Concordia et Compagnie
Le vendredi 13 Janvier 2012, au large de l’île du Giglio, un paquebot géant du nom de Costa Concordia fait naufrage, causant de ce fait la mort de seize personnes.
Il s’agit, de toute évidence, d’une tragédie qui aura touché tant de familles, ainsi que les pays desquels les victimes étaient ressortissantes. Il s’en suivit un grand débat sur la responsabilité du capitaine du navire, vu la couardise avec laquelle il a maîtrisé la situation au moment du désastre, et vu la bêtise de son geste, qui l’a poussé à voguer extrêmement près du rivage toscan.
Mais ce n’est pas tout. Pire, ce n’est pas si grave. J’ose présumer que cet homme et ses subordonnés directs perdront leur emploi et paieront des amendes voire iront en prison pour que soient réparées leurs erreurs. Ce n’est que justice. Ce que je ne comprends pas, c’est ce qui s’est déroulé dans le monde politique français, autour de cet évènement, qui m’a tellement interloqué que je ne serais pas étonné que de semblables attitudes aient été notées dans d’autres gouvernements.
Quelques personnalités politiques de droite ont cru intelligent de faire un rapprochement direct entre le capitaine du Costa Concordia et leur adversaire politique, argumentant au passage que, à l’instar du bateau naviguant en eaux troubles dans les récifs, leur rival proposait un programme doublé d’un manque de rigueur qui mènerait tout droit le pays et la population à la catastrophe.
Il est volontaire de ma part de ni ne citer les personnes concernées, ni leur cible, ni leur nom. Il s’agit ici de dénoncer une action honteuse, bien au-delà d’un hypothétique attachement politique. Il est vrai que, dans un désir commun des prétendants à la magistrature suprême d’élever le débat, nous avions tous pu constater les enchaînements de part et d’autre de l’hémicycle de coups bas, généralement perpétrés oralement. De petites insultes apparentées à des boutades. Qu’à cela ne tienne, si un tel débat passionne, entretient un intérêt pour la politique, et incite les jeunes et les moins jeunes à voter, je dis banco. Mais apporter à ce même débat, en restant dans le domaine de la blague, un sujet aussi grave sur tellement de points, est pour moi le summum de la bassesse et de l’antipathie.
Il est intéressant de noter que, moins de deux semaines après cette catastrophe et ses applications à la vie politique, le chef de l’Etat Nicolas Sarkozy, que je nomme ici parce qu’il est également le supérieur direct des personnalités ayant cru bon de faire l’amalgame dont il est question, fait grise mine. Il faut croire que son idée de déstabiliser la crédibilité de son opposant le plus coriace n’a pas marché.
Pire encore, dans une ultime tentative d’amadouer les plus larmoyants de ses administrés, et alors que sa campagne n’a pas officiellement débuté, il se montre dans sa plus parfaite humilité, admettant qu’il serait possible qu’il ne gagne pas, et que dans ce cas, nous n’entendrions plus parler de lui. Si seulement !
Je dois avouer ici même que je n’ai personnellement rien contre Monsieur Sarkozy, et que ma propre vision politique ne souhaite idéalement ni sa victoire ni celle de ces concurrents qui le talonnent de près, voire qui le dépassent dans les sondages. Mais je comprends aussi ceux qui n’ont jamais pu adhérer à son discours, d’une ambivalence à en faire saliver un psy fraîchement diplômé. Adopter une position d’adolescent susceptible, qui revient à dire que « puisque vous ne m’aimez pas, je me casse », au lieu de véritablement se comporter humainement, de prendre du recul sur son action durant son quinquennat, de se remettre en question afin de changer la voie sur laquelle il aura dirigé la nation. Et c’est sur une mauvaise blague de mon cru que je finirais, et j’en demande mille fois pardon aux amis et familles des victimes, car, comme l’avait fait le capitaine du Costa Concordia, je ne peux m’empêcher de traduire les paroles du Président de la façon suivante : « Si je perds les élections, je serais le premier à quitter le navire, et ce sera aux autres de recoller les morceaux. »
La centaine de jours qu’il nous reste, avant l’issue de cette campagne, sera largement suffisante pour méditer sur ces paroles :
« Et dire que chaque fois que nous votions pour eux
Nous faisions taire en nous ce cri ‘Ni Dieux Ni Maîtres’
Dont ils rient aujourd’hui, puisqu’ils se sont fait Dieux
Et qu’une fois de plus, nous nous sommes fait mettre. » - Renaud.
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