• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Contre la crise : syndiquez-vous !

Contre la crise : syndiquez-vous !

Ce titre aux accents péremptoires pourrait apparaître comme une survivance du passé, inadaptée au temps présent. Et pourtant !

Le monde du travail s’enlise progressivement dans une inertie apaisante pour des consciences épuisées, essorées, vidées de sens. Les conservateurs du monde entier, animateurs avisés de la mondialisation, bâtisseurs du magnétisme financier au profit de quelques-uns, orchestrent parfaitement leur programme d’abêtissement généralisé des peuples. Le meilleur ouvrage que j’ai pu lire sur cette question vient d’un philosophe italien Raffaele Simone. « Le Monstre doux »[1].

« Isolés, tout à leur distraction, concentrés sur leurs intérêts immédiats, incapables de s'associer pour résister, ces hommes remettent alors leur destinée à "un pouvoir immense et tutélaire qui se charge d'assurer leur jouissance (…) et ne cherche qu'à les fixer irrévocablement dans l'enfance. Ce pouvoir aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu'ils ne songent qu'à se réjouir. Il pourvoit à leur sécurité (…) facilite leurs plaisirs (…) Il ne brise pas les volontés mais il les amollit (…), il éteint, il hébète."
Et ça marche !
 
Pourtant, et souvent considérés comme les Don Quichotte des temps modernes, quelques syndicalistes résistent avec autant de difficultés qu’un radeau qui part à l’assaut des premières vagues d’une mer déchaînée. Décriés, dénoncés, mis au banc des accusés, ils rament dans un océan d’indifférence.
 
Indifférence ? Pas forcément ! Pas de tout le monde !
 
La lecture du dernier ouvrage de James K. Galbraith,[2] éclaire la nature des rapports qui peuvent exister entre les conservateurs – fondateurs de l’économie libérale mondialisée – et les syndicats. Les orthodoxes de l’économie prédatrice « ne reconnaissent pas aux syndicats le droit de tenir un rôle dans l’action publique et d’être invités à la table des négociations au moment où les conservateurs du monde entier en étaient arrivés à la conclusion qu’il serait plus simple, et plus efficace, de détruire le mouvement syndical que de coopérer avec lui »[3].
 
Pour les conservateurs partisans du marché libre, l’Etat c’est l’horreur ; seul le marché est bon. Or l’Etat fort négocie avec les syndicats les droits sociaux et la répartition des salaires. L’augmentation des salaires est un frein aux profits. Ceux qui sont opposés au marché sont forcément contre. Il faut les détruire ! C’est ainsi que les libéraux « ont créé une économie désyndicalisée, beaucoup plus inégalitaire qu’avant ».[4] Le syndicalisme depuis sa naissance est devenu la proie de tous les prédateurs.
 
Ainsi, sans résistance, les conservateurs du monde entier peuvent dévaster les Etats, les peuples, en fustigeant tout ce qui pourrait s’organiser pour défendre un intérêt collectif venant s’opposer aux profits réservés à quelques-uns. 
Cela va de la remise en cause des conventions collectives, de la sécurité sociale, des services publics jusqu’à l’individualisation des salaires sur la base d’entretiens individuels d’évaluation assortis d’objectifs inatteignables.
 
Ainsi et progressivement le travailleur se retrouve seul, amolli, éteint, hébété, victime du monstre doux !
 
Lorsqu’il ne sait plus comment s’en sortir, il déprime. Pire, il se suicide !
Alors, pour un syndicaliste, « il devient impossible de garder son verre de coca à la main et de regarder fixement les images qui défilent, tel un canard gras devant son entonnoir de maïs concassé ».[5]
 
Le « tous pareils » qui nous est souvent opposé est une façon, pour ceux qui le pensent, de justifier l’inertie et d’épargner le courage nécessaire qu’il faut pour s’extraire du conformisme ambiant, rechercher la vérité et la dire. « Le courage, c'est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques » [6]
 
Oui, il faut du courage pour se prémunir de ces maux qui progressivement gangrènent le monde du travail. Le notre, c’est de réveiller le sens de l’intérêt collectif sans lequel nous serons tous amollis, éteints, hébétés, « tel un canard gras devant son entonnoir de maïs concassé » !
 
Protégez-vous ! Syndiquez-vous !


