Débilité stratégique d’Israël et ruses de l’histoire. Les bombardements israéliens contre la Syrie suite à la chute du régime dans la guerre
Comment comprendre la victoire des rebelles de l'Armée syrienne libre, qui s'emparent de Damas, la capitale de la Syrie, dans la nuit du 7 au 8 décembre 2024, entraînant la chute du régime de Bachar al-Assad ? Il faut rappeler que le 27 novembre 2024, le premier jour de trêve au Liban, marqué par le retour de milliers de déplacés vers le sud, s’est opéré le début d’une offensive baptisée « Dissuasion de l'agression » contre les forces progouvernementales dans l'ouest du gouvernorat d'Alep.
En seulement dix jours, une offensive fulgurante des groupes rebelles, lancée depuis la région d’Idlib, ont mis en déroute les forces gouvernementales syriennes. Il y a beaucoup de coïncidences, d’abord la date de la trêve du Hezbollah avec Israël qui a coïncidé avec le lancement de l’offensive ; ensuite pourquoi avoir choisi le nom de l’opération « Dissuasion de l'agression » ? Dissuader qui ? Dissuader les autres, ce qui signifie que les forces armées gouvernementales devaient tacitement « être dissuadées de combattre » ; et effectivement, c’est une opération éclair, « dix jours qui ont fait basculer la Syrie et il faut le dire sans combat. »
Nous devons cependant admettre qu'en histoire, il n'y a pas de coïncidence ni de hasard ; l'histoire évolue en tout rationnellement ; tout ce qui arrive doit arriver, et ce qui arrive doit nécessairement avancer l'histoire ; l'histoire donne le sens même de la marche du monde.
Et on comprend pourquoi le nom de l'opération a été choisi ainsi ; l’armée syrienne gouvernementale n’a pas livré de grands combats. Pourquoi ? Elle n’a pas été motivée ? Pourquoi elle n’a pas été motivée ? Des médias occidentaux parlent de « corruption, de personnels militaires mal payés ». La réponse à ces médias est « peut-être » ; mais même si corruption il y a, et mauvaises soldes aussi, il faut dire que lorsque la patrie, la nation est en danger, l’armée n’a même pas besoin de penser ; toute son essence, tout son esprit se trouve dirigé obligatoirement au combat ; c’est un peu comme un instinct inné au soldat, à l’armée nationale, et le soutien inné du peuple à son armée pour la défense de la patrie.
Or, ces traits innés, naturels, nous ne l’avons pas vu dans cette offensive de groupes islamistes rebelles syriens ; ce qui signifie que l’armée gouvernementale n’a pas réagi ou peu réagi, n’a pas combattu, et donc, non qu’elle était faible, mais n’a pas voulu une seconde fois entrer dans une guerre fratricide. Une nation, où les éléments de cette même nation se combattent, et lourdement armés, et l’armée qui défend la nation est dépassée, voire même éclate, se trouve engagée dans une guerre civile, mais le temps agit. Et le plus souvent la situation d’une nation se détériore intérieurement que les grandes puissances, pour leurs intérêts respectifs, utilisent cette détérioration pour monter les uns contre les autres, et la crise survient, la scission s’opère au sein de cette nation, et la guerre civile éclate.
Et c’est là où le temps long, après une longue guerre civile, devient réparateur ; avec des négociations, et les péripéties de la guerre civile interne, et arrive un temps de paix, même si la nation est écartelée, en zones séparées, les plaies commencent à se fermer, et un temps de conscience, de compréhension sur les causes qui ont provoqué la guerre survient ; et c’est ce temps nouveau qui change totalement la perception du pourquoi on se fait la guerre.
Et visiblement c’est cette perception qui a amené les forces armées gouvernementales de l’État national de refuser le combat, de ne pas se lancer de nouveau dans une guerre fratricide. Syriens contre Syriens, et tous sont du même peuple, et peu importe les sensibilités de chaque communauté, toutes participent à la nation.
Dès lors, on peut dire que la marche de la Syrie est naturelle ; tout événement qui arrive et se réalise relève de la marche de l’histoire comment elle doit s’opérer. Donc, le nouveau gouvernement qui va s’installer en Syrie relève de la marche de l’histoire ; bien plus, ce nouveau gouvernement a devant lui des défis incommensurables.
