De la révolte des bonnets rouges, à celle des gilets jaunes, le même moteur à quatre temps de l’explosion sociale
Non anticipation de la crise, transformation des victimes en coupables, mépris de la province et de ses préoccupations, passage en force de décisions dogmatiques, renforcement des injustices : L’actuel mouvement dit des gilets jaunes n’est pas sans évoquer la révolte des bonnets rouges. Je parle ici du mouvement de 1675, qui agita la Bretagne, et fut si moqué par Madame de Sévigné lors de sa répression…
« Comment peut-on être persan ?", se demandaient les parisiens, dans "Lettres Persanes" ! Montesquieu déjà se raillait de l’ethnocentrisme des parisiens, médusés par la différence de l’étranger, incapable de comprendre qu’on ne puisse vivre comme eux.
« Avoir l’air de revenir de Pontoise.. » Il suffisait d'évoquer cetite bourgade située au dix-huitième siècle, à travers cette expression, pour faire comprendre que le type dont on parlait avait tout du parfait ahuri ! Nos bas bretons savent trop que l’expression française baragouiner vient du breton, bara, signifiant pain, et gwin, le vin.
La légende veut qu’un breton de Cornouailles n’avait que ces deux mots à la bouche, afin de se faire comprendre, perdu dans la capitale. Le sens du mot en tout cas est clair : Il désigne l’incompréhensibilité d’un langage primaire. Qu’en est dit donc des revendications de nos provinciaux ? Ont elles trouvé une légitimité accrue, depuis que nos gilets rouges ont quitté leur désert pour fouler « la plus belle avenue du monde » ?
Augustin Trapenard était-il vraiment bien perçu, à l’autre bout du pays profond, quand il faisait ce 26 au matin son billet d’humeur, lors de son émission « Boomerang », sur France-inter. Ne parlait-il pas un peu comme Madame De Sévigné, fustigeant la racaille, lors du mouvement de révolte qui traversa la Bretagne en 1675 ?
En préambule de son émission, il opposait dans leur déroulement médiatique la légitimité de deux manifestations parisiennes : L’une contre la violence faite aux femmes, et l’autre, dite "des gilets jaunes"........ Il regrettait ostensiblement que la marche des femmes n’ait pas obtenu la même couverture médiatique ; comme si les médias avaient l’obligation de se conforter à une charte, de respecter des temps d’antennes, comme à un rendez vous politique, entre deux adversaires. La surmédiatisation des gilets jaunes peut-elle provoquer la nausée, mettre en colère, ou est ce un fait politique majeur, qui doit être couvert ? …..https://bit.ly/2S8xyva extrait ;
« On joue le jaune plutôt que le violet. On préfère les dérives les débordements, aux marches organisées…. Parce que ce qui s’est passé dans le traitement des informations de ce week-end relève au pire de la misogynie, au mieux à la soumission à une ordre patriarcale… »
Notre journaliste se répand longuement sur la marche « violette » : « Qu’elle se doive d’attirer l’attention, d’avoir des répercussions, de provoquer des changements, de faire sensation ! »
C’était exactement l’ambition aussi des gilets jaunes !.... Parmi eux bien des femmes, qui auraient pu tout autant certainement défiler en violet, à une autre heure. Pour quelle raison étrange doit-on cliver les deux mouvements ? La violence faite aux femmes est bien sûr insupportable ! Mais aux pays tout autant !. Et il n’est pas besoin d’être grand clerc pour affirmer que la violence est endémique, et que la violence institutionnelle et les choix économiques induissent des comportements dommageables dans les familles ! Que le chômage, l'exclusion, la solitude et le mépris sont tout autant que l'éducation, des éléments à prendre en compte dans la dynamique de la violence ....
Bref, les deux causes sont loins d'être antinomiques, et tenter de les cliver, s'apparente à une tentative de de tri selectif, dont on devine facilement quelle couleur de gilet ira dans le tout venant ! Les marcheurs du président, avec leur camion benne n'y trouveront rien à dire, ravis d'avoir de tels échotiers pour les servir ! "Il n'est de bon bec que de Paris" Disait déjà François Villon.
Rencontre des contraires, de deux géométries opposées, ou quand le centre du cercle rencontre la circonférence. L’aménagement du grand Paris, avec l’explosion de son budget dithyrambique, a déjà un échéancier, tandis que dans les territoires, le désespoir monte : Des maires cherchent comment ils vont parvenir à entretenir le réseau routier qui leur est maintenant échu, se contentant de mettre des rustines de goudron, plutôt que de refaire la route..
Fait on partie encore du même pays ?... Cette révolte avec « ses débordements » est-elle illégitime, incompréhensible aux parisiens des belles avenues sanctuarisées, horrifiés devant les barrières entassées, les vitrines brisées ? Comme surjouent les politiques en place, tentant de diaboliser ce qui leur échappe, et qu'ils ont pourtant créé, et qui leur revient comme un boomerang, !….Le nom de l'émission....
Y a-t-il d’ailleurs un mouvement quelconque qui n’est pas eu ses soldats perdus, ses black blocks opportunistes, ses demeurés folkloriques qui s’attachent à la queue où à la tête de toutes les armées du monde, sans pourtant en ralentir la marche, ou le sens. ? ...
A quoi ça sert d’avoir vécu la commune et Mai 68 pour avoir des réactions de dames patronnesses indignées ? Faut-il chaque fois évoquer le « populisme » un mot devenu fourre tout pour dénoncer ceux qui refusent de crever la gueule ouverte ?…. Et tenter d’amalgamer à chaque fois les manifestants vers les partis extrémistes, à mi chemin de l’imbécile ou du naïf manipulé, ou du crétin ne comprenant rien aux enjeux de la modernisation. Un classique du traitement de l’information, de manipulation outrancière, qu’on a déjà entendu hier à Notre Dame des Landes, avec ces dangereux « zadistes » circulant la bave aux lèvres.
Mais le danger ne serait-il pas justement qu’à un moment les citoyens de base ne s’interrogent sur la pertinence de rester encore dans l’ensemble, et de se cliver vers une sorte de zad à grande échelle ? Révolte des bonnets rouges ? Pour beaucoup, même en Bretagne, cela n’évoque que le refus des portiques payants, un mouvement très médiatisé, bien que marginal, et qui fut monté par les patrons de l’agro alimentaire breton pour lutter contre un projet de taxer le fret.
Mais ce mouvement se référait à une page mal connue, refoulée, car sans doute peu glorieuse de l’histoire de France, qu’on nomma aussi « la révolte du papier timbré ». C'est alors que le Bretagne est en difficulté que sont mis en place de nouveaux impôts. Louis XIV est en guerre contre la Hollande depuis 1672 ; cette guerre, qu'il imaginait courte, s'allonge. La fiscalité s'alourdit pour répondre à l'effort de guerre. Incorporée depuis plus d’un siècle dans le royaume de France, la Bretagne a perdu son autonomie, mais aussi son économie florissante. (Joël Cornette : Au seizième, la Bretagne disposait de plus de 2000 mille navires de commerce : https://bit.ly/2KyY7ar Ses exportations dépendant du trafic portuaire, où la pays exporte ses voiles, sont en effet pétrifiées par le blocus maritime que les états de Hollande ont mis en place. Victime de décisions militaires catastrophiques, et de visions à courte vue, les Bretons appauvris s’insurgent, contre ces taxations, contraire à l’esprit du traité qu’ils avaient ratifié lors de leur annexion à la France. https://bit.ly/2zmiNhB ( La révolte des bonnets rouges-Hérodote)
Ce timing malheureux, entre charges nouvelles imposées aux provinces, dans une contexte de misère économique due à un roi méprisant et hautain« droit dans ses bottes » dilapidant le reste de la trésorerie à Versailles, enflamme le pays Breton. Papier timbré imposé pour tout acte administratif, taxes nouvelles sur le tabac, mais aussi sur la vaisselle d’étain : Nantes, Rennes, Carhaix, chateaulin, c’est en fait tout le pays qui se soulève.
A plus de trois siècles de distance, la révolte des gilets jaunes montre les mêmes analogies. Les déserts se sont multipliés dans le pays, les services d’état se sont raréfiés à l’extrême. En un demi siècle, un lent détricotage de la France rurale s’est faite, faisant disparaître les hôpitaux, nombre d’écoles et de gendarmeries, les commerces et les emplois s'y rattachant, amenant cette diagonale du vide, qui prend de plus en plus ses aises, au sien du pays.
