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Accueil du site > Tribune Libre > De quoi Philippe Martinez est-il le nom ?

De quoi Philippe Martinez est-il le nom ?

Prétendre que la classe ouvrière organisée prend en otage le peuple français quand elle défend ses droits menacés, comme le répète la presse, restera dans les annales. Comme si ces travailleurs en lutte, hier chauffeurs-routiers, aujourd'hui salariés des raffineries, représentaient une minorité de nantis prêts à immoler l’intérêt général sur l’autel de leurs revendications catégorielles ; comme si une grève qui leur impose des sacrifices personnels était pour eux une partie de plaisir ; comme si leur combat n’était pas un combat pour tous, y compris pour ceux qui ont fait vœu de soumission à leurs maîtres et crachent sans vergogne sur leurs défenseurs.

Contrairement à la classe ouvrière, la cohorte de plumitifs dont le capital s’est attaché les services ne risque pas de s’insurger contre un système dont elle a pour vocation de chanter les louanges. Comment cette presse française soumise aux sept milliardaires qui en détiennent la propriété et déterminent sa ligne éditoriale, de BFM/TV à "Libération", du "Monde" à "L’Express" et de TF1 au "Figaro", pourrait-elle se comporter autrement que sur le mode d'une servilité à toute épreuve ?

Cette sujétion des médias, en effet, pousse un journaliste à prendre parti pour les détenteurs de capitaux et leurs valets comme si ses propres intérêts de classe étaient en jeu ; elle le range aussitôt du côté de la caste privilégiée qui rémunère ses services. Ce journaliste a beau être un salarié, le voilà qui crache son venin sur la classe ouvrière, comme si, piteusement assigné à la fonction de combattre ses propres défenseurs, ce mercenaire devait aussi se faire renégat.

Mais ce constat de la servilité médiatique n'est pas le seul enseignement. Non seulement le gouvernement socialiste trahit tous ses engagements électoraux, mais il entreprend aussi à la demande expresse du capital une démolition que la droite n’avait pas osé imaginer. Redoublant de zèle pour satisfaire leurs maîtres, les socialistes entendent mener aussi loin que possible la mise en cause des conquêtes sociales, chaque régression, même si elle n’aboutit pas, permettant de franchir un nouveau seuil symbolique. A force de porter le fer contre les droits des travailleurs, espère-t-on, on finira bien par les persuader que leurs droits ne sont pas légitimes et qu’ils auraient tout à gagner à y renoncer. Pour les salariés, le droit du travail est un système immunitaire. Le parti socialiste est son virus.

Pour ceux qui ont la mémoire courte, il faut rappeler que les principaux acquis des travailleurs français ont été conquis de haute lutte ; que sans les massives occupations d’usines de l’été 36, les travailleurs ne partiraient jamais en congés payés ; que sans les combats héroïques de la Résistance et de la Libération, la Sécurité sociale et les comités d’entreprise n’auraient jamais vu le jour ; que sans les puissantes grèves ouvrières de juin 68, la revalorisation des bas salaires exigée par la croissance des Trente Glorieuses serait restée un vœu pieux ; que sans l’alliance avec un parti communiste français à 15-20% les conquêtes initiales de 1981 seraient restées lettre morte.

Mais le parti socialiste, historiquement, n’a jamais accompli la moindre réforme en faveur des travailleurs de ce pays. Il a pris acte d’un rapport de forces en 1936 ; il n’a joué qu’un rôle secondaire à la Libération, où le général de Gaulle confia les postes-clé aux communistes ; en 68 le PS était aux abonnés absents ; quant aux avancées de 1981, il les a reniées, en même temps qu’une souveraineté nationale dont il est avec la droite française l’un des fossoyeurs. En revanche, il réprima dans le sang les grèves des mineurs en 1947, faisant appel à l’armée contre cette avant-garde des luttes ouvrières depuis le XIXème siècle. C’est ainsi que les socialistes rendirent hommage aux héros de Germinal : en les faisant fusiller.

