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Culture, cluster et social-économie

La lecture du livre de Christian Blanc, « La Croissance et le Chaos » a été une véritable révélation pour moi, surtout à considérer que je me sens très proche, dans la réflexion, des thèses de Joseph Aloïs Schumpeter, or j’ai cru reconnaître dans le travail d’observation et de réflexion de Christian Blanc une application pratique, pragmatique et modernisée des thèses de cet économiste, notamment sur le rôle de l’entrepreneur, sur la destruction créatrice, et sur le rôle de l’innovation.

Un des points centraux du livre de Christian Blanc, c’est que les clusters dont il parle (association région-université-entreprise) ne peuvent se mettre en place que dans le cadre d’une décentralisation très forte. On a parlé au PS et à l’UDF de VIe République, mais, sur ce point, je crois qu’il n’y a pas urgence : l’urgence, c’est la décentralisation. François Bayrou l’a compris bien mieux que d’autres, notamment en souhaitant supprimer un échelon (le département) et en redonnant du pouvoir aux Régions.


Je suis un adhérent de l’UDF, je ne m’en cache pas, et, à cet égard, j’ai pris un coup au moral quand j’ai appris que Christian Blanc se rangeait derrière Nicolas Sarkozy. Cette décision est demeurée un grand mystère pour moi, alors que tout à l’UDF lui souriait pour qu’il puisse mettre en place son projet économique : j’ai lu d’autres analyses très proches de la sienne chez plusieurs cadres de l’UDF.
La tradition bonapartiste dans laquelle Nicolas Sarkozy semble s’inscrire, désormais, me semble fort mal se marier avec quelque velléité de décentralisation que ce soit.

Je me serais consolé si le gouvernement avait envoyé des signes forts de ces urgences, mais ce n’est nullement le cas : ni Christian Blanc ni Alain Lambert ne sont au gouvernement, et rien ne laisse présager une réforme radicale de la décentralisation et du rôle de l’Etat.

Tout au plus l’on commence à parler d’autonomie pour les universités. Parions qu’elles ne seront toujours pas autonomes dans cinq ans, tout du moins pas financièrement.

Dans l’entre-deux-tours, Ségolène Royal m’avait intéressé parce que je l’avais vu évoluer singulièrement : face à François Bayrou, elle a reconnu qu’elle ne faisait pas des 35 heures un point de non-retour, et face à Nicolas Sarkozy, c’est elle qui a explicité le rôle qu’elle comptait donner à l’entente Région-entreprise-université : que du bon, de mon point de vue.

Le seul point sur lequel je tendrais à avoir confiance dans le nouveau gouvernement, c’est pour les retraites, pour lesquelles des réformes douloureuses mais nécessaires sont inévitables, et pour la financement de la santé. Mais voilà : le gouvernement commence par un maladresse monumentale en parlant de ne pas rembourser les 75 à 100 premiers euros de frais médicaux, alors qu’il faut plutôt jouer sur le ticket modérateur. Cette mesure ne peut qu’être très impopulaire, et risque de créer plus de nuisances sanitaires qu’elle ne règle le problème du financement de la santé. Si les individus les plus pauvres n’osent plus se soigner parce qu’il faut débourser d’emblée jusqu’à 40 euros, on pourrait voir certaines maladies épidémiques réapparaître.

J’ai l’impression au final que l’on va perdre encore cinq années sur les véritables urgences. François Bayrou me semblait les avoir comprises, ces urgences, lui, et j’aimais beaucoup l’idée qu’il véhiculait d’une société dont la clef de voûte était la culture, et en même temps, qui faisait de l’entreprise et de son développement la pierre angulaire de son programme économique : un beau projet humaniste, dans lequel je me retrouvais tout à fait.

Alors voilà, aujourd’hui, je suis dépité, la tête emplie de regrets, et je regarde avec amertume les temps qui se préparent.

L’UDF, quant à elle dérive, une partie de son équipage ayant fui la tempête : et elle a perdu des hommes de valeur, avec des Pierre Albertini ou des Charles de Courson. Il reste à l’UDF-MoDem des économistes de talent comme Christian Saint-Etienne, et puis bien sûr, des fortes têtes qui ne cèdent pas face à l’adversité, à commencer par François Bayrou, lui-même, mais aussi des Gilles Artigues, Marielle de Sarnez, Jean Lassalle , Michel Mercier ou Anne-Marie Comparini, mais, sur le fond, la tête est décapitée, et il faudra du temps pour reconstruire.


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3 réactions à cet article    


  • Charles André Charles André 1er juin 2007 13:35

    L’autonomie des universités est tout de même annoncée comme une des priorités de Sarko, qui fera l’objet d’une loi cet été ! C’est pas fait mais le signal d’urgence prioritaire est bien là !

    Oui, « la croissance ou le chaos » est un livre que tout le monde devrait lire : plus qu’un brillant livre pédagogique et concret, il délivre une vision humaine enthousiasmante d’une économie qui réussit précisément parce que fondée sur la coopération des acteurs. Réaliser un idéal par l’économie, cette perspective est rarement évoquée !

    Sur la désertification de l’UDF-MoDem, il me semble qu’il faut désormais voir plus loin que l’invective qui a prévalu durant la campagne présidentielle. Si certains sont évidemment allé du côté du plus fort, si d’autres ont tout simplement fini par rester fidèle à leurs positionnement et électorat traditionnels, des gens comme Blanc ou Sauvadet me semblent avoir mis le doigt sur quelquechose de plus fondamental qui rendait le travail avec Bayrou inenvisageable : Bayrou travaille et décide seul ; il ne sait évoluer en équipe, en collectif.

    Sauvadet l’a dit lorsqu’il s’est rangé dans la majorité présidentielle : Bayrou n’a pas tenu la parole qu’il avait donnée aux élus UDF à l’entre-deux tours ; il avait promis de laisser les électeurs libres, il a en réalité donné une consigne implicite anti-Sarkozy (selon moi avant tout pour se placer dans la perspective de 2012 : FB serait, dans ses rêves, à la tête de l’opposition).

    J’ai plusieurs fois entendu le même reproche de cavalier absolument seul de Bayrou. Ce qui n’est pas valable pour Sarko, qui sait s’entourer, consulter, travailler en équipe.

    Par ailleurs, concernant Blanc, il avait annoncé il y a DEUX ANS ! à Bayrou qu’il ne le soutiendrait pas. J’ai interprété ses déclarations ainsi : après avoir à plusieurs reprises longuement échangé avec Sarkozy et cotoyé FB pendant toute la législature dans le groupe UDF, Blanc considérait que Bayrou n’avait pas saisi la profondeur des enjeux, n’osait (par tactique, positionnement) prendre ses responsabilités en abordant de front certains problèmes majeurs (fonction publique par exemple, j’imagine), parce qu’il n’était que dans la critique et le positionnement.

    Personnellement, je suis en total désaccord avec ton diagnotic : la nécessité première est de faire redémarrer l’économie et renouer avec une action publique efficace. Mettre fin au chômage et dynamiser notre société.

    Bref : Bayrou est esthétiquement satisfaisant. Mais il n’avait ni l’envergure ni la capacité de rassemblement qui doivent êtres celles d’un Président de la République. Et que penser d’un candidat qui fait campagne dans le registre de la dénonciation des « puissances de l’argent » ?! C’est du Mélenchon (c’est une image révélatrice, je ne veux pas lancer un débat de fond la dessus....) ! La décision de ceux qui n’ont pas suivi Bayrou dans son positionnement personnel est donc parfaitement logique. Je t’accorde néanmoins qu’évidemment, sur la décentralisation, le compte est loin d’y être avec un Sarko très jacobin. On ne peut tout avoir, hélas !

    C’est triste, car le MoDem aurait pu (pourrait ?) préfigurer une gauche moderne.

    Ne pas prendre ma réponse comme du militantisme, cette période est passée.


    • L'Hérétique Anaxagore 1er juin 2007 19:43

      Je te cite : « Personnellement, je suis en total désaccord avec ton diagnotic : la nécessité première est de faire redémarrer l’économie et renouer avec une action publique efficace. Mettre fin au chômage et dynamiser notre société. »

      Je ne vois pas en quoi ce que je dis s’oppose à cette remarque : c’est exactement le sens de mon article.

      Sur la Fonction Publique, entendons-nous : ce qui m’agace drôlement à l’UMP, c’est que la réduction des effectifs de la Fonction Publique est une obssession sans aucune réflexion. En gros, il faut réduire, et à la limite, peu importe où on réduit pourvu qu’on réduise.

      S’il y a justement une réflexion, dans la Croissance et le Chaos, chez C.Blanc, c’est bien sur la fonction publique.

      Moi aussi, je pense que l’on ne peut continuer avec une fonction publique toujours plus importante, mais justement, ce que j’attendais de politiques honnêtes, compétents et responsables c’est qu’ils me disent :

      Voilà, on est endetté jusqu’au cou, on n’a plus de fric, et en plus on doit rembourser la dette. En revanche, l’absence d’argent cela n’empêche pas un arbitrage budgétaire à la lueur de la politique que l’on souhaite mener, et donc, des priorités.

      Ce que j’aimais, chez Bayrou, c’est qu’il avait compris l’importance de réduire et la dette et la fonction publique, mais qu’il était capable de dire : voilà, il y aura des priorités budgétaires. L’Education est un secteur prioritaire pour l’UDF, on vous maintiendra les moyens dans ce domaine.

      Relancer les TPE et PME, c’est prioritaire, on leur assurera les deux premiers emplois sans charges et on leur garantira 30% des marchés publics.

      ça, c’est un programme.

      Franchement, regarde, les cadeaux fiscaux ( et pourtant, à titre perso, je vais en bénéficier) est-ce que tu crois franchement que c’est une urgence ? Ce n’est pas une question de morale, c’est une question de priorité. M... la priorité, c’est de revitaliser notre tissu industriel et économique et de permettre à nos entreprises d’être réactives et compétitives. En plus, cette très mauvaise idée pour les emprunts fiscaux va tirer encore plus le marché immobilier vers le haut alors qu’il commençait à s’assagir.

      Il n’y a rien, absolument rien, qui va dans le bon sens économique actuellement, de la part du gvt.

      Pire, ce gvt commence d’emblée par laisser filer la dette en pariant sur des recettes qu’il n’a pas.

      Quant à la décentralisation, malheur aux vaincus, plus personne n’en parle, et pourtant, elle est vitale !


      • L'Hérétique Anaxagore 1er juin 2007 19:45

        Me suis planté sur une remarque : en fait, dans le bouquin de C.Blanc, la faiblesse dans la réflexion, c’est justement sur la fonction publique : réduire, il a raison, mais encore faut-il se poser la question de savoir ce qu’il convient de réduire ou non.

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