Bientôt on parlera d’un hexagone du vide. Le « sentiment » d’abandon est accablant, l’avenir devient redoutable à envisager ! « Sentiment » est devenu un élément redondant de langage en vogue au sein du gouvernement, celui-ci préférant évoquer le coté suggestif de la chose, pour couper court à toute perspective fâcheuse…..
Pourtant nous sommes dans la réalité dure, celle émergeant d’un choix de société, sur fond de libéralisme mortifère... L’état remplit de moins en moins ses fonctions régaliennes dans les « territoires », ces réserves d’indiens, où ne passent même plus le train dans la prairie. Il faut se rappeler que Fernand Braudel, historien prestigieux, qui écrivit sur ces derniers jours « l’identité de la France » avait coutume de dire que le rail, dans les provinces, avait fait davantage pour le sentiment appartenance à la France, que la révolution de 1789.
En clair il signifiait que l’action est supérieure au verbe, qu’il ne suffit pas de proclamer « Liberté-égalité-fraternité », du haut d’une estrade, mais qu’il faut créer le cadre ! On paiera son impôt avec beaucoup plus de facilité si celui-ci est compréhensible, s’il y a un véritable deal, une vision où chacun se sentira respecté, et aidé, intégré à un projet collectif.
Au delà des justifications économiques à courte vue, s’affublant c’est un comble du précepte de sécurité, ( car si l’on ferme une maternité on évoquera hypocritement le risque lié à la sécurité, après avoir amputé le budget) effleure le mépris. Le provincial est transformé en benêt, le gilet jaune à un sans culotte qui s’échauffe et écluse des bières autour d’un rond point…
. Les images TV et les les interviews sont censés donner des éléments de réflexion au lambda moyen, qui se fera une opinion, étayé cependant selon l’endroit où il vit. Révolte des pauvres, des exclus, des dieselistes pétaradant au volant de leur vieille caisse, et refusant de comprendre la noblesse de vue de notre président, regardant les objectifs de la COP 21, les yeux tournés vers l’horizon, comme Clemenceau regardant la ligne bleue des Vosges.
Allez savoir si ces têtes brûles, adipeuses, faisant peur à certains journalistes bourlingueurs, ayant connu pourtant les pires conflits du bout du monde, et n’ayant jamais eu aussi peur, n’ont pas débusqué là le véritable ennemi intérieur, encore plus redoutable que les âmes perdues de Daesh, « Ils avaient la bave aux lèvres ! » Nous dit ainsi un journaliste de BFM TV !….. » https://bit.ly/2QlslD7
Quelle idée aussi de partir en mission dans la fumée jaune sans porte flingue à ses côtes, genre Benalla !... Ce journaliste ne s’est pas fait breaké ! Il aurait dû prendre conseil à Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement. Griveaux a en effet fait une sortie très remarquée, commentant une idée de Wauquiez, évoquant la mise en place de compensations financières aux plus impactés par les décisions gouvernementales : « Son ticket carburant, c'est de la subvention à la pollution. Wauquiez, c'est le candidat des gars qui fument des clopes et qui roulent au diesel. Ça n'est pas la France du XXIe siècle que nous voulons. »
On voit par là que la France voulue ne correspond pas au paysage rural, fantasmé, une image empreinte de la culture canal + nulle part ailleurs, et Deschiens. Les gueux ont osé monter à Paris, salir la plus belle avenue du monde, et même faire les grands titres. Parfois, la violence vient tout autant d’être à se point caricaturé, et nié.
Me revient la répression des bonnets rouges. La mise en chauffe. Le 3 juillet 1675 , Madame de Sévigné écrit à sa fille : « On dit qu'il y a cinq cents ou six cents bonnets bleus en Basse-Bretagne qui auraient bien besoin d'être pendus pour leur apprendre à parler ».
