• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Développement durable, machine arrière toute !

Développement durable, machine arrière toute !

Lorsque j’ai écrit l’article : « Développement durable, une arnaque du capitalisme ! », les réactions et commentaires furent pour le moins mitigés. Disons, plutôt, étonnés que l’on remit en cause ce principe qui aux yeux de beaucoup allait peindre l’avenir en vert tout en continuant à croitre.

 Pourtant, les forcenés du PIB, sentant que quelque chose clochait avait modifié l’expression en « développement soutenable », ce qui veut dire à peu près la même chose hormis le fait que cela laisse apparaître un léger doute sur la durabilité. Cependant, le développement proprement dit n’était pas remis en cause, c’est néanmoins le plus important de l’expression. A l’évidence, en utilisant ce terme il n’était absolument pas tenu compte que la terre est un produit fini ce qui inéluctablement est une barrière à toute croissance expansive. Même le nucléaire dont le Chef de l’Etat français est le chantre verra un jour son minerai épuisé, c’est même pire que les énergies fossiles puisqu’il se fait toujours de la fossilisation sur des millénaires, les minerais comme l’uranium, eux, non.

 Convaincus de leur pouvoir incontestable, les scientistes disent : on trouvera des solutions ! Ou alors des inconditionnels de la croissance s’unissent à l’astrophysicien Stephen Hawking.qui veut aller coloniser d’autres planètes afin de pouvoir continuer à croitre, la terre ne suffisant plus. Sans être grand clerc ni être au paroxysme de la négation scientifique il est évident que la techno-science ne résoudra pas tout et raison de plus lorsque l’on envisage d’aller planter des poireaux sur Vénus. Cela remet donc sérieusement en cause le développement durable et c’est l’un de ses grands prêtres, le pape de ce principe ainsi que le considèrent certains, qui vient de faire machine arrière sur cette notion.

 Dominique Bourg, est une sommité en la matière, universitaire reconnu, professeur à l’IPEH, (Institut des Politiques de l’Environnement Humain de Lausanne), il faisait partie du Comité National du Développement durable qu’il a quitté récemment, mais aussi du Comité de veille écologique de la fondation Hulot. Il fut aussi l’un des constructeurs du Grenelle de l’environnement, et on lui doit surtout deux ouvrages de référence, « Le développement durable » avec Marie-Claude Smouts et Antoine Serge en 2005, puis : « Le développement durable. Maintenant ou jamais », avec Gilles–Laurent Rayssac, novembre 2006. Donc, le spécialiste, l’expert incontournable.

 Seulement voilà, l’expert a fait machine arrière ! Ce fait est suffisamment marquant qu’il méritait d’être signalé et d’en remercier le journal la Décroissance pour en avoir fait part dans ses colonnes. C’est donc dans un long entretien avec Vincent Cheynet en page 5 de la Décroissance N°72 de septembre 2010 qu’il remet en question le concept de développement qui fut pourtant la pierre d’achoppement de l’économie verte. Il avait d’ailleurs déjà fait une analyse assez poussée de la situation au paragraphe « la parenthèse du développement durable » dans la revue Etudes du mois de juillet 2010 (tome 413/1-2). C’est donc un passage pris dans cette revue que nous citerons car il suffit pour comprendre le retour en arrière du spécialiste :

 « Repensons à ce que disait les textes fondateurs de la réflexion écologique des années 1970, ceux d’Illich, des époux Meadows, les auteurs du rapport au Club de Rome, de Georgescu-Roegen, Goldsmith ou Gortz. Tous n’envisagèrent d’autre qu’une décroissance des économies. Or nous sommes désormais contraints à nouveau cette perspective. Tel est par exemple la position défendue en mars 2009 par la commission britannique du développement durable.

 Le rêve du découplage entre la croissance des économies et la consommation des ressources a fait long feu. Il convient donc de refermer la parenthèse du développement durable. Cessons de croire que nous pouvons harmoniser une économie purement financière, dont les instruments visent à rendre plus clair toute considération de long terme, et la préservation de la biosphère.

 Finissons-en avec la rhétorique des trois piliers et un équilibre aussi trompeur que mensonger entre les dimensions économiques, sociales et écologiques.  »

 Ce résumé suffit pour dire qu’il remet totalement en cause la notion de développement durable dont il fut pourtant un ardent promoteur. Cela prouve ainsi que nous l’avions plusieurs fois précisé que ce concept est obsolète, il précise d’ailleurs dans l’entretien : « …il devient nécessaire de réfléchir sans tarder à ce que peuvent être des sociétés de décroissance  » (extrait de la Décroissance).

