Cumul des mandats et consanguinité du monde politique avec celui des affaires, fléaux de la « démocratie » Française
Malgré la loi de 2014 sur le non-cumul des mandats, la France reste le mauvais élève de l’Europe
Désormais, pratiquement tous les pays occidentaux connaissent, en droit ou en fait, le non cumul des mandats. Depuis le 14 Février 2014, la Loi n° 2014-125 interdit le cumul de Député ou de Sénateur avec celle de Député Européen et celles de Députés, Sénateurs, Députés Européens avec des fonctions exécutives locales (Maire, maire d’arrondissement, Maire de secteur, Maire délégué adjoint au Maire, président et vice Président d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, Président et vice Président de Région, Président et vice Président de Conseil Général). Toutefois, l’entrée en vigueur de la loi n’aura lieu que lors du prochain renouvellement de l'Assemblée nationale, soit en 2017. Concernant le non-cumul pour les Députés Européens, celui-ci ne s'appliquera qu'à partir de 2019.
En France 84% des députés et 72% des sénateurs cumulent (source : Vie publique). Dans les autres pays européens, pas plus de 20% des élus en moyenne cumulent. Le cumul des mandats reste largement une spécificité française que notre pays ne partageait, jusqu’à une période relativement récente, qu’avec l’Irlande. Or, même celle-ci l’a interdit en 2003.
Le cumul des mandats donne lieu à une pratique très résiduelle dans les autres pays européens,
En Belgique, par exemple, règne une interdiction stricte : un parlementaire ne peut siéger dans une assemblée régionale ou provinciale mais il peut exercer un mandat communal. En Espagne, les députés n’ont pas le droit d’être élus dans un parlement de communauté autonome. Les sénateurs ont cette faculté, mais ils ne perçoivent alors que leur indemnité parlementaire, ce qui rend ce cumul peu attractif.
En Allemagne, la Cour Constitutionnelle juge que l’exercice simultané des fonctions au Bundestag (parlement fédéral) et dans un Landtag (parlement régional) est incompatible avec la Loi fondamentale. Pour ces trois premiers pays où règne un système politique à caractère fédéral, la crainte d’un fractionnement de l’autorité législative nationale est fréquemment invoquée pour condamner les situations de cumul.
L’Italie connaît une situation intermédiaire : députés et sénateurs peuvent siéger au parlement européen mais ils n’ont pas le droit d’être conseillers régionaux. En outre, les maires des communes de plus de 20 000 habitants ne peuvent être élus au parlement.
Au Portugal, un cumul très limité est autorisé. Un député de l’assemblée nationale portugaise ne peut détenir un mandat de député européen ou être membre d’un exécutif local, mais il peut siéger en tant que simple Conseiller municipal.
Lorsqu’il n’est pas réglementé, le cumul donne lieu à une pratique très résiduelle dans les autres pays européens, les élus craignant sans doute, s’ils s’y adonnaient, de le payer en termes d’impopularité auprès des citoyens qui s’opposeraient ainsi à leur élection. Ainsi, au Royaume-Uni, la loi n’interdit rien mais l’usage veut qu’il n’y ait pas de cumul de mandats. Les Etats membres arrivés dernièrement dans l’Union européenne ne pratiquent en général pas de cumul des mandats électifs : Chypre, Malte, Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie, Slovénie.
La règle du non cumul est aussi strictement appliquée en Norvège, pays non membre de l’UE. Aux Etats-Unis, afin d’éviter un conflit d’allégeances, on ne peut être à la fois gouverneur d’un Etat et membre de la chambre des représentants.
Les interdictions ou les limitations qui sont évoqués concernent principalement les mandats détenus dans les grandes collectivités. En outre, même lorsque la loi autorise le cumul d’un mandat de parlementaire avec celui de maire, l’observation démontre que la pratique reste exceptionnelle dans ces pays.
Pour réellement Moraliser la vie publique il faut interdire par la constitution tout cumul de mandat, mettre fin à la consanguinité du monde politique avec le monde des affaires
Moraliser la vie publique implique aussi une inscription dans la constitution d’un certain nombre de principes qui aujourd’hui ne font l’objet que d’une loi organique très sommaire et assez limitée, telle celle concernant la question du cumul des mandats. Moraliser la vie publique, c’est aussi mettre fin à la consanguinité entre la politique et le monde des affaires. Aujourd’hui cela reste un enjeu majeur et récurrent du débat politique, mais également un tabou.
Aller au-delà de la loi de Janvier 2014
La loi de du 22 Janvier 2014 qui interdit le cumul de fonctions exécutives locales (Maire, Président ou vice Président de Département, Régions) avec le mandat de député ou de sénateur, ainsi que le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen, va dans le bon sens, elle reste toutefois très insuffisants, car elle n’interdit pas totalement tout cumul de mandats et n’en limite pas la durée en cas de renouvellement.
A noter que 84 % des députés cumulent les fonctions électives, dont 58% des députés et 59% des sénateurs détiennent également une fonction exécutive locale, sans compter tous les élus locaux qui cumulent plusieurs mandats de Maire, Conseillers généraux ou Régionaux, Président ou vice Président d’intercommunalité, auxquelles vont se rajouter des Présidences ou vice présidences de Pôles métropolitains…
Interdire tout cumul de mandat et en limiter la durée en cas de renouvellement
Le cumul des mandats est une plaie pour notre démocratie, cette pratique, contribue à la mise en place progressive d’un système d’inspiration aristocratique et dynastique qui mine notre république. C'est l'invention progressive d’un corps constitué, d’un groupe distinct de femmes et surtout d’hommes, parfois de familles, qui font profession de politique.
Le cumul en est la clé de voûte dans la mesure où il réduit d’autant le nombre de mandats accessibles aux citoyens qui veulent s’engager. On peut également s’interroger sur le fait que quelques grandes écoles, ou quelques professions seulement, fournissent l’essentiel des élites politiques françaises... Les avocats, les médecins, voire des chefs d’entreprises sont à ce point mieux représentés que les artisans, commerçants, agriculteurs, ouvriers, employés, enseignants du primaire et du secondaire, infirmièr(e)s etc.
Comment s’étonner dès lors que l’électorat populaire se sente coupé des élus dans lesquels il ne se reconnaît pas ? Les votes de rejet ou d’adhésion à des thèses populistes ou nationalistes et les taux d’abstention qui battent des records à chaque élection sont là pour nous le rappeler. Si le bien public est une vocation, la politique n’est pas une « carrière ». Le cumul des mandats, avec les effets de cour, les facilités du pouvoir et de l’argent public sont des dangers contre lesquels il convient de mettre définitivement un terme sans autoriser la moindre dérogation. Ce qui veut dire qu’il n’est pas possible de cumuler deux mandats de quelque niveau que ce soit, même avec celui de modeste Conseiller Municipal de village.
Interdire tout cumul des mandats améliorerait incontestablement le renouvellement du personnel politique, toutefois il faut aller au-delà en interdisant qu’au cours d’une vie publique l’on ne puisse exercer plus de deux fois le même mandat. Pour tous les mandats la durée ne doit par ailleurs pas excéder cinq ans.
Mettre fin à tout cumul de mandat et en limiter la durée de renouvellement implique son inscription dans la constitution.
Instituer le référendum d’initiative révocatoire
Le référendum révocatoire d'initiative citoyenne est censé permettre aux électeurs d'une circonscription ou d'un État d'exprimer leur désaccord politique ou leur perte de confiance vis-à-vis d'un élu qui fait mal son travail ou s’il transgresse son contrat électoral en demandant sa révocation avant la fin de son mandat. Il doit être inscrit dans la Constitution.
Il existe aux USA, en 2011, dans 17 États (sur 50) au total, 150 tentatives de recall : 75 ont abouti à la révocation de la personne visée. La plupart du temps il s’agit de la mise en cause des maires des communes. Le plus célèbre recall est celui du 7 octobre 2003 en Californie : le gouverneur Gray DAVIS a été révoqué. Arnold Schwarzenegger a été élu à sa place.
Au Venezuela, le président Hugo Chavez avait fait modifier la Constitution en 2004 pour introduire le référendum de révocation. La consultation du 15 août 2004 lui a immédiatement été favorable.
La décision doit appartenir aux citoyens de la circonscription électorale, dont dépend l’élu(e) concerné(e). Pour les Députés, bien qu’il s’agisse d’une élection Nationale, le fait qu’ils ou elles soient élu(e)s d’une circonscription territoriale au scrutin majoritaire, cela permet de procéder de la même manière que pour les élu(e)s des collectivités territoriales.
Si le principe doit être inscrit dans la Constitution, c’est la loi qui doit définir les conditions d’organisation du référendum révocatoire, en fixant le seuil nécessaire pour le permettre
Introduction dans toutes les assemblées d’un quota de citoyens tirés au sort
Qu’il s’agisse des assemblées territoriales ou de l’Assemblée Nationale, afin de mieux conjuguer la démocratie représentative avec la participation des citoyens par plus de démocratie directe, un nouveau bol d’air démocratique implique une innovation qui doit se traduire par un quota de citoyens tirés au sort, un peu comme dans cours d’assises. Ces représentants des citoyens tirés au sort dans les diverses assemblées bénéficieraient des mêmes droits et seraient assujettis aux mêmes devoirs que les élus au suffrage universel. Cette disposition serait rajoutée à l’article 1 de la constitution, 2 eme alinéa
Introduire un quota de citoyens tirés au sort pour siéger dans chaque assemblée Nationale et territoriale, c’est aussi contribuer à la démocratie directe.
Mettre fin au système de consanguinité monde politique - monde des affaires. Des liaisons dangereuses, peu visibles, mais lourdes de conséquences
A Droite
Les cas les plus documentés et sans nul doute les plus nombreux concernent la droite. Au cours de la dernière décennie, Nicolas SARKOZY a été la figure emblématique de ce qui n’est plus une dérive mais une constante. Le livre « Le président des riches » des Pinçon-Charlot constitue une remarquable enquête sociologique sur cette consanguinité du fric et de la politique, dans tous les domaines. Depuis Neuilly jusqu’aux grands dossiers publics, en passant par le contrôle des médias et mille autres manifestations de « l’oligarchie au pouvoir », avec un chef de file capable de hausser le ton en disant « les paradis fiscaux, c’est ter-mi-né » tout en les laissant prospérer en toute quiétude : le film préféré de l’oligarchie c’est « nous irons tous aux paradis ».
Les invités du FOUQUET’S donnent une bonne idée de l’entourage de l’ex-président, dans une situation où il est encerclé, de plein gré. Voici quelques-uns de ces amis, invités pour célébrer l’élection de leur champion et qui veilleront par la suite à ce que tout se passe bien pour eux et pour leurs actionnaires. Un objectif qui fut parfaitement atteint au cours du quinquennat, même en pleine crise : Vincent BOLLORE, Martin BOUYGUES, Bernard ARNAULT, Serge DASSAULT, Jean-Claude DECAUX, le belge Albert FRERE (arrivé dans la journée de Marrakech en jet privé), le banquier Antoine BEMHEIM, pour ne parler que des grands de ce petit monde.
Par la suite, le livre démontre le rôle décisif du banquier Michel PEBEREAU dans les grandes décisions prises par l’Élysée pour « sauver les banques » en faisant payer la facture aux citoyens, l’État organisant sa propre insolvabilité. Il mentionne également le va-et-vient de Patrick OUART, numéro deux de LVMH à l’époque, parti à l’Élysée entre 2007 et 2009, de retour à LVMH ensuite.
A Gauche
La Droite ne détient pas le monopole dans ce domaine et l’imbrication entre les responsables politiques de Gauche et les milieux d’affaires est pour le moins plus que choquante quand on sait, par exemple, que ceux qui conseillaient l’ancien Ministre de l’Économie Laurent FABIUS en 2000 lorsqu’il a soufflé le grand vent de baisse des impôts, dans lequel la droite s’est engouffrée ensuite, et qui a dans tous les cas bénéficié avant tout aux riches. Il affirmait même alors que la victoire aux présidentielles de 2002 en dépendait (on a vu le résultat). Ses orientations sont-elles étrangères au fait qu’à peine nommé Ministre de l’économie en 2000, et après avoir consulté son ami très proche, un de ses anciens chefs de cabinet, Serge WEINBERG, bras droit de François PINAULT, « il nomme comme chef de cabinet Bruno CREMEL, alors responsable des activités Internet du groupe Pinault-Printemps-Redoute (PPR) ? Ce dernier personnage, après la déroute présidentielle du candidat JOSPIN, réintègrera le groupe PINAULT comme numéro deux de la FNAC » (Source : Olivier TOSCER, Le monde diplomatique, décembre 2003).
