits, l'activité principale de Derwick Associates est la corruption continue pour l'obtention de contrats d'énergie, et d'industrie. Tout travail légitime effectué en vertu de ces contrats est effectué par d'autres. Leur stratagème illégal se fait de leurs maisons et bureaux à New York à travers divers agents et à travers leurs entreprises et les relations américaines qui les exécutent." Tiens, tiens : les vénézuéliens n'ont donc jamais tiqué pour se faire embarquer par des avions... texans ? Pour ses contrats avec Petroleos de Venezuela SA (PDVSA Derwick est passé par Bariven, une division de PDVSA (qui aurait été grugée de 70 millions de dollars !). Un avocat lié aux droits de l'homme, Thor Leonardo Halvorssen Mendoza, a poursuivi Derwick et Betancourt, pour avoir dû verser 50 000 000 de dollars à Diosdado Cabello, le président de l'Assemblée Nationale pour pouvoir hériter des contrats (ce que Derwick a nié, bien sûr) : on retombe sur le même et la même méthode !
Un marxisme proche de capitalistes texans !
Parmi les sous-traitants, on trouve, en effet, c'est amusant... des texans. Ainsi au détour d'une recherche internet particulière, on tombe sur une autre entreprise US : "Industrial Ovarb est une société enregistrée au Texas qui a fait des centaines de millions de dollars de ventes à PDVSA, la compagnie pétrolière d'État du Venezuela en 2010, au cours de la première phase de crise de l'électricité actuelle au Venezuela. Ovarb (*) est une société sœur de Tradequip Marine Services,
une société basée dans la banlieue nord de Houston qui fait une majorité des ventes IST à PDVSA. Tradequip a une entreprise vénézuélienne aussi, Tradequip CA. Tradequip, Ovarb, avec une foule d'autres entreprises, sont contrôlées par la famille de Roberto Enrique Fernández Rincón (ici à droite) , un Vénézuélien ayant un manoir à The Woodlands, au Texas (d'une valeur de 5 885 080 de dollars, elle est ici à droite). Son fils, Jose Enrique Rincón Bravo est aussi un acteur majeur dans la société. (Ovarb signifiant Bravo à l'envers). Son beau fils, Ottavio Cautilli, a été utilisé pour vérifier les noms de domaine liés à Ovarb. Je pense que Humberto Roberto Bravo est le beau frère de Roberto. Retour en 2010, avec l'enregistrement de la société Ovarb au nom d'une femme nommée Sara Curphy.
Elle a été inscrite en tant que présidente sur certains documents juridiques et sur le site. César Batiz, un journaliste à El Mundo et aux Dernières Nouvelles à Caracas, a signalé il y a quelques années Ovarb dans son désormais célèbre article, "PDVSA acheté trop cher". Un autre article sous son nom disait que Michael Baker, le mari de Curphy, est également apparu comme nom dans les documents juridiques et des entreprises associées à certaines des sociétés des Rincon. José Berti a fondé une société avec José Roberto Rincón (et selon le journal aujourd'hui disparu 6to Poder, Berti avait également été mêlé à une affaire intéressante avec ses propres affaires). D'autres noms de domaine enregistrés sont liés à Abraham Shiera. Shiera est un homme d'affaires vénézuélien-floridien qui dirige des les entreprises qui vendent des matériaux à PDVSA.
(Il apparaît également dans cette photo Avec Enrique Roberto Rincon.) A noter que Roberto Rincon dispsose d'un jet, le N9GY, inscrit à la FFA sous le nom de Global Air Services Corp ; enregistré...à Wilmington, dans le Delaware. La société a été créée comme une "Foreign For-Profit Corporation" dans l'Etat du Texas on vendredi 15 janvier 2010. Son directeur est Scott Villanueva, mais son "registered agent for the company" s'appelle... Jose Roberto Rincon. L'homme est un des rares pilotes étrangers acceptés par la FAA, selon ses normes récentes plus strictes...
Des avions inscrits au Delaware
"Un point de référence dans l'histoire que je n'avais jamais remarqué - même si elle a été assis-dans un fichier Excel sur mon ordinateur pendant des mois - c'est que Derwick est le propriétaire apparent d'un jet d'affaires Falcon 2000 N229DA comme nombre de queue. Le détenteur déclaré dans la base de données américaine de la FAA est "SCC Trust Co Fiduciaire Du Delaware (...) mais il y a une autre base de données de la FAA, qui montre Derwick Associates au Venezuela sous la rubrique « opname" (je pense que ça veut dire le nom de l'opérateur) pour l'avion N229DA.
Il existe un autre avion, aussi : j'ai une copie de cette même base de données de la FAA de juin qui montre Derwick Associés du Venezuela et sous la rubrique « opname" un Cessna 550 avec le numéro d'immatriculation US N300CS. L'avion a été réinscrit au SCC Trust Co. du Delaware, puis radié aux États-Unis après l'exportation au Venezuela. Cette page le montre au Venezuela avec un nombre inconnu."
De nombreux jets privés, utilisés intensément par les dirigeants politiques
Les avions de PDVSA demeurent nombreux : bien que lors de la campagne 1999 Hugo Chavez avait promis de mettre fin au gaspillage des aéronefs publics à des fins privées et a annoncé la vente de tous les appareils PDVSA (voir notre épisode précédent), cela n'a pas été fait. "Seuls trois appareils ont été vendus. Aujourd'hui PDVSA possède une flotte de 15 avions : avant Chávez il y avait deux avions qui ont rejoint au moins les 13, achetés aupravant entre 2006 et 2011, et le gouvernement est en train de négocier l'achat de sept autres jets Gulfstream", a déclaré l'avocat Joaquin Chaffardet après une étude sur la question des « queues révolutionnaires » et avoir examiné le rapport et les comptes du ministère du Pétrole et des Mines en 2011.
