Déconstruction du mythe du « 11-Septembre 2008 de la finance »
Ceux qui ont évoqué un 11-Septembre financier pour parler de la crise des liquidités n’ont pas entièrement tort. Mais, en creusant un peu plus loin, quelques similitudes étranges apparaissent. Notamment l’usage d’un « effet effondrement » pour justifier « l’opération renflouement », que la plupart appellent plan Paulson, un renflouement aussi présent en Europe, mais de moindre envergure. Le spectre de 1929 semble procéder d’un mythe construit pour donner aux populations du sens et les faire passer à la caisse. Rien que de l’ordinaire. Juste réglementé. Car le procédé est vieux comme le monde et Dieu sait si les Eglises ou les sectes ont fait des affaires sur la base de croyance. Place au récit. Je vais user d’un procédé assez étrange. Pour déconstruire un mythe en filigrane produit par les élites, rien de tel que de construire ce mythe, mais pas en filigrane, avec des grosses ficelles, pour le rendre visible.

Pour commencer, le vrai 11-Septembre, résumé en quelques lignes. Un groupuscule, nommé Al-Qaïda, aux racines obscures, se réclamant de l’Islam ; au début censé aider à bouter les Soviétiques de l’Afghanistan. Après la guerre d’Irak de 1991, sous la direction de son chef Ben Laden et avec ses capitaux saoudiens, l’objectif d’Al-Qaïda a divergé. Bouter les bases américaines de l’Arabie saoudite. Dans les années 1990, quelques attentats très sanglants ont été commis. Les médias ont filmé des combattants ayant trouvé en Afghanistan quelque terre d’accueil et surtout des dirigeants plutôt bienveillants. De vrais amis, ces talibans. Les Etats-Unis auraient dû se méfier. Les avions sont des cibles traditionnelles du terrorisme depuis les années 1960. Mais les Etats-Unis s’étaient sans doute endormis. Le succès de ces attentats ne se comprend qu’à travers une négligence de la part d’un pays qui pourtant, avec la CIA et la NSA, dispose du renseignement le plus puissant du monde. Les tours jumelles se sont effondrées et la suite est connue.
Examinons maintenant ce 11-Septembre de la finance. Les crises économiques font partie de l’Histoire, comme d’ailleurs le terrorisme qui ne date pas de Ben Laden. Déjà, Sarajevo, 1914. C’est loin. Quelle est justement cette crise de 2008 ? Elle a son origine quelque part en 2001. A cette époque, des liquidités injectées par Alan Greenspan et des banques. Des opérations de profit, des siphonages opérés par des organisations non terroristes, mais qui peuvent faire pas mal de dégâts. Surtout dans un environnement non contrôlé où les capitaux circulent librement. Ce n’est qu’un aspect de cette histoire financière.
Ces groupuscules de la finance se réclament d’une organisation non officielle qui n’a même pas une existence, ni un chef. Ce sont les administrateurs d’Al Dollarida. Cette enseigne a pour objectif de faire le maximum de profit. Les membres d’Al Dolladira sont parfaitement organisés. Ils disposent de traders, de gestionnaires, de directeurs, de PDG, de courtiers et d’employés bien dociles et formés à la guerre de tranchée dans les guichets des banques pour aguicher le client. Les plus gros profits sont réalisés par l’équipe dirigeante qui se rémunère non seulement avec des salaires énormes, mais aussi avec des stocks-options, sous la bienveillance des actionnaires qui, eux, ont leurs dividendes et voient le cours de l’action monter. Al Dollarida ressemble à un système du crime organisé, mais ce ne sont pas des criminels comme les parrains de la mafia avec qui ils partagent un seul point commun, la complicité des politiques, et peut-être la Rolex au poignet, quoique ce cliché soit d’une évidence telle qu’elle ne signifie rien. Par ailleurs, Al Dollarida partage avec Al-Qaïda un point commun. L’interprétation des textes. Les premiers lisent les sourates du Coran, les seconds jouent sur les règles du libéralisme. Ils ont inventé un mode de rémunération assez étrange, les stock-options, une libéralité avec les lois conventionnelles des transactions. Il paraît que ça aide à motiver les dirigeants. Le bon gestionnaire aura de la thune en voilà, et du côté des terroristes, c’est mille vierges au paradis. Bon, restons sérieux. Le capitalisme a ses écritures, comme l’islam. Le capitalisme a ses doctrinaires. Certains comme Fukuyama président la fin de l’Histoire, sorte d’eschatologie matérielle qui a son pendant dans la doctrine chi’ite. Et puis, il y a ceux d’Al Dollarida pour qui faire du profit est l’essentiel, quelle que soit l’Histoire. Parfois, certains de leurs dignitaires rencontrent, à Cannes ou à Marbella, leurs homologues wahhabites dont les enfants s’amusent à faire du kart sur la Croisette avec des Lamborghini.
