Débat Le Pen/Mélenchon : le jeu des Le Pen au grand jour
La médiacratie dans toute sa splendeur. Le débat Mélenchon/Le Pen à 08 h 30 du matin. Pareil horaire empêcha que le plus grand nombre voie l'émission en direct, mais n'empêchera pas les médias -une fois de plus- de penser à votre place et de préparer les avancées droitières du programme de Sarkozy, l'air de rien. Marine Le Pen en avançant sur les terres de la Gauche ne signe-t-elle pas sa défaite intellectuelle ?
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Avant d'évoquer l'émission de BFM-TV, permettez-moi de faire d'abord une révélation. Adolescent dans les années 80, j'avais été absolument ébloui par les tribunes de M. Le Pen, avant de comprendre au fur et à mesure que ma compréhension du monde murissait que j'avais été, précisément, ébloui. Je sais donc à quel point le Front National est un illusionniste, une créature de la télévision, une boursouflure qui naît dans l'ignorance des gens et profite de leur innocence. Attention, cela fait des dégâts réels dans les mairies où le F.N a sévi par la suite. Le manque de culture civique et politique que tout bon citoyen français devrait posséder avant de voter me manquait. J'ai donc mis ma pauvre cervelle en marche et mon simple bon sens.
Vingt-cinq ans après, le 14 février 2011 de retour devant ma télévision, les médias et le pouvoir en place marionettisent, caricaturent cette fois Mélenchon, et mettent en lumière les ultra-libéraux les plus régressifs dont la France ait accouchés : les Le Pen. En 2002 déjà, TF1 et consorts avaient agité les deux épouvantails de l'extrême-gauche et de l'extrême-droite, croyant mieux légitimer le centre au pouvoir, et ça n'avait pas marché, on a eu l'extrême-droite. Courage.
Jean-Luc Mélenchon a vertement répondu très rationnellement en restant courtois, patient à l'extrême d'écouter la caricature du social-traître que Mme Le Pen s'est amusée à faire de lui. Ses propositions gênent évidemment tout le gottha bien crémeux de ceux qui s'enrichissent, en accomplissant le rêve bourgeois séculaire de gagner de l'argent en ne rien faisant.
J'ai donc vu en face de lui une extra-terrestre déguisée en fille-à-papa, Madame Le Pen, parler à « front renversé » (expression intéressante de J-J Bourdin !) du cours de l'évolution politique récente. Elle expliqua, sans s'arracher aucun cheveu, que Jean-Luc Mélenchon serait « l'agent du système » et le « faux-ami de ceux qu'il prétend défendre » (sic). Je fus pris de douleurs intercostales tellement c'était drôle. Le Mélenchon qui préconise un revenu maximum, qui pense que l'outil monétaire doit être re-connecté à la souveraineté populaire et au contrôle des parlementaires, celui qui avec J. Généreux érigera en principe de définanciariser les comptes publics*, des agents cachés du MEDEF ?
Cela n'aura peut-être que peu d'importance pour vous mais je peux affirmer que lorsqu'on voit vivre Jean-Luc Mélenchon dans son entourage, que l'on constate l'indignation qui le saisit quelquefois, qu'on voit sa pugnacité, la sincérité que dégage son action quotidienne et la qualité du contact qu'il a avec toute personne, du plus humble comme moi au notable, l'imaginer en social-traître relève de la science-fiction. Il aura des défauts, mas pas celui-là.
Donc, le voilà accusé, Jean-Luc Mélenchon, d'avoir une vision « libérale » de la monnaie ? Libérale oui, au sens historique, et pas totalitaire. Là, on était déjà au degré zéro de la compréhension d'une économie socialiste. C'est ça l'intelligence de Mme Le Pen ? Elle n'a donc rien d'autre à dire pour sa défense ? On l'espérait plus fine.
Au cours de l'émission on ne fut pas plus surpris. Du marketing électoral sur l'immigration**. Et ça n'a pas changé depuis vingt-cinq ans. Du facho retoqué par une grande bourge acoquinée chez les bad-boys. Le long de cette petite heure comme depuis quelques années déjà, elle vint sur les thèmes propres aux mouvements ouvriers d'avant Jaurès ! Elle voudrait nous plonger dans la violence du XIX° siècle où, en effet les ouvriers cassaient du Rital, du Polak, parce qu'un Code du travail n'encadrait pas les salaires de ces pauvres gens qui venaient leur faire une concurrence déloyale, malgré eux. Relire Germinal ! Combien d'Italiens ont été assassinés à Marseille il y a un siècle à cause de ça ? On en est toujours là, au XXIème siècle, à cause d'une droite européenne qui s'acharne à détricoter le Code de travail. C'est pour ces raisons que le Parti de Gauche exige la régularisation de ces travailleurs pauvres. Non pas pour faire « entrer toute la misère du monde » comme dit Le Pen citant Rocard (encore !) mais pour contraindre le patronat à considérer ces travailleurs comme égaux aux autres en droits, en devoirs et en traitement. Tous ces gens ayant fui leur campagne, poussés soit par des dictatures, des guerres ou pire, par la concurrence déloyale que nos produits agricoles industriels et subventionnés par la PAC exerce sur leur production locale, viennent faire nos ménages, nos poubelles et face à des entreprises peu scrupuleuses, acceptent le travail qu'on leur donne. Ils ont des papiers d'identité, tout, mais ils attendent « Le » papier (CERFA) qui ne vient pas. Voilà ! Pratiques, corvéables à merci, utiles au patronat qui dégage des marges bénéficiaires sur leur dos et sur le nôtre, ces esclaves modernes indisposent la grande fille-à-papa. Et elle a raison, c'est écœurant ; sauf que le Front National, en vrai porte-parole de la droite du MEDEF, voudrait continuer de s'en prendre à eux en les privant de l'aide médicale. Humanisme ? Hypocrisie. Son père était borgne, elle est myope.
* Je suis adhérent du Parti deGauche
- Economie Jacques Généreux : http://jacquesgenereux.fr/
- sur le financement des lycées d'ile de France
- blog Eric Coquerel http://www.eric-coquerel.fr/
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