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Accueil du site > Tribune Libre > Coke en stock (XXVI) : Haïti, la chasse gardée des USA

Coke en stock (XXVI) : Haïti, la chasse gardée des USA

 

Et Haïti, dans tout ça, allez vous me dire ? Oh, et bien l’île n’échappe pas à la règle. Avec ses deux petits bateaux de surveillance des côtes, seulement, pensez bien, c’est l’endroit rêvé pour les trafiquants. Deux bateaux seulement pour surveiller 1100 miles de côtes et… à l’intérieur, jusqu’a 29 aérodromes clandestins de comptabilisés dans un rapport de 2009 de l’US State Department. Un vrai porte-avions ! Quand ces fameux avions n’atterrissent pas, ils larguent la drogue au large, parfois juste devant les gardes-côtes US qui les poursuivent… comme dans un film !

Cela commence en effet par une scène digne d’un polar hollywoodien. « Trois hommes costauds portant des lunettes de soleil enveloppantes et des chaînes en or s’appuyaient contre leur SUV à cette frontière, à quleque distance du croisement avec la frontière de la République Dominicaine. Pendant que l’un d’eux murmurait dans un talkie-walkie, quatre policiers haïtiens regardaient en sachant qu’ ils ne plaisantaient pas. Le hayon du SUV a alors été ouvert. Les flics ont ouvert de grand yeux devant le chargement opaque gainé de plastique. Un officier a ramassé un paquet de la taille d’un pain, en évaluant son poids au bout de son avant-bras. Ensuite, la police et le trio orné d’or ont frappé leurs poings en signe de solidarité, ont négocié, et les véhicules sont repartis vers la capitale haïtienne, Port-au- Prince ». Et ainsi finit une saisie de drogue qui n’a donc pas été réalisée… Et voilà comment aussi Haïti surveille les entrées de drogue dans le pays serait-on tenté d’ajouter…

Dans un rapport de 2009 de l’US State Department, le constat est implacable : souvent présenté comme un « porte-avions » américain avancé, Haïti est pourtant bien une plaque tournante incontournable du trafic de la région. « Avions et de bateaux de drogues déversent des envois de cocaïne en provenance de Venezuela et de la Colombie, selon le rapport. La drogue est ensuite emportée à Port-au-Prince ou sur la côte nord, où les cargos la transportent vers l’Europe ou par les Bahamas et la Floride, indique le rapport. Certains prises de cocaïne sont faites à la République dominicaine, qui partage une frontière longue de 220 miles avec Haïti. En 2008, l’armée américaine a détecté 23 vols présumés de drogues à Haïti (46 en 2006) et 91 vers la République dominicaine, et les chiffres sont à la hausse depuis 2006, selon le Département d’Etat ». Mais il y a pire encore comme constatation  : « les routes haïtiennes sont si mauvais que même lorsque les vols sont détectés, la police d’ Haïti ne peut que rarement se rendre sur les sites de débarquement à temps pour attraper les expéditions ». En somme, ne pas chercher à développer une infrastructure routière descente dans le pays… aide les trafiquants ! Beau constat d’impuissance ! A Haïti, les pistes qui servent à l’aide humanitaire comme ici sur le plateau d’Inche, servent aussi aux transfert de drogue. Celui d’Inche étant vraiment symptomatique. Ou celui de l‘Anse-a-Galets (localisée ici). Les avions qui y atterrissent sont du même modèle.

