De la justice
De la justice
Le concept de justice, consusbstantiel à l’humanité, émane naturellement de celui de loi, consubstantiel à l’univers, qui induit naturellement ceux d’accident, d’erreur ou de faute, consubstantiels à celui de loi. La doctrine du Christ, qui éclaire celle de l’Ancien Testament, fondée sur la loi naturelle reçue par Moïse sur le mont Sion, affirme la notion de péché originel, qui se déduit logiquement de l’existence de cette loi naturelle et qui explique qu’il n’y a pas de société humaine sans justice, puisque la faute est inhérente à l’homme et que la justice est la correction de la faute, exigée pour la conservation de la loi, car la loi naturelle est la source de l’harmonie des sociétés humaines.
La faute vient de la liberté qui est donnée à l’homme par la loi. La connaissance de la loi n’empêche pas la faute, bien au contraire elle la suppose, car la différence entre la faute et l’erreur, c’est la conscience : L’homme libre est responsable de ses actes parce qu’il en est conscient, c’est pourquoi lorsqu’il viole la loi, il commet une faute. Et la loi des hommes relevant nécessairement d’une loi inhérente à leur nature, ses principes les plus fondamentaux sont instinctivement connus de tout homme dès qu’il accède à la conscience : Il n’est pas nécessaire d’avoir étudié pour connaitre que le meurtre est un crime, c'est-à-dire une faute grave.
On peut donc en conclure que la loi est inhérente à l’homme, c’est pourquoi il n’y a pas de société humaine sans institution judiciaire. En effet, celle-ci est nécessaire pour maintenir les hommes dans le cadre de la loi. Les pulsions individuelles pouvant être, en chaque homme, plus ou moins désordonnées, il est nécessaire de réprimer celles qui sont nuisibles à la communauté, afin de maintenir la société humaine dans l’harmonie de la loi.
L’idée qui prétend que la punition n’est pas dissuasive, couramment répandue aujourd’hui, n’est qu’un misérable mensonge visant à désintégrer la justice, ce qui engendre le chaos. La justice commande au contraire que la faute soit réprimée, afin d’engendrer la crainte de la loi, qui est la source de son respect. D’où il vient que le symbole de la justice est la balance à deux plateaux, au milieu desquels se situe l’aiguille qui sert à mesurer. Et que mesure cette aiguille ?
Le premier plateau de la balance symbolise la faute commise, et le second la peine qui lui est appliquée. Le fléau de la justice permet d’ajuster la peine à la faute. La peine est infligée au fautif en dépit de sa volonté personnelle qui aura toujours tendance à chercher à la faute une excuse afin d’éviter la peine, mais la force de la loi est de contraindre le coupable.
Tout le savoir de l’institution judiciaire est donc dans la mesure de la faute, afin de lui appliquer une peine appropriée. Sur une balance juste, il n’est pas possible de tricher : L’aiguille doit se situer exactement au milieu entre la faute et la peine, et c’est le rôle du juge de prendre cette mesure avec précision.
Car, en effet, la justice elle-même doit être parfaite afin que l’institution judiciaire soit acceptée par le peuple, et c’est là toute sa difficulté : La notion de tare, que doit prendre en compte le négociant lorsqu’il mesure sa marchandise afin de ne pas léser son client, intervient de même en justice sous la forme de circonstances, atténuantes ou aggravantes : Le rôle du juge est d’en prendre la mesure précise, c'est-à-dire de les ajuster à la conscience du prévenu et à la cause de la victime, sans perdre de vue la gravité de la faute elle-même. A titre d’exemple, la qualification de viol n’aura pas la même gravité si la victime est un enfant de huit ans ou si elle est une adulte prostituée notoire : Le juge tiendra compte de cette différence de circonstance, car appliquer la même peine à ces deux cas serait une injustice flagrante.
C’est ici que l’on perçoit la fragilité de la justice : Sa balance peut être faussée dès qu’elle est confiée à un juge incompétent, lâche ou pervers, qui infligera alors à la faute une peine inappropriée, c'est-à-dire ne prenant pas la mesure précise de la faute et de ses circonstances.
Le coupable doit répondre de ses actes en fonction de ce qu’il possède, et jusqu’à sa vie si nécessaire : Ici encore, on remarquera que condamner à mort un escroc n’ayant commis aucune violence serait injuste car il n’a pas engagé la vie dans sa faute, tandis que le meurtrier, selon la loi naturelle, a engagé sa vie dans son meurtre, et elle peut donc lui être ôtée si les circonstances n’atténuent pas l’abomination de ses actes.
Si l’aiguille de la balance penche outrancièrement du côté de la peine, la justice est tyrannique : Dans ce cas, elle peut condamner à mort un voleur de pomme. Si l’aiguille penche outrancièrement du côté de la faute, la justice est laxiste : Dans ce cas, elle peut relaxer un violeur ou un meurtrier. Dans les deux cas, « justice » n’est plus qu’un nom, la loi finit par s’effondrer et la société sombre dans le chaos, car l’injustice engendre la colère.
Face à une justice ayant sombré dans la tyrannie, cette colère se traduira par des soulèvements de foules contre les institutions, les individus étant amenés à mépriser puis haïr un système judiciaire qui les opprime outrancièrement, tandis que face à une justice ayant sombré dans le laxisme, c’est la société elle-même qui fera office de tyran, l’absence de punition étant un clair encouragement à débrider les pulsions désordonnées de la nature humaine : Les bourreaux ne sont alors plus les éxécutants désignés par le pouvoir judiciaire, qui finit par s’incliner devant le délinquant, mais ce sont les criminels qui, n’ayant plus aucune crainte de la justice, finissent par pulluler au point de dresser une armée de malfaisants tyranniques qui frappent injustement, aveuglément et en tout lieu les citoyens, à la manière imprévisible des catastrophes naturelles. Si, de plus, ces voyous disposent d’une doctrine cohérente qui les organise et les encourage à multiplier aveuglément leurs crimes, alors le chaos viendra sans tarder, et la société humaine ne sera plus qu’une vallée de larmes.
Pire encore, si la justice est confiée à des hommes lâches et/ou pervers, ils feront preuve à la fois d’une implacable tyrannie envers les faibles commettant des délits sans atteinte aux personnes, les dépouillant impitoyablement au moindre écart, mais jugeront avec un ahurissant laxisme les véritables voyous répandant tous les vices, y compris la violence gratuite ou débridée : Un tel système judiciaire serait le pire que l’on puisse trouver, et la société dans laquelle il s’exercerait ne pourrait durer un demi-siècle, car l’oppression des faibles y serait double : et par le système judiciaire, et par l’impunité des voyous pouvant s’ébattre sans crainte parmi les gens honnêtes comme les loups parmi un troupeau sans chien ni berger : la fin d’un tel système, que l’on peut nommer « trahison institutionnelle », est nécessairement la guerre civile.
A ce point précis de notre analyse, il importe que le lecteur s’interroge sur la société dans laquelle nous sommes, afin de déterminer en lui-même sous lequel de ces quatre systèmes il pense que nous vivons aujourd’hui : justice, tyrannie, laxisme ou trahison institutionnelle ? Cette analyse peut se poursuivre dans de nombreux développements, mais il nous semble finalement préférable de laisser à chacun le soin de la méditer à ce point précis.
Pierre Mellifont.
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