L'expérience historique nous l'a appris : le rôle des socialistes français, c’est d’accréditer la fiction d’une opposition entre la droite et la gauche qui n’existe que dans les représentations collectives, et non dans la réalité des rapports sociaux. C’est d’organiser au nom de cette opposition artificielle une alternance politique dont le principal résultat est d’empêcher une véritable alternative à la tyrannie de la finance mondialisée. C'est de substituer à la véritable question, celle de la répartition effective du produit social et de l'exercice de la souveraineté populaire qui en est la condition, toute une série de contre-feux et de querelles grotesques, de la théorie du genre à l'antisémitisme, du voile islamique à la réforme de l'orthographe.

Quoiq u'il advienne de la crise sociale actuelle, on peut dire qu'elle a déjà manifesté une vertu pédagogique des plus précieuses. Car elle révèle, s'il en était besoin, que l'agitation qui se donne en spectacle à la surface du marécage politicien est l'expression voilée d'une réalité plus profonde ; que le véritable clivage social ne passe pas entre la droite et la gauche, mais entre ceux qui vivent de leur travail et ceux qui se contentent d’en toucher les dividendes. Dans cette division fondamentale de la société, la dignité du peuple français est d’un seul côté. A la Libération, le général de Gaulle nomma des communistes aux postes-clé. Parmi eux, Ambroise Croizat, modeste ouvrier français, créa la Sécurité sociale. En 2016, la dignité du peuple français a un nom : c'est Philippe Martinez.

 


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15 réactions à cet article    


  • Old Dan 28 mai 2016 09:16

    Excellent !...

    [.. bien l’idée de ces patrons du CAC40 qui hurlent à la prises d’otages par leurs smicards ! ]


    • Pere Plexe Pere Plexe 28 mai 2016 20:20

      @Old Dan
      Les éléments de langages sont bien rodés repris docilement par les médias depuis des décennies.

      Elements qui révélent la logique de ceux qui l’utilisent :
      GREVE=PRISE D’OTAGE=CRIME qu’il faut interdire....


    • La Voix De Ton Maître La Voix De Ton Maître 28 mai 2016 10:50

      En 2016, la dignité du peuple français a un nom : c’est Philippe Martinez.

      En était globalement d’accord avec ce que vous avez écrit, je terminerai par : c’est Philippe Martinez car on a rien trouvé de mieux.

      Je pense que nous somme plus dans un scénario à la Syntagma qu’à l’aube d’une nouvelle ère. La situation va se débloquer le gouvernement reculera un peu et la CGT criera victoire (comme une caricature de ce qu’est devenu la politique) et puis il y aura de nouveaux sursauts jusqu’au jour où les français réaliseront que la finance tient tout le monde par les bourses :
      - un petit coup de hausse d’intérêt ?
      - oups un défaut de paiement !
      Et l’on bradera ce qui nous reste de bijoux de famille sous le regard accusateur du reste du monde : ces français, non seulement ils sont fainéants mais râleurs en plus !

      Mon scénario est plus crédible face à votre analyse historique. La dignité ce n’est pas le pouvoir d’achat.


      • foufouille foufouille 28 mai 2016 10:54

        En 2016, la dignité du peuple français a un nom : c’est Philippe Martinez.
        ==== ya du boulot avec lepaon


        • Shawford 28 mai 2016 11:05

          Bonjour Monsieur Guigue,

          votre pensée et votre prose est chirurgicale et de haut vol.

          Mais si vous me permettez une digression (et j’en profite parce que justement vous n’en parlez pas ici, faisant montre du fait que vous n’êtes pas obsédé par la question éthnique) vous avez été catalogué comme anti sioniste et par extension perverse antisémiste, en bref pestiféré sans répit possible.

          Vous avez été exclu de votre charge de sous prefet, vous serez surement carrément rayé de la fonction publique à terme (je m’excuse pour cette prospective osée et sentencieuse mais tellement prévisible si on y pense bien) comme d’autres ne pourront bientôt plus du tout exercer à visage découvert leur métier d’humoriste (vous suivez la quenelle ?).

