Depuis hier, sur la réforme des retraites, les ministres vous mentent encore plus !
Mercredi 11 décembre 2019 le premier ministre dévoile le « détail » de sa réforme sur les retraites, plus juste, plus efficace, conforme aux promesses et pour que chacun soit gagnant/gagnant. Et aussitôt c’est un déferlement de ministres et députés de la LREM sur toutes les radios et télés à toute heure pour répéter inlassablement les mêmes arguments appris par cœur en séminaires gouvernementaux et parlementaires. Auraient-ils des doutes sur le bien-fondé et la sincérité de leur réforme ?
Je n’avais pas l’intention de proposer un nouvel article après celui publié sur Agoravox le 2 décembre : - Sur la réforme des retraites, les ministres vous mentent ! -
Mais avec ce que j’ai entendu ces 24 dernières heures relayé par les journalistes, les chroniqueurs, les communicants et autre experts de tous ces médias complaisants, je ne peux pas ne rien écrire.
(Médias complaisants : BFM, RMC, propriétaire Patrick Drahi ; Canal+, C8, Cnews, Cstar, propriétaire Vincent Bolloré ; RTL, M6, RTL2, W9, propriétaire famille Mohn ; TF1, LCI, TMC, NT1, propriétaire Martin Bouygues ; Europe1, RFM, Virgin Radio, propriétaire Arnaud Lagardère ; tous des soutiens ou carrément des proches d’Emmanuel Macron qui l’ont fait élire).
Je ne reviens pas sur les premiers mensonges, c’est-à-dire, le système par points assurera l’équilibre financier, les pensions ne baisseront pas malgré le calcul sur toute la carrière, on devra travailler plus longtemps parce qu’on vivra plus vieux oui mais pas tous et pas les séniors chômeurs non plus, etc.
De mémoire, sans préparation, sans recherches et sans ordonnancement une partie des mensonges irréfutables entendus ces dernières heures et dont je me souviens.
France Inter, ce jeudi 12 décembre dans le « grand entretien », on fait remarquer à Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement que les salariés qui perçoivent plus de 10 000 euros par mois aujourd’hui cotisent comme tous les autres à 28% et que demain avec la réforme ils ne paieront plus que 2,8%. Sibeth Ndiaye répond qu’actuellement ces salariés payent 28% qui leur sont rendus dans leur pension qui est proportionnelle aux cotisations. Faux, archi faux : la pension n’est pas proportionnelle aux cotisations ; au-delà de 3 380 euros brut, tout ce qui est perçu en plus ne compte pas dans le calcul de la pension. Elle ajoute que désormais les 2,8% payés ne serviront plus qu’à la redistribution. Or aujourd’hui, vous l’avez compris, ce sont les 28% qui servent à la redistribution. Encore une fois ce sont les plus riches qui sont favorisés. Aucun des deux érudits journalistes n’a relevé l’erreur. Leur seule excuse acceptable serait qu’en fait ils n’y connaissent rien. Mais alors ont-ils droit au titre de journaliste ?
Le premier ministre repris par tous les autres en cœur : l’âge réel moyen de départ à la retraite est de 63,4 ans actuellement donc quasiment 64 ans. Faux. C’est l’âge de liquidation des droits et parmi ceux qui la demandent la moitié n’a plus de travail puisque entre 55 et 64 ans, 47,9% des séniors sont sans emploi.
Les femmes ont des retraites de 42% inférieures à celles des hommes à cause du système actuel. Faux. L’immense majorité des femmes arrivées à la retraite n’ont pas de carrière complète parce que beaucoup n’ont jamais travaillé, leur rôle était de rester à la maison, ont commencé très tard leur carrière, ont eu des emplois à temps partiel et ont eu des salaires très inférieurs à ceux des hommes : voilà pourquoi leur pension est tellement plus basse que celles des hommes.
L’évolution des pensions suivra celle des salaires. Faux. La part du PIB attribuée aux retraites étant fixée à 14%, le nombre de retraités augmentant, l’insuffisance des recettes persistant à cause du chômage et des exonérations, la valeur du point ne pourra que régresser.
Les syndicats géreront la valeur du point. Faux.
En dernier ressort ce sera l’assemblée nationale c’est-à-dire en fait le gouvernement qui tranchera à l’intérieur d’une enveloppe limitée par les 14% du PIB comme cela vient de se passer pour l’assurance chômage.
Citation : « Dans un discours devant un lobby patronal en 2016, François Fillon avait avoué le vrai avantage de ce système à ses yeux. Ecoutez-le dans la vidéo ci-dessous : « le système par point en réalité, ça permet une chose, qu’aucun homme politique n’avoue. Ça permet de baisser chaque année le montant des points, la valeur des points, et donc de diminuer le niveau des pensions ».
Cette réforme ne fera que des gagnants. Alors pourquoi ne pas en faire profiter tout le monde tout de suite ? Pourquoi ne l’appliquer partiellement qu’aux générations après 1975 (1985 pour les régimes spéciaux) ? Pourquoi l’appliquer complètement qu’à ceux qui entreront en activité dès 2022 ?
Les pensions de réversion seront plus favorables en attribuant 70% du revenu du couple au conjoint survivant. Faux. Un exemple : un couple de deux salariés au SMIC.
À eux deux ils reçoivent 1 200 + 1 200 = 2 400 euros. Aujourd’hui le conjoint survivant peut recevoir son salaire plus la moitié de celui du défunt soit 1 200 + 600 = 1 800 euros. Avec la réforme ça devient, 2 400 x 0,7 = 1 680 euros.
