Darfour : le temps de l’action ?
Par Mahor Chiche, président de Sauver Le Darfour France, et Jérôme L. J. di Costanzo, correspondant à Londres de Sauver Le Darfour Europe.
Sous la pression de l’opinion publique, le ministre des Affaires étrangères français, Bernard Kouchner, avait organisé en juin dernier la première initiative diplomatique sérieuse sur le Darfour : la conférence de Paris.
De cette première, on pouvait espérer raisonnablement des jours meilleurs pour les populations martyres du Darfour, les événements des dernières semaines nous forcent à constater, qu’il y a une dégradation de la donne géopolitique par un élargissement de la zone de conflit et par voie de conséquence une dégradation de la situation humanitaire.
Le risque d’extension est devenu une réalité, aujourd’hui c’est bien l’ensemble de la Corne de l’Afrique qui est déstabilisée, personne ne peut plus affirmer que la crise du Darfour est « sous contrôle » !
Les récentes offensives des forces gouvernementales soudanaises et des miliciens Janjawids contre les forces rebelles du Mouvement Darfouris « justice et égalité », le « JEM », de Khalil Hibrahim (qui bénéficiait du soutien logistique du Tchad) ont entraîné l’exode de 12 000 Darfouris.
Lundi 11 février, le Premier ministre tchadien a annoncé que son pays n’avait pas la capacité d’accueillir plus de réfugiés. Il s’agit-là d’un nouveau déséquilibre pour ce pays qui, rappelons-le, est sur le point de sombrer encore une fois dans une guerre civile opposant le gouvernement d’Idris Deby à des forces rebelles soutenues par Khartoum. Pour la sécurité des camps de réfugiés et leurs populations, il faut une fois encore regretter le retard pris dans le déploiement de la force Eufor.
Cinq ans après le début des hostilités, l’impuissance de la communauté internationale à proposer une sortie de crise est manifeste.
Le nettoyage ethnique, qui avait connu une certaine accalmie, reprend. Bombardements, attaques de miliciens Janjawids, destruction de villes...
La mécanique infernale est à l’œuvre.
D’une situation de massacres à grande échelle, cantonnée à l’intérieur de frontières nationales bien délimitées, se bornant à l’affrontement de factions ethniques à l’intérieur du Soudan, la misère du Darfour s’étend à un no man’s land sans précédent.
Entre l’opposition de deux régimes, Khartoum et Njamena, il y a au milieu, des populations civiles cherchant à fuir l’implacable barbarie de la guerre. Le chaos et la misère se propagent, selon un axe Nord-Sud, en suivant le Nil. Il convient de constater la création d’une zone de fracture partant de Khartoum à la corne de l’Afrique. Après le Tchad, la République centre-africaine risque d’être elle aussi déstabilisée.
Cette politique d’ambitions régionales est avant tout la conséquence de l’onde de choc de la politique d’Omar El-Bechir.
Khartoum, qui mène une politique de domination régionale et de contagion de sa doctrine radicale, teste depuis cinq ans la capacité de réaction de la communauté internationale. Dernière provocation du régime en date, la nomination au pouvoir la nomination du chef Janjawid Cheikh Moussa Hilal comme conseiller auprès du ministre des Affaires fédérales.
Plus de 200 000 morts, 2,5 millions de déplacés, le plus grand déploiement humanitaire depuis la création de l’ONU, vingt résolutions et une conférence de paix, pour constater qu’aucune négociations de paix sérieuses n’ont été entamées, aucune sanction crédible n’a été mise en place, aucun déploiement militaire conséquent n’a permis de stopper l’horreur...
Devant ce constat, il est clair désormais que la solution sera régionale et passera par une réelle implication de l’Union européenne. Il est temps de mettre en œuvre les diverses solutions préconisées par les groupes d’experts tels la zone d’exclusion aérienne ou le gel des actifs des responsables soudanais...
La communauté internationale a trop attendu, sa naïve tolérance n’a fait en rien fléchir Omar El-Béchir. Il est temps d’agir pour sauver les populations du Darfour, il est temps d’appliquer les résolutions de l’ONU, il est temps de tenir parole : une force internationale de protection des civils doit être déployée.
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