[1] Le Monstre doux. L'Occident vire-t-il à droite ?, de Raffaele Simone, " Le Débat ", Gallimard,
[2] James K. Galbraith « L’Etat prédateur » édition le Seuil, septembre 2009
[3] James K. Galbraith « L’Etat prédateur » édition le Seuil, septembre 2009 – p76 et 77
[4] id-p 78
[5] Denis Garnier « Libérez-vous ! De l’économie contre le travail » Editions Le Manuscrit - 2011
[6] Jean-Jaurès- Le discours à la jeunesse – Albi 30 juillet 1903

Moyenne des avis sur cet article :  3.67/5   (15 votes)




Réagissez à l'article

16 réactions à cet article    


  • matthius matthius 13 décembre 2011 14:23

    Se syndicaliser permet en général d’éviter la comparution immédiate, à ca que m’a dit un militant syndical.


    • AntoineR 13 décembre 2011 14:57

      En France, le seul syndicat qui protège les intérêts de ses membres, c’est le MEDEF.
      (Et encore, pas des petits patrons).

      Le système syndical est bien vérrouillé. Les 5 syndicats qui détiennent le quasi-monopole se sont vendus. Ils ne servent plus qu’à canaliser le peuple (voir les manifs pour les retraites).

      Il y a trop de magouilles entre les gouvernements, les syndicats et les organismes genre IUMM. 

      Vous avez l’air de vous y connaitre en syndicat. Vous pourriez peut-être expliquer clairement la particularité des 5 syndicats majoritaires concernant la non-transparence de leur compte. Je pense que ça pourrait intéresser tout le monde (et pourtant c’est peu connu)....



      • Croa Croa 13 décembre 2011 18:45

        Les syndicats sont aussi à l’image de leurs membres. C’est parce qu’il n’y a pas assez de militants que certains déléguées le sont par carriérisme, d’autres par défaut et tous plus ou moins contraints à composer (quand il n’y a personne derrière...  smiley  ! ).

        Il existe aussi des syndicats moins pourris que d’autres...

        Bref, syndiquez-vous aussi pour pouvoir critiquer les délégués. Tant qu’à faire évitez les pires, ceux qui signent n’importe quoi et vous trahissent sans y être obligé (je vous laisse suivre mon regard !)

        Et une syndicalisation massive serait aussi gage d’indépendance : Les sous ça compte. Pour certains un syndicat c’est gratuit (cas des non-syndiqués qui savent pourtant solliciter le délégué), et comme tout autres choses on ils en ont pour leur argent !
        Les autres aussi, hélas smiley 


      • Garnier Denis Garnier Denis 14 décembre 2011 08:38

        @Jean

        Votre message est intéressant mais me semble inadapté au contenu de mon article. Même si, pour retrouver une vraie démocratie la solution du tirage au sort, chère à Etienne Chouard, peut être une solution pour bousculer le peuple des élus actuels, elle ne règlera en rien les rapports entre les « patrons », propriétaire de l’outil de production, et les salariés.

        Je tentais d’expliquer dans mon article que les propriétaires de l’outil de production sont arrivés à endormir le peuple et les salariés. Ensuite ils veulent briser les syndicats, seul rempart qui existe entre cet outil de production et le profit qu’ils peuvent en tirer. Si vous avez une solution pour défendre les salariés à tous les niveaux de la République, sans syndicats, je suis intéressé.


      • Garnier Denis Garnier Denis 14 décembre 2011 09:34

        Comme vous l’avez compris je suis syndicaliste. Je ne suis qu’un modeste militant chargé des conditions de travail et de la prévention des risques professionnels pour les personnels hospitaliers.(des fonctionnaires) Je ne sais pas s’il existe des « magouilles » et si nous sommes « vendus » pour canaliser le peuple. Comme vous pouvez le lire dans mon article, il y a plus doué que nous pour cela. (lire le « Monstre doux »)

        Concernant les comptes, à partir du moment ou il existe un financement public, il doit y avoir une parfaite transparence sur l’utilisation de cet argent public. C’est obligatoire. C’est inscrit dans la Loi. Concernant l’utilisation des cotisations, cela ne regarde que ceux qui les versent. Il existe au sein de chaque syndicat, à tous les niveaux, entreprise, département, région, nation, des commissions de contrôle chargées d’examiner les comptes par des adhérents qui ne sont membres d’aucune instance. Ce sont eux qui contrôlent et qui donnent ou pas le quitus au trésorier, comme dans n’importe quelle association. Il m’est arrivé de voir des quitus refusés et dans ce cas le trésorier doit démissionner. Mais, la meilleure façon que vous aurez de comprendre cela c’est d’y participer. Bien cordialement


      • Garnier Denis Garnier Denis 14 décembre 2011 09:34

        Comme vous l’aurez compris.... est adressé à Antoine


      • AntoineR 14 décembre 2011 16:37

        Bonjour Denis,

        Quand je dis que les syndicats sont vendus, je parle de la « direction » des syndicats et non pas de ses « petits » membres comme les délégués syndicaux.
        C’est comme en politique ou dans les religions. Les acteurs de la base sont généralements ceux qui y croient le plus.
        Et je vous félicite de votre engagement qui a l’air d’être sain. Je vous félicite aussi de votre énergie puisque vous sortez même du cadre de votre entreprise et conseillez les gens en dehors, notamment avec cet article.
        Je crois franchement au syndicalisme (un de mes auteurs préféré est d’ailleurs Noam Chomsky qui se dit « anarcho-syndicaliste »).
        Mais en France, je pense réellement que les 5 grands syndicats sont corrompus. Ceci est dû à leur financement. Il y a d’ailleurs un article qui l’explique très bien sur AV aujourd’hui.
        Pour résumer : « celui qui paie, commande ! »
        Quand je parle de magouilles, je parle des magouilles de financement. Pas celle lié à quelques délégués véreux qui sont là pour se protéger ou pour ne rien foutre au boulot.
        Il y a des fénéants partout et je ne remets pas en cause le syndicalisme pour cela. Après tout, si les gens ne sont pas content de leur délégués, ils n’ont qu’à se syndiquer pour prendre leur place.
        Je me suis mal fais comprendre dans mon premier message. Le problème, ce ne sont pas les délégués, le problème est le système de financement qui arrange tout le monde sauf....les salariés..



      • latortue latortue 13 décembre 2011 16:53

        Je me syndiquerai le jour ou les syndicat ne seront plus financés et par le patronat et par les subventions de l’état et de plus et c’est bien ça le pire le jour ou les secrétaires des syndicats ne se prendrons plus pour ce qu’il ne sont pas, ne roule plus en C6 avec chauffeur .
        J’adore le secrétaire de la CGT qui est au début de la manif avec les ouvriers et a la fin monte dans sa C6 avec chauffeur .Ce n’est qu’un exemple valable pour les autres
        pour qui se prennent il ces connards ,ce sont les représentants du monde ouvrier pas les faire valoir de l’état et du Medef HONTE A EUX
        jouer en bourse ce n’est pas non plus le rôle des syndicats exemple acheter un club très connue coté en bourse
        http://www.lexpress.fr/actualite/politique/quand-la-cgt-mene-sa-vie-de-chateau_778889.html
        C’EST POUR CA QUE SI PEUX DE GENS NE SONT PLUS SYNDIQUE
        un syndicat est là pour représenter le monde du travail
        pour faire des grèves quand l’état veux faire passer des mesures injustes
        pour se battre contre le patronat qui exploite le monde du travail
        pas pour jouer au petit patron ni au gros bras comme certain syndicat de docker .
        QU’ils fassent leur boulot et ils auront des adhérents


        • Garnier Denis Garnier Denis 14 décembre 2011 08:43

          « L’express » est effectivement une bonne référence pour traiter objectivement des syndicats. Vous auriez aussi pu citer « Le figaro ». Si votre vérité est fondée sur ces lectures c’est bien que le monstre doux de Rafelle Simone a accomplit son oeuvre. Je vous laisse donc tout à vos certitudes de professeur et je vais me replonger dans mes doutes d’élève.


        • latortue latortue 14 décembre 2011 10:23

          Par Garnier Denis

          c’est tout ce que vous trouvez comme réponse mes certitudes de professeur vous en voulez d’autre des certitudes tiens bonhomme en voila d’autres
          http://info.france2.fr/economie/EDF :-le-CE-ach%C3%A8te-une-soci%C3%A9t%C3%A9-cot%C3%A9e-en-bourse------59638333.html
          http://lexpansion.lexpress.fr/entreprise/la-cgt-a-t-elle-vire-capitaliste_231250.html
          et une réponse au sujet des secrétaires qui roulent en C6 avec chauffeur vous en avez une
          vous êtes purement et simplement ridicule mon pauvre

          il n’y a pas que l’express (qui n’est d’ailleurs pas mon livre de chevet )qui en parle des tas de sites en parlent il n’y a que vous pour ne pas être au courant
          les syndicats sont des coquilles vides payé par le MEDEF et les subventions de L’état voila la réalité
          j’ai été syndiqué au coeur même de l’appareil CGT alors parlons en si vous voulez !!!!!!!!!!