Rappelons qu’en Afghanistan, les fondamentalistes du Mouvement islamiste des talibans, eux aussi, à l’été 2021, ont pris le pouvoir pratiquement sans combat ; l’armée régulière afghane a refusé de combattre les Talibans qui, pendant 20 ans, ont combattu, depuis les attentats du 11 septembre 2001, les Occupants, les États-Unis soutenus par des forces de l’OTAN. Là aussi, qu’ils soient islamistes radicaux et rétrogrades sur la question des droits de la femme, c’est la marche de l’histoire qui a retenu les Talibans pour diriger le peuple afghan.
Pour un peuple, qu’un pouvoir soit musulman progressiste ou islamiste radical, tout relève des aspirations du plus grand nombre et de leurs histoires respectives. Prenons en exemple, l’Arabie saoudite et le Maroc, qui sont des monarchies de longue date. La première pourtant très riche en pétrole et le peuple saoudien se suffisant à lui-même sur le plan socioéconomique, ne cause pas de problèmes à l’État ; le Maroc beaucoup moins riche, mais le peuple marocain se trouve lui aussi suffisant à lui-même sur le plan socioéconomique, donc une situation pour les deux monarchies qui n’est pas seulement normale mais naturelle, au regard de la marche de l’histoire.
Il est évident que cette situation des monarchies arabes n’est pas éternelle ; viendra le temps où des changements s’opèreront comme cela s’est opéré pour les monarchies chrétiennes de droit divin, en Europe, il y a un peu plus de 150 ans.
Aujourd’hui, très vraisemblablement, l’humanité est à un tournant de l’histoire. C’est que, durant toute la guerre menée par Israël contre le Hamas à Gaza, depuis l’attaque sans précédent du 7 octobre 2023 qui a fait 1200 morts et 250 otages, la Syrie a subi aussi les attaques israéliennes et la riposte syrienne n’a pas été dissuasive comme le fut celle du Hezbollah qui n’a cessé d’attaquer Israël pendant presque un an. Israël a subi des attaques quotidiennes du Hezbollah, et n’a lancé une offensive contre le Liban qu’après dix mois de pilonnage, en septembre 2024.
Et ce point est très important au regard de la marche de l’histoire. Un Hezbollah qui a été très actif dans l’offensive d’Israël menée contre Gaza ; il n’a cessé de pilonner Israël et a bien affirmé qu’il vient en soutien au peuple de Gaza ; qu’il ne s’arrête que si Israël arrête son agression contre Gaza ; alors que la Syrie, une nation dotée d’une armée régulière, certes faisant face aux régions autonomes de la région kurde et d’Idlib, a néanmoins faiblement réagi aux attaques israéliennes.
Cette situation de la Syrie est comptée dans tous les événements qui étoffent le cours de l’histoire qui, sans que les puissances en prennent conscience, provoque une bifurcation dans la marche du monde. L’histoire n’est pas le cours d’un long fleuve tranquille sinon elle n'est pas l'histoire mouvementée d'une humanité en lutte pour sa survie ; une crise, une guerre qui dure porte en elle des changements à venir dans toute région où joue cette guerre.
Et c'est le cas pour cette région du monde dont les changements impacteront le reste du monde. En clair, tout est lié ; qu’il s’agisse d’une petite nation, d’une nation de puissance moyenne ou d’une grande puissance ; la marche du monde concerne toutes les nations.
Ne prenant que le gouvernement de Michel Barnier, destitué après le vote d'une motion de censure à l'Assemblée nationale française, le jeudi 5 décembre 2024. On peut penser que cet événement n’a rien à voir avec les guerres qui s’y jouent au Proche-Orient ; pourtant, ils ont un lien, un côté économique lie cette région qui est centrale sur le plan économique, financier et monétaire mondial. Parce que les plus grands gisements de pétrole y se trouvent et la monnaie de facturation des transactions pétrolières de cette région s’effectuent en dollar US. Et l’Europe comme les États-Unis se trouvent menacés par ces pétrodollars qui leur ont donné une puissance écrasante sur le monde. Sauf que la roue est en train de tourner sur cette donne parce qu’elle a créé un endettement « extraordinaire » tant aux États-Unis qu’en Europe. Et les déficits commerciaux ne cessent de s’allonger et menacent à terme l’Europe et les États-Unis. Déjà, partout en Europe, la situation économique décline sans perspectives futures.
