De la révision générale des politiques publiques
Liquidation des retraites ou des politiques publiques : : l’exemple de la C.R.A.M. du Gard.
La mise en œuvre de la R.G.P.P. (Révision générale des politiques publiques) et l’adoption du dogme du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux dans les administrations - qu’elles relèvent du droit public ou du droit privé - contribuent à la déshumanisation qu’a soulignée avec lucidité Monsieur Jean-Paul Delavoye, Médiateur de la République, dans son dernier rapport, et à la congestion des circuits administratifs.
Illustration dans le Gard.
Mercredi 3 novembre, n’ayant pu la joindre par téléphone (1) je me rends à l’antenne nîmoise de la C.R.A.M. (Caisse régionale d’assurance maladie). J’arrive vers 10 heures.
Je tire un ticket, il s’agit du numéro 66. Plusieurs dizaines de personnes attendent déjà. On appelle le numéro 41. Une employée du point accueil se trouve derrière un guichet, elle est seule pour accueillir le public. Un rapide calcul me laisse à penser qu’à raison de cinq minutes par personne mon attente pourrait durer au moins deux heures.
Mais il s’avère que l’employée d’accueil est également chargée de traiter les dossiers, le temps qu’elle consacre aux usagers sera donc plus près de dix minutes que de cinq minutes. D’autres bureaux existent dans cette agence et de temps en temps on en voit sortir brièvement, puis rentrer, des collègues de l’employée d’accueil, mais elle seule a un contact avec le public, le tout-venant.
Très vite, je me rends compte qu’en dépit d’un écriteau qui invite à la « politesse et au respect » la caisse ne donne pas l’exemple : les gens sont traités sans aucune considération. L’employée n’est pas en cause, elle a l’air très dévouée. Le problème c’est qu’il n’existe aucune confidentialité : dans la salle où j’attends chacun peut entendre la conversation, connaître le numéro de téléphone des personnes, leur situation matrimoniale, le (ou les) métier(s) qu’ils ont exercé, les récriminations qui leur sont faites le cas échéant.
Je constate qu’avant de connaître leur position vis-à-vis de leurs droits à la retraite les personnes devront d’abord conserver… la position debout. Certains, par souci de discrétion, font le choix de se pencher vers le visage de l’agent d’accueil. De temps en temps, entre deux usagers, un malin essaie de passer avant son tour : « C’est juste pour un petit renseignement » mais tout le monde attend justement pour un petit, ou un grand, renseignement ! Un jour, paraît-il, certains en seraient même venus aux mains.
A partir de 11 heures, miracle, une autre employée de l’agence se met à renseigner elle aussi le public qui a la chance, cette fois-ci, d’être reçu dans un bureau. J’en conclus qu’il existe donc une inégalité de traitement entre les usagers à qui n’est garantie aucune confidentialité, et ceux qui peuvent disparaître derrière une porte fermée avec l’avantage de pouvoir prendre leur temps pour exposer leur situation, puisqu’ils n’ont pas à subir la pression de la salle.
J’apprends que chaque jour, vers 11 heures, le même phénomène se produit, l’agence ferme en effet à 12 heures, il s’agit d’écouler plus rapidement le stock des futurs retraités. D’autant que l’après-midi, merci à la révision générale des politiques publiques ! l’administration ne reçoit pas le public. A ce moment-là le "point accueil retraite" n’offre point d’accueil...
Finalement je suis appelé au guichet à 11 heures 30, comme tout un chacun j’ai dû attendre longuement. Je demande simplement à connaître la date de la réunion d’information générale qui m’avait été annoncée au téléphone le 11 décembre 2009 pour la fin 2010. L’employée me dit qu’elle n’est pas au courant. Elle me précise qu’une réunion a déjà eu lieu avant l’été. Elle remplit une fiche et me demande si cela ne me gênerait pas de me déplacer dans un rayon de 10 à 20 kilomètres. J’ai la chance de posséder un véhicule en état de marche, et de conserver encore sept points de mon permis, mais je me demande comment font ceux qui n’ont plus de voiture ou qui ont perdu tous leurs points.
J’explique ensuite à l’agent d’accueil qu’ayant fait carrière dans la fonction publique, je ne justifie que de treize trimestres dans le secteur privé, je souhaiterais savoir néanmoins comment cela s’articulera avec ma retraite de la C.N.R.A.C.L. (2) Elle me répond qu’elle ne sait pas mais que la caisse procèdera à la liquidation de ma retraite. Je renonce à lui en demander une estimation, de toute façon peu substantielle, et je me dis que puisqu’on liquide les politiques publiques, on peut bien liquider ma retraite…
Une heure et demie auparavant, une dame à côté de moi m’avait donné une solution possible aux difficultés rencontrées : « Le mieux c’est de connaître quelqu’un qui travaille à la C.R.A.M. ! » C’est sûr.
Mais, dans l’attente, croyez-moi, on n’a pas du tout envie de revenir ; après tout, c’est peut-être ça l’objectif recherché.
Notes
- Deux adresses de la C.R.AM. figurent dans les pages jaunes pour la ville de Nîmes, l’une, c’est l’agence dans laquelle je me suis rendu, n’a pas indiqué de téléphone, je m’en aperçois au moment où j’appelle le numéro que j’ai lu en face l’adresse de l’agence : il s’agit du numéro d’un fax ! L’autre numéro de téléphone répond ainsi : « Le numéro que vous demandez n’est pas attribué », personne n’a eu l’idée d’indiquer un autre numéro à appeler
- Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales
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