Il n’y aura pas de fonds de pension. L’histoire récente des complémentaires santés infirme cette affirmation. Avant il n’y avait que la sécurité sociale, puis les mutuelles à but non lucratif. Les assurances privées étaient interdites dans ce secteur de la santé. Aujourd’hui elles foisonnent sous le nom de complémentaire santé dans les banques, les assurances, les grandes chaines d’hypermarché, etc. Ce sera pareil pour les complémentaires retraites pour ceux qui pourront les payer.
Les carrières longues pourront toujours partir deux ans avant l’âge légal oui mais subiront la même pénalisation que les autres avant l’âge pivot, ou d’équilibre.
Les pensions des enseignants ne subiront pas une baisse de leur pension. Faux. C’est le premier ministre qui l’annonce : la baisse ne sera pas pire que celle des autres fonctionnaires d’emploi équivalent ; il maquille cela en affirmant que leurs salaires seront augmentés au niveau de celui des autres fonctionnaires d’emploi équivalent. Il omet de dire que ceux-ci supporteront la même baisse des pensions que connaitra l’immense majorité des travailleurs pour qui les pensions baisseront automatiquement avec le calcul sur toute la carrière au lieu des 25 meilleures années.
Il n’y aura plus de régimes spéciaux. Faux. Militaires, gendarmes, pompiers, avocats, d’autres professions libérales, policiers sur le terrain, certains agriculteurs ou artisans, RATP, SNCF pour les générations avant 1985, etc. Au passage, la part des régimes spéciaux dans les retraites est d’à peine 6% au maximum, certains avancent le chiffre de 3%. Et c’est pour cela qu’il faut tout casser dans le régime actuel ?
Les jeunes n’auront pas de retraite avec le système actuel. Faux. Le Conseil d’Orientation des Retraites annonce le début du retour à l’équilibre du régime actuel à partir de 2030.
Dans les autres pays les travailleurs prennent leur retraite à 67 voire 69 ans sous-entendu parce qu’eux ont bien compris qu’il fallait travailler plus longtemps, blablabla. Faux. Les travailleurs de ces pays n’ont pas pu bénéficier de la résistance des syndicats à la française et, en Allemagne à cause de la démographie, en Suède, en Hollande, au Royaume Uni, par exemple, à cause des déficits de leurs systèmes respectifs, etc.
Le Parisien, 11 décembre 2019 : « Le dernier rapport de l'OCDE sur les pensions de retraite est clair : si on le compare avec celui des autres pays développés, le système actuel en France est avantageux pour les retraités mais pèse un peu plus sur les dépenses et les revenus des actifs ».
« Pèse un peu plus ». C’est pour cela qu’il faut tout casser ? Pourquoi ce refus obstiné de négocier les améliorations nécessaires au régime actuel ce qui arrêterait immédiatement les grèves ?
S’ils mentent tant c’est pour cacher quoi ? Posez-vous la question !
Dans mon article publié sur Agoravox le 28 novembre 2019, - Les directions de la CFDT, « Trente ans de détricotage du droit social » ? – j’avais écrit : « On peut se demander s’il (Laurent Berger) ne sait pas déjà qu’il approuvera la réforme à la fin, pourvu que les apparences puissent être sauvées ? »
Si le gouvernement revient sur l’âge pivot devenu d’équilibre, les apparences seront sauvegardées et la CFDT pourra approuver la réforme. Sinon, il sera confirmé que la CFDT au niveau confédéral ne sert à rien quand les gouvernants et particulièrement le président de la république en l’occurrence ne leur font pas gentiment une petite place à côté d’eux.
Dans ce même article, j’avais tronqué la fin. Je craignais d’être plus médisant qu’utilement informatif en évoquant le devenir des secrétaires généraux ? Comme les informations que j’ai collectées sont accessibles à tout le monde ailleurs qu’à la fin de mon article et qu’elles sont à mon sens éclairantes, je les rajoute ici, même si ce n’est plus tout à fait le même sujet.
Depuis, que sont devenus les quatre précédents secrétaires généraux de la CFDT après leur départ du syndicat (source Wikipédia, ordre chronologique non respecté, genre ignoré) : président de l'Agence du service civique, nommé inspecteur général des affaires sociales (5eme tour) en conseil des ministres, au statut de haut fonctionnaire, chargé du suivi du plan gouvernemental de lutte contre la pauvreté, PDG de Vigeo devenue Vigeo Eiris (Selon le Canard enchaîné, qui reprend le témoignage d'un chef d'entreprise, « Vigeo, c'est pas compliqué, il suffit de payer : tu files 200 000 ou 300 000 balles, on certifie que ta boîte est écolo et sociale, et te voilà peinard »), membre du conseil d'administration de la Coface (Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur) et du conseil de surveillance du Monde S.A, nommé par la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, et le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, déléguée française à l'Organisation internationale du travail (OIT) poste auquel la personne renoncera à cause de possibles conflits d’intérêt, président de VVF (Villages Vacances Familles, qui deviendra Belambra Clubs après avoir été privatisé en juillet 2006), directeur de la société d’investissement solidaire France Active, consultant en stratégies sociales et gérant de « J.K consultant » à Paris, vice-président de l'Observatoire social international lié à Entreprise&Personnel, un club RH regroupant plusieurs grandes entreprises françaises, membre de la Commission pour la libération de la croissance française dite « Commission Attali ».
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