Et ce qui se passe au Proche et au Moyen-Orient est en lien avec ce qui se passe, sur le plan économique, en Occident.
Un autre point, Israël, tout en applaudissant la chute de Bachar-al-Assad, n’a pas perdu le nord ; il s’est empressé de bombarder, le 8 et 9 décembre, des entrepôts d’armes dans le sud de la Syrie et dans la capitale Damas. Le motif avancé par Israël : « pour empêcher leur récupération par l’opposition armée », selon des allégations publiées par des médias hébreux ; Israël s'efforce de contrecarrer les menaces potentielles et de contrecarrer toute atteinte à sa supériorité aérienne en Syrie. »
De plus, l’armée israélienne a annoncé dimanche s’être déployée dans la zone tampon démilitarisée du Golan, dans le Sud-Ouest syrien, à la lisière avec la partie de ce plateau occupée et annexée par Israël, suite au retrait des troupes syriennes.
Il est clair que le changement de régime en Syrie est lié aux défis qui attendent cette région centrale du monde. Pour ne citer que les violations continuelles de la trêve par l’armée israélienne, elles n’ont qu’un sens, et d’ailleurs les médias israéliens le disent. « Les Libanais déplacés par les bombardements israéliens rentrent chez eux dans le sud du pays après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu. Beaucoup d'entre eux retrouvent leur habitation en ruine. En revanche, il n’est pas encore question pour les 60 000 déplacés israéliens du nord du pays de revenir chez eux. Selon beaucoup d’Israéliens, la trêve avantage plus le Liban qu’Israël. »
Dès lors, on comprend pourquoi les violations répétées de la trêve par Israël qui continue à mener des attaques à la frontière sud du Liban ; un comportement suffisant pour montrer qu’Israël a été forcé à signer la trêve et que ces violations de la trêve, un moyen pour montrer qu’il n’a pas perdu la guerre, alors qu’en fait, aucun objectif tracé par le gouvernement israélien n’a été atteint, après 14 mois de guerre.
Et le plus surprenant qui arrive, c’est la chute du régime Assad. Que préfigure-t-il ? Il est certain que si l’histoire a opté pour le changement de régime en Syrie, et qu’un régime islamiste a pris le pouvoir, c’est que cette région centrale du monde est à un tournant de l’histoire. Une guerre qui a mobilisé contre Israël plusieurs pays musulmans de la région depuis l’attaque sans précédent du Hamas contre Israël. Ces pays et régions sont : Gaza et la Cisjordanie directement en conflit armé avec Israël ; le Liban près d’une année de pilonnage du territoire d’Israël qui riposte par des raids aériens et environ deux mois de guerre à la fin, suivis d’une trêve ; les attaques des autres groupes au Yémen, en Syrie, en Irak et l’intervention de l’Iran en Israël.
Une guerre qui a concerné sept pays musulmans pour un petit pays qu’est Israël mais qui a le soutien massif des États-Unis.
Force de dire que c’est la première fois de l’histoire que la guerre a opposé autant de pays musulmans contre Israël qui a pourtant été soutenu par une coalition de puissances occidentales, en particulier les États-Unis et le Royaume-Uni ; la France a rejoint la coalition internationale en mer Rouge afin de répondre aux attaques répétées des rebelles Houthis contre des navires qu’ils estiment « liés à Israël ».
L’irruption du nouveau régime syrien, inattendue, doit avoir un sens dans la situation chaotique, aujourd’hui, au Proche-Orient ; ce nouveau régime sera confronté, dans des temps très proches à Israël ; c’est inévitable. La guerre a, à la fois, changé et en pire encore ; elle a exacerbé les rapports de forces. Ce qui veut dire que la guerre avec Israël, même si elle se termine avec une trêve avec le Hamas à Gaza, et que les otages seraient rendus, l’état de guerre qui sera gelé le restera momentané et surtout bouillonnant de l’intérieur. La guerre pourrait reprendre très rapidement si Israël et les États-Unis continueraient dans leur « débilité stratégique », à ne pas prendre pour leçon des enseignements de l’histoire.