En 2013, le Service d'assistance du transport aérien, SATA, a rapporté l'acquisition d'un Gulfstream III, l'inscription YV2896, (ici à droite) pour 2 895 980 dollars et ont indiqué qu'ils opéraient six aéronefs à voilure fixe et 4 à voilure tournante 4. Il y a 27 avions. Sur ce total, 10 Cesna 206 à 207 modèles ont été donnés à l'armée pour le travail social, Quatre CRJ700, ont été prêtés par PDVSA à Conviasa. Le reste (7 Lear 45XR Jet, deux Falcon 900 EX, et deux Falcon 900 B) sont sous l'utilisation de la direction de PDVSA, et deux Beechcraft1900D (d'une capacité 19 personnes) sont utilisés pour l'exploration et de l'industrie de production (pétrolière). "Les deux Beechcraft 1900D, d'enregistrement YV2862 et YV2861 ne sont pas utilisés à cette fin. Dans les médias de l'aviation privées il est dit qu'ils sont utilisés pour les vols intérieurs des dirigeants PSUV et la gestion moyenne inférieure de PDVSA ", a déclaré Chaffardet en exil.
Le plus beau cas d'espèce : celui de Rafael Ramirez
Mais ils ont souvent été utilisés pour convenances personnelles, dans des proportions assez ahurissantes, à vrai dire. "Le dossier indique que le vol de Citgo du samedi 3 janvier 2000 en Falcon est parti vide de Houston, Texas (où se trouve la raffinerie de Citgo) et a atterri à Maiquetía. Le lendemain, le même avion a quitté le terminal à destination de Houston, au Texas, avec trois passagers : Rafael Ramirez, Beatrice Sanso de Ramirez et Ernesto Ramirez Sanso. Le 4 janvier, la famille Ramirez s'est envolée pour la ville d'Eagle, dans le Colorado, connue pour ses belles montagnes enneigées, et idéale pour la pratique des sports d'hiver. Le Falcon 2000 est revenu vide à sa base. Par la suite, le 10 Janvier un autre avion du même type laissé sans passagers de Houston pour aller à Eagle, où il a emporté la famille Ramirez et est retourné à Houston, seulement pour faire comme de coutume, leur destination finale était Maiquetía, où ils sont arrivés dans les heures avancées de la nuit. Le trajet complet dépassait les 10 000 miles au coût de 94 961 dollars.
Les données révèlent également l'atterrissage de l'avion sur des aéroports dans des États endroits exotiques comme Honolulu, Sydney et Doha, entre autres. C'est le cas du vol affrété le 20 Avril 2009 par le président Alejandro Granado Citgo et son épouse Rosana Delgado Granado, de Fort Lauderdale en Floride, où ils ont eu une résidence dans la capitale du Texas, au siège du bureau de Granado. Quatre jours plus tard, le couple est monté à bord d'un autre F2000 et a couvert un parcours de 3 586 miles (5700 km) de la capitale du Texas vers Honolulu, Hawaii. Le 25 avril, le couple Granado est monté à bord de l'avion de l'Etat vénézuélien, cette fois pour se rendre à Sydney, en Australie, où ils sont restés pendant quatre jours. Le 29 avril, ils sont repartis pour la deuxième plus grande ville d'Australie, Melbourne, et sont restés jusqu'au 2 mai, où ils ont commencé le long voyage de retour à Fort Lauderdale avec les mêmes arrêts inclus. Le voyage de plus de 18 000 miles (29000 km !) couvert par un avion de Citgo, avec équipage et de carburant de la société, à eu un coût de 192 090 dollars. Le rapport du Département de l'aviation montre que la mère de Citgo Granado, María Ravelo Granado, a a aussi utilisé des aéronefs d'État pour se rendre de Barquisimeto à Houston ou Fort Lauderdale.
Entre janvier et août 2009, le président de Citgo s'est rendu 69 fois entre sa résidence de travail au Texas et sa maison de la famille en Floride. Un autre fait encore : Eulogio del Pino, vice-président de PDVSA, est également contenu dans le rapport sur Citgo. Le 23 mars 2009 un avion est parti d'Aruba avec Alessandra del Pino, à destination de Paris. Le 25 mars, Ruben Figuera les a rejoints et ensemble ils ont volé de Paris à Doha, capitale du Qatar. Le lendemain, ils se sont rendus à Bilbao, en Espagne, le 27 mars ils sont retournés à Maiquetía. L'itinéraire entier a coûté 131 750 dollars. PDVSA et Citgo ont coûté au pays 418 801 dollars en 2009 en frais d'avions." Pour couper cours aux insinuations de la presse, Maduro se résigne le 3 septembre 2014 à se passer de Rafael Ramírez comme ministre. Poussé par sa gauche, disent certains, qui trouvaient Ramirez vraiment trop... capitaliste. Pressé par les scandales des dépenses somptuaires du ministre, pour d'autres, étalées dans la presse face aux difficultés de la populace.
Les liens entre les industriels texans, leurs avions, et le régime vénézuélien demeurent surprenants, comme on a pu le voir avec le cas du "poulet" de l'épisode précédent. Avec en philigrane le spectre de la DEA, toujours à l'affût de ce que ces fameux jets peuvent emporter. Une Dea bien plus proche qu'on ne le pensait jusqu'ici des trafiquants, sauf pour ceux qui me lisent depuis des années maintenant...

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