Crimée-Russie : de quoi se mêle l’Europe ?
Ce jour jeudi 6 mars, le Parlement régional de Crimée s'est prononcé en faveur d'un rattachement de la Crimée à la Russie sanctionné par l'organisation, dans dix jours, d'un référendum sur le statut de ladite Crimée. Le gouvernement pro-occidental de Kiev a ce même jour répondu en annonçant la dissolution du Parlement régional et l'invalidation du scrutin. Il entend par ailleurs signer l'accord d'association avec l'Union Européenne, signature dont la suspension avait servi de point de départ à la mobilisation de Maïdan.
Pour Barack Obama dans une allocution prononcée jeudi à la Maison Blanche, l'organisation d'un référendum en Crimée, telle qu'imaginé par le Parlement de la République autonome, « violerait la Constitution ukrainienne et violerait le droit international ». Pour le secrétaire d'Etat John Kerry, il n'y a même pas débat : la Crimée fait partie de l'Ukraine, assure-t-il.
Les Etats-Unis et leurs fidèles suiveurs, les gouvernements européens, sont effectivement effrayés par la valeur d'exemple du processus de référendum. Il suffirait, pour annexer un territoire étranger, disent-ils, qu'un vote du Parlement de ce territoire déclare la sécession et propose à la population d'en juger à l'occasion d'un référendum. D'autres régions des Etats voisins, y compris d'Etats européens, voire des Etats-Unis (la Bretagne ou l'Etat d'Alabama, par exemple) ne vont-elles pas suivre cette démarche sécessionniste ?
Cette crainte relève de la pure propagande occidentale. Pour que de telles régions suivent l'exemple de la Crimée, il faudrait qu'elles soient peuplées d'une majorité de russophones désirant par ailleurs rejoindre la Russie. Ce n'est évidemment pas le cas. Les seuls qui ont exprimé le désir de se rapprocher de la Russie sont les représentants de grandes villes de l'Ukraine orientale, traditionnellement très proches. Nous avons précédemment écrit ici, notamment dans notre précédent éditorial, que pour éviter ce genre de difficulté, les Européens et les Russes devraient se mettre d'accord au plus vite sur une fédéralisation de l'Ukraine, avec dans chaque cas consultation des populations.
Mais les Etats-Unis ne veulent pas entendre parler de cette perspective, parce que le monde entier y verrait un succès de Poutine. Ils veulent au contraire tout faire pour affaiblir celui-ci, qui continue à leur faire peur. Et pour cela, ils se moquent de la démocratie . Même si comme il est probable 60 à 70% de la population de Crimée voulait redevenir russe, on fait valoir à l'avance que le référendum organisé pour leur permettre d'exprimer cette volonté serait contraire au droit international...On annonce par ailleurs, pour faire face à toute éventualité, que ce référendum, s'il avait lieu, serait truqué. Inutile de faire remarquer que les reportages occidentaux donnent presqu'exclusivement la parole à des personnes refusant, selon leurs termes, de devenir russes.
Les Européens, et la France en tête, reprennent à leur compte ces arguments de basse politique. Est-ce que le gouvernement de Kiev issu de la « révolution » de Maïdan était légitime au regard du droit international ? Et faut-il recevoir à Paris un représentant de ce gouvernement, dont il est de plus en plus évident aujourd'hui, suite aux informations non démenties communiquées par le ministre des affaires étrangères estonien Urmas Paet à la Haute Représentante de l'Union Lady Ashton, que la fusillade meurtrière ayant provoqué la chute du gouvernement avait été conduite par des milices ultra-nationalistes fort bien en cour auprès de certains pays européens. Nous ne nommerons pas ici ces pays pour ne pas compromettre la traditionnelle entente franco-polonaise.
Il est évident que, face au panier de crabe occidental, Vladimir Poutine n'a aucun mal à réagir vite et couvrir ces occidentaux, selon l'expression française, de pipi. Répétons-le, la seule façon que pourraient avoir les Européens de se sortir du piège où les a mis leur grand allié Obama serait de renoncer à se mêler d'affaires qui ne relèvent que de l'Ukraine et de la Russie. Ils feraient mieux de renforcer leurs économies ébranlées par les dictats de la Banque centrale européenne afin de pouvoir se présenter, face à la Russie, en partenaires souhaitables plutôt qu'en adversaires ridiculement impuissants.
Photo : le conseil de sécurité russe.
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