Les espérances de la divine marquise seront exhaussées au-delà. Les âmes sensibles seront conviées à ne pas lire les faits horribles qui s’attachent à cette époque... Reste de tout cela encore la mémoire des pierres, des monuments : Combien de touristes surpris, devant ces clochers coupés, ces chapelles cassées en deux, une des représailles du pouvoir en place, et toujours en nombre en Bretagne. Ce sont les livres de mémoire dépliées en pleine nature.... Elles attestent encore de cette grande barbarie, où les soldats de Louis quatorze pendirent à tout de bras, violèrent, et mirent, comble de l’horreur, même des petits enfant à la broche.
On comprend que le pouvoir royal préféra détruire les archives, au parlement de Rennes, tant cela est infamant. Il fallait casser le pays, faire une exemple, faire table rase. Répression courte, dans le temps, mais aveuglante, rappelant comme le rappelle de façon alerte Madame De Sévigné, comme une partie de campagne…...
La ville de Rennes, siège du parlement Breton fut obligé de nourrir et de loger la soldatesque, celle-ci pillant, violant, détruisant la moitié de la haute ville. Le parlement Breton fut déplacé à Vannes, comble d’humiliation. Mais sans doute que le Breton, parlant une langue incompréhensible au Parisien, nouvellement intégré au royaume comme une colonie, est alors le comble du provincial, presque un sauvage qu’on peut se permettre de mépriser, avant de l’instruire peut-être des usages du royaume.
Le marchand rennais Duchemin note dans son journal que tous les soldats ont tellement « vexé les habitants qu'ils ont jeté de leurs hôtes et hôtesses par les fenêtres après les avoir battus et excédés, ont violé des femmes, lié des enfants tous nus sur des broches pour les vouloir faire rôtir, rompu et brûlé leurs meubles, démoli les fenêtres et vitres des maisons, exigé grandes sommes de leurs hôtes, et commis tant de crimes qu'ils égalent Rennes à la destruction de Jerusalem »
C’est de cette histoire, qu’émergea ce breton fantasmé, têtu, cabochard, fort en gueule, un peu stupide, et qui a besoin d’être maté, auquel fait allusion madame De Sévigné, moins belle dans la nature que dans son style. . Se rendant à son château de Vitré, elle se fend encore de quelques bons mots, dans une belle empathie naturelle : « Nos pauvres bas-Bretons, à ce que je viens d’apprendre, s’attroupent quarante, cinquante, par les champs, et dès qu’ils voient les soldats, ils se jettent à genoux et disent mea-culpa. C’est le seul mot de français qu’ils sachent… », écrit-elle, entre autres joyeusetés, le 24 septembre 1675
« J’ai, continue-t-elle, une toute autre idée de la justice, depuis que je suis dans ce pays. Vos galériens me paraissent une société d’honnêtes gens, qui se sont retirés du monde pour mener une vie douce : nous vous en avons bien envoyé par centaines ; ceux qui sont demeurés sont plus malheureux que ceux-là ! » …Rennes est comme une ville déserte ; les punitions et les taxes ont été cruelles ; il y aurait des histoires tragiques à conter… (en octobre 1675)…) https://bit.ly/2ByLXM0 : Source Le Génocide Breton | BZH Reflexion
Bien sûr, les idées ont évolué, les mœurs se sont apaisés, autant que les comportements et les éléments de langage. Pourtant de temps en temps un dérapage survient, comme un retour du refoulé de la vieille France royaliste, centralisée, du château, sûre de son fait, et de pertinence de ses décisions, enjambant les juridictions régionales, et les parlements que l’on bafoue ……Sans doute que le Breton, parlant une langue incompréhensible au Parisien, est alors le comble du provincial, mal dégrossi, et qu’on peut se permettre de mépriser, avant de l’instruire peut être des usages du royaume.
Qui a écouté la modération des présidents de région, très mesurés, quand notre bon Edouard Philippe a imposé sans concertation la limitation à 80 km/ heure. Ils avaient compris, quel que soit leur bord politique, de la profonde inadéquation de ce genre de décision avec la réalité d’un terrain déjà excentré. La genèse des gilets jaune à bien des sources. Mais beaucoup de gens en colère contre des décisions injustes, ramenant le thème d’un politique propice aux riches, avaient noté l’hypocrisie matoise, faisant tomber des sous dans la caisse de l’état, sous une argumentation fallacieuse et hypocrite.