Pour cause, l’armée israélienne, le 8 et 9 décembre, a, pour la première fois dépassé la zone tampon à la frontière avec la Syrie, en dehors du plateau du Golan, et les bombardements israéliens se sont également intensifiés sur le territoire syrien. Entrepôts de munitions, bases aériennes syriennes où avions de chasse, hélicoptères, missiles sont détruits dans le but évident d’éviter que le nouveau régime syrien en prend possession ; l’objectif d’Israël et d’affaiblir militairement la Syrie.
Mais est-ce réellement une solution pour prévenir l’avenir ? Et si c’est encore une « idiotie intellectuelle » de la part des décideurs israéliens ; ils voient petit les rapports de forces ; ils croient qu’en détruisant les entrepôts de munitions, des forces aériennes, ils affaibliront la Syrie. Et s’ils sont complètement en dehors de la marche de l’histoire ?
N’ont-ils pas appris à ce qui s’est passé en Afghanistan ? Les combattants Talibans n’avaient ni avions de chasse, ni hélicoptères face aux forces américaines et de l’OTAN lourdement armées ; qu’a-t-elle servi leur puissance terrestre et aérienne ; les bombardements massifs par l’aviation, les chars lourds, les canons tractés de tous types d’obus, les obusiers de 155mm, etc. A la fin, les forces américaines et de l’OTAN ont été obligées de quitter l’Afghanistan sans aucun gain, et surtout dans une situation désastreuse comme le monde entier l’a vu dans toutes les télévisions de la planète qui ont montré leur retraite catastrophique de Kaboul, à l’été 2021.
Précisément, Israël, tout en applaudissant la chute de Bachar-al-Assad, ne sait pas qu’il est en train de préparer l’entrée en guerre de la Syrie dans le conflit. Et Israël n’en est pas conscient ; il se base sur les armes que lui octroie l’Occident, et il croit qu’avec les raids aériens, il imposera sa loi aux nations voisines dont il occupe indûment des terres et en a annexé certaines. Ces annexions de terres et occupations, et donc des conquêtes par la guerre ont toujours été un moyen pour Israël d'affirmer sa puissance sur ses ennemis ; mais ces territoires confisqués maintiendront Israël et les États-Unis en un état de guerre permanent. Qui plus est ses ennemis arabes se renforcent, apprennent les leçons de guerre, les tactiques et stratégies à mener face à un adversaire très fortement armé. Qui plus est encore Israël est un petit État, et en face de lui, des pays qui l’environnent et lui sont tous hostiles ne cesseront jamais de lui faire la guerre pour entrer en possession de leur terres. Et le peuple palestinien ne cessera pas le combat jusqu’à libérer ses territoires de l’occupation israélienne.
Et c’est pourquoi, par cette « débilité stratégique » d’Israël, la guerre ne pourra pas s’arrêter ; Israël ne pourra pas exister sans la guerre ; et il a besoin du soutien permanent de la puissance américaine. La question est jusqu’à quand Israël pourra-t-il tenir face à ses ennemis ? Et qui sont ses ennemis ? Ce sont tous les pays arabes et non-arabes mais tous musulmans, de la région proche et moyen-orientale. Quant à la population musulmane, elle compte plus de 1,8 milliard, soit 24% de la population mondiale. (Chiffres de 2015).
Quant à la population juive dans le monde, pour ne donner que les chiffres de l’Agence juive publié par le média israélien, Times of Israël, du 24 octobre 2024. « La population juive mondiale s’élève à 15,8 millions de personnes à la veille de Rosh HaShana, le Nouvel An juif, a déclaré mercredi l’Agence juive, soit une augmentation d’environ 100 000 personnes par rapport à l’année dernière.
Le rapport annuel est basé sur des recherches menées par le professeur Sergio Della Pergola, démographe à l’Université hébraïque de Jérusalem.