Lors du tremblement de terre, des avions déjà abandonnés se sont aussi fait piéger sur des aéroports de fortune devenus camps de réfugiés : une vision surprenante du pays. Car en Haïti, la pauvreté généralisée a son corollaire classique, celui de la corruption, omniprésente. La gangrène a touché tout le pays, bien trop pauvre pour y résister. « Nous sommes à la recherche de bandits et de gangsters, mais nous constatons aussi que la police et les membres du Congrès sont aussi parmi eux « , a déclaré le directeur général de la Police Nationale d’Haïti (PNH), Mario Andrésol qui admet qu’il ne peut pas confiance la plupart des 5 000 hommes de sa force. « Les politiciens locaux en Haïti aussi offrir une protection aux porteurs de drogues, at-il dit, ou a favoriser le transbordement en échange d’une part des bénéfices qui peuvent être distribués aux électeurs pauvres pour renforcer leur influence ». Le 29 juillet 2009, Andresol faisait le bilan de son action ses derniers mois :’« il cite en exemple l’arrestation de 335 trafiquants de drogue, la saisie de 754 kg de cocaïne et de 2908 Kg de marijuana. 32 maisons évaluées à 18 millions de dollars US ont été confisquées ». Ce qui paraît fort peu, au regard de ce qui a pu transiter !

Car la gangrène date de bien avant. Avant l’an 2000, déjà, Haïti était déjà en proie à un intense trafic comme l’a noté la radio locale Radio Métropole dans une longue litanie de saisies. « Le 1er mars 1998, environ 405 kg de cocaïne, d’une valeure approximative de 8 millions de dollars américains, ont été découvert dans le bureau de réclamation des bagages de l’aéroport de Port-au-Prince (ibid. 4 mars 1998 ; ibid2 mars 1998). Il s’agissait de la plus grosse saisie de drogue jamais effectuée à l’aéroport (ibid). La drogue est arrivée à l’aéroport en provenance de Panama par un avion des lignes colombiennes COPA (ibid 2 mars 1998). Le 8 mars 1998, les douaniers de l’aéroport ont saisi 233 kg de cocaïne en provenance de Panama par un avion de la compagnie COPA (ibid 9 mars 1998). Un autre chargement de drogue saisi à l’aéroport le 31 mars 1998 met encore une fois en cause la compagnie aérienne COPA (ibid 1er avr. 1998). Le 12 octobre 1997, 6.5 kg de cocaïne ont été saisis par la douane haïtienne de l’aéroport de la capitale haïtienne (14 oct. 1997). La drogue, destinée au marché américain, devait transiter par Port-au-Prince et la République Dominicaine (ibid). Selon Radio Métropole, le syndicat des employés de l’aéroport de Port-au-Prince ont dénoncé la corruption qui existe au sein de l’administration de l’aéroport (23 mai 1997). Le secrétaire général du syndicat, Henry Michel, a demandé une enquête sur la gestion de l’aéroport (ibid). Selon Radio Signal FM de Port-au-Prince, une grande quantité de pistolets de calibre 45 et des munitions ont été découverts dans des conteners par des agents de l’aéroport (9 sept. 1996) ».

En 2002 était également arrêté Marcel Séjour, trafiquant qui révélait la méthode la plus couramment utilisée. « Les autorités ont identifié Marcel Sejour, 29 ans, comme étant le chef de l’ opération, qui aurait distribué 5 kilos de cocaïne par semaine les rues du Queens et Long Island au cours de l’année écoulée. Sejour a été entendu sur écoute électronique affirmant qu’il avait obtenu la drogue de « représentants du gouvernement et l’armée en Haïti », après leur saisie les auprès des trafiquants dans ce pays. Au cours d’un autre appel surveillé, Sejour a évoqué le film « Blow » (de Ted Demme) lorsque il a décrit comment la drogue était larguée d’avion en Haïti. « Et mon gars y va avec son équipe, les armes à feu dans les mains, et tous les hommes sont là debout à regarder« , a déclaré selon les documents de la cour. « Puis il prennent la livraison, et une fois que toute la cargaison a été larguée, tout le monde s’en va et tout retourne à la normale ». Le film retraçait en fait la vie de George Jung (George Jacob Jung) alias Boston George, ami de Carlos Lehder, l’un des trafiquants ayant introduit la drogue aux States dans les années 70 !