La limitation serait indispensable pour votre sécurité, tout comme la taxation du diesel le serait à votre santé et à celle de la terre ?... A la bonne heure ! Mais qui est dupe. Sécurité et écologie sont évoqués uniquement quand il s’agit de faire entrer des sous, mais oubliés quand ils fâchent les intérêts des copains, et des lobbys. https://bit.ly/2DYSyBS : (La colère des gilets rouges, conséquence de l’enfumage politique – Contrepoints.)
Pourquoi ne rend-on pas les autoroutes gratuites ?…. Pourquoi protège-t-on les producteurs de pesticides, et tous ceux de l’industrie de mort ?….Pourquoi n’interdit-on pas les monstres de pollution que sont les bateaux de croisière, qui vivent actuellement un nouvel âge d’or .. Utilise-t-on ces monstres des mers pour aller au boulot ?.. Nos meilleurs intellectuels donnent parfois des conférences à bord, discourant sur l’état de la planète devant un parterre d’happy few ?….Qui n’a pas vu ces publicité de voyage « culturels » autour de la Méditerranée, ou dans les fjords des pays du nord ? Dans ce monde clivé, psychotique, l’absurdité est patente, et l’apragmatisme des gouvernants insupportable ! Ces dérives seraient comiques, semblant sortir d’un théâtre de guignol, et on en rirait bien, si elles ne nous amenaient pas en enfer. Mais la soumission aux puissances d’argent fait que l’aérien ne sera pas déranger le moins du monde, mais au contraire encouragé, toutes ailes dehors, bénéficiant même d'éxonération des taxes sur le kérosène….
Le conducteur de base perdu dans sa province, se voit comme le maillon faible ! Il ne s’agita pas de défendre le diesel en lui-même, en effet mortifère, mais de défendre les gens qui l’utilisent, et qui n’ont guère le choix. Les faire payer davantage ne changera pas leur pratique, pour la bonne raison que leur voiture a été rendue indispensable par les abandons successifs de l’état, n’offrant pas d’alternative aux sacrifiés. Voilà la raison pour laquelle la plupart des écologistes dénoncent cette politique ridicule, refusant d’être eux pris pour comme derniers boucs émissaires de l’’affaire, avec ce mistigri qu’on se refile… https://bit.ly/2QgxSej Les gilets jaunes, nouveaux « ploucs émissaires » ? - Le Figaro
Bécassine est un héritage de cette histoire des bonnets rouges, même si elle porte une coiffe bretonne. . Même si cette grande cruche un peu brave fait sourire aujourd’hui, elle n’en est pas moins la marque historique du dédain du pouvoir Parisien envers la province. A ce titre la Bretagne fut longtemps, l’exemple même d’un dépliant naïf, simpliste, à l’histoire occultée, tour à tour fantasmée et méprisée par les élites parisiennes, à l’image des colonies plus tard. L’image du tirailleur Sénégalais buvant son chocolat Banania, remplaça un jour celui de Bécassine. Il faut se rappeler qu’ils sont frère et sœur !
Louis quatorze, « roi soleil » ne fut en fait qu’un roi d’ombres et de ténèbres, bien loin de la magnificence du château de Versailles et de ses lumières, ne brillant que pour quelques milliers de privilégiés. Son règle sera marqué par bien des infamies. Les Cévenols gardent en mémoire la terrible répression de ses dragonnades, suite à la suppression de l’édit de Nantes, qui garantissait la liberté de culte... C’est une autre histoire, que cette de ces Huguenots qui s’en allèrent en de longues cohortes s’expatrier par force, et faire la fortune de l’Allemagne et des pays de La Hanse.
Sur son lit de mort, s’adressant au dauphin, voulant soulager sa conscience, et être de bon conseil, le roi regretta son œuvre : « Mon cher enfant, vous allez être bientôt roi d’un grand royaume : ce que je vous recommande le plus fortement, est de n’oublier jamais les obligations que vous avez à Dieu... Souvenez-vous que vous lui devez tout ce que vous êtes... Tâchez de conserver la paix avec vos voisins. J’ai trop aimé la guerre : ne m’imitez pas en cela, non plus que dans les trop grandes dépenses que j’ai faites. Prenez conseil en toutes choses, et cherchez à connaître le meilleur, pour le suivre toujours"
Prendre conseil. Écouter, ne pas prendre des décisions à l’emporte pièce. Prévoir, anticiper. Déployer lentement ses pièces sans hâte, au lieu de renverser l’échiquier. Mais le jeu d’échecs est-il une bonne métaphore ? Pourquoi faudrait-il qu’il y ait un vainqueur et un vaincu ? Il y aurait beaucoup d’économie et d’intelligence à ce que tout travaille de concert, qu’on s’attaquent aux injustices, au maillage du territoire, qui en garanti la cohésion.
La vision du territoire n’est pas chose anodine. C’est elle qui fabrique nos représentations mentales. Et réciproquement... Deux mondes se font face, dans l’incompréhension la plus totale. L’un semble avoir des assurances, celui d’une soumission au libéralisme, et à ses diktats, envisageant toute divergence comme opposition à détruire, utilisant pour cela le couperet de la norme, de la conformité, de l’appellation, des chartes et des circulaires.
Quelques Apaches émergent, protestent quand les traités de paix sont outrageusement bafoués, quand on réduit un peu plus leur réserve, qu’on met leurs quelques droits aux allocations en danger, ou qu’on se rappelle que leur désert serait adapté à supporter une décharge de fûts radioactifs ?. Peut-on continuer à construire de grands projets, ces trains à grande vitesse, qui sillonnent quelques couloirs, ressemblant plutôt à des avions, et qui drainent la lumière vers Paris, pressés d’aller toujours plus vite, de façon psychotique, sans penser à ce savant maillage qui a fait la France ?…
Voilà plus de trente ans que l’on est rentré dans cette logique mortifère et libérale, qui demande toujours plus d’efforts et de sacrifices pour un bénéfice que l’on ignore, hormis celui des actionnaires, avides de châteaux de Versailles et de parachutes dorés. Faire en sorte que les gens aient moins le besoin de se déplacer bouge forcément les paradigmes agricoles, compromis dans la libéralisation sauvage, les rendements absurdes, soutenus avec forces pesticides. La campagne a perdu ses belles couleurs..... Interdire demain le diesel, pourquoi pas ?... Mais il faudra faire en sorte d’introduire de nouvelles pratiques assurant l'emploi au pays, et le réenchantement du paysage. Bref, retourner au local, arrêter cette course éperdue, le frêt insensé, cette recherche des opportunites cannibles. A vrai dire c'est tout le sens de l'économie capitaliste mortifère, cracheur de particules et bouffeur d'espaces, qui est à repenser !. Il y a du boulot dans la confection de ce patchwork !
Tout cela tire un peu des bords dans tous les sens, et ne sera sûrement pas apprécié, par bien des gilets jaunes, tant ce gilet, à l’égal du bonnet rouge de nos ancêtres, a été endossé par bien des gens différents, n’ayant qu’un sentiment d’injustice patente pour les unir un moment. C’est ainsi qu’a débuté notre révolution française, sanctifié, mais si brocardée au début par certains esprits, se bouchant le nez devant les sans culottes, cette plèbe s'agitant sur les boulevards. Mais c’est le propre des mouvements de révolte, de provoquer des réflexions, de bousculer les barrières, pas seulement métalliques, surtout celles de la « plus belle avenue du monde » comme on disait de la galerie des glaces, avec ses courtisans emperruqués.
C’est la condition de celui qui se rappelle qu’il est vivant, que la fatalité économique et n’existe que dans la tête que ceux qui veulent bien la courber !
D’un seul coup, bien au-delà du coup de pompe, ils se sont organisés, montrent le poing, brillent dans la nuit comme mille lucioles !. Ne manque plus qu'un nouveau "contrat social" pour rallumer les lumières !
Gardons-nous des nouvelles Madame de Sévigné, promptes à se moquer, à nous régler notre sort, à s’amuser de notre déconvenue . Que serait devenue celle-ci, si elle était née 100 ans plus tard ?…. Aurait-elle osé faire de l'humour, avec Marie-Antoinette, du haut du balcon, à propos de pain et de brioche, ou se serait elle montrée plus maline ?
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