        • André Martin 13 décembre 2011 17:03

          Oui, mais il faudrait aussi que les syndicalistes d’entreprise, certes submergés par les problèmes à traiter et par la réunionite permanente organisée sciemment par les DRH, n’oublient pas de faire un travail d’éducation populaire. C’est-à-dire d’expliquer les mécanismes économiques et sociaux, afin que les salariés/citoyens comprennent les vraies causes du chômage de masse, de la dette publique …

          Les syndicalistes trouvent-ils sur les sites internet de leurs fédérations et confédérations des diaporamas et des vidéos pédagogiques pour faire ce travail de formation et d’information ?

           A défaut, voir par exemple « Les meilleures vidéos pour comprendre la dette et la crise » sur http://www.retraites-enjeux-debats.org/spip.php?article742 … et sur le même site, plein de diaporamas pour faire de la formation


          • Garnier Denis Garnier Denis 14 décembre 2011 08:46

            Je ne peux à ce sujet que vous conseiller la lecture de mon livre « Libérez-vous ! De l’économie contre le travail »

            Vous verrez effectivement combien il est important que les syndicats participent à l’éveil et à l’éducation économique des salariés.


          • ddacoudre ddacoudre 14 décembre 2011 10:17

            bonjour denis
            voilà un titre qui m’a fait plaisir, mais au delà si je n’ai pas lu les ouvrage récent dont tu parles j’ai du en avaler des milliers qui m’ont conduit expérience à l’appui d’écrire Rémunérer les hommes pour apprendre ou le marché de l’intelligence.
            notre seule richesse perpétuelle est dans notre aptitude à apprendre, car pour dégager des idées il faut donner au cerveau de la nourriture intellectuelle et d’expérience, alors lui se chargera des découvertes que lui susciteront les réalité vécu ou l’environnement.
            la pensé unique a sclérosé les cerveaux et construit des hommes bloqués, en sortir n’est pas facile aussi je comprend sans l’avoir lu le sens du monstre doux.
            je t invite à parcourir mon blog tu y trouveras certainement quelques inspirations.
            ddacoudre.over-blog.com
            cordialement.


            • Garnier Denis Garnier Denis 14 décembre 2011 10:38

              Merci

              Je vais lire avec attention, même si je préfère l’identité au pseudo. Déjà dans la réponse ci-dessus il y a suffisamment d’éléments pour enrichir le présent et penser l’avenir.

              Sur le monstre doux lire cet article du monde.

               

               


            • Deli 14 décembre 2011 10:53

              Une belle mafia dans le système oui.
              De surcroît il catalogue très vite les « autres », ce sont eux les meilleurs qui ont raisons sur tout.
              Non je ne culpabiliserai pas de ne pas être syndiqué comme ils le souhaiteraient.
              Un nombre important de personne se sont assis sur leurs privilèges « acquis »...mais non « ont pense aux générations futures »...
              Laissez moi rire.
              T’es prestataire, ou intérimaire, mais c’est de ta faute fallait signer ailleurs.
              Si les préstataire et les interimaires (les jeunes en générale) doivent signer de tel contrat c’est peut être parce que tu t’assoies sur tes privilèges de syndiqué et que le patron le voie bien. Il n’a peut être pas envi de nourrir des profiteurs.
              Les CDI d’aujourd’hui ne sont pas les CDI d’hier. (close d’ancienneté etc...) et on voudrait me faire croire que cela se bats...
              Je laisse les syndicats continuer leur « bataille » à la « itineris » comme je dis. (cf Asterix et Cleopatre) « Pas content, pas content... »
              Une belle hypocrisie de plus en France.


              • leguminator 14 décembre 2011 16:43

                Les syndicats... valent-ils la peine qu’on parle d’eux ?

                En d’autres temps ils ont peut être été utiles, mais de nos jours une chose est sûre : ils ne sont pas du côté des salariés, dans le privé comme dans la fonction publique.

                Pour les intérimaires, les contrats précaires, les prestataires, les salariés de petites entreprises ils sont tout simplement inexistants.

                Pour les autres ils ne servent à rien :

                • le patron veut licencier ? ils ne peuvent pas l’arrêter ne parviennent à négocier que le minimum légal : sacrée victoire !
                • le patron ne veut pas donner d’augmentation ou bien celle proposée lors des NAO est dérisoire ? ils ne peuvent rien faire d’autre que de manifester leur mécontentement et ça ne change absolument rien.

                Ces constats proviennent de mon expérience personnelle ainsi que de celle de mes proches dans des situations variées.

                Croa résume relativement bien la situation : « Il existe aussi des syndicats moins pourris que d’autres... »

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès