Cyclone Belal : pourquoi ce (petit) flop ?
Il était annoncé comme un monstre. Une première historique. On le supputait extrême, on l’attendait en catégorie maximale, celle équivalente à un ouragan majeur dans l’Atlantique : 4 ou 5.
217 km/h
Au final il est évalué seulement en catégorie 2. Seulement 2 ? Il a quand-même bien cogné l’île !
Oui bien sûr, force 2 ce n’est pas rien. C’est même déjà une très grosse machine atmosphérique. Mais c’est sensiblement moins qu’annoncé. Les médias ont forcé la dose. Ouest-France par exemple, la veille du passage : « Rafales de vent exceptionnelles, précipitations records, trajectoire inquiétante… Le cyclone Belal, qui passe sur La Réunion ce lundi, est exceptionnel à plus d’un titre. »
Alors que MétéoFrance prévoyait des vents jusqu’à 130 km/h et des rafales entre 150 et 250 km/h, la plupart des médias n’ont retenu que les chiffres maximaux et les ont majorés. Certains annonçaient des rafales entre 200 et 300 km/h.
Les habitants retenaient leur souffle pendant que la tempête déployait le sien.
Au final la rafale la plus forte semble être de 217 km/h, au pic Maïdo (ou pic Bernica) à 2 000 mètres d’altitude (l’altitude favorise la grande vitesse). Je ne l’ai pas encore vue inscrite sur tous les relevés mais l’annonce semble fiable. Cette info est reprise par BFMTV, plus raisonnable cette fois : « Cyclone Belal : des rafales enregistrées à 217 km/h à La Réunion. »
Historique ?
D’autres rafales en plaine on juste passé les 200 km/h mais pour la plus part d’entre elles la vitesse du vent était comprise entre 140 et 180 km/h.
Les vents réguliers ont soufflé, eux, entre 80 et 130 km/h.
Quelques chiffres pour le 15 février au matin, pendant les heures d’intensité maximale :
À Saint-Pierre au sud, vent entre 80 et 110 km/h, rafales entre 100 et 140 km/, pression la plus basse 988 hPa.
À Saint-Denis au nord, vent entre 60 et 100 km/h, rafales entre 100 et 180 km/h, pression minimale 977 hPa.
On est assez loin des records : en 1962 Jenny a engendré des rafales de 280 km/h, et 1948 de 300 km/h. Alors pourquoi le monstre attendu n’a-t-il accouché que d’un gros rat ? Où est passé le cataclysme redouté ? J'avais un petit doute, j'ai souligné le fait que le centre dépressionnaire de Belal n'était pas très creusé.
Le cyclone ne s’est pas trompé, il est comme il est. Il n’était simplement pas cataclysmique. L’erreur est ici humaine.
J’ai remarqué comment certains médias ont matraqué le sujet. Une première disaient-ils, historique claquaient-ils au micro avec cette accentuation des syllabes propres aux journalistes télé. Le tout sur un ton de défilé des armées avant la mère des batailles. L’apocalypse glissait sur l’eau en rampant à 35 km/h.
Pompon
Historique ? Pas plus que ça. C’est presque un cas d’école : météo, climat, on fait les mêmes erreurs. Pour protéger les populations on les alarme et les prépare au pire. Mieux vaut cela que d’en faire trop peu, pourriez-vous me dire. Non, car il y a de la crédibilité des annonces.
On ne peut pas tout prévoir en météo, la démonstration ici est claire. On peut se tromper. Mais en faire trop biaise la perception que nous avons du risque et notre confiance dans le système. Sans compter l’état de stress psychologique alimenté par cet alarmisme.
Le monstre annoncé comme un T-Rex météorologique n’était, dans cette comparaison animalière, qu’un diable de Tasmanie.
La plupart des médias tient un discours anxiogène sur ce genre de sujet. Au point de ne plus vérifier. Ni de donner de suivi : il n’y a pas d’émission spéciale « désastre » après le passage de Belal. Parce qu’il n’y a pas assez de désastre ?
Et dans cette dérive journalistique le pompon revient à la RTS. Hier, sa page sur le cyclone a été publiée à 12h45 suisse (soit 15h45 à La Réunion) après le passage du cyclone (de 8 à 11 heures locales).
Vérification ?
La page a été réactualisée à 17h38. C’est toujours après la phase la plus forte du cyclone.
L’article propose en tête une vidéo d’une minute. Sous cette vidéo, une légende : « L’œil du cyclone Belal a traversé l’île de la Réunion ce matin avec des rafales de vent de 250 km/h / 12h45 / 1 min. / aujourd'hui à 12:45 ».
Où sont les rafales de vent de 250 km/h qui sont présentée ici comme ayant eu lieu ? Quelle est la source ?
Le site de MétéoFrance publie ici une page avec une carte interactive sur les vents et les pluies pour ce cyclone. Le lundi 15 à 11 heures locales, les rafales maximales sont de 150 km/h. Celle de 217 km/h n’y est même pas indiquée.
Comment la RTS valide-t-elle ces rafales à 250 km/h, rafales que personne n’a enregistrées ? En aucune manière. Le chiffre tombe du ciel. Le pigiste ou le journaliste n’a rien vérifié. Il est resté sur les annonces d’avant et les a reprises après comme si cela avait vraiment eu lieu. Or, rien ne permet d’affirmer qu’elles ont eu lieu.
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