Deux destins : un triste et l’autre fabuleux. Tim Kretschmer, adolescent allemand, avait 17 ans. Il est mort hier, après avoir massacré une dizaine de personnes dans la petite cité de Winnenden, près de Stuttgart. Issu d’une famille aisée, fils d’un collectionneur d’armes, personne n’avait pensé qu’il arrivât à telle extrémité. Quant à Sharif Hassan Zadeh, adolescent afghan, 17 ans lui aussi, il a été reçu hier, au Ministère de l’Immigration, par le ministre Eric Besson. Il y a des histoires vraies, assez particulières, qui font beaucoup jaser et dont on aime en somme la synecdoque particularisante. Il y a en revanche d’autres histoires qui, malheureusement, choquent, et dont on a envie d’oublier assez rapidement.

- Tim Kretschmer à 14 ans
Tim Kretschmer, né dans un pays développé, l’Allemagne, avait tout pour réussir. L’environnement, un cadre et une vie familiale qui paraissait calme. Hélas, semble-t-il, derrière cette façade, se cachait un jeune homme meurtri par un échec scolaire qui n’en était pas un, rejeté par la société et très malheureux en amour, note ce matin la presse outre-Rhin. Pourtant, titulaire d’un diplôme de vendeur acquis dans le collège Albertville où il a tué 9 de ses anciens camarades, 3 enseignants et blessant grièvement 7 autres adolescentes et 2 policiers, avant de se donner la mort, selon la police. Victime d’un malaise sociétal par un échec sentimental, l’adolescent, excellent pongiste selon ses amis, a décidé d’exterminer…les femmes. Atroce constat, folie meurtrière. L’Allemagne est en deuil. Angela Merkel, la chancelière allemande s’est dite horrifiée et bouleversée lors d’une allocution, hier, en concluant que c’était « inconcevable ».
Sharif Hassan Zaded, lui, est le fils de berger afghan. Né pauvre, dans un pays miné par la corruption du Gouvernement Hamid Karzaï, le pavot-roi et le terrorisme, il arrive en France, à l’âge de 14 ans, à Lille, après un parcours tortueux, entre les mains d’un réseau de passeurs. Il débarque enfin à Tourcoing, et est placé par une assistante sociale dans un foyer d’accueil d’urgence du nom de Mosaïque, après ce parcours du combattant haut en couleurs. Puis, sauvé par sa minorité, il reste en France, pris sous l’aile des dirigeants du club, le Punch boxe française-savate de tourquennois. A noter qu’à sa majorité, normalement, selon la loi, il devait être expulsable mais, un combat de boxe, fera sans doute de lui, un français. C’est le nouvel espoir de la boxe française. Samedi dernier, il a remporté un franc succès, après sa victoire au championnat de France espoir.
En Allemagne, c’est le choc. Le problème de sécurité à l’entrée des écoles se pose désormais. Pas à l’image des Etats-Unis où, malgré des histoires récurrentes de massacres dans les établissements scolaires et une récente tuerie, la sécurité n’a pas été plus renforcée que ça. Les autorités allemandes parlent d’installer des détecteurs de métaux à chaque accès ou de placer des policiers. Ce qui est impossible. Il est finalement envisagé de renforcer des cellules psychologiques et sociales dans les écoles, pour pouvoir déceler à temps, des adolescents potentiellement dangereux. Après cette chevauchée sanglante, Une cérémonie religieuse s’est tenue hier soir dans cette petite bourgade de 30.000 habitants. Aujourd’hui, à travers tout le pays, le drapeau tricolore allemand sera en berne.
A Tourcoing en revanche, on fait la fête à l’honneur de Sharif. Il est devenu le chouchou de la République. Le ministre de l’Immigration, de l’Intégration et de l’Identité nationale, Eric Besson, est sous le charme du gamin. Avant de le recevoir, dans un communiqué, il a non seulement annoncé qu’à sa majorité, il obtiendra sa régularisation, mais que, s’il le désire, il pourra obtenir rapidement, la nationalité française. Le jeune afghan est ravi, ses protecteurs aussi qui, lui avaient prédit un tel destin s’il réussissait dans sa discipline, mais qui avouent qu’ils ne savaient pas que le destin allait s’accélérer après sa victoire aux championnats de France espoir de boxe française.
En 2002, l’Allemagne avait déjà connue une tuerie pareille, à Erfurt, dans sa partie est. La législation sur le port d’armes avait été durcie, passant de 18 ans à 21 ans. Tim Kretschmer, 17 ans, avait lui, la « chance » d’avoir des parents passionnés d’armes à feu. Il s’est simplement servi chez lui, où, la police a perquisitionné hier et découvert 18 armes. Il a pris un pistolet Beretta, avec lequel il a commis l’irréparable. C’est un sentiment d’incompréhension qui domine les esprits en Allemagne, premier pays après les Etats-Unis, où, ce genre de faits divers et méfaits sont constants. Personne n’a une réelle explication.
Le jeune Sharif qui ira voir probablement le très bon et beau film, Welcome, de Philippe Lioret, si ce n’est déjà fait, découvrira une partie de son histoire. Il l’a échappé belle, sauvé par une volonté chevaleresque. Assidu dans les salles de sport, il a accompagné son apprentissage avec des cours intensifs de français. Doué, il s’exprime aujourd’hui dans un français impeccable. S’il est naturalisé, il pourra participer au championat d’Europe et du monde à venir, sous la bannière française. Tout est question d’environnement alors ? Pas vraiment. Lorsqu’on compare les deux histoires de ces deux gamins, entre un destin brisé et un autre en passe de devenir une légende, il y a de quoi perdre son latin.
>>>Allain Jules
Sharif Hassan Zaded