          Alors si vous me permettez un conseil ou une invite, pourquoi vous n’essaieriez pas (car votre capacité d’analyse supérieure vous y autorise bien plus qu’un commentateur lambda anonyme comme) de vous dépêtrer par le haut de cette accusation qui éclipse toutes les autres infamies possibles.

          Il vous, nous faut dire bien haut et fort que vous n’êtes pas plus antisioniste qu’antisémite, mais bel et bien républicain anti communautariste ou alors par extension là aussi anti libérauxsioniste, à savoir comme je le disais à l’instant ailleurs, ceux qui justement sont généralement pas juifs pour un sou, ni une torah ou un Etat, mais qui avant tout nous niquent la gueule partout, même et peut être surtout au kibboutz !!!

          C’est le seul moyen de faire taire ces Valls et autres traitres à la, à toutes les nations et à la communauté humaine non « ghettoisante », et en particulier parveir au fait que les israéliens se contraignent (enfin ?) à bâtir in Pays sans plus pouvoir sur jouer l’infâme amalgame du sionisme sournoisement appuyé sur le racket de la diaspora (et en mettant de façon symétrique le monde arabo-musulman face aux mêmes problématiques liées au pognon, à la communauté, à la classe socio-économique) !

          Voila, j’dis ça j’dis rien (mais peut être serai-je entendu) smiley smiley )


          • Olivier Perriet Olivier Perriet 28 mai 2016 11:42

            @Shawford

            on a les obsessions qu’on peut


          • Shawford 28 mai 2016 11:48

            @Olivier Perriet

            Hum, c’est bien elliptique et sibyllin ce petit post... je me ferai fort de le considérer comme approbateur et constructif.
            J’ai à tout le moins effectivement les obsessions que je peux (et veux me permettre) smiley


          • tf1Groupie 28 mai 2016 13:28

            L’auteur se plaint de journalistes qui bavent sur les syndicalistes alors que lui-même bave sans hésitation sur les journalistes avec une foule d’idées reçues.

            Il connait la servilité médiatique mais pas la servilité et les manipulations syndicales.

            Qu’il aille se cultiver et regarde de plus près ces « merveilleux humanistes altruistes » que sont les grévistes, certains faisant grève quand il y a match de foot.

            On a même droit aux couplets sur les poilus syndicaux des années 30.
            Caricatural.


            • colere48 colere48 28 mai 2016 14:57

              LA FRANCE INSOUMISE :

              Nous ne nous soumettons pas à l’injustice et l’inégalité,
              aux terroristes ni aux racistes. Nous voulons la paix, la
              dignité sociale, la laïcité, la sécurité et la fraternité. Nous
              refusons le chômage et la précarité. Se soigner, se loger,
              s’instruire ne doivent plus être des privilèges. Nous voulons
              le partage des richesses. Nous ne nous soumettons pas
              à cette monarchie présidentielle ni à la caste d’oligarques
              qui dirigent. Nous voulons une assemblée constituante
              pour passer à la 6e République. Nous ne nous soumettons
              pas aux traités européens qui donnent tout pouvoir à la
              finance. Nous voulons le peuple souverain. Nous ne nous
              soumettons pas aux lobbys productivistes. Nous voulons
              la planification écologique et la sortie du nucléaire et des
              énergies carbonées. Nous voulons inventer, créer, partager.
              Nous ne nous soumettrons pas au futur que les puissants
              veulent nous imposer. Nous voulons la liberté et l’égalité.
              Nous sommes la France insoumise ! Tournons la page de cet
              ordre injuste et cruel. Proposons la candidature de Jean-Luc
              Mélenchon pour l’élection présidentielle de 2017.
              Retrouvons-nous le dimanche 5 juin à Paris,
              place Stalingrad pour le défilé
              de la France insoumise et fière de l’être !

