Dans la presse en 2013 : lorsque la République française s’effondrera
A lire attentivement la presse de ces derniers mois, on peut déceler dans l'air médiatique un « parfum d'années 30 », parfum fait de rumeurs de putschs ligueux et même, de craintes de guerre européenne. S'il est encore un peu trop tôt pour appeler les citoyens aux armes, ces informations d'un genre nouveau n'en constituent pas moins un indicateur intéressant, et amusant, d'une époque qui ne sait décidément plus quoi attendre d'une crise qui n'en finit pas, sinon se préparer à tout, même au pire.
Pour qui s'intéresse aux informations autres que celles servies par les flux d'actualité mainstream, notre époque apparaît comme particulièrement savoureuse, surtout pour les amateurs de ce que l'on nomme l'« ironie de l'histoire ».
Cette ironie transparaît ainsi de deux informations reléguées en marge des grands sujets d'actualité à quelques mois d'intervalle.
Début-juin, un blog, relayé les jours suivants par plusieurs médias généralistes, nous en informe : certains cercles, trop irrités par la politique gouvernementale, s'intéresseraient sérieusement à la possibilité d'un coup d’État militaire, en France. Un coup d’État en France – rien de moins. L'expression est lâchée, elle qui ne l'avait plus été depuis plusieurs décennies. Certes, il faut s'empresser de préciser que ce projet est prêté à quelques officiers soutenus par une nébuleuse d'extrême-droite née sur le contre-coup de la loi du « mariage pour tous ». Toutefois, la résurgence d'une telle information, du reste non démentie par les intéressés, vient peut-être mettre en terre le mythe d'une France à jamais protégée de ses vieux démons politiques.
Plus récemment, c'est encore la France qui est à l'honneur d'un article de presse, suisse celui-ci. Un quotidien romand nous a en effet appris qu'un récent exercice de l'armée suisse a pris pour scénario celui d'une confédération helvète attaquée par son voisin français ou pour être plus précis, de ce qu'il en resterait après son implosion politique. Au probable grand soulagement de la communauté internationale, cette simulation a vu la victoire des troupes helvètes. Mais contre qui les blindés suisses ont dû se battre au juste ? Contre des paramilitaires provenant d'un des États voyous nés sur les ruines d'une France victime d'une ultime crise économique et sociétale. On pourrait voir dans le choix de ce scénario la trop grande imagination de hauts-gradés suisses rongés par l'ennui et trop peu soucieux d’entretenir des relations diplomatiques cordiales avec les pays limitrophes. Mais il est permis d'en douter : déjà en 2010, l’État-major suisse avait accordé à la France l'honneur d'être élevée au rang de menace militaire sérieuse, au même titre que l'Italie, l'Espagne et la Grèce. Pour l'armée helvète, la crise économique, au plus fort en 2010, aurait pu menacer la stabilité de ces pays au point de déboucher sur de sérieuses complications géopolitiques. Trois ans plus tard, on ne voit pas encore trace de millions de réfugiés français ou italiens cherchant asile en Suisse, ni celles de groupes paramilitaires imposant leur loi sur les décombres de la République. On ne peut toutefois s'empêcher de se demander si une telle information – la préparation d'un de nos voisins à une agression militaire française – aurait pu voir le jour avant-crise, il y a de cela dix ou vingt ans.
S'il serait grotesque d’accorder à ces quelques informations plus de valeur qu'elles en ont, c'est-à-dire celle de faits-divers, il n'en demeure pas moins qu'elles témoignent de l'apparition de pertes de repères et d'angoisses d'un genre nouveau, en France et en Europe. Et rien ne saurait les prévenir de croître si n'apparaissait pas rapidement la perspective de réponses à la crise actuelle.
Somme toute, que certaines personnalités publiques estiment possible un renversement de la République française et qu'elles reçoivent un petit écho médiatique n'est pas plus inquiétant, dans un contexte de crise économique majeure, que de contracter une légère infection après s'être blessé. Mais sans soins adaptés, l'infection est susceptible tôt ou tard de dégénérer en septicémie, surtout si le malade, las, ne voit plus d'autres perspectives d'avenir et de loisir que le développement de sa maladie.
17 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON