De Barnier en Bayrou
de Barnier en Bayrou …
Quelques individus (1) gagnant leur vie dans l’exercice de fonctions conférées par l’élection ( ou en découlant), sont possiblement en train de « tuer » le système de 1958 (2) (ou, sous un autre rapport, de se « savonner la planche »). C’est ce qu’on peut raisonnablement déduire des évènements récents, avec les nominations successives des gouvernements Barnier et Bayrou.
C’est que le système de 1958 ne pouvait marcher que si le chef de l’Etat suscitait l’adhésion populaire (pour ce qu’il portait et faisait sérieusement espérer). Et que si ce dernier disposait par ailleurs d’une majorité parlementaire (3) qui le laisse utiliser ses prérogatives dans le sens voulu par les rédacteurs de la constitution.
Les évènements récents marquent le retour aux « moeurs » de la classe politique française. Avec notamment, - la distributions des postes de ministres faisant l’objet de tractations et de marchandages ( que les intéressés et médias se font un plaisir de mettre sur la place publique) ; un gouvernement, nommé avec difficultés et lenteur, qui ne repose pas sur une majorité franche, mais sur des combinaisons incertaines et instables d’individus. Le tout, comme jadis, dans une grande stabilité … mais du personnel politique faisant carrière. Puisque ceux qui ont quitté récemment les fonctions ministérielles qu’ils avaient eues sous des étiquettes diverses, retrouvent, comme dans le passé, un « maroquin » dans un autre assemblage de personnes.
Bref, l’époque Macron marque la résurrection des habitudes françaises : le « régime des partis ».
Retour qui semble pouvoir être attribué à deux facteurs :
1/ Le président actuel a été élu, non parce qu’il incarnait la réponse à un besoin du pays. Mais parce qu’il a été « fabriqué », comme les faits l’indiquent, par une poignée de gens de connivence, a été soutenu par les moyens de ces derniers, et a été « vendu » aux électeurs par une sorte d’intense campagne publicitaire - donc par des techniques de marketing / manipulation- . Ce même président a, en plus, été itérativement désavoué par les votes postérieurs des citoyens.
2/ aucune majorité de rechange ne permet la reproduction de ce qu’on a appelé la « cohabitation » (4).
Surtout que les groupes politiques qui sont à la manoeuvre sont d’accord sur l’essentiel. Qui est de continuer à vivre dans le nouveau contexte institutionnel (de 1992 et des années suivantes) selon lequel les institutions françaises ne peuvent utiliser leurs compétences que dans le cadre des objectifs et selon les limites de ce qui est imposé de l’extérieur (5).
Aussi, le sentiment s’est-il répandu que la société française, du fait du jeu et des pratiques des titulaires de postes décisionnels (et / ou du fait des tournures intellectuelles ou psychologiques particulières de quelques uns), s’apprête à toucher le fond.
Paradoxalement, lorsqu’elle touche le fond du fait de sa classe politique, la France n’y reste pas.
C’est ce qu'enseigne l’histoire constitutionnelle (*). Laquelle fait apparaître que le peuple français finit toujours par accepter - quand … « trop c’est trop » - qu’un individu sortant du commun (6), se propose pour prendre un jour les rênes, et ( si la classe politique n’a pas réussi à l’éreinter) mettre de l’ordre. Et fasse en sorte que la société française … sorte de là où elle avait fini, de par sa classe politique, par patauger.
Certes l’histoire enseigne que le redressement ne dure pas forcément très longtemps avant que les habitudes ne reprennent le dessus - voir aussi celle de la V° République (*) - … Mais il se produit
A l’heure actuelle, les questions qui semblent pouvoir être dégagées des faits actuels sont :
Quand (à l’occasion de quel événement) ?
Qui ?
Marcel-M. MONIN
ancien m. de conf. des universités
(1) Y compris beaucoup de ceux qui s’affichent encore comme étant fidèles à la pensée et à l’éthique du général de Gaulle ; et qui, comme tous les êtres humains, doivent penser à leur soupe, laquelle n’est plus servie en contrepartie du soutien à de Gaulle.
( 2) Ce qui, sous un certain rapport, n’est pas une nouveauté. On se rappelle ( certes dans un contexte fort différent) la « crise du 16 mai » ( 1877) au cours de laquelle la classe politique neutralisa les mécanismes mis en place par les lois constitutionnelles de 1875 (*).
(3) Michel Debré (en réponse à la question que nous lui avions posée - il y a bien longtemps- dans une conférence organisée à la faculté de droit de Paris) avait déclaré en substance ce qui suit. Si les gens du général de Gaulle avaient perdu les élections organisées après la promulgation de la nouvelle constitution, ils se seraient retirés, le général de Gaulle en tête.
(4) Lorsque les élections s’analysèrent en un désaveu pour le chef de l’Etat et son clan, les présidents Mitterrand et Chirac, qui n’avaient pas terminé leur mandat s’accrochèrent à malgré tout leur poste (malgré l’échec électoral.) Ce comportement n’eut pas trop de conséquences sur le fonctionnement des institutions parce que chaque fois que cela se produisit, le gouvernement suivant put s’appuyer sur une ( autre) majorité parlementaire.
Ce qui fait qu’entre le chef d’Etat s’agrippant au poste, et le Premier Ministre venu de chez les adversaires , s’opéra une forme de distribution des rôles … qui « marcha ». Probablement parce les vainqueurs de l’élection législative, les Premiers Ministres en tête, ne s’en sentirent pas beaucoup contrariés.
(5) Ce qui invite les politiques aux affaires à convaincre les citoyens de supporter les conséquences négatives pour eux de la mise en oeuvre de la politique économico-sociale inscrite dans le texte de traités. Et ce qui explique que beaucoup de « choses » aillent à vau-l’eau. Puisque « rectifier le tir, » supposerait de remettre en cause le fond des traités (les intérêts que leurs dispositions visent à défendre) et le mode supranational de gouvernement privant techniquement les peuples -( directement ou par représentants qui auraient à coeur de représenter ) de s’y opposer facilement . Il est symptomatique de constater que les ministres actuels ( comme leurs prédécesseurs immédiats d’ailleurs) prennent leurs fonctions en disant : « - que ça ne va pas, et qu’il faut … » , … « - qu’ils vont prendre des mesures… ». Alors que le président de la République, qui nomme ces gens, est en place depuis sept ans. Et que sept ans après, ce sont les mêmes constatations de carence et les mêmes litanies qui sont reprises et répétées en boucle.
(6) et n’étant pas l’un des marmitons de la cuisine politicienne …
(*) … dont on trouvera des éléments dans notre commentaire de la constitution : « Textes et documents constitutionnels depuis 1958. Analyses et commentaires. Dalloz-Armand Colin) .
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