Le mythe du 11-Septembre financier évoque une crise de liquidité. C’est en quelque sorte l’équivalent du krach des deux tours jumelles avec des avions chargées de carburant. Juste une métaphore car le krach de 2008 vient des liquidités. Autrement dit, c’est l’économie qui se casse la gueule tel un gigantesque Boeing qui n’a plus de carburant. Une négligence du système comme ce fut le cas en 2001, des économistes qui n’ont rien vu venir, des politiciens négligents ? Quoi qu’il en soit, c’est cela le mythe du krach de septembre 2008 dont l’effet fut de motiver ce plan Paulson chiffré à 700 milliards de dollars. Une décision étrange car, selon les analystes, personne ne peut dire quel est l’état des finances des établissements bancaires. Le secret règne et, si des chiffres doivent être annoncés, ce sera au moment du bilan, début 2009. Personne ne sait où en est la situation sauf qu’on suppose un krach de liquidités et, comme en 2001, une réplique instantanée est déclenchée. Avec des annonces de presse, des paniques entretenues, mais d’une manière chiffrée, apparemment rationnelle, sans aucune image comme celles des deux tours, juste quelques trous d’airs dans les indices boursiers qui finissent par se récupérer. Etait-ce bien nécessaire d’injecter ce carburant de liquidités ? On va dire que oui, et la suite de l’économie va le prouver. Les affaires vont continuer, même si le chômage va augmenter.
Etait-ce bien nécessaire d’envoyer toutes ces troupes en Afghanistan en 2001 ? On va dire que oui, il n’y a plus eu d’attentats aux States, juste ceux de Madrid et de Londres et quelques-uns disséminés, en Somalie, ou concentrés, en Afghanistan et en Irak, ce qui justifie bien évidemment la présence occidentale. Le monde libre est en guerre contre le terrorisme. Et, en 2008, le monde libre est en voie de guérison contre les dégâts de la finance. Organisés par les financiers d’Al Dollarida qui n’ont pas pour intention de couler le système, mais partagent avec les membres d’Al-Qaïda un signe évident. L’obsession d’une quête qui les enferme dans un système, une bulle, un combat mené à l’écart du monde commun. Les uns veulent combattre à tout prix l’Occident, quitte à payer le prix d’une vie, les autres veulent à tout prix faire des profits faramineux, quitte à faire payer la société pour leur gabegie, leur folie. Certes, les objectifs semblent inverses, détruire pour les uns, piller les finances en soi-disant dynamisant l’économie. Mais, au bout du compte, c’est la société qui en pâtit.
Pour finir, soulignons une similitude de plus. Après les attentats du WTC, tout le monde était Américain et les nations ne se sont pas fait prier pour approuver l’intervention armée contre les talibans. Un consensus large, mais beaucoup moins pour la guerre en Irak en 2003. Si on observe les réactions face au plan Paulson, on peut déceler un très large consensus. Car le krach de l’avion financier américain est susceptible d’engendrer une menace contre l’économie européenne. Et que donc, il faut approuver de plan, et faire participer l’Europe comme naguère, les troupes de différents pays furent envoyées en Orient. Dans un cas, lutter contre une menace terroriste, dans l’autre, contre l’effet domino et une hypothétique dépression à la 1929. Tout le monde est pour Paulson en 2008, Sarkozy, DSK, Hollande, Fabius, Bayrou, l’union sacrée ; comme toute le monde était pour intervenir en 2001 contre les talibans, excepté quelques « emmerdeurs » chez les Verts et le PC ; et maintenant, le turbulent J.-M. Aphatie en croisade contre ce plan de 700 milliards. Et moi-même, mais qui ne compte pas vu que je n’existe pas dans les médias. Cela dit, quelques divergences à noter entre Mme Merkel et M. Sarkozy. Un signe ?
Epilogue. Nous a-t-on tout dit du WTC et de l’intervention contre le terrorisme qui nous coûte bien cher ? Savons-nous tout de ce krach financier ? Une chose est sûre, ceux qui savent sont ceux qui profitent largement du système sans forcément l’améliorer. C’est un peu cela l’économie de la connaissance. Woody Allen disait que les méchants ont compris quelque chose que les bons ignorent. Disons alors que les profiteurs ont compris quelque chose que les laborieux ignorent. Et la messe sera dite !
48 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON