Crypto
C’est par le terme hébreu « Amen » que les fidèles terminent leurs prières. C’est par son synonyme latin « fiat », ainsi soit-il, que les banquiers des temps modernes achèvent les leurs.
Une monnaie fiduciaire (fiat currency) est une monnaie, dont la valeur nominale est supérieure à sa valeur intrinsèque, c’est-à-dire, la bonne administration des richesses matérielles de son émetteur, l’état, la différence, ou, pour utiliser un terme comptable, le goodwill, étant la confiance que le détenteur concède à l’émetteur.
Dans le cas du système monétaire de l’étalon or, l’unité monétaire, émise par l’état, correspond à un poids fixe d’or.
Le préfixe crypto, provenant du grecque, signifiant « caché », un antonyme pour « transparent », est utilisé pour décrire la dernière version, moderne, de la monnaie « fiat », la cryptomonnaie, dont l’émetteur n’est plus le représentant d’un collectif social, vivant sur un territoire géographiquement délimité, et dont les membres exercent une activité économique, un état, mais une machine.
Le principe du papier-monnaie fut introduit pour la première fois, en France, par un écossais, comment pouvait-il en être autrement, John Law, en 1720, dans le but d’effacer la dette colossale du Roi-Soleil, Louis XIV, au train de vie dispendieux, principe repris ensuite par les révolutionnaires en 1789, sous l’appellation d’assignats, billets de banque, gagés sur les « biens nationaux », les richesses volées au clergé.
N’ayant rien à envier aux goûts de luxe du plus dépensier des Bourbons, les révolutionnaires activèrent aussitôt la planche à billets, à volonté, pour financier la guerre, cela sonne familier (?), de façon, à ce que le nombre de billets émis, dépassa rapidement la valeur des biens, volés au clergé, créant ainsi…de l’inflation.
C’est donc la confiance, la base de la théorie quantitative « moderne » de la monnaie, le monétarisme, et non les modèles mathématiques sophistiqués que personne n’est censé comprendre, le même subterfuge d’ailleurs avancé par les inventeurs de la cryptomonnaie, la complexité supposée.
Il s’appelle Do Kwon, l’inventeur coréen de la cryptomonnaie « Terra », une nouvelle monnaie électronique, censée être liée au cours du dollar US. Pour ce faire il aurait fallu accumuler, avec l’afflux des devises de la part des investisseurs, en lieu et place de lingots d’or, des titres du trésor américain, afin de soutenir le cours de la nouvelle monnaie, en cas de perte de confiance des investisseurs. Il aurait fallu. (1)
Il semblerait que Do Kwon ait trouvé un autre usage, plus personnel. En lieu et place il avait créé la monnaie jumelle « Luna », dont la valeur fut purement fonction de l’offre et de la demande. Afin d’obtenir le sésame, la monnaie « Terra », l’investisseur devait d’abord acquérir la monnaie « Luna », dont la valeur fut multipliée par 100 à son apogée, sous le poids de la demande. Pour 100 dollars US on pouvait donc acquérir une unité « Luna » et l’échanger, si on voulait bien le faire, contre une unité « Terra », supposément sécurisée par une unité de la valeur de première qualité, des bons du trésor américain, par exemple, d’une valeur réelle de 1 dollar US.
Le fait que « Luna » ait perdu, en l’espace de quelques jours, près de 100 % de sa valeur, et que la valeur de sa jumelle « Terra » soit tombée en dessous de sa parité vs le dollar US, est un indice que la valeur du gage, censé protéger « Terra », fut très probablement insuffisante, ou inexistante (?), un peu à l’instar de la fortune du clergé, pillée au fur et à mesure par les révolutionnaires pour financer la guerre, servant de gage aux assignats, émis par les derniers. Comme quoi, rien de nouveau sous le soleil.
On pourrait objecter que Do Kwon est un escroc et les banquiers, à plus forte raison les banquiers centraux, des gens bien. Après tout, contrairement à monsieur Kwon, les derniers travaillent pour le bien commun, disposant de modèles mathématiques sophistiqués, toujours à l’affut du moment opportun pour approvisionner l’économie avec la quantité nécessaire de monnaie pour garantir son bon fonctionnement, tout en laissant aux banques commerciales privées le choix des heureux bénéficiaires du précieux sésame. Cela va sans dire. C’est le libéralisme économique après tout. Et si les heureux bénéficiaires sont des fonds d’investissement, tels que Black Rock, Vanguard ou State Street, et non l’économie réelle, soit.
Il n’est donc pas étonnant qu’aux temps de la raréfaction, simulée par la spéculation ou réelle, cela reste à démontrer, de valeurs tangibles, telles que les matières premières, la valeur des cryptomonnaies, crée du néant, à l’instar de celles des banques centrales, censées protéger ses investisseurs contre l’inflation, un peu comme celles des banques centrales, s’effondre.
Quant à l’inflation, qui touche tout le monde, elle est attisée par le retour de la masse de monnaie, crée du néant, depuis 2008 à un rythme effréné qui représente un multiple de la croissance économique, dans le simple but de sauver du naufrage un système économique et financier, déjà pourri jusqu’à la moelle, le capitalisme.
- Heiner Flassbeck, économiste allemand, Secrétaire d’Etat au Ministère fédéral allemand des finances, conseiller économique du Ministre allemand des finances, Oscar Lafontaine, entre 1998 et 1999, Directeur du Département « Macroeconomics and Development » à United Nations Conference on Trade and Development UNCTAD à Genève entre 2003 et 2012.
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