L’agence ajoute que sur ces 15,8 millions, 7,3 millions résident en Israël, contre 7,2 millions l’année dernière. Sur les 8,5 millions de Juifs qui vivent en dehors d’Israël, le plus grand centre de population juive est les Etats-Unis, où vivent actuellement 6,3 millions de personnes, selon le rapport. »
On constate dans ces chiffres donnés par le Time of Israël, qui sont extrêmement faibles, une dénatalité flagrante en Israël. Seulement 100 000 naissances juives, en un an ; ils ont fait passer la population juive dans le monde de 15,7 millions à 15,8 millions de personnes, en 2024 ; et l’augmentation a eu lieu en Israël. Que sera Israël sur le plan démographique dans les décennies futures ? Une contraction de la population juive dans le monde ? Comme pour tous les pays industrialisés : Allemagne, Japon, Russie…
Quant à la guerre liée aux territoires annexés et à l’occupation indue, Israël est condamné à perdre la guerre et à rendre tous les territoires à leurs propriétaires. C’est une question de temps ; la situation évolue plus favorablement pour les pays qui sont en conflit armé avec Israël que pour Israël qui s’entête de maintenir cette colonisation avec l’appui des Américains et Européens. N’est-ce pas une « déraison » bien plus qu’une « débilité stratégique » pour Israël et ses soutiens occidentaux ?
La question qui se pose : « Cette déraison provient-elle d’Israël et de ses soutiens occidentaux ? Sur le plan humain, oui, elle provient d’Israël et de ses soutiens occidentaux. Sur le plan absolu, non, cette déraison relève de l’histoire ; c’est l’Histoire en absolu qui trace la marche de l’humanité ; en d’autres termes, c’est l’Esprit, au sens hégélien, qui gouverne le monde ; et dit plus simplement, qu’on y croit ou que l’on n’y croit pas, c’est Dieu. Il existe bien une puissance qui a créé le monde et les êtres humains, et qui les suit : sans cette puissance, il n’y aurait ni monde ni humanité ; et c’est cette puissance qui ordonne la marche u monde.
Aussi peut-on dire que la guerre déclenchée en octobre 2023 est loin d’être terminée, elle fait entrer tout le Proche-Orient dans un nouveau tournant de l’histoire. Et même du monde, sur un plan géoéconomique et géostratégique mondial. Des conséquences sans commune mesure avec le passé. La petite enclave de Gaza, par exemple, a été pratiquement détruite ; Israël a utilisé tous les moyens pour détruire le bras armé du Hamas. Il n’a pas hésité à bombarder la population civile ; aucune humanité vis-à-vis des civils ; des bombardements massifs et surtout aveugles frappant la population, de jour comme de nuit, parfois en plein sommeil, dans les camps de toiles.
Les camps de réfugiés sont devenus des mini-Gaza. Les Gazaouis disent : « Israël nous bombarde, détruit nos maisons, nos hôpitaux, nos écoles, nos mosquées ; il rase nos routes, bloque les ambulances, nous asphyxie, nous fait affamer… et le motif invoqué par Israël, les terroristes palestiniens se cachent parmi la population, donc il faut tout bombarder : femmes, enfants, vieillards, jeunes et moins jeune. Mais est-ce possible une telle ignominie par les corps armés d’Israël, les soldats israéliens qui sont des humains ? « Ont-ils conscience de leur inhumanité ? »
Forcément, non. S’ils en ont conscience de leur inhumanité, ils n’iraient pas jusqu’à bombarder, tuer sans distinction entre combattants palestiniens qui se cachent dans les souterrains et les populations palestiniennes qui n’ont pas où aller sinon à vivre dans les camps de toiles et ils sont sans cesse déplacés, comme es moutons que l’on mène à l’abattoir.
Force de dire que cette guerre à Gaza est devenue le summum de toutes les guerres passées ; quant au Hezbollah, il a certes contribué fortement en bombardant continûment pendant près d’un an Israël ; à la fin attaqué par une offensive israélienne massive, le Hezbollah a néanmoins bloqué l’armée israélienne à la périphérie de la frontière du Sud du Liban avec Israël. Malgré toute la puissance de feu de l’armée israélienne, ses brigades motorisées, ses chars d’assaut, son aviation ne cessant de pilonner les forces du Hezbollah et les villes du Sud du Liban et la capitale, Beyrouth, Israël n’a pas atteint ses objectifs, y compris à Gaza où les combattants du Hamas continuent le combat contre Israël.
