Constitution césariste et parti césariste
La Constitution de 1958 de la Cinquième République a souvent été qualifiée de « césariste » au sens où elle était taillée sur mesure pour le général De Gaulle. Les Présidents qui se sont succédé après lui ne jouissaient pas d’une aussi grande autorité que la sienne et, après le passage vers le quinquennat sous Jacques Chirac, les deux Présidents suivants (Nicolas Sarkozy et François Hollande) n’ont pas été réélus.
On peut considérer comme césariste aussi le parti politique LREM au sens où il a été conçu dans le but de faire élire Emmanuel Macron Président de la République. Ce parti n’a pas été créé autour d’un club où on fait mûrir des idées politiques. Il est le résultat du fait que M. Macron a rassemblé autour de lui certaines personnes politiques plutôt de gauche, certaines autres plutôt de droite et enfin aussi des centristes, mais qu’il a surtout attiré pas mal de gens qui ne venaient pas du monde politique et qui voulaient tout simplement investir leurs compétences dans la gérance de l’état. Ces derniers, moins susceptibles que les vraies figures politiques de contester les idées du Président, donnent un aspect un peu technocratique au gouvernement actuel.
Le mouvement des « gilets jaunes », tout comme LREM, est un rassemblement de gens qui viennent si pas de tous, alors au moins de beaucoup d’horizons. Ce mouvement qui a commencé 60 ans après l’adoption de la Constitution de la Cinquième République exprime le mécontentement populaire autour de tout ce qui ne va pas dans celle-ci. Et le Grand débat national lancé par le gouvernement avait comme but principal annoncé de faire un sondage auprès du peuple français au sujet des problèmes qui devaient être résolus d’urgence.
Parmi les questions qui étaient au cœur de l’attention des Français se trouvait celle de l’immigration. Lors de la campagne du débat, dans une note ministérielle on avait mentionné que beaucoup de préfets l’indiquaient comme une des préoccupations principales des citoyens français. Mais dans le projet initial concernant les thèmes qui devaient être abordés dans le débat, l’immigration ne figurait pas. Et à l’issue du débat, l’aspect le plus important de ce problème, notamment l’immigration clandestine qui s’est considérablement accrue depuis 2015, n’avait pas été discuté. Le Président était particulièrement opposé à une discussion détaillée de cet aspect.
Lors des élections municipales de 2020, le problème de l’immigration clandestine risque de se faire éclipser par des problèmes locaux. Par exemple, dans une petite commune, le plus important sera de trouver quelqu’un qui accepte d’endosser les tâches de plus en plus ingrates de maire. Dans ce sens, les étiquettes politiques des candidats pourront passer au second plan. En revanche, pour les élections présidentielles de 2022, la question de l’immigration clandestine se situera certainement sur le devant de la scène. Et M. Macron se trouvera dans une posture pas des plus faciles. Il y a plusieurs raisons à cela :
1. Il a gagné le second tour des élections de 2017 contre Marine Le Pen, une opposante de première ligne à cette immigration. Les électeurs se souviendront des efforts de M. Macron d’étouffer la discussion sur l’immigration clandestine lors du Grand débat national. Bon nombre d’entre eux pourra décider de refuser leur vote au Président sortant en raison de son refus d’une discussion vraiment libre et non biaisée lors du débat.
2. Le poids international d’Emmanuel Macron risque de diminuer après le départ d’Angela Merkel dont le soutien lui a souvent été utile. N’oublions pas que l’autorité auprès de l’électorat allemand de Mme Merkel a drastiquement chuté exactement à cause de sa politique migratoire irréfléchie et des conséquences néfastes de celle-ci (attentats perpétrés par des islamistes, crimes commis par des clandestins, tensions liées au nombre de migrants mal intégrés et au communautarisme, etc.).
3. Absorbé par la résolution de problèmes intérieurs, M. Macron aura du mal à émerger d’ici 2022 comme leader européen. Fidèle à ses convictions, il s’opposera aux partis européens dits « populistes ». Dans cette opposition deviendra clair que quand un parti « populiste » européen se déclare contre l’immigration clandestine, son argument principal sera la préservation des valeurs nationales du pays et le refus d’accepter sur son territoire des gens qui ne s’intègrent pas. Le Président Macron aura du mal à leur opposer des contre-arguments vraiment authentiques.
Et puisqu’on a abordé ce sujet, remarquons que ceux qui fustigent les partis « populistes » d’aujourd’hui saisissent souvent l’occasion de faire des comparaisons entre ces derniers et le nazisme. Après tout, Hitler a aussi été qualifié de populiste. Pourtant ce sont plutôt les contrastes qui s’imposent comme résultat de telles comparaisons. Primo, à quelques petites exceptions près, les partis populistes d’aujourd’hui n’ont pas de discours raciste ou antisémite. Dans ce sens il convient de se rappeler que dans son livre « Mein Kampf » (« Mon combat ») Adolf Hitler compare la race aryenne à l’homme et toutes les autres races au cheval qui est mené par cet homme. Et secundo, les partis politiques européens contemporains ont accepté les frontières depuis la Seconde Guerre mondiale et ne cherchent pas un nouveau découpage territorial aux dépens des voisins. Hitler, au contraire, préconisait dans son livre que l’Allemagne devait tourner son regard vers les terres à faible densité de population des pays qui avaient été créés sur le territoire de l’Empire Russe après la Première Guerre mondiale. Et si l’Allemagne nazie n’avait pas eu le temps de coloniser ces territoires pendant la Seconde Guerre mondiale, elle avait au moins importé des trains entiers de terre fertile ukrainienne dite « terre noire ».
Mais revenons aux élections de 2022. Elles auront lieu 60 ans après les accords d’Évian de 1962 qui ont mis fin à la guerre d’Algérie. Il y a des parallèles évidents entre 1962 et 2022 :
- Les Français subissent des attaques terroristes de la part de combattants musulmans.
- Le nombre de combattants activement engagés dans l’activité armée contre les Français est faible comparé au nombre total de la population musulmane. En Algérie, sur une population de 10 millions, il y avait environ 200 000 membres de l’FLN quand ce nombre était le plus élevé. Néanmoins ce nombre s’avère suffisant pour maintenir la tension entre la communauté des Français de souche et celle des musulmans.
- Pendant la guerre d’Algérie il est devenu clair que, contrairement aux affirmations de certains hommes politiques, les Français et les Algériens étaient deux peuples différents, chacun avec son histoire, son territoire et son système de valeurs. Lors de la campagne d’élections de 2022, on parlera certainement encore une fois des racines judéo-chrétiennes des Français de souche et du fait que la société française laïque d’aujourd’hui est le résultat d’une évolution continue basée sur les valeurs apportées par lesdites racines. Accueillir massivement des migrants dont bon nombre écoute attentivement et accepte les arguments des religieux salafistes signifierait porter atteinte aux valeurs républicaines de la France. Car le salafisme voit l’Occident comme un ennemi qui veut la destruction de l’islam. D’ailleurs, on peut se rappeler aussi que le nom « Boko Haram » de l’organisation terroriste islamiste africaine signifie « le mode de vie occidental est un péché ».
Observons au passage que le salafisme est un courant religieux sunnite. Quand Emmanuel Macron a décidé de frapper le 13 avril 2018 les forces armées de Bachar al-Assad (qui est alaouite, donc chiite) en réponse à l'attaque chimique présumée des forces syriennes à Douma, près de Damas, son geste aurait dû plaire aux opposants sunnites de ce dernier. Néanmoins ceci n’a pas arrêté les attentats commis par des islamistes en France (il suffit de se rappeler l’attaque au couteau de la préfecture de police de Paris du 3 octobre 2019 qui a coûté la vie à quatre personnes). La raison en est que c’est la société laïque française qui déplaît aux islamistes ; sur ce plan aucun compromis avec eux n’est possible. À titre de comparaison on peut se rappeler que, malgré la participation de la France aux frappes contre les Serbes en 1999 lors de la guerre du Kosovo, aucun Serbe n’a commis d’attentat en France pour se venger. Les Serbes se sentaient, certes, trahis par la France, leur allié de la Première Guerre mondiale, mais ayant les mêmes racines judéo-chrétiennes que les Français, ils n’étaient pas animés par la logique qu’il fallait détruire la France.
Pour revenir à la décision du Président de frapper les forces syriennes en 2018, on peut ajouter qu’aujourd’hui la France ne joue aucun rôle important dans la résolution de la crise syrienne. Car c’est précisément Bachar al-Assad (soutenu par les Russes) qui a des chances réelles d’en finir avec ce qui reste du Daech. La Turquie poursuit sa propre politique contre les Kurdes. Ces derniers viennent d’être abandonnés par les États-Unis et doivent composer avec Bachar al-Assad et les Russes. Si la plus grande puissance mondiale se retire d’un jeu devenu trop compliqué, alors qu’en reste-t-il pour la France ? On peut dire qu’en Syrie, Emmanuel Macron n’a pas misé sur le bon cheval. À ce propos on peut se rappeler aussi que les opposants de Bachar al-Assad sont des islamistes (dits « modérés ») qui ont été soupçonnés par les Américains d’avoir vendu des armes à Daech.
En 2022, les autres leaders politiques, contrairement à M. Macron, n’auront pas à faire face aux élections avec un bilan aussi lourd derrière eux tel que le référendum sur l’immigration que l’on a refusé aux Français. C’est pourquoi il ne faudra pas s’étonner si, après les non-réélections de N. Sarkozy et F. Hollande, le Président sortant confirme la règle du « jamais deux sans trois ».
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