 En effet, là est le cœur du problème, auquel il ne répondra pas puisqu’il se borne à une simple analyse en n’allant pas chercher les causes profondes de la suractivité humaine destructrice qui sont le productivisme et son moteur, le capitalisme.

 Certes, il a avancé dans la réflexion de façon assez remarquable, mais pour aller vers cette mutation, même en période transitoire il faut construire la société de demain en s’opposant, en détruisant le capitalisme car il n’y a pas d’autres alternatives, le profit fera toujours produire plus en épuisant les ressources de la terre, en la polluant, sous le fallacieux prétexte de créer des richesses.

 Toutefois, forts de ce revirement, si les fervents défenseurs du développement durable font les mêmes constations sur l’évolution incontournable que vont subir nos sociétés, on peut espérer aussi que des germes de décolonisation de la pensée unique vont faire leurs chemins…

 Le Ragondin Furieux

 


Moyenne des avis sur cet article :  3.95/5   (19 votes)




Réagissez à l'article

11 réactions à cet article    


  • Jean-Pierre Llabrés Jean-Pierre Llabrés 22 septembre 2010 13:02

    "il faut construire la société de demain en s’opposant, en détruisant le capitalisme car il n’y a pas d’autres alternatives, le profit fera toujours produire plus en épuisant les ressources de la terre, en la polluant, sous le fallacieux prétexte de créer des richesses".

    Et si, au lieu de s’opposer ou de détruire le capitalisme, on parvenait à se l’approprier pour le maîtriser ?
    Il convient de cesser de considérer le Capitalisme comme LE mal absolu et de le faire évoluer vers un Capitalisme intrinsèquement Écologique, Anthropocentrique, Philanthropique et Équitable grâce à l’instauration d’une Allocation Universelle transitoire suivie de la génération d’un Dividende Universel permanent et évolutif, « fonds de pension national et privé », sorte de coopérative-capitaliste, solidairement et collectivement géré par une structure spécifique, indépendante de l’État et représentative des citoyens-électeurs-contribuables qui résoudra le problème du chômage et permettra l’accession citoyenne au Pouvoir Économique.
    (cf.
    Mémoires présidentiels : 2012 - 2022)
    Un nanti capitaliste (monomaniaque & sans complexe).


    • LE CHAT LE CHAT 22 septembre 2010 13:14

      Ces capitalistes sont tellement rapaces et cons qu’ils s’opposent à la taxation des transactions financière au profit de l’aide au dévellopement des pays du tiers monde , ne voyant même pas qu’ils se privent de faire des habitants de ces pays de futurs consommateurs .....  smiley


      • zototo 22 septembre 2010 14:59

        Hum, j’ai des doutes sur tes connaissances de l’économie....


        Pour faire simple : taxe tobine = réponse du berger à la bergère ; Vous voulez taxer les transactions financières OK, les financiers vous feront payer leurs services plus cher...

      • zototo 22 septembre 2010 15:00

        Et le simple fait que sarko défende la taxe tobine, est la démonstration la plus simple que c’est une mauvaise idée...



      • Fouls Fouls 22 septembre 2010 17:30

        Cela fait plaisir de voir que ce genre d’idées est parfois exposé sur la place publique et plus seulement dans les colonnes de la Décroissance, il est temps que ce genre de débat progresse pour peut-être définir une série de mesures concrètes... car sincèrement tout ce que j’ai lu jusque là sur les alternatives à la société de croissance reste assez floues


        • Mengneau Michel Mengneau Michel 22 septembre 2010 18:52

          Si j’ai insisté sur la prise de position de Dominique Bourg c’est que celle-ci est loin d’être anodine, je prétends même qu’elle est capitale !

          En effet, il fut Le penseur du développement durable, qui en fait est une chose irréalisable, on ne peut donc que le remercier de sa prise de conscience tardive certes, mais qui prouve son honnêté même s’il n’a pas fait le cheminement complet pour se désengluer du capitalisme restant le consultant de multinationales diverses. Toutefois on ne peut que saluer le fait d’avoir eu le courage de dire halte au mensonge...


