Crise du barrage : Les choix dont disposent l’Egypte
Dans un article publié il y a quelques mois, j’ai écrit que les solutions de négociation ne sont pas les plus aisées pour trouver des compromis audacieux pour des soucis majeurs. C’est encore plus vrai pour les enjeux existentiels, comme c’est le cas pour le barrage de la Renaissance d’Ethiopie. Cependant, elles restent toujours les meilleures solutions pour établir la sécurité et la stabilité.
C’est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit de la nécessité d’un approvisionnement vital en eau, où les aspects techniques, politiques et sécuritaires se recoupent. S’asseoir à la table des négociations à la recherche de sorties de crise reste l’une des meilleures pratiques en matière de relations internationales.
Toutefois, l’efficacité de ce modèle reste tributaire de la volonté des parties au conflit. Elle tient à leur sérieux pour trouver des solutions et des alternatives satisfaisantes pour tous.
Le président égyptien Abdel Fattah El Sisi a fait preuve, aux yeux du monde entier, de l’étendue et de la profondeur de sa patience, de sa persévérance et de sa ferme volonté de résoudre la crise du barrage Renaissance par la négociation.
Ses récentes déclarations à ce sujet reflètent aussi sa conscience des répercussions et des conséquences de toute escalade militaire consécutive aux atteintes à l’approvisionnement en eau de l’Égypte dues à cette situation. Sisi a bien fait de nier la menace en évoquant les lignes rouges de l’Égypte sur ce sujet ultra-sensible.
« Personne ne pourra ravir une goutte d’eau à l’Égypte ou alors il y aura un état d’instabilité dans la région que personne n’imagine et personne n’imagine qu’il puisse être loin de notre pouvoir, » a-t-il déclaré. « Nous ne menaçons personne. Mais personne ne peut ravir une goutte d’eau à l’Égypte. »
Son discours est digne d’un homme d’État qui connaît bien le statut civilisationnel et stratégique de l’Égypte. Il cherche aussi à préserver les droits de son peuple sans s’engager dans une escalade non calculée, ni se laisser entraîner dans la guerre des mots et les appels à la guerre que beaucoup promeuvent surtout sur les médias sociaux.
Cela fait foi de sa profonde connaissance de l’histoire et des conditions de la nation, des priorités de son peuple, et de sa capacité à mener son pays à bon port. Pour être honnête, le président Sisi a prouvé qu’il était un homme de la situation. Sa stratégie de la ligne rouge en Libye a réussi à dissuader la Turquie de poursuivre son expansion pour s’emparer de l’est de la Libye.
Dans la crise du barrage de la Renaissance, cependant, l’homme politique n’a pas recouru à cette stratégie en vue de préserver la spécificité de ce sujet et sa volonté de laisser de côté le langage de l’escalade avec le voisin éthiopien.
Mais les développements rapides sur ce dossier ont joué un rôle majeur dans la transition de la diplomatie égyptienne vers un langage plus dur pour calmer et rassurer le publique égyptien d’abord. Ensuite, c’est pour envoyer un message fort et clair non seulement à la partie éthiopienne mais aussi aux grandes puissances.
Ces dernières ont jusqu’à présent évité de jouer le rôle qu’elles devraient assumer pour dégager une solution à ce problème. La crise est en ébullition et menace de faire jaillir un conflit régional dont on ne peut pas connaître l’étendue.
En toute objectivité, le président Sisi ne cesse d’accumuler un bagage d’expérience remarquable et estimé. Il fait avancer à grand pas son pays vers une renaissance et un développement sans précédent dans son histoire moderne. C’est ce qui explique sa volonté évidente, comme le laissent entendre ses propos, de ne pas se préoccuper de guerres et de conflits inutiles, sans pour autant nier sa ferme volonté de livrer bataille si le futur de son peuple est en cause.
Il faut ici noter l’énorme impact populaire de ses récentes déclarations à propos de la question du barrage de la Renaissance. Les réactions dans les médias sociaux et ailleurs en témoignent.
Bien qu’il ait semblé calme, ses déclarations ont été lues dans le contexte de son expérience militaire rigoureuse et résolue et de ses positions passées, à maintes reprises, pour protéger l’Égypte et son peuple dans les circonstances les plus sombres et les plus épouvantables.
Il est sûr, dans cette conjoncture, que le choix diplomatique pour dépasser les divergences entre le Caire, Khartoum et Addis-Abeba est le moyen le plus sûr et le plus efficace de parvenir à un accord convenant à toutes les parties et garantissant les droits et la sécurité hydrique.
Cela permet d’apporter sécurité, stabilité, développement durable et prospérité à tous les pays, loin des conflits, des haines et des séquelles qu’il faut des années, sinon des décennies, pour surmonter. Les dirigeants des trois pays se trouvent à un moment historique concernant la survie et le destin de leurs peuples.
Cela exige de la sagesse au-delà de tout désir de gains passagers ou de victoires médiatiques. Il faut arriver à un règlement qui contente toutes les parties et garantisse à tous les dirigeants une digne inscription dans l’histoire de leurs pays, en tant que partisans de la paix et du développement, et non de la guerre et de la dévastation.
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