Le 27 novembre 2024, la trêve à la fin a eu lieu ; en réalité, la trêve a été imposée par Washington. Pourquoi ? Parce qu’elle relevait d’une question de conscience pour le président américain Joe Biden. En fait, pour raison de conscience, Joe Biden ne voulait pas quitter la Maison Blanche, le 20 janvier, sans régler la guerre au Proche-Orient. En effet, en laissant cette guerre inhumaine se poursuivre à Gaza et au Liban, il sait qu’après son mandat, il sera taxé de fossoyeur des peuples palestinien à Gaza et au Liban. En clair, c’est lui qui a donné carte blanche à Israël d’enterrer le peuple de Gaza par les milliers de bombes de tous calibres qu’il a envoyés à Israël. Joe Biden sait très bien qu’Israël, sans le soutien massif des États-Unis en armements et en protection par l’armée américaine, ne peut mener une guerre contre un pays arabe ni maintenir sous occupation le peuple palestinien.
Aussi comprend-on la part de responsabilité du président américain sortant dans ce soutien à Israël est criante ; que l’opinion publique mondiale et les historiens auront à dénoncer, après la fin de son mandat. Il est devenu vital pour la prise de conscience de Joe Biden comme de son administration qui partage cette responsabilité de mettre fin à cette guerre au moins par une trêve jusqu’à la fin de son mandat, le 20 janvier 2025.
Quant au président élu Donald Trump, lui aussi appelle à la fin de la guerre à Gaza, sachant qu’il prendra la relève après les départ de Joe Biden. Sauf qu’il y a eu un événement inattendu qui a surgi le 27 novembre 2024, le jour même de la déclaration de la trêve au Liban. L’attaque menée par les forces de l’opposition a fait tomber le régime de Bachar, en seulement dix jours.
Comme on l’a dit supra, il n'y a pas de coïncidence ni de hasard en histoire ; tous les événements évoluent rationnellement ; tout ce qui arrive doit arriver, et ce qui arrive doit nécessairement avancer l'histoire ; l'histoire oriente la marche du monde. Comment ? Par les « ruses de l’histoire ».
Se rappeler les deux guerres mondiales. Les puissances européennes, dans l’apogée de leurs puissances, avaient le monde entier à leurs pieds ; une grande partie du monde était colonisée, toute l’Afrique et une grande partie de l’Asie ; le reste du monde s’inclinait sauf les États-Unis qui étaient issus de l’Europe, et donc les États-Unis, une Europe-bis.
Ce sont précisément ces deux ruses de l’histoire, les deux guerres mondiales qui ont mis fin à tous les empires coloniaux, en Europe, en Asie… 54 pays d’Afrique sont devenus indépendants, et plus de 50 nouveaux pays dans les autres continents.
On comprend dès lors que, non seulement les guerres depuis 2023 contre Israël, la prise du pouvoir par l’opposition syrienne a aussi un sens historique dans les événements à venir, dans cette région centrale du monde.
Si le régime de Bachar est tombé, c’est simplement parce que son régime n’est plus viable au regard de l’évolution de l’histoire. Le régime de Bachar était en fait un régime de statu quo avec Israël ; il convenait à la fois au pouvoir politique syrien et au pouvoir israélien ; l’objectif de cette entente non dite était le maintien du statu quo de la situation du plateau du Golan annexé par Israël. Mais l’histoire avance ; elle n’attend pas ; elle doit se réaliser ; les guerres à Gaza et au Liban remettaient déjà en cause le statu quo de plus de 50 ans ; Israël n’a pas gagné la guerre ; certes des destructions inimaginables ont eu lieu, des pertes humaines considérables certes plus côté palestinien et libanais qu’israélien. Les pertes humaines israéliennes sont censurées, mais dans un journal israélien, on a fait état, il y a quelques mois, de 12 000 blessés. Israël a certainement eu beaucoup de tués et tout le nord d’Israël est à reconstruire.
Et arrive cette nouvelle donne, la prise du pouvoir par l’opposition islamiste, entre le 8 et le 9 décembre 2024. Et que fait Israël devant cette nouvelle situation du front syrien ? Devant ce flottement dans la prise de Damas et la fuite de Bachar al-Assad, les forces armées israéliennes prennent possession de la zone tampon, une zone de démarcation neutre, après la chute de Damas. Les chars israéliens pénètrent dans de nouvelles zones et imposent des couvre-feux aux localités syriennes. Le commandement israélien prétend dans cette occupation sur le territoire syrien d’empêcher l’émergence d’une « infrastructure terroriste ».