          • toubab 23 septembre 2010 09:12

            Pour aller plus loin dans le sens de M.Cassino, j’ajouterai :arrêtez de prendre les intelligences issues des 5 et plus Milliards d’Asiatiques,Sud Américains, Africains ,Océaniens.......pour des Ignares ,ni la Chine , ni l’Inde n’ont besoin de votre exemple d’ auto flagellations de couches moyennes occidentales.
            Dans mon village du Sénégal, les fillettes après l’école ,parcourent des kilomètres quotidiens pour aller au puits ,chercher du bois mort......faute d’ambulance on crève en chemin dans la carriole ...ca c’est du Durable !


            • cimonie raoul 23 septembre 2010 11:08

              Ai lu l’article dans La Décroissance de ce mois-ci. Effectivement, c’est un sacré retournement de veste en même temps qu’un aveu de vanité du développement durable. Comme quoi, la mode du DD était décriée à juste titre finalement. Et comme le disent Bourg et bien d’autres, la décroissance, on n’y échappera pas...


              • Le chien qui danse 23 septembre 2010 12:17

                Croissance, décroissance, DD, tout cela sont des concepts pour nous faire croire que nous sommes ou pouvons être les maîtres de la situation.
                Là nous avons une situation qui se profile qui va nous montrer que nous ne faisons pas ce que nous voulons, c’est une bonne leçon d’humilité.
                Quand nous l’aurons acceptée et digérée on pourra commencer à parler solution.
                Les trois piliers resteront, simplement parce qu’ils sont structurels, économie, mais de quelles économie parlons nous. Social, mais qu’est-ce qu’une société et pour quoi faire. Environnemental, quel rapport avec ça, harmonisation certes mais comment et pour quoi.
                Ce qu’évite quasiment tout le monde c’est la question du sens qui se profile dès que l’on remet en cause le développement compulsif qui à régné depuis l’aube de l’humanité.
                C’est à un développement réfléchi auquel nous devons accéder, c’est cette révolution qui est à faire, elle se fera dans la douleur, les accouchements sont difficiles.
                On ne peut attendre de réfléchir pour agir, demain il faut agir, un peu de spontanéité et de gratuité nous permettraient peut-être d’y voir un peu plus clair.
                Les dents vont grincer, comme à dit l’autre...


                • Will Will 23 septembre 2010 12:28

                  Asssocier l’idée de developpement à quelque concept que ce soit qui impliquerait une clause pérenne est tout simplement un oxymore, une impossibilité claire pour tout être humain qui ose se rappeler qu’il vit sur une planète, c’est à dire une boule finie sans expansion aucune, dont les ressources sont par définition limitées.

                  Mais nous avons inventé les religions (croissez et multipliez vous), le profit sans limite (capitalisme, impérialisme,etc.) et toutes les formes d’exploitation de l’homme par l’homme qui résultent en une finale et exponentielle exploitation de la planète par sa seule espèce totalement prédatrice, nous !

                  La décroissance est certes une excellente idée, mais si et seulement si elle se conçoit en termes de réduction quantitative qui va simultanément avec une augmentation qualitative, c’est à dire que nous devons (les moyens scientifiques et techniques le peuvent dès maintenant) réduire l’exploitation des ressources naturelles à leur minimum vital sur la planète, en appliquant une politique de décroissance du gaspillage et de la population (stabilisation au moins, le tabou de la surpopulation n’existe pas, la stabilisation de la population se fait naturellement dès que la qualité du niveau de vie est suffisante) et simultanément une politique de développement de : l’éducation à un très haut niveau de qualité, la recherche dans la même mesure, la transformation radicale et qualitative des médias dans leur contenu par l’expansion des points précédents, etc...

                  Mais quand j’emploie le mot politique, je dévoile le noeud du problème, sauf à l’obtention d’un changement radical de la gestion politique (au sens ethymologique), nous sommes conduit à soit disparaitre, soit souffrir une régulation forcée par les éléments ou la folie des puissants qui nous amènerons à une société humaine dont Orwell avait pressenti les premisses !

                  Chacun peut quelques chose en agissant simplement par l’exposition de ses idées progressistes dans son cercle familier, et c’est déjà beaucoup, s’il le fait !

                  Longue vie à tous, cette planète est merveilleuse, et l’univers est si grand !

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON







Palmarès