Culture, mentalités, et droits fondamentaux
Si les droits fondamentaux ont un caractère universel en tant que principes, force est de reconnaitre qu’en tant que processus ils diffèrent en matière d’interprétation et en matière d’application, ce qui les rendent parfois contradictoires, selon le pays et selon les régions géographiques. La disparité interprétative relève du système de valeurs socio-culturelles, tandis que la disparité de leur application diffère selon les disponibilités d’ordre matériel.
Il est important de préciser, que lorsqu’on raisonne en termes de droits contradictoires on les aborde en tant que processus, et non pas en tant que principes. En tant que principes ces droits sont, certes, universellement applicables, mais en tant que processus ils se heurtent au système de valeurs socio-culturelles, ainsi qu’aux disponibilités d’ordre matériel.
Pour mieux articuler ce propos, il convient de rappeler que les droits fondamentaux furent institutionnalisés à un stade de l’histoire où les sociétés révélaient déjà des formes différentes d’évolution. Appelée également construction socio-historique, cette évolution diffère d’un pays à l’autre, selon la quantité et la qualité des acquis socio-historiques. Dès lors, au moment de leur publication certains droits rentrent automatiquement en contradiction avec l’existant socio-historique, c’est-à-dire les acquis d’ordre économique, social et culturel.
Notons entre autres, que le facteur socio-culturel rentre en incohérence avec les droits fondamentaux dès leur institutionnalisation (transcription) au niveau national, tandis que le facteur matériel rentre en incohérence une fois le déséquilibre population/ressources déclenché.
L’impact du système de valeurs socio-culturelles
Pour mieux illustrer la première incohérence on fait référence à la Charte des Nations Unies qui proclame les droits fondamentaux considérant, on cite « que les Etats Membres se sont engagés à assurer, en coopération avec l'Organisation des Nations Unies, le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales ». Or, dans la triste réalité, les Etats étant déjà constitués culturellement et socialement, adoptent ces valeurs universelles à leur contexte socioculturel. Dès lors, l’égalité des droits entre hommes et femmes est entravée par des facteurs d’ordre coutumier ou religieux, tandis que le progrès social est entravé notamment par l’existence des catégories sociales imperméables.
Visiblement, si on traite ces principes fondamentaux à travers le processus dont ils font, ou doivent faire l’objet, on remarque une série d’incohérences.
L’article premier de cette Déclaration affirme l’égalité en droits et en dignité. Néanmoins, étant déjà définis par les catégories sociales d’appartenance, les statuts sociaux entravent l’égalité en droits, tandis que la situation matérielle et financière entrave l’égalité en dignité, ou du moins, quelques aspects de la dignité. Or, diminuer les inégalités matérielles se heurte à l’article 17, qui consacre le respect de la propriété privée. Puis, diminuer les inégalités sociales à l’intérieur d’une société se heurte à l’article 18, qui consacre le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, sachant pertinemment que la religion est au fondement de la culture et des coutumes, l’ensemble étant à l’origine des inégalités sociales.
Ensuite, l’article 23 confère à toute personne le droit au travail sans aucune discrimination de rémunération. Certes, mais l’alinéa 3 de l’article 26 octroie aux parents le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants. Donc, même si en principe le droit n’implique pas de discriminations, elles s’opèrent en amont vue que le programme scolaire n’est pas uniformisé. Selon leur position sociale et leur situation matérielle, les parents choisissent pour leurs enfants le type d’éducation, donc de spécialisation, choix qui les rendent inégaux sur le marché du travail. Ce qui laisse entendre, que la culture rend contradictoires les droits fondamentaux lors du passage du stade de principe au stade de processus.
Cependant, et paradoxalement, au nom de leur culture les hommes ne remettent pas en question les inégalités à l’intérieur de leur société, mais au nom de la Déclaration universelle des droits de l'homme, ils exigent le respect de ces droits, ainsi que le partage équitable des richesses planétaires. S’illustre alors, à la fois l’incohérence entre ce qu’on appelle droits universels et patrimoine culturel, ainsi que le caractère contradictoire, ou ambivalent, que revêtent les acteurs humains.
Or, c’est justement cette attitude contradictoire qui entrave la faisabilité des droits fondamentaux. Car, en légitimant les inégalités sociales à l’intérieur de leur propre société, ils légitiment inconsciemment les inégalités, donc implicitement les inégalités entre nations, ainsi que la hiérarchie des puissances.