Et Israël, anticipant, ne pouvant accepter ce changement de statu quo puisque Bachar al-Assad est parti, rompant le deal, se lance dans une agression massive contre la Syrie. Les médias occidentaux rapportent que l’armée de l’air israélienne « a attaqué plus de 300 cibles militaires en Syrie, dont l’objectif visé est de détruire l’armée syrienne ». Les cibles attaquées en Syrie sont des bases où stationnent les chars, les avions et hélicoptères militaires, les rampes de missiles, de l’armée syrienne. Il est rapporté que l’aviation israélienne a lancé les raids les plus massifs contre la Syrie depuis la guerre d’octobre 1973, détruisant tous les escadrons d’avions de guerre dans les aéroports, des radars, des dépôts d’armes. Y compris des centres de recherches militaires.
Que peut-on dire de cette stratégie israélienne de détruire tous les équipements de l’armée syrienne, qui va des chars aux avions et missiles ? La réponse va de soi ; le nouveau régime syrien va remettre de l’ordre dans l’État syrien mais avec une nouvelle donne : le rétablissement de la souveraineté de l’Etat syrien sur toutes ses composantes terrestres. Donc la question de l’annexion du plateau du Golan va forcément se poser pour le nouveau régime syrien, il y va de sa crédibilité, d’autant plus que toutes les forces vives de la nation seront invitées à la construction et la consolidation de l’État syrien.
Israël a déjà anticipé ses projections sur ce que sera le nouvel État syrien ; ce n’est plus une branche ethnique qui gouvernera la Syrie, comme le fut la communauté alaouite. Une histoire de la Syrie a pris fin et une nouvelle histoire se lève pour la Syrie. Quant à Israël, qu’il ait détruit une grande partie des équipements de l’armée syrienne, pourra-t-il arrêter la marche de l’histoire ? Qui est déjà programmée, et qu’en fait la chute du régime de Bachar al-Assad était une ruse de l’histoire, comme l’a été l’attaque sans précédent du Hamas, le 7 octobre 2023.
Le Hamas aurait pu ne pas réussir son attaque si les circonstances historiques et la marche de l’histoire lui étaient contraires ; or, cette attaque a été un formidable et puissant levier historique pour rebattre les cartes de cette région qui, on peut dire, se sont ankylosées même, avec la nouvelle donne : les accords d’Abrahams. Deux traités de paix entre des monarchies arabes et Israël, reléguant au second plan la cause palestinienne.
Une ruse de l’histoire appelle à sa fin, avec la trêve au Liban et bientôt à Gaza, une autre ruse de l’histoire : la chute du régime syrien et son remplacement par un nouveau. Ce qui signifie qu’Israël n’a pas fini avec les guerres, ni d’ailleurs les États-Unis, leur soutien. Dès lors, on peut comprendre que « les bombardements israéliens contre la Syrie suite à la chute du régime s’inscrivent dans la guerre ». Et le nouvel État syrien est conscient qu’Israël est massivement soutenu par les États-Unis ; et les États-Unis lui sont hostiles ne serait-ce que lorsqu’il cherchera à récupérer le plateau du Golan.
Et sans armements, le nouvel État syrien se trouvera devant une question de survie même ; et donc, il doit aussi chercher en urgence les puissances qui peuvent suppléer à ses besoins. Et les puissances qui s’opposent à l’Occident ne manquent pas ; à voir la guerre en Ukraine. Les principales puissances face à l'Occident sont la Russie et la Chine ; et avec les bases russes en Syrie, notamment à Tartous, le nouveau régime a intérêt à négocier avec la Russie ; il sait que, sans soutien sûr, il ne pourrait arriver à répondre aux aspirations du peuple syrien.
Cependant, quoi que l’on puisse dire sur les événements à venir, la marche de l’histoire est déjà tracée, et peu importe la débilité stratégique d’Israël qui ne voit où est son vrai intérêt. L’histoire ne manquera pas de le lui apprendre.
Medjdoub Hamed
Chercheur
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