Des mutuelles aux syndics : plus de réglementations pour moins d’abus
Alors que les Français peinent, et c’est un euphémisme, à boucler leurs fins de mois, les cas d’abus de la part d’entreprises peu scrupuleuses se multiplient. Profitant d’un marché opaque et d’un cadre législatif flou, entreprises autoroutières, syndics et mutuelles spolient les consommateurs depuis plusieurs années. Une situation devenue intolérable et à laquelle il faut espérer qu’une révision réglementaire mette fin dans les prochains mois.

Que les Français en bavent pour maintenir leur niveau de vie au fil des ans depuis la crise, il est difficile de l’ignorer. Une étude vient nous le confirmer tous les mois ou presque. La dernière en date a été réalisée par Opinion Way pour le Sofinscope d’octobre 2013 et les chiffres délivrés sont édifiants. C’est 540 euros qui manquent aux Français chaque mois pour vivre correctement, soit une somme en augmentation de 3 % par rapport à 2012.
On apprend notamment que la hausse continue des prix mécontente considérablement deux tiers des personnes interrogées en région parisienne et 63 % des provinciaux. L’augmentation des taxes, de 5 points depuis 2012, est un autre grief exprimé par 64 % des Parisiens. Et comme il n’y a guère de hausse des salaires qui vaille pour compenser, il faut bien sacrifier les budgets plaisirs.
Une situation qui rend les Français considérablement irritables et qui pourrait les conduire à être plus regardants sur certains dossiers qu’ils négligeaient auparavant, faute de temps et de besoin. Désormais, les Français vont vouloir bénéficier de produits et services à la mesure de ce qu’ils doivent débourser pour les obtenir. Depuis quelques mois, des lanceurs d’alerte pointent du doigt certains abus de la part d’entreprises extorquant à leurs clients de l’argent qu’ils n’ont pas et profitant pour ce faire du manque de transparence du marché. La plupart invoquent une nécessaire révision réglementaire pour faire cesser ce que l’on peut bien appeler une spoliation.
Une hausse de péage constante depuis 2008
Cet été, alors que nombre de Français hésitaient à partir en vacances, la Cour des comptes revenait sur l’augmentation des tarifs routiers supérieure à l’inflation, et ce depuis 2008. En vertu des contrats de plans s’étalant sur 5 ans, les sociétés autoroutières sont en effet autorisées à augmenter les frais de péage pour compenser, exceptionnellement, leurs investissements. Mais ces contrats « ne sont pas publics et sont conclus dans des conditions peu transparentes » expliquait le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, lors de son audition le mercredi 24 juillet par la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Une augmentation d’autant plus intolérable que le chiffre d’affaires des sept sociétés concessionnaires historiques a augmenté en moyenne de 4 % par an entre 2006 et 2011. Ce n’est manifestement pas la crise pour tout le monde. La Cour des comptes n’a donc pas manqué de formuler quelques recommandations parmi lesquelles le plafonnement des hausses de tarif et la contre-expertise des coûts des investissements.
Contrats de syndics : jeu sur les prestations dites « particulières »
La problématique de l’opacité et de ses répercussions en termes de coûts sur les consommateurs est aussi au cœur de l’actualité du logement en ce moment, alors que le projet de loi Alur a été étudié au Sénat du 22 au 25 octobre. Une première alerte avait été lancée par l’association UFC Que Choisir et l’Association des copropriétaires (ARC) le 28 mai 2013. Elles avaient révélé de nombreuses dérives de la part des syndics professionnels, imputables à un contenu législatif distinguant mal d’une part les tâches dites de « gestion courante » comprises dans un forfait annuel, et d’autre part les honoraires supplémentaires correspondant aux prestations dites « particulières » et faisant l’objet d’une rétribution additionnelle.
Ces abus (surfacturations, prestations fantaisistes et frais prohibitifs) pouvaient allonger dans certains cas la facture jusqu’à 50 % du prix des forfaits. Là encore, les deux associations ont émis des recommandations, reprises par la loi Alur, parmi lesquelles l’ouverture obligatoire d’un compte séparé au nom du syndicat des copropriétaires.
Jusqu’ici les conditions tarifaires prohibitives appliquées à l’ouverture d’un compte séparé (entre 15 % et 39 % plus cher que le compte unique) conduisaient le syndicat à ouvrir un compte unique. Ce qui de fait l’empêchait d’avoir une bonne visibilité sur la trésorerie. Une pratique banalisée que pratiquait la majorité des acteurs du marché.
Dorénavant, le syndic devra aussi faire figurer sur le contrat la liste limitative des prestations particulières donnant lieu à une facturation supplémentaire. En outre, le barème d’honoraires dans les contrats n’aura plus lieu d’être et le projet de loi projette également de créer un « Conseil de l’immobilier » chargé de veiller à la bonne déontologie des professionnels du secteur. Gageons que l’injection de davantage de transparence dans le secteur fera payer le juste prix aux copropriétaires. Mais il est rageant de s’apercevoir que certains syndics en ont profité pendant des années pour s’en mettre plein les poches.
Les mutuelles, les prochaines sur la liste ?
Dernier exemple, les « contrats illisibles et les pratiques commerciales floues » des organismes complémentaires de santé dénoncés par Fréderic Bizard dans un ouvrage intitulé « Complémentaires santé : le Scandale ». Encore une révélation qui risque de hérisser le poil des Français. « Les frais de gestion augmentent sans cesse au sein des organismes complémentaires, ce qui réduit d’autant la marge de manœuvre pour rembourser correctement les assurés », dénonce-t-il. Il accuse encore une fois les complémentaires santé de tout faire pour « conserver un marché le plus opaque possible ».
Un dossier à étudier de près à l’avenir ? Sans doute, d’autant que la santé est un sujet auquel les Français sont particulièrement sensibles.
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