L’impact du facteur matériel
Quant à l’incohérence entre les droits fondamentaux et le facteur matériel, il est important de préciser que dès l’instant que le rapport population/ressources est déséquilibré, la préoccupation alimentaire devient l’exigence de premier ordre (pour un ménage ou pour un pays), cela au détriment de tout autre droit fondamental. Or, et cela à l’encontre de tout savoir de sens commun, ce déséquilibre est redevable surtout aux mentalités locales.
Rappelons à ce titre, qu’au moment de la création des Etats concernés par la pauvreté (notamment ceux d’Afrique) le rapport population/ressources étaient en équilibre, car le principe du partage conventionnel du territoire d’Afrique pour constituer ces Etats, reposait sur un équilibre entre la population existante et les ressources environnantes. Donc, si aujourd’hui il y a un déséquilibre, il est redevable principalement, à l’augmentation de la population. Or, la croissance démographique spécifiques aux pays du sud découle d’un système de valeurs, qui valorise et encourage la fécondité.
En règle générale, tout individu doit s’adapter à son contexte socio-historique, sachant que l’adaptation est le devoir fondamental de l’être humain. Dès lors, les populations du sud avaient pour devoir d’accompagner l’introduction des principes fondamentaux dans leurs sociétés, en s’adaptant progressivement aux exigences relatives à ces droits dits universaux.
Ces exigences concernent, entre autres, un équilibre raisonnable entre ressources et population, afin de développer en parallèle les infrastructures économiques, ainsi que les Institutions dont requièrent un pays démocratique, notamment l’Ecole. Mais dans la triste réalité, la plupart des pays du sud ont connu une explosion démographique, indirectement proportionnelle à leur développement socio-économique, ce qui a étouffé l’Economie.
Certes, d’autres facteurs sont à prendre en considération. Néanmoins, le système de valeurs locales, qui nourrit une attitude modérée, voire réticente, quant à l’activité productive économique, mais qui tout au contraire valorise la fécondité, est fort responsable de la non-effectivité des droits fondamentaux.
D’une part, parce que par tradition l’action productive et lucrative n’étant pas une valeur dominante dans ce système socio-culturel, s’est traduite au fil des siècles par un faible stock d’acquis matériels et immatériels. Ensuite, parce qu’en valorisant la fécondité, il a fait en sorte que pendant les derniers 50 ans, le développement démographique a été nettement supérieur au développement économique, ce qui a conduit actuellement à un déséquilibre local entre ressources disponibles et population, paralysant la dynamique sociale et économique. Dès lors, sans développement économique, les Institutions qui devraient, de facto, consacrer et défendre les droits universaux sont, soit peu fiables, soit inexistantes.
Rappelons qu’en vertu de l’article 25 de la Déclaration Universelle, chaque Etat doit assurer les revenus nécessaires, afin que les acteurs sociaux accèdent au minimum d’alimentation, d’habillement, de logement, ainsi que de soins médicaux. Néanmoins, pour les pays qui ont fait l’objet d’une explosion démographique au-delà de leur ressources (naturelles, matérielles, immatérielles), ces droits deviennent inapplicables de l’intérieur.
Selon l’’article 22, par exemple toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale. Mais l’article précise bien que cela doit se faire en raison des ressources de chaque pays. Evidemment, plus le taux de la population accroît, par rapport aux ressources naturelles, plus le montant dédié à la sécurité sociale baisse.
Pareillement, l’article 26 de la Charte des droits universaux, confère à toute personne le droit à l’éducation, notamment l'enseignement élémentaire. Néanmoins, pour les pays pauvres et peuplés, le budget de l’éducation est sacrifié au titre de l’alimentation.
En somme, on constate que l’application pratique, et surtout, le respect des droits fondamentaux, ne vont pas de soi. Tout au contraire, dans la vraie réalité ces droits universaux requièrent, d’une part certaines dispositions mentales favorables à leur insertion sociale, ensuite un niveau économique suffisamment élevé pour entretenir toutes les Institutions au service d’une véritable Démocratie. Néanmoins, ces deux exigences sont fortement, et historiquement, déterminées, et souvent infléchies, par les mentalités locales, donc par le système de valeurs spécifique à chaque nation.
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