Crédit d’impôt pour les emprunts immobiliers : faut-il croire le gouvernement ?
C’est la mesure phare, parmi les réformes adoptées cet été dans le cadre du paquet fiscal : les intérêts des emprunts contractés pour l’acquisition ou la construction de la résidence principale ouvrent droit à un crédit d’impôt, à raison des cinq premières annuités de remboursement.
A l’origine, le gouvernement avait prévu que l’institution du crédit d’impôt aurait un effet rétroactif. Mais cette rétroactivité a été censurée par le Conseil constitutionnel. La réaction du gouvernement ne s’est pas fait attendre : Mme Christine Lagarde, ministre de l’Economie, des Finances et de l’Emploi, a annoncé un dispositif complémentaire pour les promesses de vente signées à compter du 6 mai.
Cette annonce sera-t-elle suivie d’effet ? Eléments de réponse, par Julien Chateauneuf.
Commençons par un bref historique de la réforme : l’article 5 de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, prévoyait l’application rétroactive du crédit d’impôt... jusqu’à la décision du Conseil constitutionnel en date du 16 août 2007.
1. La controverse née de la décision du Conseil constitutionnel :
Pour censurer la rétroactivité du crédit d’impôt, les sages du Conseil constitutionnel se sont appuyés sur une analyse économique.
En effet, ils ont constaté que le but du crédit d’impôt était de favoriser l’accession à la propriété.
Or pour atteindre cet objectif, il est inutile d’accroître le pouvoir d’achat des ménages déjà propriétaires de leur logement.
Dès lors, les sacrifices budgétaires supportés par l’Etat pour leur venir en aide ne sont pas justifiés.
C’est pourquoi le Conseil constitutionnel a réservé le bénéfice du crédit d’impôt aux futurs propriétaires.
Conscients de la portée de cette décision, les députés de l’UMP ont affiché leur mécontentement : selon M. Patrick Devedjian, « jamais le Conseil constitutionnel n’avait affirmé la non-rétroactivité de la loi fiscale ! En particulier pas en 1984, quand le gouvernement Fabius avait supprimé la déduction sur les emprunts immobiliers ! » [1]
2. Quelles sont les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel ?
Suite à la décision du Conseil constitutionnel, le crédit d’impôt concerne les seules opérations d’acquisition et de construction intervenant à compter du 22 août 2007 (date de la publication au Journal officiel de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat).
Mais, souhaitant donner un signal fort à l’opinion, le gouvernement a promis l’adoption de mesures complémentaires.
3. La réaction du gouvernement :
Le nouveau dispositif annoncé par le gouvernement comporte deux volets.
D’une part, le gouvernement envisage de doubler (de 20 à 40 % du montant des intérêts), le crédit d’impôt accordé aux emprunteurs au titre de la première année de remboursement. Cette mesure pourrait figurer dans le projet de loi de finances pour 2008 ; elle n’appelle pas d’observations particulières sur le plan juridique.
D’autre part, conformément aux engagements du gouvernement, l’administration devrait admettre la prise en compte des promesses de vente signées à compter du 6 mai 2007 (date de l’élection de M. Nicolas Sarkozy à la présidence de la République). Cette solution s’appliquerait, alors même que l’acte d’acquisition définitif serait antérieur au 22 août... en violation de la décision du Conseil constitutionnel.
Or les décisions du Conseil constitutionnel s’imposent à l’administration.
4. Quelles conclusions en tirer ?
Même si l’administration se prononçait pour la prise en compte des promesses de vente signées à compter du 6 mai 2007, les contribuables concernés ne pourraient pas s’en prévaloir.
Les déclarations du gouvernement seront donc accueillies avec la plus grande prudence...
Notes
[1] Propos reproduits à la une du Midi Libre, deuxième cahier, en date du 25 août 2007
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