Des trafiquants, certes, mais tout un enjeu politique lié à ce trafic. Haïti, partculièrement touché par la drogue, mais également particulièrement visée par la CIA, cela aussi je l’avais aussi écrit  : « car la CIA, depuis longtemps, nous apprend un livre remarquable s’est en effet infiltrée partout dans la société à Haïti. La raison est simple : en face, il y a Cuba, ne cherchons pas plus loin. Pour y arriver, à déstabiliser un pays, on le sait, la drogue est le meilleur moyen : le Sénat américain avait découvert dans les années 90 que les trafiquants colombiens fournissaient 100 millions de dollars par an au lieutenant-colonel Joseph Michel François et son l’organisation paramilitaire, le FRAPH (Front Révolutionnaire Armé pour le Progrès d’Haïti). Joseph Michel François était l’homme qui avait renversé Aristide. Ayant fui le pays en 1994, parti se réfugier à San Pedro Sula au Honduras, devenu soi-disant simple gérant de magasin de meubles, l’homme n’avait pas perdu ses habitudes et avait en particulier réussi à faire passer en contrebande 33 tonnes de cocaïne et d’héroïne aux Etats-Unis, à partir de son aéroport privé en Haïti. La drogue étant fournie par les trafiquants colombiens, et les américains l’avaient arrêté en 1997, mais la justice hondurienne l’avait juste après relâché. Comme par hasard. Or, pour ces trafics, il a bien fallu utiliser des avions : mais lesquels ? Ceux des chefs de la mafia colombienne, par définition d’apparition fantômatique, où ceux plus discrets de petites sociétés faisant régulièrement un trajet précis ? » JM François, formé à la terrifiante « U.S. Army’s School of the Americas » semblait bien avoir appris puis récité ses leçons ! En 1993 déjà un rapport de l’antidrogue US avait fait d’Haïti le deuxième point de transfert entre la Colombie et les USA !

L’homme qui gardera longtemps Haïti sous sa coupe politique n’est autre que Richard Helms, un des responsables de la CIA. « Helms, ouvertement raciste, et toujours ségrégationniste, était également à la tête du »Subcommittee on Western Hemisphere Affairs ». Il était bien caché derrière les opérations haïtiennes : il avait aussi été un des ardents supporters de Roberto d’Aubuisson au Nicaragua et avait participé à l’opération de détournement des élections dans le pays, organisée par la CIA.  Lui-même un « Southern Baptist », il était aussi à la tête du mouvement des chrétiens de droite, et avait fondé le Camp Willow Run centre d’endoctrinement religieux de la jeunesse US : tout se tient en ce qui le concerne. Il était notamment fort proche de Jerry Falwell, l’évangéliste en cheville en Floride avec Wallace J. Hilliard, le financier de la Huffman Aviation. On retombe sur… Mohammed Atta et sur la circulation de drogue via un jet cette fois. Celui d’Hilliard. Bien connu des lecteurs d’Agoravox…. et de cette longue série ! » Haïti n’en n’ayant visiblement pas les moyens, étant manifestement le maillon faible de toute la zone, c’est Porto-Rico qui s’en est donc chargé en achetant des avions Tucanos pour traquer les aéronefs des marchands de drogue. Le 29 juin, premier succès, ou presque, un avion de trafiquants tentant de larguer son chargement sur le territoire de St-Domingue ayant été contraint de le faire dans les eaux d’Haïti.En 2008 déjà, le responsable dominicain de la lutte antidrogue avait parlé de « négligence » américaine dans la lutte sur le territoire Haïtien. Citant l’exemple des 500 millions de dollars accordés au Mexique et à l’Amérique centrale contre les 2,5 millions seulement pour la République Dominicaine et Haïti.


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12 réactions à cet article    


  • Robert GIL ROBERT GIL 26 mars 2011 12:47

    Après la seconde guerre mondiale les Duvalier avec l’aide des USA régneront sur l’ile de 1957 à 1986. Cette dictature a été soutenue par tous les pays occidentaux, et pendant cette période la dette d’Haïti a été multipliée par 20 ; et oui, ça sert aussi à ça un dictateur ! Lorsque « Baby doc » sera chassé du pays, il emportera un magot supérieur à la dette de son pays. La France, pays des droits de l’homme et terre d’asile, l’accueillera. Pillée, Haïti s’enfonce encore un peu plus dans la pauvreté avec l’assentiment de la communauté internationale ! Lire cet petite histoite haitienne....

    http://2ccr.unblog.fr/2010/11/05/sommes-nous-tous-des-haitiens/


    • morice morice 26 mars 2011 15:41

      excellent commentaire en effet.


    • duane 26 mars 2011 13:27

      Et puis d’où vous les sortez vos deux bateaux ? hein ? Je vous le demande !

      Vos sources, morice, vos sources !

      Non mais !


      • Johnny Marocco 26 mars 2011 15:06

        @ Duane

        Je ne doute pas des sources de morice, son topo sur le honduras, à ce titre, est on ne peut plus éloquent : j’étais au Nicaragua en 2009, et on lisait partout dans la presse là-bas (à savoir qu’elle est infiniment plus libre et moins muselée qu’ici et dans presque tout l’occident), le dessous des cartes sur les troubles qui se déroulaient alors et leur pourquoi, sachant qu’on nous jouait un tout air de violon en Europe. Je me suis longuement demandé si je n’allais pas pondre un article là-dessus, mais le manque de rigueur, et également la peur des détracteurs m’ont convaincu de ne pas le faire, et c’est là que morice intervient sur ce sujet, à ma grande surprise, et ce qu’il écrit se révèle tout à fait conforme à ce que j’avais lu. Et croyez-moi qu’il y énormément de choses qui se déroulent en Amérique Latine dont les récits ne franchissent pas ou peu l’Atlantique.


      • morice morice 26 mars 2011 15:37

        Et puis d’où vous les sortez vos deux bateaux ? hein ? Je vous le demande !

        Vos sources, morice, vos sources !

        cessez vos insinuations ici, Duane, vous ne venez que pour mépriser, pas pour commenter.

        regardez-vous donc : tous VOS posts concernent MON fil de discussion. A ce stade, je peux parler de HARCELEMENT.

        sur vos 282 posts, il n’y en a pas 20 ailleurs que sur ma pomme.

        Ça tourne à l’obsession de frustré, ces commentaires. Et y’en a marre, « Duand », y’en a MARRE.

      • morice morice 26 mars 2011 15:40

        laissez donc, c’est un frustré qui ne vient que pour faire son show, quand il ne s’amuse pas à raconter des choses immondes sur des musiciens dont il ne connaît rien. Il ne vient pas commenter, il vient régler ses comptes, et ça fait plus de 250 commentaires maintenant. Mossieu ne peut pas me blairer, pour des raisons qui lui sont propres mais qui se devinent très vite. Il a pris le pseudo de « Duane » le jour même où j’ai dit ici mon admiration pour Duane Allman. Bref, comme vous le voyiez, c’est avant tout un...pervers.


      • duane 26 mars 2011 15:41

        Salut Johnny

        Private joke avec momo !

        Vous avez raison, mais peut-être que nous nous sommes croisés alors ?

        Bonne journée.


      • Johnny Marocco 27 mars 2011 23:38

        Et où on se serait croisé, je vous prie ? Pas au Nicaragua, ni même en Amérique Latine, d’ailleurs, car les trolls, comme chacun sait, sont allergiques au christianisme, il est donc fort peu probable que vous y fussiez allé et revenu entier


      • rocla (haddock) rocla (haddock) 26 mars 2011 19:48

        c ’est dingue de voir des commentaires SI valmeillants sous la plus d’ un auteur aussi talentueux .


        Ne vous laissez pas faire Morice , c ’est tous des gens de l’ extrême-droite ces zigototos ...

        • morice morice 26 mars 2011 22:32

          arrêtez vos imbécilités, Haddock ; il en serait temps. 


          • AN221 AN219 27 mars 2011 18:04

            Excellent scénario pour un films déjà vu.


            • AN221 AN219 27 mars 2011 18:05

              Excellent scénario pour un film déjà vu.

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