Pour identifier d’autres proches de Laurent Fabius, du côté de la finance des ROTHSCHILD notamment, ou ceux qu’il invite dans sa maison de campagne (dont Serge WEINBERG, Louis SCHWEITZER …), ou par qui il est invité en privé, source : le livre : « Fabius, les brûlures d’une ambition » (2002) du journaliste du Nouvel Obs, Jean-Gabriel FREDET, plutôt en admiration devant l’animal politique de l’époque, mais qui estime que Fabius « accepte un capitalisme plus financier qu’industriel » (p. 322).
Autre exemple avec Jean-Paul HUCHON qui a été tour à tour, directeur du cabinet de Michel ROCARD à Matignon, bras droit de François PINAULT, puis vice-président d’un cabinet de chasseurs de têtes avant de devenir président de la région Ile-de-France. Autre exemple éclairant, celui de Marc-Antoine JAMET directeur de cabinet de M. Laurent FABIUS à l’Hôtel de Lassay (1988 – 1992), et en 2003 secrétaire général du groupe Louis Vuitton Moet Hennessy (LVMH) de M. Bernard ARNAULT…. Le patron de LVMH, roi de l’industrie du luxe, aurait d’ailleurs du mal à dissimuler sa considération envers le monde politique tant il a érigé le recrutement dans les palais de la République en méthode de gestion des ressources humaines.
Qui conseillait HOLLANDE en économie ? Sinon la banque d’affaire ROTHSCHILD par son représentant de l’époque un certain Emmanuel MACRON nommé depuis Ministre. La liste de ces exemples est longue et n’exclue pas certaines baronnies locales…
Que tel ou tel homme ou femme politique soit soupçonné d’irrégularités liées à des activités en liaison avec le monde des affaires trouvera sans doute un écho particulier dans la période que nous traversons. L’oligarchie industrialo - Financière est une couche sociale nuisible et insubmersible, qui résiste à toutes les alternances. Elle édicte les mêmes recommandations conformes à ses intérêts, quel que soit le gouvernement. D’ailleurs qui nous gouverne réellement, des énarques bien sur mais peu savent qu’ils sont nombreux les hiérarques de LR, UDI, comme ceux du PS a être membres de deux clubs :« le Siècle », filiale Française du club « Bilderberg » et la « French American Foundation », deux clubs parmi les plus discrets mais les plus influents dans le monde et en France (http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/qui-gouverne-reellement-135165).
Inscription dans la Constitution l'interdiction aux Députés et Sénateurs, mais pas seulement, d'exercer une activité professionnelle
S’il est difficile d’interdire toute relation à un responsable politique avec une personne issue du monde des affaires, encore faut-il que ces responsables politiques ne soient pas dépendant économiquement du monde des affaires pendant l’exercice de leur fonction, car force est de constater que bon nombre continuent à exercer des activités professionnelles (avocat, consultants, direction de société etc.) et lorsqu’ils accèdent à des fonctions Ministérielles, ils sont tenus à des « renvois d’ascenseurs »
Lorsqu'un fonctionnaire devient parlementaire ou exerce une fonction élective à temps complet il ne peut cumuler son mandat d'élu avec son emploi, pour lequel il est mis "en disponibilité" ce qui est normal. Cette disposition doit s'appliquer également à ceux qui viennent du secteur privé. Il convient donc d’interdire aux Députés, Sénateurs, aux chefs et membres d’un exécutif de grande collectivité territoriale (Régions, Départements, métropoles et communautés urbaines, grandes villes…) d’exercer une activité professionnelle de quelque nature que ce soit pendant l’exercice de leurs mandats, car trop nombreux sont celles et ceux qui cumulent une activité professionnelle avec leur mandat, ce qui implique de le graver dans le marbre Constitutionnel
Pour conclure
Une république exemplaire se doit de moraliser la vie publique en restituant le pouvoir au citoyen par plus de démocratie directe, en leur permettant de destituer les élue(e)s qui manquent à leurs obligations, d’interdire tout cumul de mandat avec une limitation de la durée de renouvellement, ainsi que de lutter contre la consanguinité entre le monde politique et celui des affaires. Mais, ne nous berçons pas d’illusions, tant que la classe politique n’y sera pas contrainte par la force populaire, toutes les promesses qui seraient faites dans ce sens se joueront à l’Arlésienne…
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