              La France Insoumise Meeting du 5 juin 2016 avec JL Mélenchon


              • alain-aaae (---.---.122.46) 28 mai 2016 16:25

                se s socialistes depuis 1936 on abondonné les combattants internationaux en espagne et ces meme socialiste on mit au pouvoir Petain pendant la guerre 39/45.j ajouterais que c est MITTERRAND qui a donné l ordre au militaires les tortures en algerie.ce petainiste qui fut décoré par Pétain.il a voulu que se soit max LEJEUNE qui aurait été celui qui avait donné l ordre aux militaires,au début de son election en 1980 il avit envoyé un jeune troducu a abbeville pour remplacer lejeune ce jeune n est resté qu une journée car LEJEUNE a appele mitterand et lui as dit qu il avait les preuves sur lui.Max LEJEUNE était le cousin de ma femme 


                • simplesanstete 28 mai 2016 22:36

                  Qui est PMartinez ?

                  Un maquereau marxiste déjà cocu, bien sûr et un de +. Fabricant de paralysés depuis 140 ans et de rage stérile. L’archétype du bof présentable préféré des français, l’homme du ressentiment vaincu et convaincu, au suivant....

                  • devphil30 devphil30 30 mai 2016 08:38

                    Excellent article 


                    Philippe Martinez était peu connu jusqu’à certaines semaines et il gagne à être connu car c’est une personne entière qui a connu le militantisme jeune , qui à une histoire personnelle et d’immigré.
                    Il connait bien les sujets et il sait défendre les droits des travailleurs.

                    La CGT ne transige pas avec le gouvernement comme la cfdt.

                    La CGT est une organisation syndicale à soutenir car même après cette loi travail , il faudra être très vigilant.

                    Philippe 

                    • Francis, agnotologue JL 30 mai 2016 09:26
                      Excellent article en effet.
                       
                      Je voudrais dire ceci :
                       
                      Le jour de la grève des distributeurs de journaux, on a entendu dans les radios bien pensantes - toutes en fait - l’un de ces plumitifs dont le capital s’est attaché les services, 
                       
                      se plaindre de ce que la CGT s’était opposée à la parution des quotidiens qui n’avaient pas publié ce jour là, une interview de Gilles Martinez. 
                      Seule l’Huma avait été livrée en kiosques.
                       
                      Son argumentaire était à mourir de rire, et pourtant dans le studio, personne n’a moufté : en effet, le gugusse demandait à la cantonnade ce qu’on dirait si 
                      les médias refusaient de publier une interview du premier ministre ! Il faut vraiment être déconnecté de la réalité pour poser une question pareille.

                      • vigneron 31 mai 2016 09:12

                        «  Le parti socialiste (...) n’a joué qu’un rôle secondaire à la Libération, où le général de Gaulle confia les postes-clé aux communistes. »

                        Comment peut-on prétendre être pris au sérieux en avançant de telles inepties ? Il suffit de constater la proportion des ministres issus de la SFIO de Blum et Mollet, de l’UDSR de Pleven et Mitterrand (plus ceux du PSR rad-soc tendance Mendès) dans les gvts CdG 1 et 2 face aux quelques ministres communistes dont le seul vraiment important fut Marcel Paul grâce auquel la CGT a pu se maintenir jusqu’au beaufissime Martinez via ses bastions stratégiques et la CCAS électro-gazière.

                        • vigneron 31 mai 2016 09:30

                          Martinez a été appelé pour tenter, en désespoir de cause, les derniers gestes de réanimation sur le grand corps malade de la CGT. Il a multiplié en conséquence les vibrantes démonstrations de radicalisme hypertrophié, au risque évidemment de la disqualification définitive - mais avait-il le choix ? Les gestes désespérés sont le plus souvent voués à l’échec. Ceux de Martinez et de ses conseillers ne font manifestement pas exception à la règle. Un Martinez ne peut par définition accomplir ce qu’un Thibault n’a pu réussir. RIP cgt.

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